Chapitre 47
Allongé dans l'imposant lit de la suite seigneuriale, Catriona fermement serrée contre son torse, Lachlan avait encore du mal à y croire. La veille elle était bien opposée à leur union et à présent elle avait accepté de devenir sienne. Qu'il était impatient de la mener à l'autel !
Pour sa part, les réactions des membres de son clan ne l'inquiétaient pas. Si Catriona avait une piètre image d'elle-même, ce n'était pas le cas de tout à chacun. Nombreux étaient ceux à ne simplement pas la connaître. Les rumeurs lancées par une vieille femme sénile n'apportaient pas la vérité divine. Et il doutait que les MacKinnon soient tous trop stupides pour en avoir conscience. Leur guérisseuse avait sauvé plus de vie que n'importe lequel d'entre eux. Et ça, par contre, ils le savaient sûrement tous.
Non, lui il en était convaincu, le clan MacKinnon festoierait à la nouvelle de leur prochaine union. Après tout, les noces n'étaient-elles pas l'occasion idéale pour se réjouir et boire plus que de raison ?
De discret coups contre la porte close le tirèrent de ses pensées. Délicatement, il se soustraya à l'emprise de Catriona en faisant de son mieux pour ne pas la réveiller. Il rabattit la couverture sur ses épaules et l'observa quelques secondes. Ainsi assoupie, ses cheveux blonds formant une auréole autour de son visage paisible, elle était encore plus belle. Le cœur gonflé par trop d'amour, il noua son plaid autour de sa taille et entrouvrit la porte.
Darren se tenait de l'autre côté, bras croisés et sourcils froncés. Tandis que Lachlan se glissait par l'embrasure, il jeta un coup d'œil amusé à l'intérieur.
— Tiens donc, commenta-t-il, dois-je en conclure que ta mission fut un succès ? Où devrais-je plutôt m'inquiéter qu'une ribaude ait atteint ton lit pour te consoler ? Je n'ai pas eu le temps de discerner davantage qu'une silhouette.
Lachlan leva les yeux au ciel.
— Qu'est-ce que tu veux ?
— Mince, devrais-je opter pour la ribaude ? Tu me sembles de mauvaise humeur. Je voulais juste m'assurer que tu te portes bien. Je ne t'ai pas vu hier soir et j'ai eu peur que ce soit annonciateur d'une bien triste nouvelle.
Le laird esquissa un grand sourire au souvenir de la veille.
— C'était plutôt une bonne chose, Darren.
— Elle a accepté ?
— Aye. Bon, ce n'était pas une chose aisée de la convaincre, mais j'y suis parvenu.
— Comme si elle pouvait résister à ton charme, railla le Campbell.
— Exactement.
Au bruissement des draps, Lachlan devina que Catriona était en train de se réveiller.
— Je te rejoins en bas, annonça-t-il, nous allons venir rompre le jeûne. Et en profiter pour annoncer nos fiançailles.
— Tu as de la chance, pour un matin, nous sommes assez nombreux dans la grande salle. Mais il y a la vieille Ishbell...
— Tant mieux, nous verrons à sa réaction la sanction appropriée. Je l'ai prévenue il y a quelques mois.
— Bien, à tout de suite.
Lachlan acquiesça et le regarda s'éloigner avant de retourner à l'intérieur de ses appartements. Le corps toujours emmitouflé sous les couvertures épaisses, Catriona s'étirait en poussant un soupir proche du gémissement. Les lèvres étirées par un mélange d'amour et de désir, le laird avança silencieusement jusqu'au matelas et y posa un genou pour se retrouver à sa hauteur.
— Bonjour, susurra-t-il dans le creux de son oreille.
Son amante tourna son visage encore ensommeillé vers lui, ses cheveux emmêlés tout autour de sa tête. Elle portait sur sa joue les marques du coussin.
— Bonjour.
Quand elle se mut un peu plus dans sa direction, le galbe de ses seins quitta son cocon de chaleur, attirant immédiatement le regard de Lachlan. Il se racla la gorge et se força à remonter les yeux. Lorsqu'elle lui sourit, il glissa ses doigts contre sa joue avant de poser ses lèvres sur les siennes.
— Il faudrait que nous descendions, la prévint-il doucement. Si tu me distrais, nous manquerons une occasion d'officialiser nos fiançailles.
Catriona grogna.
— Je me lève, Lach, je me lève.
Il lui fallut encore cinq minutes avant d'enfin s'exécuter. Il l'aida à s'habiller, ne manquant pas une occasion pour baiser son épaule. Lachlan se sentait tellement comblé qu'il ne désirait plus passer un seul instant loin d'elle. Alors qu'ils allaient sortir des appartements seigneuriaux, Catriona posa une main sur la sienne.
— Je n'aurais jamais cru être heureuse d'annoncer que j'allais me remarier.
Il serra ses doigts dans les siens, ravi d'entendre ces mots. Il savait ce que ça lui demandait de se réjouir de l'annoncer au clan MacKinnon.
— Allons-y, l'encouragea Lachlan.
Sans lâcher sa paume, il l'entraîna avec lui. Oui, elle était anxieuse. Il le voyait aux tensions qui habitaient son dos et la poussait à se tenir encore plus droite que d'ordinaire.
— Ça va bien se passer, Cat, souffla-t-il avant qu'ils entrent dans la grande salle. Je t'aime.
Lorsque Lachlan s'engagea dans la salle à manger, il sentit les regards peser sur lui. Ou plutôt sur eux. D'une pression, il tenta d'apporter son soutien à sa promise. Il misait sur la clarté du message pour éviter de trop surprendre ses vassaux. Il guida Catriona jusqu'à la table d'honneur, placée sur l'estrade, à laquelle siégeait déjà Darren. Le Campbell se leva pour saluer Catriona avec un respect exagéré. Elle lui adressa un bonjour crispé qui laissait ressortir tout le stress qui la travaillait.
Elle prit place sa jamais regarder les tablées. Seul Lachlan resta debout dans l'attente d'un silence qui lui permettrait de discourir. Il n'eut pas à patienter longtemps. Les siens comprirent immédiatement le message et se turent les uns après les autres. Du coin de l'œil, il aperçut Ishbell se lever, mais comme elle n'esquissa pas le moindre mouvement supplémentaire, il ne releva pas.
— Mes amis, j'ai aujourd'hui une bien bonne nouvelle à vous annoncer. Je ne suis pas homme à épiloguer et enrichir mes annonces de fioritures inutiles. Je n'avais pour objectif que de donner de ma personne pour le bien-être de notre clan. Mais il s'avère que je ne peux complètement m'effacer. Vous le savez tous, Catriona et moi avons toujours été très proches. Hier, j'ai demandé sa main et elle a accepté, faisant de moi le plus heureux des hommes.
Lachlan avait à peine achevé sa phrase que, déjà, des applaudissements retentirent de part et d'autre de la pièce. Cailean se permit même un sifflement tandis que le laird tendait une main en direction de Catriona pour qu'elle se lève elle aussi. Debouts, ils partageaient sa joie en la lui signifiant par des cris et des tapes sur les tables. Une bouffée de chaleur enivra le cœur de Lachlan, il allait les remercier lorsque la vieille Ishbell s'avança dans l'espace central, le visage fermé.
— Vous ne pouvez pas faire ça ! hurla-t-elle en pointant du doigt la jeune femme. C'est une sorcière, elle ne vous apportera que du malheur, elle...
— Silence ! tonna Lachlan.
Au même moment, Cailean, Monroe et Fergus s'avancèrent en direction d'Ishbell, prêts à répondre à de potentiels ordres. Les voir si promptes à défendre Catriona voulait dire énormément.
— Je t'avais prévenue, Ishbell. Je t'interdis de manquer de respect à Catriona et, malheureusement pour toi, tu viens de le refaire. Il me semble que tu as de la famille dans les Lowlands. Je crois que c'est l'occasion de les rejoindre.
— Je... je dois partir ? s'offusqua-t-elle. Je suis ici depuis plus de soixante années ! C'est hors de question que je...
D'un geste, il prit appui sur la surface plane de la table pour renforcer sa présence.
— Tu vas faire tes bagages maintenant et ne plus jamais revenir ! Je te bannis des terres des MacKinnon. J'ai été plus que clément avec toi. Sors.
Sa voix grave avait fait trembler les murs. L'exilée hésita, regardant autour d'elle pour trouver un soutien qui n'existait pas. Personne n'oserait s'opposer à la volonté du laird. Le pas lourd, elle sortit avec toute la dignité qu'il lui restait. Puisqu'elle n'avait pas le choix, elle s'exécuterait.
À présent, l'atmosphère était pesante. Les membres du clan ne savait pas quoi dire pour redonner à l'annonce son caractère jovial. Ce fut finalement Cailean qui se décida à agir. Il marcha jusqu'au deux marches qui menaient à l'estrade et s'agenouilla au niveau de Catriona.
— Je suis honoré de pouvoir à présent vous considérer comme ma Lady.
— Félicitations, mon laird, renchérit Fergus en levant un pichet de bière, vous n'auriez pas pu trouver meilleure épouse !
Il porta ensuite le rebord du récipient à ses lèvres et but à même la carafe. Il fut suivit par l'ensemble du clan qui leva verre. Des félicitations éparses résonnèrent à droite, puis à gauche, avant de devenir un seul et unique cri de bonheur.
Lachlan jeta un œil en direction de Catriona. Elle avait relevé la tête et se tenait plus fièrement que quelques instants plus tôt. Visiblement, la confiance et la joie partagée des membres de leur clan lui redonnait de l'assurance. Elle se permit même un sourire décontracté tandis que son regard croisait celui d'Aigneas.
— Bruce, Donan et Carron, vous parcourrez nos terres pour annoncer la nouvelle dès que nous aurons fixé une date, ordonna Lachlan. Nous festoierons tous ensemble ce soir pour célébrer la nouvelle.
Lachlan but une gorgée de bière et se rassit en observant Catriona faire de même. Moira choisit cet instant précis pour déposer une écuelle remplie de porridge devant sa future lady.
— Tenez, ma Lady, toutes mes félicitations.
Elle ponctua sa déclaration d'un signe de tête et s'apprêtait à s'éloigner quand Lachlan la stoppa :
— Moira, je veux te voir en début d'après-midi pour discuter de l'organisation des noces.
— Bien, laird.
L'Écossaise courba la nuque avec respect et se retira. Enfin libre de parler à Catriona, puisque les conversations avaient repris, il se pencha vers elle avec un sourire.
— Tu vois, je t'avais bien dit qu'ils seraient heureux de cette nouvelle.
Quand ses yeux bleus trouvèrent les siens, il eut l'impression que son rythme cardiaque se stoppait.
— Et tu avais raison. Je... je ne pensais pas que... qu'ils...
— Ils veulent le bonheur de leur laird. Apparemment personne ne doute que tu sois la seule pouvant me l'apporter.
— Peut-être que tu ne le regretteras pas, alors.
— Jamais.
La mâchoire crispée, il fit pivoter son grand siège dans un bruit désagréable et prit ses mains dans les siennes.
— Tu es tout ce dont j'aurais pu rêver, Catriona, reprit-il avec convictions. Je t'aime.
— Je t'aime aussi, Lachlan, plus que je ne m'en serais cru capable un jour. Je veux passer ma vie à tes côtés.
— Je suis heureux de te l'entendre dire, ricana-t-il, parce qu'à présent tu n'as plus le choix.
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