32. La bravoure de Misaki

Au même moment où la cérémonie mortuaire avait lieu aux plaines au sud de la capitale, Flint était allongé à côté de son mari sur leur lit. Après avoir confié Estelle à Misaki, ils avaient passé un moment intime sous la douche, suivi d'une soirée romantique en tête-à-tête. Maintenant, ils se reposaient.

Au-dessus de son bureau de travail, situé près de leur lit, Flint avait remarqué, à la lueur du jour, la date de cette journée. Le 14 mars était l'anniversaire de naissance de son père. Il se maudit d'avoir oublié cette journée importante avec tout le grabuge qu'avait provoqué la lettre de Troyd. Il avait l'esprit ailleurs dernièrement et n'avait pas fait attention aux dates encerclées de son calendrier. Encore une fois, il pouvait remercier Gabriel de prendre autant de notes pour lui. Voilà que c'était justement cette journée dont il devait se rappeler ce mois-ci. L'an dernier, il avait eu honte de se pointer à la fête d'Artael, parce qu'il n'avait pas trouvé de présent à lui offrir. Kyran l'avait disputé pendant une bonne dizaine de minutes avant d'abandonner toute tentative de le convaincre de rester à la fête.

Couché à moitié nu, dos à son mari qui le serrait contre lui, Flint soupira et imagina la tête que ferait Gabriel quand il réaliserait qu'ils avaient complètement loupé cet événement annuel. Flint croyait qu'avec l'adoption d'Estelle, il n'aurait pas besoin de faire d'autre cadeau à son père, mais cela n'excusait pas son manque d'attention. Gabriel se mit à bouger légèrement, il avait ressenti que quelque chose n'allait pas. Il se réveilla en sursaut et fit bondir Flint sous son poids lorsqu'il s'assit rapidement sur leur lit. Le blond cligna des yeux, puis bâilla.

— As-tu encore fait un cauchemar, chéri ? demanda Flint.

— Mouais... J'avais l'intuition que tu avais besoin de moi... expliqua Gabriel qui s'étira les bras. J'étais en train de rêver au banquet de notre mariage que nous n'avons jamais eu et il y avait une loutre qui me balançait des coquilles Saint-Jacques à la figure...

— Ce n'était qu'un rêve, ne t'en fais pas. Par contre, aujourd'hui c'est l'anniversaire de papa et je n'ai même pas préparé de carte de souhait.

— Ah ça ? Ce n'est pas un problème. J'ai déjà tout prévu il y a trois jours. J'ai acheté une bouteille de vin et une carte de souhaits signé à ton nom, celui d'Estelle et le mien. C'était avec ma signature, bien sûr. Une servante devrait lui livrer tout ça pour le dîner.

— Fiou ! Que ferais-je sans toi ?

Flint se leva, enfila rapidement un chandail, puis un pantalon avant d'aller aider son mari à se relever de leur lit. Gabriel était encore à moitié endormi, en robe de chambre ouverte et deux pantoufles en peluche de lapins roses alors qu'il observait son mari faire leur lit.

Gabriel s'éloigna au fond de la pièce pour aller se préparer un café avec la petite chaudière installée dans un coin. Il prit soin de préparer une tasse à part pour Flint, tandis qu'il regardait le blond s'agiter dans tous les sens dans leur chambre. Ce dernier était pressé ce matin, car il avait réalisé qu'il était de service pour faire une ronde matinale. Lorsqu'il eut terminé d'enfiler son armure en cuir et son épée, il s'approcha de son mari, l'embrassa passionnément, puis sortit en trombe de la pièce après lui avoir dit de passer une excellente matinée.

Déboussolé, Gabriel regarda les deux tasses de café dans ses mains et se regarda dans le grand miroir situé près de la porte de leur salle de bain. Il soupira, déçu.

— Et je fais quoi maintenant ? se dit-il pour lui-même à son reflet.

Il décida de ranger la tasse qu'il ne boirait pas dans leur petit réfrigérateur, puis but l'autre tranquillement, alors qu'il s'approchait de l'une des fenêtres de leur chambre. Il faisait pluvieux à l'extérieur.

— Encore une mauvaise journée qui s'annonce, rechigna Gabriel.

Il grogna et déposa sa tasse vide au rebord de la fenêtre. Ensuite, il enleva sa robe de nuit, ce qui dévoila son énorme ventre dans les reflets du grand miroir, lorsqu'il passa près ce dernier.

Il s'arrêta un moment, puis fit quelques poses avec ses bras, essayant de déceler des muscles dans ces derniers. Mais rien à faire. Il ne voyait que du gras partout. Toutefois, il esquissa un sourire quand il remarqua qu'il avait regagné tout le poids qu'il avait perdu. Malheureusement, une expression triste s'afficha sur son visage. Avec tous les commentaires que Nash et Shayne lui faisaient, il commençait à avoir peur qu'il doive encore être forcé à suivre un régime. Il joua avec sa panse en silence, la faisant rebondir quelques fois. Il finit par rigoler et retrouva le sourire.

— Mmm... mon corps me plaît de plus en plus, ces jours-ci, se dit-il. Il est vrai que je pourrais faire un peu plus de musculation, par contre... Hmm... Même Flint a l'air d'approuver tous ces changements... C'est vrai que je suis beau bonhomme !

Alors qu'il réfléchissait devant le miroir, Gabriel vérifiait l'état de sa barbe qu'il avait taillée la soirée précédente avant de faire l'amour avec son mari. La barbiche en cercle revenait à la mode dans la république. Il trouvait que cela lui donnait un air plus mature, plus adulte. Quant à la pilosité du reste de son corps, il devait s'y faire, il n'était pas fait pour rester imberbe. À toutes les fois qu'il se rasait, ça finissait par repousser rapidement. Et il était hors de question qu'il se mette de la cire partout sur le corps ! Finalement, Gabriel se dit qu'il n'était pas si mal que ça.

C'est bon, Gab, arrête de t'en faire, pensait le grand homme qui regarda son gros ventre qu'il caressa. T'es tout mignon ! Tu n'as pas besoin d'un corps musclé pour prouver ta valeur ! Pas vrai, mon gros bedon d'amour ?! Jamais on ne se séparera, toi et moi. Ça m'a pris beaucoup de temps pour t'accepter, maintenant, je t'aime !

Comme tout le monde le savait déjà dans son entourage, Gabriel n'avait jamais su ce que c'était d'être mince. Son organisme avait toujours fait en sorte qu'il consomme beaucoup d'aliments pour maintenir son niveau d'énergie à jour. Sa puissance venait aussi de toute la nourriture qu'il consommait. C'était comme une seconde nature pour lui de toujours avoir quelque chose sous la dent.

Bien que Gabriel soit de plus en plus reconnu pour sa bonne humeur et son côté flamboyant, il lui arrivait souvent de se remettre en question lorsqu'il était seul. Aussi, il était de moins en moins timide, depuis qu'il faisait partie de la Septième Brigade. Depuis quelques années, il se sentait mieux dans sa peau et n'avait plus peur d'affirmer qu'il s'aimait ainsi ; même que ses propres rondeurs l'excitaient autant que son mari. Cela avait permis au couple de s'épanouir pleinement.

Le colosse décida de se choisir des vêtements dans le dressoir situé près de la porte d'entrée, puis les enfila alors qu'il chantonnait un petit air connu dans la région. Après s'être habillé, il enfila aussi son blouson et ramassa son portefeuille qu'il mit dans l'une de ses poches. Il ne travaillerait pas avant quelques heures, mais il avait la matinée libre à lui pour aller faire des courses. Puisque les écoles étaient fermées pour la semaine, il emmènerait Estelle chez Misaki avant de partir, pendant les jours qui suivraient. En temps normal, la guerrière leur aurait sûrement offert d'escorter la petite à l'école en même temps que Sakura.

C'était un matin tout ce qu'il y avait de plus normal, mis à part le ciel gris. Les gens se promenaient le long du couloir de l'étage des dortoirs, Gabriel verrouilla sa porte derrière lui puis se dirigea d'un pas vif vers les appartements des Megumi. Après les emplettes, il pensait rendre visite au président avec Estelle. Probablement que ce serait l'heure du dîner. Il n'avait pas vraiment fait attention de vérifier l'heure en sortant. Il avait toujours eu du souci à lire les aiguilles sur les horloges. À vrai dire, il se fiait surtout à son estomac pour calculer les heures de la journée.

Il cogna une fois à la porte de Misaki. Aucune réponse.

— Allô ? lança Gabriel. Il y a quelqu'un ? Vous êtes là ?

Après vingt secondes d'attente, il toqua encore une fois, puis une troisième fois. Personne ne vint. Il fronça des sourcils et souffla des narines. Il vérifia instinctivement si la poignée de porte était déverrouillée. Elle l'était. Pris d'une crise de panique, il ouvrit la porte en coup de vent et remarqua avec horreur que l'appartement des Megumi avait été saccagé.

Il y avait des traces de lames tranchantes dans le lit du couple, des objets cassés ici et là. Aucune trace de sang à l'horizon. La porte-fenêtre de la pièce était grande ouverte, un vent froid pénétrait dans la chambre. Il n'y avait personne. La vitre n'avait pas été brisée en plusieurs morceaux, mais le colosse remarqua que quelqu'un y avait découpé un cercle à travers celle-ci afin de déverrouiller la porte à partir de l'atrium.

Quelqu'un s'est infiltré dans la chambre, songea-t-il.

Il sentit son sang bouillir.

Des draps avaient été attachés aux bordures métalliques à l'extérieur  ; Misaki s'était probablement enfui durant la nuit avec les enfants. Elle n'avait même pas ramassé son bâton rétractile qui avait été cassé et jeté sur le lit désorganisé.

— Mais que s'est-il passé ?! tonna Gabriel.

Il s'aventura plus loin dans la pièce et espéra y trouver quelques indices. Deux brigadiers qui sortaient de leurs chambres respectives, se déplacèrent devant la porte des Megumi. Ils se parlaient entre eux et disaient avoir entendu un bruit lourd dans la pièce, durant la nuit, mais personne n'était venu voir de quoi il s'agissait. Le gros guerrier vit que la lampe de chevet était tombée par terre et que le bulbe de lumière s'était cassé.

— Alertez le président ! ordonna Gabriel. Il s'agit d'une invasion à domicile ! Faites patrouiller la ville pour la disparition de Misaki Megumi, de Sakura Megumi et de ma fille Estelle Markios !

— Mais vous n'êtes pas capitaine, dit l'un des brigadiers à la porte.

— JE ME FICHE DE MON TITRE ! MA FILLE EST PEUT-ÊTRE EN DANGER ! MAINTENANT GROUILLEZ VOS GROS CULS ET ALLEZ DIRE AU PRÉSIDENT QU'UN INTRUS S'EN EST PRIS À MA FAMILLE ! JE VOUS PRÉVIENS QUE JE VAIS VOUS BOTTER LES FESSES SI VOUS NE ME PRENEZ PAS AU SÉRIEUX !

— T... t... tout de suite, Monsieur Tabris ! répondit le second brigadier.

— C'EST MARKIOS ! corrigea le colosse, vexé qu'il ne prenne pas son mariage au sérieux. COMBIEN DE FOIS VA-T-IL FALLOIR QUE JE LE RÉPÈTE !? Pfft...

Les brigadiers à la porte s'écartèrent et laissèrent passer Gabriel en coup de vent, qui se dirigea vers l'escalier qui menait au rez-de-chaussée. Son premier instinct était de retrouver Flint, lui saurait probablement l'aider davantage. Il était encore étonné d'avoir monté la voix vers les gardes à la porte de Misaki. Cependant, il n'y avait pas une minute à perdre. La vie de sa fille était en danger. Il pressa donc le pas.

Lorsqu'il arriva au rez-de-chaussée, il tomba nez à nez avec Flint qui tenait Sakura dans l'un de ses bras, puis Estelle d'une main. Il avait entendu son mari hurler d'en bas.

— Comment... comment est-ce possible... commenta Gabriel, essoufflé. Où est Misaki ?!

— Je l'ignore, mentionna Flint, ébahi. Au moment de descendre, l'infirmière est venue me voir avec ces deux-là ! Elle prétend que Misaki les avait laissées à l'église cette nuit avant de disparaître. Sakura ne semble au courant de rien, mais Estelle...

— Que... Que sais-tu, chérie ? demanda Gabriel, anxieux.

— Quelqu'un est venu dans notre chambre cette nuit, dit la petite blonde. Il a essayé de tuer Tante Misaki et Sakura, mais elle l'a assommé solidement avec son bâton avant de nous évacuer par la grande fenêtre. Après, elle nous a laissé chez Tante Sarah, puis elle est partie en nous promettant de revenir nous chercher...

— Il n'y avait personne dans la chambre lorsque j'ai ouvert la porte, dit Gabriel. Athéna soit louée ! Vous êtes vivantes ! J'ai eu si peur qu'on vous fasse du mal...

Le colosse prit Estelle dans ses bras et la serra contre lui ; il pleurait à chaudes larmes. La préadolescente sourit maladroitement et essaya de rassurer son père qui était beaucoup stressé qu'elle allait bien. Sakura était trop petite pour comprendre que sa mère était probablement morte... Coup de chance pour elle et son amie qu'elles aient été déposées à la maison de prières. Le pouls de Gabriel ralentit quand son mari lui mit une main sur l'épaule. Ni l'un ni l'autre ne comprenait ce qui s'était produit cette nuit-là.

¤*¤*¤

À trois heures du matin, avant que tout ceci ne se produise, Misaki n'arrivait pas à dormir. Elle avait passé la dernière heure à circuler dans les couloirs, avec espoir que personne ne viendrait troubler le sommeil de sa fille et de la petite Estelle qui s'étaient beaucoup amusées durant la soirée. Elle s'était arrêtée un moment, un peu plus tôt, devant la porte de Flint et de son mari ; elle avait entendu des gloussements de l'autre côté de la porte. Encore une fois, ces deux-là faisaient des trucs sous la couette.

Pfft, je me demande comment ils font pour avoir autant d'énergie au lit, ces deux-là, pensa-t-elle après avoir entendu l'un deux crier de plaisir. Il faudrait qu'ils me montrent ce qu'ils prennent comme aphrodisiaques. Je pourrai m'en servir avec Yosuke...

Puisqu'il n'allait rien se passer pour ce soir, elle s'étira, puis se dirigea vers sa chambre. Elle referma donc la porte derrière elle et entendit un bruit sec. Un morceau de vitre était tombé par terre. La lueur de la lune éclairait partiellement la pièce. Misaki remarqua une ombre de l'autre côté de la porte-fenêtre. On essayait de rentrer chez elle par infraction. L'individu entra discrètement, sans remarquer la guerrière albinos qui était dressée près de l'entrée de la chambre, son arme en main. Au moment où la porte en vitre s'ouvrit, Misaki bondit vers l'avant et frappa le mystérieux personnage au crâne. L'inconnu fut assommé sur le coup. À la volée, son arme se cassa et fit tomber une lampe de chevet. Les filles se réveillèrent à cause du bruit.

Misaki leur fit signe de garder silence, un index sur ses lèvres, puis leur indiqua de la suivre discrètement vers la porte d'entrée, après avoir jeté les restes de son bâton cassé sur le lit. Toutefois, lorsqu'elle ouvrit celle-ci, elle remarqua que les lumières du couloir avaient été éteintes. Rapidement, elle barricada l'ouverture de sa chambre, et posa n'importe quel objet lourd qu'elle put trouver à proximité de celle-ci. Ensuite, elle ordonna aux filles d'enlever les draps du lit et de les déplacer à l'atrium.

Misaki se dirigea alors vers le patio et commença à attacher les draps l'un après l'autre sur les bordures métalliques. Elle remarqua que l'individu était monté sur son balcon à l'aide d'un harpon lancé jusque-là. Lorsqu'elle jugea la corde improvisée assez longue, elle demanda à Estelle de descendre après elle et demanda à Sakura de s'accrocher à son épaule droite. La plus petite des deux gamines hocha nerveusement la tête.

Une minute plus tard, on défonça la porte de la chambre alors qu'elles atterrissaient près des buissons à l'arrière du palais. Misaki conduisit par la suite les deux enfants à l'église ; elle frappa de toutes ses forces à l'entrée principale jusqu'à ce que le Père Shalom vienne lui répondre. Elle lui laissa les enfants, s'excusa de devoir repartir et s'enfonça ensuite dans les ténèbres de la nuit. Le prêtre avait compris qu'elle traquait un ennemi de la ville et avait préféré ne pas lui poser de questions. Elle se cacha donc, pendant quelque temps, dans un coin sombre du quartier marchand.

Elle s'était trouvé un manche à balai qui traînait près de l'auberge, dont elle coupa le bout inutile avec un couteau bien tranchant, qu'elle gardait précieusement à sa ceinture. Pour le moment, elle était seule contre ces individus et ignorait ce qu'ils cherchaient. Ensuite, elle se cacha derrière un buisson de l'église, puis attendit tranquillement que quelque chose se produise. Elle vit alors trois individus sortir des pénombres, depuis le palais et le centre d'entraînement. Ils portaient de longues capes noires. Cassandra ne lui avait-elle pas parlé de ce genre d'individu... ?

Deux d'entre eux semblaient en parfait état même si le troisième, inconscient, était transporté par ses confrères. Misaki jugea que c'était celui qu'elle avait assommé. Elle reconnaissait ces capes pour avoir entendu Nash, Shayne et Cassandra leur parler des représentants du culte.

Ce sont bel et bien eux, se dit la jeune femme. Mais que voulaient-ils dans ma chambre ? Cherchent-ils Yosuke ? Depuis quand la secte est-elle intéressée à lui ? Par tous les esprits, ne me dites pas qu'ils sont venus pour...

Elle cessa de réfléchir sur le coup et décida qu'il était temps d'agir, plutôt que de penser à n'importe quoi. Ces hommes méritaient une sévère correction. Ils ne l'empêcheraient pas de protéger la ville durant l'absence de son mari et des brigades. Elle attendit donc le moment propice pour sortir de sa cachette et défier les brigands avec son bâton de fortune.

— Mince, j'ai oublié mon sac de bombes lacrymogènes dans ma chambre et mes shurikens, murmura Misaki pour elle-même. Tant pis, je vais faire sans...

Deux des adeptes s'approchèrent de la grande fontaine du marché public. Misaki remarqua que l'eau ne coulait pas ce soir. L'un d'entre eux se pencha et appuya sur quelque chose, la guerrière entendit aussitôt des cliquetis dans l'obscurité. La lune n'éclairait pas assez les individus pour qu'elle puisse voir d'où venait le mécanisme, mais comprit que l'un d'entre eux était en train de descendre un objet sous la fontaine.

Un passage secret ! pensa Misaki.

Il lui fallait agir, tout de suite.

— Halte-là ! aboya-t-elle, avant de sortir de sa cachette, pour courir vers eux. Plus un geste, où je vous jure que ça va mal se terminer pour vous !

Le deuxième individu éveillé donna un coup de pied sur un morceau de la fontaine, on entendit un autre cliquetis avant que l'immense objet se refermait déjà. Misaki comprit que l'un d'entre eux s'était servi du passage pour transporter leur ami blessé. L'autre allait faire diversion. La guerrière bondit vers le mystérieux personnage et fit pivoter son arme devant elle. Il était équipé d'une hachette et remarqua la jeune femme lorsqu'il para son coup. La lumière de la lune brilla sur l'objet métallique.

— Que faisiez-vous dans ma chambre ?! dit la jeune femme.

— Mêlez-vous de vos affaires !

— Mes affaires !? Vous étiez sur le point de tuer ma fille et notre invitée !

— La cible était votre mari.

— Pourquoi donc ?! Que vous a-t-il fait pour mériter un tel traitement ?

— Je ne vais pas perdre mon temps avec vous plus longtemps. Fichez le camp avant que je vous tue. Je vous préviens, je suis sérieux.

Comme toute réponse, Misaki lui planta le bâton dans le nez. Elle entendit un craquement, elle l'avait cassé. Elle visa cette fois les testicules de l'homme.

— Je vois, je vois, vous êtes forte, dit l'inconnu qui recula de quelques pas. Désolé, mais parler avec vous est une perte de temps, je me casse.

— Attendez une petite minute, je n'ai pas encore terminé avec vous !

L'individu jeta à terre une bombe fumigène et s'éloigna alors que Misaki étouffait déjà à cause de la fumée. Cependant, elle avait utilisé ce genre d'arme assez souvent pour comprendre ses effets et comment s'en séparer rapidement.

Ces enfoirés ont volé mes bombes ! songea-t-elle en toussant.

Elle retint donc son souffle et courut dans la dernière direction où elle avait entendu du mouvement. Même si elle était consciente que toutes ces activités violentes étaient très mauvaises pour le bébé, la sécurité des autres était bien plus importante que tout le reste. De plus, elle mourrait d'impatience de connaître la raison pour laquelle ils recherchaient son mari.

— Dites-moi au moins pourquoi vous vouliez tuer mon mari ! cria la jeune femme, en pleine poursuite de l'étrange personnage.

— Mais vous allez me laisser ou quoi ?! Je vous ai dit que vous êtes une perte de temps ! Foutez-moi la paix ! lança l'inconnu qui fit tomber un tonneau de fruits et légumes dans la route, dans le but de faire tomber Misaki.

— Je n'abandonnerai pas aussi facilement, désolé ! répliqua cette dernière qui bondit par-dessus le baril.

Une femme ouvrit une fenêtre, au-dessus de sa boutique, après avoir allumé une lumière dans sa pièce.

Elle jeta un regard dans le vide et cria :

— Ce n'est pas fini ce boucan ?! Il y en a qui essaient de dormir ici !

La guerrière et le fugitif ne s'arrêtèrent pas pour autant. Au coin du quartier résidentiel, Misaki perdit la trace de l'homme. Elle lâcha un juron avant de faire demi-tour. Une fois revenue sur ses pas, elle ne s'était pas aperçue que quelqu'un l'avait suivie et elle se prit un coup de pelle derrière la tête. L'un des hommes qui était entré au passage secret sous la fontaine, avait fait demi-tour pour aider son acolyte.

Inconsciente, la guerrière albinos ne serait plus un problème pour leur groupe. Toutefois, elle risquerait d'alerter leur présence dans la ville. L'inconnu se dit qu'il serait mieux pour eux de la capturer, jusqu'à ce qu'ils reçoivent de nouvelles directives de leurs supérieurs. Il traîna donc Misaki jusqu'à la fontaine, réactiva le mécanisme du passage, puis glissa le corps inanimé de la guerrière à l'intérieur. Un instant plus tard, la ville de Baldt retrouva sa tranquillité nocturne habituelle.

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