Combien de temps s'était écoulé depuis la disparition de l'enfer ? Flint n'aurait su le dire. Tout ce dont il se souvenait, c'était qu'il s'était précipité dans les bras de son mari avant de se faire dévorer vivant par une brume ténébreuse.

Quand il ouvrit les yeux, il flottait dans le vide, seul. Le néant absolu l'entourait et il ne voyait personne. Il ne voyait même pas son propre corps, mais était conscient. Instinctivement, il fit apparaître une boule de lumière auprès de lui et réalisa qu'il se trouvait dans une grande pièce remplie de machines. Il avait un masque intubé attaché à sa bouche. Il avança ses mains vers ce qui semblait être de la vitre. Il tapota cette dernière et remarqua qu'il était entouré d'eau ; ou d'une moins, un liquide transparent.

À sa gauche, il y avait un autre engin comme le sien, où son mari avait été entassé. Il remarqua que ce dernier était nu comme un ver, tout comme lui. Ils se trouvaient dans des incubateurs. Flint allait paniquer, quand il se souvint qu'il avait un masque qui lui recouvrait le visage et lui permettait de respirer.

Rapidement, il réalisa que tous les membres de son groupe s'étaient retrouvés dans la même situation que lui. Ils étaient tous enfermés dans ces sarcophages étranges et on les avait déshabillés. Il vit aussi qu'il n'était pas le seul à s'être réveillé. Il n'y avait pas de traces des esprits élémentaires dans cette pièce. Cela l'inquiéta.

Alors même qu'il cogna une seconde fois sur la vitre de son incubateur, une lumière s'ouvrit dans la pièce hautement équipée. Une demoiselle à la longue chevelure blonde marcha jusqu'à lui et l'examina. L'image était un peu embrouillée, mais il reconnut le visage de sa mère.

Athéna le salua, souriante, puis sautilla de joie quand elle le vit cligner des yeux. Elle s'éloigna aussitôt et appuya sur ce qui semblait être un panneau de commandes holographique, situé au centre de la pièce. Il y avait un écran accroché à l'objet, que Flint ne comprenait pas.

— Mais que fait-elle ? se demanda le Flint qui observait sa mère toucher le panneau. Est-ce qu'elle essaie de me faire sortir... ?

Le liquide transparent commença à disparaître de son incubateur à travers le plancher sous ses pieds. Il baissa la tête et remarqua qu'il y avait des grilles avec des fentes exprès pour que l'eau puisse passer à travers les tuiles. Cela lui rappelait les vestiaires pour hommes, au centre d'entraînement de Baldt.

Une fois qu'il toucha le sol, la cloche de verre qui l'entourait s'ouvrit. Il constata aussi qu'il portait des cathéters ici et là, sur ses bras et ses jambes. Ils étaient liés à différents tubes remplis de liquides étranges. Il n'avait pas remarqué tout cela, à cause de la noirceur de la pièce.

— Maman ? demanda Flint lorsque celle-ci lui enleva le masque de la bouche. Peux-tu nous dire où nous sommes ?

— Vous êtes ici au Saint Royaume, expliqua la divinité. Cependant, vous ne resterez pas ici longtemps. J'ai reçu la permission de vous soigner et de vous renvoyer sur Aeglys, une fois le processus terminé.

— Où veux-tu en venir... ? questionna celui-ci. Sommes-nous morts ?

— Ce serait beaucoup trop long à expliquer, mais je peux te rassurer que vous allez pouvoir rejoindre votre monde très bientôt.

— Mais je ne comprends pas ! Nous sommes censés avoir péris avec la disparition de l'enfer ! Comment est-ce possible ?

Athéna secoua la tête et appuya sur le bouton d'une machine qui se trouvait près de la cloche de verre de son fils. Un par un, les camarades de Flint se faisaient réveiller. Pendant ce temps, le capitaine ne comprenait pas ce qui était en train de se produire.

— Attends un peu que tout le monde soit réveillé et habillé, dit Athéna. Je te promets que je vous dirai tout ce que je sais.

Et ce fut ce qu'elle fit. Quelques anges entrèrent dans la grande salle aux incubateurs, et leur retirèrent tous les cathéters et les masques. Ensuite, on passa du linge propre à tout le monde, en plus de grandes serviettes. Gabriel en reçut trois, puisqu'il était le plus grand et le plus imposant du groupe. Envoûtés par cet endroit, ils furent tous guidés vers des vestiaires de la pièce, où ils purent se changer.

— Vos équipements personnels vous seront rendus lorsque vous retournerez sur Aeglys, dit la déesse d'une voix rassurante, alors qu'ils revenaient tous vers elle.

Au centre de la grande salle, tous les membres de la Septième Brigade avaient été rassemblés, une fois qu'ils avaient enfilé les vêtements qu'on leur avait assignés. Ils portaient tous des tee-shirts blancs et des pantalons aux couleurs sombres. Ceux de Gabriel étaient trop petits pour lui, alors le haut de son uniforme temporaire révélait une bonne partie de son gros ventre. Il rougit timidement et se cacha derrière son mari. Les autres n'y faisaient pas attention.

— Nous sommes morts, c'est ça ? formula Flint, déterminé à avoir des réponses de sa mère. S'il te plaît, Maman... Je dois savoir.

— En effet, dit-elle. Vous avez tous été tués lors de l'apparition de la force obscure que l'on appelle le néant. Cependant, nous avons récolté vos âmes avant qu'elles ne soient détruites.

Cassandra poussa un petit cri de frayeur et se couvrit la bouche.

— Vous venez de passer quelques semaines dans ces incubateurs alors que nous construisions pour vous de nouveaux corps, poursuivit Athéna. Ne vous en faites pas pour les détails, vous êtes semblables à vos vies précédentes.

Elle se mit un doigt sur la joue et regarda à gauche, puis à droite.

— En fait, pas tout à fait, ajouta celle-ci. Flint et Lucas ont déjà les améliorations, mais vous allez tous bientôt comprendre où je veux en venir.

Le Capitaine Markios comprit aussitôt les paroles de sa mère.

— Tu les as tous transformés en anges, c'est ça ? questionna-t-il, en état de choc.

— C'était le seul moyen pour que vous puissiez circuler librement au Saint Royaume, expliqua sa mère. Les âmes normales doivent toutes se reposer pour l'éternité au Jardin d'Éden ou bien être réincarnés.

Shayne s'avança d'un pas vers la déesse et fronça des sourcils.

— Comment est-ce possible ?! Ne savez-vous pas que je suis un vampire ?

— Était, répliqua Athéna. Mais ne vous en faites pas pour ça. Vos actions nous ont prouvé que vous étiez quelqu'un de valeureux qui méritait sa place à nos côtés. Vous ne ressentirez plus la soif de votre malédiction. Désormais, vous vous nourrirez comme la plupart des mortels.

Shayne tenta de ressentir ses crocs vampiriques avec sa langue, mais remarqua qu'elles étaient toutes petites et moins tranchantes que les précédentes. Il était interloqué par cette révélation.

— Comprenez-moi, je conçois tout à fait votre désarroi, Shayne, mais ces liquides dans lesquels nous vous avons placé ont purifié ce qu'il y avait de dangereux ou de maléfique en chacun de vous. Vos corps étaient en si piteux états lorsqu'ils sont arrivés ici que nous avons dû les reconstruire un par un. Sans notre intervention, même vos âmes n'existeraient plus et ne pourraient pas profiter d'un repos éternel.

Le capitaine du groupe tourna son visage vers Luna. Cette dernière venait de faire apparaître deux ailes blanches dans son dos. Elle était fascinée par la lumière étrange qui sortait de son corps. Elle avait déjà compris comment fonctionnaient ses pouvoirs angéliques et s'élança aussitôt dans les airs.

— Je vois que votre mage attitrée est toujours aussi intuitive, ricana Athéna. Oh, ma chère enfant, comme je suis ravie de voir que mon présent te plaise.

— Vous voulez rire ? C'est... fantastique ! s'exclama Luna. Je déborde de pouvoirs ! Je n'ai jamais ressenti autant de puissance de toute ma vie !

Un à un, les membres de la Septième Brigade imitèrent leur amie, sous les regards de la déesse et des servantes qui leur avaient passé de nouveaux vêtements. Les ailes de Gabriel étaient plus grandes et plus larges que celles des autres. Il ne flottait pas dans les airs, comme la plupart de ses amis, mais tous ses sens étaient aussi décuplés que ses pairs.

— Normalement, vous devriez tous rejoindre notre armée, expliqua la déesse. Cependant, votre tâche n'est toujours pas terminée en Aeglys. Nous avons besoin de protecteurs tels que vous pour préserver l'humanité et les autres races de ce monde. Vous avez tous la permission de continuer vos existences là-bas, en tant que nos agents, nos yeux, nos oreilles et parfois nos bouches. Ce sera désormais plus facile de communiquer entre nous, car vous développerez bientôt des pouvoirs psychiques reliés à votre transformation.

— Minute, Maman... dit Flint. Pourquoi es-tu si pressée ? Que se passe-t-il ? Je te sens anxieuse. Prends une grande respiration...

Athéna gloussa, puis se tourna vers son fils.

— Je vois que tu as perçu ma détresse, mon chéri, dit-elle. Mais ne t'en fais pas pour moi. C'est de Baldt et des autres nations d'Aeglys, dont vous devez vous soucier. Pendant que vous dormiez... la guerre a éclaté.

Les visages de tous les membres du groupe s'aggravèrent aussitôt. Un chahut incompréhensible se mêla autour de Flint. Il n'arrivait pas à comprendre ce que ses camarades formulaient, mais il savait qu'ils étaient tous aussi en colère que lui.

Athéna leva sa main pour attirer l'attention sur elle.

— Calmez-vous, je vous prie, dit-elle. Je comprends votre peine, mais sachez que vous n'êtes pas les seuls à vous sentir ainsi. Par notre faute, nous avons laissé les forces du mal pénétrer votre dimension et pour cette raison, nous n'avons pas eu le choix d'intervenir. Tous les dieux et déesses de cette division étaient d'accord pour vous renvoyer chez vous.

— Pourquoi serait-ce de votre faute ? demanda Lucas. Où voulez-vous en venir ?

Lucas, qui n'avait jamais rencontré sa mère, se plaça aux côtés de Flint. Il ne savait pas s'il devait la tutoyer, comme son frère, ou bien demeurer formel. Il était intimidé par sa présence et pour cette raison, préférait rester auprès de son quadruplé. Le visage de la divinité se posa sur lui. Elle sourit.

— Tu n'as rien à craindre de moi, mon fils, dit-elle. Seulement, nous n'avons pas fait attention aux nombreux agents des disciples qui se sont infiltrés dans nos rangs et plusieurs d'entre nous sont morts. Durant la récente émeute qui s'est passée au Saint Royaume, plusieurs de nos divinités ont été tuées, puis remplacées. Nous sommes en pleine période de crise, mais ne vous en faites pas pour nous. Nous saurons gérer tout ça, comme vous saurez gérer le conflit sur Aeglys. Tous les démons et les sbires de Perséphone ont été appréhendés et exécutés.

Tandis qu'elle avait prononcé ces dernières phrases, elle s'était aussi adressée au reste du groupe. Ainsi, même le paradis avait souffert des manigances des dieux renégats. Flint était contrarié par cette nouvelle.

Il allait lui dire quelque chose, lorsque sa mère continua son monologue :

— Durant les quatre dernières années qui se sont écoulées, nous ne nous sommes pas rendu compte que les espions du camp ennemi avaient brouillé les pistes de toutes les activités surnaturelles de votre monde. Quand nous avons fini par comprendre ce qui se passait sous notre nez, il était déjà trop tard. Il y a quelques mois, environ, les agents des renégats nous ont été révélés, ainsi que leurs plans.

Athéna afficha une expression grave, répugnée par son souvenir.

Elle déglutit avant de reprendre :

— La disparition des esprits élémentaires, l'enfer d'Aeglys qui se vidait peu à peu... puis le retour de Perséphone et de ses acolytes... Je ne m'en remettrai pas de sitôt. Et pourtant, la goutte qui a fait déborder le vase, c'est qu'ils ont tenté de vous tuer en compagnie des esprits élémentaires à maintes reprises...

Athéna pleura devant ses sujets. Elle recouvrit son visage, honteuse des événements qui avaient conduit tous ces gens jusqu'à elle.

— Maman... formula Flint qui s'approcha de sa mère, aggravé.

— J'ai manqué à mon devoir en tant que votre déesse. Je vous demande pardon...

Elle s'agenouilla devant les membres de la Septième Brigade, au grand ébahissement des servantes angéliques.

— Je fais une piètre divinité si je ne suis même pas capable de protéger le monde auquel je suis tant attachée ! brailla-t-elle. Oh, si vous saviez comme j'ai honte !

Par réflexe, le capitaine s'agenouilla près de sa mère et la consola pour ensuite l'enlacer dans ses bras. Lucas hésita un moment, puis s'approcha d'elle. Il n'imita pas son frère, mais chercha un mouchoir dans ses poches de pantalon. Il avait oublié qu'il ne portait pas ses habits habituels.

Shayne était stupéfait de voir une déesse, aussi imparfaite, se prosterner devant eux. Lui qui avait renié l'existence des dieux toute sa vie, il se mordillait la lèvre inférieure. Il n'en revenait toujours pas qu'il n'avait plus ses canines de vampire. Cassandra lui prit la main, afin de l'apaiser. Elle avait ressenti sa colère et sa peur et se dit qu'elle se devait d'intervenir.

— Votre Majesté ! dit l'une des servantes. Je vous en prie, Votre Altesse ! Ne vous affligez pas une telle souffrance... Vous ne pouviez pas prévoir que les démons se joueraient de nous, comme ils l'ont fait !

— Elle a raison, madame ! dit la seconde servante. Nous sommes tous responsables de cette terrible tragédie !

Athéna s'essuya les yeux et se releva avec l'aide de Flint. Elle posa ensuite son regard sur Lucas qui ne savait pas trop comment réagir. Elle serra aussitôt son fils trans dans ses bras, ce qui le déstabilisa un moment, mais il lui rendit son câlin. Il ne connaissait pas la déesse autant que son frère, mais il avait conscience que cette femme était celle qui l'avait mis au monde, trente-et-un ans plus tôt.

— Au fait, Mère, demanda Lucas. Quel jour sommes-nous en Aeglys ?

— Je... je l'ignore, pour être honnête, avoua la divinité, toute rouge.

— Le 18 juin 3918 AD, Votre Altesse, intervint l'une de ses servantes.

Flint sursauta. Elle leur avait dit qu'ils avaient passé beaucoup de temps dans ces incubateurs. Il avait encore de la difficulté à s'adapter à cette idée. Plus de deux mois s'étaient écoulés depuis la destruction de l'enfer.

— Par tous les esprits ! s'exclama Misaki. Nous avons dormi tant que ça ?

Tous se tournèrent vers la guerrière albinos. Elle n'avait rien dit depuis son réveil. Elle était toute aussi curieuse que les autres de savoir ce qui s'était passé durant leur absence. Ses joues rosirent quand elle réalisa que tous les autres l'observaient.

— J'en ai bien peur, remarqua Athéna. Mais ne vous en faites pas. Nous vous enverrons directement chez-vous, à Baldt, donc vous n'aurez pas à emprunter de bateau pour retourner chez vous.

— Et moi ? demanda Lucas. Qu'en est-il d'Archenwald ?

La déesse secoua brièvement la tête et cligna les yeux. L'homme comprit que quelque chose de grave s'était déroulé durant son sommeil.

— La monarchie de Lanartis n'est plus, dit-elle d'un air grave, après avoir rouvert ses yeux. Le roi et la reine ont été exécutés le jour même où vous avez été fait prisonniers de la dimension maudite. Troyd Markios siège désormais la cité de la lumière.

La réaction de Lucas fut instantanée. Il se recouvrit la bouche et s'éloigna à pas de course, loin du groupe. Il se pencha dans un coin et vomit ce qui semblait être un litre d'eau. La guérisseuse était consternée par cette révélation, d'autant plus que Shayne poussa un juron et serra les poings.

— Je me disais bien aussi que Troyd n'était pas à Archenwald par hasard ! grogna Shayne. Qu'en est-il des citoyens ?

— La plupart ont été exécutés, puis convertis en démons, expliqua Athéna. D'autres servent d'esclave à Troyd et à ses acolytes.

Elle prit une grande respiration.

— Aux dernières nouvelles, des survivants d'Archenwald se sont rassemblés à Drokaï et ont pris la fuite vers la république de Baldt, affirma-t-elle. Le pays de Lanartis n'est donc plus qu'un vaste champ de bataille où règnent les démons. Ils ont aussi atteint Mytira, mais ils sont moins nombreux que sur la Grande Aeglysienne.

— Et qu'en est-il des esprits élémentaires ? demanda Flint. Où sont-ils passés ?

— Ne vous en faites pas pour eux, expliqua-t-elle. Ceux qui vous ont été assignés vous attendent à la salle des portails. Ils se sont réveillés bien avant vous et nous les avons soignés avec succès. Ils ont hâte de vous retrouver.

— Non... Je voulais dire, les autres esprits qui ne travaillaient pas à nos côtés.

— Ah... eux ? Ne vous en faites pas pour ces derniers. Poséidon et les autres dieux de notre faction les ont tous sauvés et renvoyés sur Aeglys. Je ne peux pas vous en dire plus, car cela irait contre mes ordres...

— Je vois... et où se trouve Cordelia et les gens qui se trouvaient à son camp ?

— Ils dorment tous paisiblement au Jardin d'Éden. Cependant, le Conclave des dieux a d'autres plans pour Mademoiselle Lawson. Vous aurez bientôt de ses nouvelles.

— Je ne comprends pas...

— C'est tout ce que je suis autorisée à vous dire, Flint. Essaie de comprendre. Même les dieux ont leurs règlements à suivre.

L'une des servantes roula les yeux. Tout le monde au Saint Royaume était au courant qu'Athéna avait déjà désobéi au Conclave, plusieurs fois.

— Je vois, soupira Flint. Mais j'espère que tu te souviens que je ne serai jamais votre pantin. Je t'ai déjà dit, il y a quatre ans, que je ne supporterai pas d'être manipulé par les dieux. Je suis néanmoins un citoyen d'Aeglys et je compte me servir de ces pouvoirs afin de protéger ma nation.

— Évidemment, je n'ai pas oublié cette conversation... Ton oncle non plus, d'ailleurs. Cependant, nous ne pouvons plus prendre de risques contre les renégats et c'est pour cette raison que vous avez tous reçu ces pouvoirs.

— Une petite minute... dit Luna qui s'approcha de la déesse. Vous dites que Flint et Lucas sont morts comme nous, pas vrai ?

Athéna hocha la tête et fixa le sol, un moment avant de relever son regard.

— Oui, pourquoi ? questionna-t-elle.

— D'après ce qu'on apprend dans la bible de votre religion, quand un ange meurt, il retourne dans le cycle de réincarnation... n'est-ce pas ? continua Luna.

— Oui, et parfois certaines âmes sont perdues à jamais, tout dépend du type d'arme utilisée contre nos anges. Le néant est une matière noire qui détruit tout, même les âmes. Heureusement pour nous, nous avons réussi à sauver tout le monde juste avant que l'enfer ne disparaisse complètement.

— Donc, techniquement parlant, Flint ne devrait même pas être avec nous... Ni Lucas. Ils devraient être réincarnés...

— C'est exact, cependant le temps presse et nous ne pouvions pas séparer votre groupe. Pour cette raison, le Conclave des dieux m'a permis à mon équipe et moi de tous vous sauver et de vous donner de nouveaux corps.

Elle se tourna vers Gabriel qui se sentait de trop dans cette pièce.

— D'ailleurs, je dois aussi préciser un petit détail en ce qui concerne votre cher ami, ici présent. Il n'est plus un homoncule. Lorsque nous l'avons reconstitué avec l'ancienne magie, son être a été transformé comme tous les autres. Pour ne pas trop le dépayser, il conservera sa puissance et sa résilience habituelle.

Le colosse se pointa du doigt, choqué.

— Mais j'appréciais mon identité de golem humanoïde, couina-t-il.

— Ça ne fait rien, répondit Misaki. Tu seras toujours notre bon vieux Gab.

— Hé hé... répliqua-t-il. Merci.

La déesse sourit avant de rajouter :

— Les limites étranges imposées à ton corps ont été enlevées. Tu devrais être en mesure de lancer des sorts comme tous les autres mortels d'Aeglys qui pratiquent la magie.

— Wouaaaah... s'exclama Gabriel. Vraiment ?!

— Affirmatif... Même que nous avons découvert une particularité unique dans ton code génétique. Tu serais capable de manipuler ton apparence physique selon tes désirs, mais tu ne sembles pas comprendre comment ça fonctionne, pas vrai ?

Gabriel haussa les épaules.

— C'est bien ce que nous pensions, soupira Athéna. Cependant, tu t'en sers depuis toujours, sans même t'en rendre compte. C'est ce qui explique pourquoi tu es si gros et que tu n'arrives pas à maigrir.

Athéna s'approcha du colosse et lui donna une petite tape amicale sur le bedon. Ce dernier rougit timidement.

— Ne t'en fais pas, s'exprima-t-elle avant de lever son regard vers lui. Je ne suis pas là pour te juger. Si tu veux être ainsi, c'est ton droit. Sache seulement que tu peux désormais changer d'apparence selon tes désirs. Avec ta faculté de lancer des sorts, ça devrait être beaucoup plus facile qu'avant pour toi.

— Ah ! Donc ça explique pourquoi les diètes n'ont jamais fonctionné avec lui ! lança Shayne qui pouffa de rire. Pfft ! J'aurais dû m'en douter qu'il soit spécial.

Le colosse rougit encore plus fort et se gratta la joue.

— Son subconscient le voulait ainsi et c'est pour cette raison qu'il n'a jamais maigri autant que les médecins le souhaitaient, répondit Athéna.

Shayne écarquilla ses oreilles pointues, et se rappela que cette déesse semblait déjà tous les connaître.

Elle serra alors le colosse dans ses bras et lui fit une bise sur la joue.

— Très heureuse de te retrouver, Gabriel, dit-elle. Je suis contente que tout se passe bien entre Flint et toi.

— Euh... ah... merci... Athéna ? couina le gros barbu.

— Ça ne fait rien si tu ne te souviens pas de ta vie d'avant, expliqua-t-elle. Tu étais l'un de mes meilleurs amis et l'un de mes plus loyaux domestiques. Je vois que ton existence au Saint Royaume t'a beaucoup aidé sur Aeglys !

Gabriel était si timide en cet instant qu'il avait envie de fondre. Toutefois, il avait une étrange sensation d'avoir déjà parlé avec la divinité, bien des années plus tôt. Cette rencontre jouait beaucoup avec son cerveau. Et ce fut à cet instant qu'il eut un flash dans son esprit. Il se revit petit, maigrichon, avec des lunettes. Il avait ressemblé plus ou moins à Wyatt. Il avait aussi porté le prénom de Gabriel. Il avait passé plusieurs années avec Athéna, avant de la suivre sur la planète qu'elle avait créée. Étrangement, son âme s'était sentie aspirée par le corps magique dans lequel il avait fusionné avec la personnalité que Randell voulait lui donner. Il avait tout oublié. Revoir la déesse lui avait rappelé tout ça.

— Nana ! couina le gros guerrier. C'est toi !?

— Gabby ! répondit Athéna. Enfin, tu te souviens moi ?

— Nana ! s'exclama Gabriel, en larmes. Oh ma chère Nana...

Il souleva la déesse dans les airs et l'embrassa tendrement sur les joues et le front. Les servantes prirent peur en voyant celui-ci soulever leur patronne de cette façon, mais les membres de la Septième Brigade pouffèrent de rire.

— Tu n'as pas changé ! dit Gabriel. Toujours aussi ravissante !

— Non, mais toi tu t'es regardé récemment ? T'es énooooorme !

Gabriel éclata de rire et serra sa bonne amie dans ses bras. Ils restèrent ainsi une bonne minute, à s'échanger quelques mots, en toute complicité. Enfin, il déposa la dame par terre et mit une main sur son épaule.

— Je me souviens de tout, à présent, dit-il en s'adressant à son groupe. À l'époque, c'était moi l'assistant, ainsi que le garde du corps d'Athéna. J'étais le sosie de Wyatt et je passais mes journées à étudier la magie. J'étais trop faible pour soulever quoi que ce soit et je me plaignais souvent que je n'avais pas d'avenir dans ce palais...

— Oui, dit la princesse. Il était l'un de mes premiers mentors en magie et c'est lui qui m'a donné l'idée de transférer toutes ces âmes sur Aeglys, il y a environ quatre mille ans. Sans lui, ce projet n'aurait pas vu le jour.

Les amis de Gabriel s'échangèrent tous des regards, étonnés et confus.

— Nous étions au beau milieu d'un conflit avec Perséphone, expliqua Gabriel. Des milliards de personnes ont perdu la vie sur le monde par-dessus lequel nous avons construit Aeglys. Pour cette raison, j'ai proposé à Nana ici présente de récolter un maximum d'âmes et de les réincarner dans la nouvelle dimension. Et c'est comme ça que notre plan d'agrandir l'armée des anges a commencé. Elle a accepté de porter le chapeau puisqu'elle ne voulait pas que je sois renvoyé de mon rang d'assistant. Elle s'est pris toutes les sanctions à ma place. Il y a une trentaine d'années, elle m'a confessé qu'elle voulait visiter notre monde... J'ai décidé de la suivre et c'est dans le plus grand des hasards, qu'elle a rencontré Artael et qu'ils ont conçu les quadruplés.

— Comment se fait-il que tu n'étais pas à ses côtés lorsque vous aviez rencontré mon père, dans ce cas ? demanda Flint, curieux.

— Personne ne pouvait me voir sauf Nana qui avait un corps artificiel. Cependant, quelque temps avant qu'elle n'apprenne qu'elle soit enceinte de ton père, mon âme a été aspirée dans l'une des expériences de Randell. Et voilà comment je suis devenu un gros nounours !

Le colosse souleva sa grosse panse avant de la laisser retomber.

— Pfft, grosse diva, taquina le capitaine.

— Et c'est comme ça que tu m'aimes, rajouta le châtain imposant, joyeux.

— Donc ça explique bien des choses... dit la guérisseuse qui se tourna vers Gabriel. Je ne m'attendais pas à ce qu'on en apprenne autant sur toi, un jour.

Cassandra s'était calmée. Elle semblait confortable à l'idée qu'elle était devenue une créature de la lumière. Toutefois, elle baissa son regard vers son propre ventre et remarqua un détail qui la fit sursauter. Il y avait déjà un ventre plutôt rond sous son tee-shirt. Elle était enceinte. Émue, elle pleura de joie.

— Au fait, toi, prononça la déesse. Toutes mes félicitations ! Nous avons pris soin de bien vous nourrir durant votre résurrection. Les triplés sont en pleine forme !

Shayne était bouchée bée par cette nouvelle.

— Pardon ?! s'exclama-t-il, avant de tomber sur les fesses. Mais... mais...

Il venait de remarquer la grosseur du ventre de sa compagne, comme les autres membres de son groupe d'ailleurs. Il était assez rond.

— Vous en êtes à votre deuxième mois de grossesse, expliqua l'une des domestiques. Il s'agit d'une fille et de deux garçons.

— Je vais être papa... couina Shayne pour lui-même, en état de choc.

Cassandra grinça des dents.

— J'aurais aimé apprendre la nouvelle de leurs identités à leur naissance, pour être honnête, avoua-t-elle. Mais ça alors...

Elle passa une main sur sa forme ronde. Bientôt, elle serait encore plus grosse.

— Je vais être maman ! dit-elle, excitée.

Cette dernière se prit les joues, dans tous ses états. Misaki bondit de joie et partit serrer sa meilleure amie dans ses bras. Cassandra fut rapidement entourée d'Estelle, Kylie et Luna qui vinrent la féliciter. Shayne était toujours à terre et marmonnait des mots que personne ne pouvait comprendre. Wyatt pouffa de rire et aida ce dernier à se relever. Flint s'approcha pour lui faire une accolade amicale et lui ébouriffa les cheveux.

— Il faut fêter ça ! déclara le capitaine.

— En effet, répondit Athéna. Cependant, le monde d'Aeglys a besoin de vous et les célébrations devront attendre.

— Au fait Maman, commenta Flint. Seras-tu des nôtres sur les champs de bataille ? J'imagine déjà la tête de Papa en te voyant...

Elle secoua la tête.

— Ma tâche actuelle est de veiller sur le Saint Royaume, mais cela n'empêchera pas les autres divinités d'intervenir, lui expliqua-t-elle. Quelques-uns d'entre nous ont déjà commencés à rejoindre les rangs des brigadiers de Baldt.

— Pourquoi ne peux-tu pas venir ? Est-ce en rapport au fait que tu aies désobéi au Conclave ?

— Non, mes sanctions ont été levées depuis quatre ans. Cependant, de nouveaux dieux doivent être formés pour remplacer ceux qui ont péri lors de l'émeute. J'espère que tu comprends où je veux en venir...

La déesse et le capitaine s'échangèrent des regards tristes. Il aurait tant aimé qu'elle les accompagne sur leur monde, une nouvelle fois. Il aurait aimé qu'elle passe un peu plus de temps avec eux, mais il savait qu'ils devaient déjà repartir.

— Votre Altesse ? demanda Luna qui s'inclina poliment. Pourriez-vous nous en dire plus sur l'enfer ? J'ai des tonnes de questions qui cogitent dans ma tête et si peu de réponses... Je pensais que vous pourriez...

— Je comprends parfaitement ta curiosité, Luna, mais vous devez partir. La consigne était la suivante : quand vous seriez réveillés, je devrais vous guider jusqu'à la salle des portails. Nous allons devoir vous bander les yeux, puis vous escorter. Je suis navrée. Mais je promets que je répondrai à toutes vos questions lorsque les choses se seront calmées sur Aeglys.

Luna fronça des sourcils et soupira. Elle était déçue, mais saisissait l'ampleur de la situation. Athéna se tourna vers Cassandra et ajouta :

— Cassandra, j'aimerais que tu te tiennes loin des combats et que tu te concentres sur les soins médicaux pour quelque temps. Les gens auront besoin de ton expertise et de tes connaissances en potions.

— Oui, Votre Majesté, formula la guérisseuse.

Athéna s'approcha alors des jumeaux et les observa en silence. Ces derniers reculèrent, intimidés par sa présence.

— Franchement, vous n'avez pas honte de vous faire passer pour de simples mortels ? soupira la déesse. Votre plaisanterie a assez duré.

— Je ne vois pas où vous voulez en venir, Athéna, insista Kylie.

— M... moi n... non p... plus ! bégaya son frère.

Athéna roula des yeux et cogna leurs têtes comme on cogne à une porte. Les deux anges s'inclinèrent en guise de respect.

— Un instant... tu les connais ? demanda Flint. Comment est-ce possible ?

— Je crois qu'ils sont quand même capables de vous le dire eux-mêmes... grogna sa mère, qui se croisa les bras. Parlez maintenant, avant que je me fâche.

Kylie déglutit avant de s'avancer en direction de son groupe. Le regard inquiet d'Estelle se posa sur elle. Scottie suivit sa jumelle rapidement.

— En fait... expliqua la musicienne. Nous sommes... des dieux...

— Plus précisément, les enfants adoptifs d'Apollon, expliqua Athéna. Il y a une vingtaine d'années de cela, ils ont refusé leur titre de dieux, alors ils ont pris la fuite vers le monde des mortels et ont pris l'apparence de jeunes enfants.

— Nous ne voulions pas finir comme notre père, Votre Altesse ! Il est mort sous nos yeux, aux champs de batailles...

— Je sais, mais ce n'était pas une raison de fuir vos responsabilités ! Votre père a bien sûr été remplacé par un nouvel Apollon. Il s'agit de votre oncle. Estimez-vous heureux que je n'aie pas dénoncé votre retour au Conclave, sinon vous seriez dans de beaux draps...

Scottie et Kylie baissèrent leurs regards devant leur supérieure.

— N... Nous s... sommes désolés, Athéna, dit Scottie.

— Allez plutôt dire cela à votre tante Artémis qui a perdu son frère... soupira la princesse. Mais bon, peu importe. Ce qui est fait, est fait. Cependant, je me dois de vous dire que je trouve très ironique que vous serviez l'une de mes plus belles créations. Jamais je n'aurais cru que vous vous sentiriez attirés vers elle...

Athéna se tourna vers Estelle qui venait de comprendre qu'on parlait d'elle. Cette dernière ressentit la main de la déesse se poser sur sa joue, qui la caressait. L'adolescente était subjuguée par la beauté de cette femme.

— La dernière fois que je t'ai vue, tu étais toute petite... déclara Athéna.

— Pardon... ? demanda Estelle. Je ne comprends pas...

— En fait... il y a quatre ans de cela, alors que tes parents parlaient déjà de trouver une mère porteuse, j'ai décidé de t'envoyer sur Aeglys et d'implanter de faux souvenirs dans l'esprit collectif des rebelles... Tu es un clone de Flint et de Gabriel, créée à travers mes machines et ma magie.

— Tu as fait quoi !? grogna Flint qui sursauta.

Athéna se mit à rire nerveusement et rougit timidement avant de gratter la tête.

— Surprise... ? couina-t-elle, embêtée. Je pensais vraiment bien faire...

— Elle... est... notre fille... ? marmonna Gabriel, abasourdi.

Estelle ne savait pas comment répondre à cette remarque. Elle était aussi choquée que Gabriel. Elle se tourna vers les jumeaux envers qui elle éprouvait beaucoup de respect. Même eux étaient tout aussi confus que leur amie. Cette rencontre avec la Déesse Athéna les avait tous déstabilisés.

— T'entends ça, Flint ?! Elle est notre bébé ! pleura le colosse de joie. De notre chair et notre sang ! C'est complètement fou... Non ! C'est un miracle !

Il se dirigea vers Estelle qu'il serra dans ses bras.

Cette dernière ne savait pas comment réagir. Elle ressentait un sentiment de frustration qui montait en elle. Ainsi donc, elle n'avait que quatre ans, chronologiquement parlant, et possédait le corps d'une adolescente de seize ans. Elle était sur le point de pousser un cri d'horreur lorsqu'elle réalisa que Gabriel était d'accord avec le choix de la déesse.

— Mais c'est immonde ! s'exclama Flint qui fixait sa mère d'un air dégoûté. Et si nous avions décidé de nous séparer ? Y as-tu pensé, Maman ?

— Crois-moi, Flint, commenta la princesse. Tout le monde ici sait déjà que vous alliez finir vos vieux jours ensemble. Je n'ai fait que rajouter un peu de piquant à votre routine. Et puis allons... regarde Estelle... N'est-elle pas la plus belle fille que tu aies vue de toute ta vie ?

— Oui, mais... marmonna Flint.

Il se tourna vers sa fille qui était en larmes. Elle bouillait de rage. Il s'approcha de cette dernière et la serra dans ses bras.

— C'est notre fille, dit-il avant d'embrasser celle-ci sur le front.

Les souvenirs de l'adolescente étaient flous. Elle ne se souvenait même pas d'avoir un jour eu des parents, à part ceux qu'elle avait à présent. Elle n'avait que les rebelles dans sa tête. Savoir que toutes leurs mémoires avaient été trafiquées la perturbait grandement. En vérité, elle avait été créée par magie dans l'un de ces incubateurs dont ils étaient tous sortis et elle avait fait la connaissance de ses parents, plusieurs jours plus tard. Estelle n'avait jamais été seule. Elle en était convaincue.

— Je vous ai créé une fille parce que je vous ai toujours aimé, déclara Athéna. Je voulais que vous ayez votre fin heureuse. Ceci est une autre transgression des lois dont je paie toujours les frais. Voilà pourquoi je ne suis pas autorisée à partir du Saint Royaume pour aller vous aider...

Luna, la plus logique du groupe, était époustouflée.

— Je dois apprendre cette technique ! s'exclama-t-elle. Créer la vie à partir de pratiquement rien, ça doit être fascinant !

— Tout doux, Luna, tu es un ange désormais, remarqua Athéna en riant. Essaie d'abord de t'adapter à tes nouveaux pouvoirs, après, on verra dans quoi tu pourras te spécialiser. Toutefois, j'ai déjà une petite idée sur ton avenir. Il contiendra beaucoup de flammes.

Tous les membres de la Septième Brigade, sauf la magicienne, gloussèrent.

— Suis-je si prévisible que ça ? bouda cette dernière.

— Aussi prévisible que mon végétarisme, confirma Cassandra.

Estelle s'était calmée. Athéna, qui lui avait paru un peu folle avec ses déclarations surprenantes, lui était aussi sympathique. L'adolescente n'avait toujours pas oublié ce que Luna avait fait à Wyatt. D'ailleurs, ce dernier était beaucoup trop silencieux. Elle avait peur qu'il soit en train sombrer d'une dépression. Scottie non plus n'était pas à son aise, mais c'était probablement dû au fait qu'il avait dû avouer à tout le monde qu'il n'était pas quelqu'un de normal.

— Les enfants d'Apollon, hein ? dit Estelle qui se tourna vers les jumeaux. Eh bah... ça fait de nous des cousins, n'est-ce pas ?

— Seulement par titres, répliqua Kylie. Nous ne sommes pas liés au sang des Olympiens. En fait, nous venons du Valhalla. Notre père était le troisième Thor, mais celui-ci est mort en se sacrifiant pour notre mère, Dame Sif.

— C'est pourquoi Kylie a hérité de la foudre de son père et que Scottie maîtrise la nature et la terre de sa mère, expliqua Athéna. Leurs véritables noms sont Thrud et Ullr, respectivement, mais ils ont décidé de changer de noms lorsqu'ils sont venus vivre chez les Olympiens.

— Beurk, j'ai horreur de mon ancien prénom, déclara Kylie. Thrud rime trop avec crotte. Mon ancêtre était sûrement une femme intéressante, mais je préfère de loin Kylie Sanders. C'est beaucoup plus classe !

— Et moi, Ullr m'intimide... marmonna son frère. Je n'ai rien de glorieux. C'est un ancien mot pour gloire, en fait.

Il s'était tourné vers les autres pour leur expliquer pourquoi il n'aimait pas son nom d'origine. Misaki hocha la tête lorsqu'elle entendit son explication.

— Pourtant, tu combats à l'arc et les flèches, comme ton grand-père Ullr, dit Athéna. Je trouve cela marrant, pour être franche avec toi...

Elle plissait des yeux et observait son neveu adoptif d'un air cynique.

— Mais bon, tu fais comme tu veux, ajouta-t-elle.

Flint avait une question qui lui chicotait depuis un moment, il demanda donc :

— Au fait, il s'est passé quoi avec le Valhalla ?

Le visage de la princesse s'assombrit. Elle secoua la tête et s'approcha un peu plus des Sanders, pour ensuite mettre ses mains sur leurs épaules.

— Vous avez devant vous les derniers survivants des dieux scandinaves, déclara-t-elle. Leurs semblables ont tous péri durant la grande guerre contre les démons. Pour cette raison, nous avons adopté ces deux-là dans nos rangs.

— Oh... constata son fils. Je suis désolé de l'apprendre.

Scottie et Kylie détournèrent leurs regards, à la fois chagrinés, mais honteux que leurs amis apprenaient toute leur histoire ainsi.

— Ce n'est pas tout, mais nous devons vraiment partir, maintenant, dit Athéna. Je constate que vous êtes tous en pleine forme et que vous pouvez bouger par vous-même. Comme je l'ai dit, vos anciens vêtements, votre équipement et les esprits élémentaires vous attendent à la salle des portails. Je vais donc vous demander de mettre ces bandeaux et de tenir la main de vos guides...

À cet instant, une dizaine d'anges entrèrent dans la pièce. Ils mirent les tissus autour des yeux des membres de la Septième Brigade et de Lucas pour ensuite prendre leurs mains. La princesse et ses servantes les guidèrent ensuite avec leurs voix et ils marchèrent le long d'un couloir, puis un autre, et encore un autre, jusqu'à ce qu'ils arrivent à une salle blanche, très éclairée. Les guides quittèrent la pièce après avoir repris les bandeaux.

Flint remarqua qu'un animal s'était approché de lui pour lui lécher la main. Il baissa son regard pour remarquer Dia, de bonne humeur. Il lui caressa la tête et elle se transforma en épée, entre ses mains.

Devant eux se tenait un gigantesque portail d'où une magie puissante résonnait avec tous les membres du groupe. Il était relié à un ordinateur et plusieurs machines. Devant ce dernier se tenait un grand homme châtain aux yeux verts que la plupart des membres de la Septième Brigade reconnurent aussitôt.

Il les salua d'un signe de main et lança :

— Salut tout le monde ! Je vous ai manqué ?

Soudain, Flint et Luna s'élancèrent en direction de leur vieil ami. Puis, ils furent interrompus par plusieurs gardes du corps qui se plantèrent devant eux. Le plus grand des soldats les toisa et pointa une lance vers le capitaine, qui figea sur place.

— Faites attention à ce que vous faites ! bougonna l'ange imposant. Devant vous se tient Sa Majesté le Roi Zeus. Vous devez vous tenir à l'écart. C'est un ordre !

— C'est faux ! tonna Flint. Cet homme est nul autre que mon Oncle Nash !