Chapitre 10-2 Tends lui la main

J’avisai la petite lucarne en haut du mur. À peine assez grande pour que j’y passe, en vérité. Tant pis. Même si ces rigolos débutaient leur recherches par les chambres, nuls doutes qu’ils allaient fouiller chaque recoin de l’auberge et sans tarder. Je déplaçai une lourde caisse en-dessous de la petite fenêtre et me hissai sur le bord. Le vent fouetta mon visage, une violente rafale manqua de me repousser en arrière.

Voilà que la tempête s’invitait à l’averse. Je me glissai dans l’obscurité et sautai directement en bas du mur. Le choc ébranla mes tibias. Je me courbai en avant pour reprendre mon équilibre en étouffant un grognement douloureux. Si Fabian m’avait levé plus tôt, j’aurais pu sortir par la porte, comme lui, j’imaginais.

Je ne perdis pas un instant et m’élançai vers la bâtisse voisine. Au même instant, je perçus un martèlement régulier rendu sourd par les éléments déchaînés, au-dessus de ma tête. Je levai les yeux et me figeai, effaré. Atalaya s’enfuyait par les toits, aussi rapide et précise qu’une flèche qui fend l’air. Elle n’espérait tout de même pas achever sa course en un seul morceau. Elle filait sans un regard en arrière, le regard braqué sur un point bien précis. Les écuries, d’après le plan de la ville que je m’étais forcée de mémoriser.

Je la pris en chasse aussitôt, même s’il devenait facile de la perdre de vue avec la pluie intempestive. Les rafales devaient la percuter de plein fouet, pourtant, elle ne vacillait pas. Pas plus qu’elle ne prêtait attention aux cris qui retentissaient dans la rue adjacente, sans doute ceux de ses poursuivants. Elle paraissait habituée à ce genre de course poursuite. Peut-être même n’était-ce pas la première fois qu’elle fuyait. Toujours en courant, je saisis la corde reliée à un double crochet en métal, prêt à m’en servir si elle chutait.

Soudain, je levai la tête et vit son pied droit glisser sur l’ardoise. Sans hésiter, je lançai ma corde, le crochet s’arrima à la première fenêtre. Je me hissai en quelques secondes sur le balcon et lançai une gerbe de flamme incandescente contre la fenêtre qui fondit instantanément. Je me précipitai vers la pièce adjacente, puis vers le balcon de celle-ci. Juste à temps. La jeune femme chuta du toit. Je la saisis in extremis à l’avant-bras. D’une traction, je l’attirai à l’intérieur, plaquée contre moi, la main plaquée contre sa bouche.

Elle se dégagea d’un bond et me fit face, le souffle court. Ses cheveux trempés par la pluie battante collait à ses tempes, encore plus noirs que la veille, et faisaient mieux ressortir le violet saisissant de ses iris. Son nez froncé, sa main serrée autour du manche de sa dague, prête à être brandie, la rendaient presque sauvage. La méfiance suintait par tous les pores de sa peau. La jeune femme combative qui se tenait devant moi était à des lieues de celle, ensorcelante que j’avais en face de moi la veille au soir.

— Qui êtes-vous ? gronda-t-elle
Curieux de voir sa réaction, j’optai pour le silence et dévoilait simplement un pan intérieur de ma cape. Le lys qu’elle m’avait offert y était dissimulé, bien en sécurité. Il faudrait que je songe à le mettre en vase lorsque j’en aurais l’occasion. Elle planta son regard dans le mien, soupçonneux.

— Vous étiez à l’Empyrée, hier soir ?
Malheureusement pour nous deux, le temps pressait. J’agitai la main d’un air détaché.

— Fabian vous attend à la sortie de la ville avec vos montures, indiquai-je simplement.

Il était manifeste que ce gredin n’avait même pas songé à avertir la jeune femme du rôle qu’il m’avait confié. Force était de constater qu’elle appréciait guère les inconnus. Peut-être même ignorait-elle qu’il était un Sheioff.

— Décidément, c’est de famille cette manie de mépriser les autres ! ricana-t-elle

Amusé par son caractère bien trempé, je ne pus m’empêcher de la taquiner légèrement.

— Excusez-moi de ne pas vous faire la conversation, mais j’ai cru comprendre que le temps vous était compté. Nous ferions mieux de ne pas trop en perdre, souris-je, mutin.

Elle releva la tête, visiblement blessée dans son orgueil. Emporté dans mon élan, je m’approchai d’un pas et dégageai une mèche de cheveux collée au creux de son cou.

— Si vous souhaitez le savoir, oui, vous étiez sublime hier soir, susurrai-je dans son oreille.

Puis, je la dépassai d’un pas et l’admonestai d’un ton dégagé.

— Vous venez ? Je crois qu’il serait plus sûr de quitter les toits, non ?

— Je n’ai pas besoin de vous, répliqua-t-elle enfin. Je m’en sortirai toute seule.

— Oh, j’ai cru comprendre, en effet, me moquai-je ouvertement.

Elle me dépassa rageusement et m’arracha des mains la torche que je venais de détacher d’un mur.

— Je connais bien mieux Resh que vous, qui que vous soyez. Donnez-moi ça.

L’autorité naturelle qui se dégageait de la jeune femme accrût mon amusement. Je l’avais sans nul doute déstabilisée, mais l’effort qu’elle fît pour le dissimuler était notoire. Je la suivis en silence, détaillant allègrement sa silhouette féline toute en courbe. Elle était différente des autres humaines, c’était une évidence. Bien que sa répartie bien pendue ne justifie en rien l’importance que notre chef semblait lui donner.

Elle arpenta les couloirs sombre comme si elle les connaissait jusqu’à gagner l’arrière de la bâtisse. Le silence régnait à l’extérieur, mais elle me désigna soudain une ombre à l’ombre de la ruelle. Elle se faufila sans bruit dans son dos, sa dague brandie. La lame se planta dans la gorge du mercenaire qui s’effondra curieusement sans émettre le moindre cri sur les pavés. Je saisis le cadavre sous les bras et le traînai au fond de la ruelle.

Son sang-froid et son geste sans hésitation aucune m’impressionnèrent, je ne pouvais le nier. Cela confirmait mes suppositions. Elle savait se battre pour survivre. Lorsque je la rejoignis, elle me désigna la muraille de la ville dont la crête dentelée se découpait dans l’obscurité éclairée par la lune. En face de nous, une porte d’accès était visible. Notre meilleure chance de nous extraire de ce piège. J’indiquai néanmoins les multiples endroits où ces hommes pouvaient nous avoir tendu une embuscade. En réponse, elle me tendit la main. Atalaya paraissait certaine de pouvoir atteindre son but.

Un instant indécis, je choisis de lui accorder ma confiance. Au moins cela me permettrait de tester ses capacités. Au besoin, ma magie suffirait à exterminer nos adversaires. Ses doigts fins s’enroulèrent autour de ma paume en une poigne assurée. Je plantai mon regard dans le sien, afin de synchroniser nos corps. Elle donna le départ et nous nous élançâmes à vive allure.

Un sifflement retentit à nos oreilles. Une pellicule transparente nous entoura en quelques secondes. Je percutai soudain qu’il s’agissait de magie. Je carrai les épaules, prêt à riposter moi aussi, mais elle resserra ses doigts autour de ma paume. Sous mes yeux ébahis, des flèches de glace s’étirèrent de la pellicule d’eau pour tournoyer autour de nous en une pluie impénétrable.

Elle s’immobilisa devant la porte, à peine essoufflée. Je constatai que la rue était devenue une patinoire qui donnait du fil à retordre à nos adversaires. Atalaya maniait sa magie avec une précision bluffante, pour une humaine. Je doutais que sa puissance puisse rivaliser avec les hommes de Daisyel, mais c’était un atout indéniable.
Elle s’apprêtait à enfoncer la porte de la même manière qu’elle avait repoussé nos assaillants, mais je l’empêchai d’achever son mouvement. Mieux valait qu’elle n’épuise pas ses ressources inutilement.

— Laissez-moi faire, vous aurez besoin de votre magie plus tard.

Sans attendre de réponse, j’appelai mon Feu, les paumes ouvertes face au battant de fer. Sa chaleur familière inonda mes veines de sa puissance maitrisée. Cette sensation m’avait manqué. Une décharge incandescente percuta le métal qui fondit comme neige au soleil. Peut-être en avais-je fait un peu trop, mais j’étais curieux de la réaction de mon alliée d’un soir.

À mon grand désarroi, je vis une profonde répulsion se peindre sur son visage hâlé. Je lui tendis une main assurée, un poil désappointé. Elle recula d’un pas imprécis, les lèvres entrouvertes et le regard dans le vague. Elle avait sans nul doute percé à jour mes origines, avec une facilité déconcertante. Nul doute qu’elle avait déjà rencontré un mage de Feu. Elle ne devait pas en avoir gardé une impression à mon avantage.

Pourtant, nous n’avions guère de temps à perdre. Bien qu’elle fut en état de choc, je l’attirai à moi d’une poigne ferme et me ruai dans le couloir. Une seconde gerbe de feu couvrit nos arrières, nous laissant tout juste assez de temps pour remettre les pieds sur terre. Enfin, surtout la jeune femme.
Je la maintenais d’une main au creux de ses reins, tandis que l’autre glissa sur sa pommette pour relever son visage vers le mien.
— Je crois vous avoir prouvé que je ne suis pas là pour vous tendre un piège, princesse, murmurai-je doucement.

Ses iris violets papillonnaient, incertains. Je décelai dans son aura une flopée d’émotions indistinctes. Deux d’entre elles sortaient du lot. Une inquiétude profonde, ancrée en elle, comme si elle la poursuivait depuis longtemps, ainsi qu’une douleur pulsatile, elle aussi tapie au fond de son âme. Ce qu’elle était loin la jeune femme lumineuse qui dansait à l’Empyrée. Pourtant, cette Atalaya m’avait parue si authentique.

— Ayez-confiance, vous ne vous y brûlerez pas les ailes.

Brusquement, elle retrouva son sang-froid. La jeune femme s’écarte d’un geste ferme. Elle avait relevé ses barrières.

— Il vaudrait mieux, la morsure de la glace est pire encore, riposta-elle avec un sourire acéré.

Mes lèvres s’étirèrent à leur tour.

— C’est une invitation ?

Elle cilla, sans se détendre pour autant.

— C’est un avertissement. Ne vous aventurez pas sur cette pente.

J’aurais essayé. Sans plus attendre, elle décrocha une torche enflammée et s’élança dans le corridor qui béait face à nous. Nous devions remonter à la surface. Nous parcourûmes quelques centaines de mètre sans déboucher sur un escalier, mais le couloir semblait remonter le long de la muraille. Etrange agencement.

Quelques minutes plus tard, Atalaya s’immobilisa. Au loin, un rai de lumière éclairait faiblement le corridor silencieux. Derrière nous, des bruits de pas nous talonnaient. Elle éteignit la torche et inclina deux doigts vers la droite. Elle préférait qu’on avance prudemment le long du mur. Je m’étonnais également que nous n’ayons croisé personne. Une défense efficace aurait nécessité une relève depuis longtemps.

Je ne décelais plus aucun bruit à l’extérieur. Plus de pluie battante et de rafale, donc. La pierre n’en serait pas moins glissante pour autant. Nous n’étions plus qu’à quelques pas des quelques marches menant au chemin de ronde. Soudain, Atalaya se figea, la main sur le manche de sa dague. Une silhouette étrange se tenait sous le rayon lune. Je sentis ma magie s’agiter en mon for intérieur. Elle me prévenait d’un danger et se trompait rarement.

Si je déchainais mon feu, le couloir étroit risquait de nous piéger, tandis que les murs entièrement bâtis en pierre retarderaient sa propagation. D’autant que je ne manquerais pas de blesser Atalaya. Je détaillai attentivement le nouveau venu. Il ne brandissait pas d’arme et sa posture même reflétait plutôt une attitude pacifique. Un masque trompeur, certainement, vu la posture de la jeune femme.

— Je vous attendais, Dame Corbel. J’ai bien cru avoir manqué votre départ.

— Elias Skörd, persifla Atalaya, comme c’est aimable de me rendre visite. Que me vaut l’honneur ?

Ils se connaissaient donc. J’ignorais complètement qui pouvait être ce rigolo planqué sous sa bure écarlate, mais il ne m’inspirait guère confiance. Je pris sur moi pour apaiser mon feu et dissimuler au mieux mon aura. J’aurais parié qu’il avait lui-même envoyé ses gros bras aux trousses d’Atalaya.

— Notre ami commun perd patience, il attend toujours votre réponse. Face à votre silence, il souhaite à présent vous rencontrer. Je suis ici pour vous conduire à lui.

La jeune femme conserva un silence glacial. Le temps s’étira, sans qu’aucun des deux ne bouge d’un millimètre.

— Vous pouvez avertir votre ami que je ne désire pas plus le rencontrer qu’entrer à son service, cracha-t-elle enfin.

L’homme aux cheveux interminables esquissa un rictus moqueur et se gaussa.

— Ne soyez pas stupide, voulez-vous, susurra-t-il, plein de fiel Il vous veut et il vous aura. Si vous n’obéissez pas, vous savez ce qu’il vous en coûtera.

Atalaya tressaillit imperceptiblement. Lui n’avait pas pu s’en apercevoir, mais je devinais qu’elle avait quelqu’un à perdre dans l’histoire. La tension dans l’air grimpa d’un cran. Ce fut à cet instant précis que je constatai que la muraille entière était devenue silencieuse. Les mercenaires qui nous poursuivaient semblaient s’être volatilisés.

— Vous ne m’aurez pas, murmura Atalaya d’une voix menaçante. Allez-vous-en, où vous regretterez de m’avoir défié.

Je crus que la vermine allait révéler ses crocs. Au lieu de ça, l’homme s’inclina.

— Comme il vous plaira, Dame, vous êtes désormais prévenue.

Alors qu’il disparaissait dans l’obscurité, j’empoignai le poignet de la jeune femme.

— Il faudrait songer à y aller, princesse. Ils arrivent.

À cette réflexion, ses sourcils se froncèrent. Elle avait compris, elle aussi. Quelque chose clochait. J’apposai un doigt contre ses lèvres et sondais les environs sur un rayon d’un kilomètre. Personne. La muraille était réellement déserte. Mu d’un mauvais pressentiment, je me ruai vers les escaliers, les gravis quatre à quatre et débouchai à l’air libre.

Le ciel nuageux d’un gris foncé ne se déridait pas, mais plus une goutte de pluie. Le chemin de ronde s’étendait sur des dizaines de kilomètres tout autour de la ville, mais aucun soldat ne patrouillait. Ils avaient été retirés de leur poste. Pourquoi ? Une seule réponse possible. Je m’approchai à genoux des créneaux côté ville.

— Nous avons un problème, annonçai-je d’une voix tendue. Il y avait des thessars à l’auberge ?

— Je ne crois pas, mais il est possible que l’averse de ce soir ne soit pas naturelle.

Alors ça, c’est une très mauvaise nouvelle. Nous avions été piégés. Enfin, Atalaya. Je devais néanmoins reconnaitre qu’il avait été savamment orchestré. Je maugréai tout bas. Dans quel pétrin Fabian m’avait-il fourré ?

Les mêmes hommes qui avaient perquisitionnés l’auberge, sans doute des mercenaires à la solde de l’inconnu en robe rouge, se tenaient alignés en bas de la muraille. Ce dernier déblatérait une litanie inaudible, les paumes levées vers le ciel, à l’instar de certains de ses hommes, agenouillés à ses pieds.

— Une bombe à air comprimé, murmura soudain Atalaya. Le Draas concentre la magie des autres pour faire exploser la muraille.

Un Draas ? Une concentration d’énergie ? Aucun Thessar n’en était capable. Ces mercenaires étaient des Mages de l’Air, comme ceux qui avaient attaqué mon clan. Ce Draas devait en être un, et il en avait après Atalaya.

— On va sauter ? Voilà qui est ironique pour un mage de Feu, raillai-je.

Je n’avais pourtant aucune intention de baisser les bras. Au diable la discrétion, je me relevai et détalai comme un lapin. Les contours d’une tour de garde se dessinaient à une centaine de mètre, un escalier devait descendre au pied de la muraille. Les pas d’Atalaya résonnaient dans mon dos. L’air s’alourdit davantage. Plus que quelques secondes. Nous n’y arriverions pas. Une main saisit alors mon poignet et me força à me retourner. Je plongeai mon regard dans celui, résolu, d’Atalaya.

— Je vais nous faire descendre. Faites-moi confiance.

Sans attendre ma réponse, elle s’accroupit et posa sa paume contre la pierre. Tandis que son aura se colorait subitement de vert, le processus s’interrompit aussitôt. Elle s’écria :

— Couchez-vous !

Elle crocheta mes jambes et me coucha au sol, son corps au-dessus du mien. Une violente rafale rasa la muraille de près et poursuivit sa course sur nos assaillants. La main de la jeune femme crocheta la mienne, brûlante. Sa magie affleurait la surface, prête à se déployer. Dès que le souffle nous dépassa, elle se releva brutalement et me tira à sa suite.

— Vous avez peur de me perdre ? la taquinai-je, bien qu’un peu secoué

— C’est notre chance.

Je retrouvai mes esprits rapidement.

— Une minute, ma belle, c’était qui, cet allié providentiel ? l’apostrophai-je en haut des escaliers.

Elle haussa les épaules.

— Aucune idée. Je n’ai pas vraiment eu le temps de capter son aura. Toujours est-il que nous lui devons une fière chandelle. Alors suivez-moi et quittons cette…

Sa réponse m’interpella. Elle était capable de capter une aura ? D’après mes connaissances, seuls les Mages étaient à même de le faire. La jeune femme se tut brusquement, le regard braqué sur l’horizon. Elle blêmit, ses iris se voilèrent.

— Atalaya ! la hélai-je

Ses mains tremblaient tandis que son souffle se hachait. Je la saisis par les épaules, anxieux.

— Eh ! Que se passe-t-il ?

— Non… balbutia-t-elle. Non, Graham… Brett…, non !

Je jetai un œil sur la ville, alarmé. Une fumée d’encre s’élevait dans le ciel, à l’est de la ville. Je compris qu’il s’agissait de l’auberge qui partait en fumée. Or Atalaya connaissait bien le tenancier et son enfant, de ce que j’avais pu comprendre. Je le ceinturais à l’instant où elle se ruait vers les créneaux.

— Si vous retournez là-bas, vous ne ressortirez pas ! grondai-je

— Vous ne comprenez pas ! s’écria la jeune femme, affolée. Je ne peux pas les laisser. Ils vont payer pour m’avoir aidé, je ne peux pas… pas encore.

La détresse qui couvait au fond de ses prunelles violettes n’était pas liée seulement au destin incertain de l’aubergiste et de son fils. Elle était plus profonde, ses paroles le confirmaient. Alors, j’encadrai son visage ruisselant de larme, le mien toujours dissimulé sous mon capuchon. 

— Je vais y aller, promis-je. Sauvez-vous, princesse. Je vais les rejoindre et je les aiderai à reconstruire ce qu’il faudra. Je vous le promets.

Je ne pouvais pas lui livrer mon message maintenant, Fabian m’avait sommé d’attendre son retour à l’Académie. Je pouvais au moins porter secours à ses amis, si cela pouvait la rassurer.

— Mais vous…, non, je…

— La question est réglée, princesse. Je ne vous ai pas escorté jusqu’ici pour que vous me faussiez compagnie pour un autre, ironisai-je.

Elle saisit une de mes mains pour y déposer des grains violines.

— Voici des graines à planter, indiqua la jeune femme. Il faudra penser très fort au bâtiment que vous souhaitez construire. Et voici également un échantillon de terreau, Brett saura quoi en faire. De la part d’une Thessar de la Terre.

Je soulevai un sourcil à la mention de cette inconnue. Elle connaissait donc une Thessar de la Terre, cela expliquait bien des choses. Je n’osais cependant pas la prévenir que Brett et Graham avaient peu de chance de s’en être sortis.

— Alors voici venu le temps de nous dire adieu, princesse.

Je reculai et la saluai bien bas.

— Ce fut une rencontre très plaisante, ajoutai-je, un sourire en coin.

— Vous ne me ferez donc pas l’honneur de voir votre visage ? s’enquit-elle, joueuse.

— Cela casserait le charme, répliquai-je. Mais, je suis certain que vous en aurez l’occasion. Nous nous recroiserons.

Cela, c’était une promesse que je comptais tenir. Elle me lança un sourire ravageur.

— Dans ce cas, vous garderez dans votre mémoire le seul nom de la princesse au lys. Merci pour tout.

Je culpabilisai légèrement de ne pas lui avouer que je connaissais parfaitement son prénom. Elle dévala les escaliers après m’avoir gratifié d’un salut martial. Je soupesais le sachet de terreau et les graines au creux de ma paume. J’avais une famille à secourir, à présent.

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