chapitre 9

Edna trotinait derrière Luc. Ils étaient passés devant des grands bâtiments sombres et monumentaux, avec des larges fenêtres noires et des murs de pierre bien alignés.

Divers affichages, du petit tract aux grandes affiches diffusaient sur les écrans géants, promouvaient la guerre.

" Notre mission est de protéger la patrie "

Disait une publicité avec un groupe de soldat tout sourire, le regard au loin.

Luc posa une main sur l'épaule d'Edna pour l'engager à avancer sans regarder. Mais la jeune femme était bien trop curieuse. Elle s'arrêta devant une nouvelle affiche coller contre un mur.

" Le Kanta est lâche, l'Isère est ignorante, Luta est faible. La Manse est grande. "

Une famille heureuse souriaient en haut d'une colline là où d'autres personnes aux effigies du Kanta, de l'Isère et de Luta, semblaient miséreux en bas.  Edna se pencha sur la dernière phrase en bas de l'affiche.

" Si vous les voyez, signalez les étrangers "

Edna chercha Luc du regard, il lui fit une grimace en retour. Il ouvrit la bouche pour parler quand une voix les fit sursauter.

— Mon ami Luc ! Tu t'es trouvé une femme à l'ouest ?

— Hanz, salua froidement Luc.

— C'est qui elle ? s'étonna le militaire qui venait de perturber leur route vers le musée.

Il était habillé d'un uniforme noir avec motifs de camouflage sombre. Une cape rouge tombait sur son épaule droite avec une chaîne dorée relié à son coeur. Il se tenait droit comme un piqué, et chacun de ses gestes semblaient menacer Edna d'un quelconque danger.

— Une amie...

— Bonjour, je m'appelle Edna Browns.

Luc lui jeta un regard noir.
— Nous devons y aller, au revoir Hanz.

L'homme se mit à rire de façon faussement chaleureuse.

— Attendez, mademoiselle Browns, prenez un tract.

Edna saisit la feuille et la foura dans son sac. Elle finit par suivre Luc qui partait sans elle. Non, ce Hanz ne la perturberait pas. Etait-elle lâche ? Certainement pas.

— A quoi tu joues ? demanda l'ancien militaire.

Mais Edna ne lui répondit pas, ils étaient arrivés devant un gigantesque bâtiment blanc, d'où pendaient des longues bannières rouges tombantes des fenêtre du quatrième étage jusqu'au deuxième. Derrière les grandes fenêtres, on pouvait apercevoir la lumière de lustres magistraux.

Une foule de famille ou de couple sortait et rentrait. Edna souffla d'admiration, elle frissonna en voyant de la fumée sortir de sa bouche.

— Allons-y !

Et Luc fut contraint de la suivre.

— Dis, demanda Edna en continuant à marcher, pourquoi tu n'es plus militaire ?

Luc remonta facilement à sa hauteur en quelques pas.
— J'ai aimé.

La jeune femme comprit qu'elle n'aurait pas une réponse plus développée et rentra dans le musée d'un pas conquérant. Luc était vraiment mystérieux, mais elle en était certaine, ses secrets n'étaient pas mauvais. Faire confiance et avancer, c'était son mot d'ordre. Tout faire pour oublier l'accident.

Edna franchit la grande porte du musée. Luc l'avait invitée ici sans lui donner de véritables explications, et elle, intriguée par ce mystère, s’était laissé convaincre. Elle s’efforçait de ne pas trop l’observer, mais sa présence avait quelque chose d’étrangement magnétique, comme s’il en savait bien plus qu’il ne disait.

Le musée était imposant, à la fois par sa taille et par l’histoire qu’il semblait contenir. Les murs ornés de tableaux, de fresques et d’objets anciens racontaient les récits d’un passé qui n’était pas le sien. Edna n’était pas originaire de Manse, ce pays qui lui semblait à la fois familier et étranger, et pourtant elle se sentait étrangement connectée à ces lieux. Elle suivait Luc à travers les vastes salles, le bruit de leurs pas résonnant sur les dalles de marbre.

Les vitrines brillantes exposaient des artefacts anciens, des armes gravées, des bijoux éclatants, mais aussi des peintures saisissantes qui dépeignaient des batailles épiques, des scènes de cour et des paysages oubliés. Edna avançait lentement, s’arrêtant parfois devant une œuvre qui attirait son regard, mais elle ne s’attardait jamais trop longtemps. Luc, lui, paraissait absorbé, ses yeux scrutant les œuvres avec une intensité qu’elle ne comprenait pas.

Ce fut alors qu’un tableau, suspendu sur un mur isolé, capta son attention. Elle s’immobilisa, comme si une force invisible la retenait sur place.

Le tableau représentait la peinture d'une famille, qui posait pour son portrait. Il y avait les deux parents et une jeune fille au regard bleu éclatant.

Mais ce n’était pas seulement l’image qui la fascinait. Quelque chose dans ce tableau lui parlait.

Edna s'approcha un peu, oubliant la présence de Luc. Elle observa leur tenues riches, la couronne de l'homme et le diadème de la femme posés sur leur cheveux blonds. Et puis la princesse. Il semblait à celui qui regardait le tableau, que le peintre avait mis en avant ce collier qui brillait à son coup.

Ou peut-être était-ce parce qu'Edna avait récupéré exactement le même de sa grand-mère ?

Luc, s'arrêta à sa hauteur.
— Ce tableau t’intrigue ? demanda-t-il.

Edna ne répondit pas immédiatement. Ses yeux restaient fixés sur la peinture, détaillant chaque trait, chaque nuance. Elle finit par murmurer :
— Qui est-elle ?

En parlant de l'enfant.

Luc la regarda un instant, son expression indéchiffrable. Puis il répondit, d’une voix grave et mesurée.

— La mère de Wolfman, notre roi actuel. Avec ses parents à l'air de leur règne.

Edna tira le collier de sous sa chemise. Elle l'enleva de son coup et le brandit devant elle. Faisait jouer sa vision pour décrypter son bijoux face à celui de la peinture.

Et elle se rendit compte qu'ils étaient semblables.

Luc observa la scène tout aussi étonné. Soudain, un grand bruit perturba leur contemplation. Et l'homme sursauta. Il saisit la main d'Edna et la tira pour se mettre à courir.

— Qu'est-ce que tu fais ? s'exclama Edna.

— Il faut sortir d'ici, dit-il en les faisant précipitamment tourner au détour d'un couloir.

Edna continua donc de courir sans savoir ce qu'ils fuyaient. Une angoisse lui saisit le ventre quand elle entendit un autre groupe courir dans le musée après eux.

— Ils sont là !

Luc se mit à courir plus vite. Mais le groupe qu'Edna distingua être des soldats, se rapprochait d'eux.

Tout à coup, elle percuta le dos de Luc.  Il l'entraîna dans un coin pour se cacher de leur ravisseur, sous une table, cachés par une nappe.

Edna vit les hommes habillés d'un uniforme tout comme Hanz qu'ils avaient vu précédemment. Ils passèrent sans les voir. Et heureusement, puisqu'ils portaient des armes.

C'était Hanz qui avait dû décrypter quelque chose chez elle tout à l'heure, et qui leur avait envoyé les soldats. Luc su lire dans ses pensées.

— Je t'avais dit qu'il fallait se méfier de tout le monde ici.

Edna sortit de leur cachette avec précaution et souffla encore sous le choc.

Luc se releva derrière elle.
— Il faut partir maintenant. Dépêche-toi.

Mais Edna s'était arrêtée pour contempler la salle où ils se trouvaient. Dans un ail plus moderne du musée, une partie dédiée à l’histoire récente de Manse. Ici, les vitrines n’exposaient pas de reliques anciennes ni de tableaux, mais des photographies, des documents officiels, et des objets ayant appartenu à des figures emblématiques de l’époque contemporaine. Au centre de l’attention : le roi Wolfman, l’actuel souverain, dont la guerre contre Luta occupait toutes les discussions dans le pays.

Edna connaissait son nom, bien sûr, et avait entendu parler de lui à travers les journaux, mais elle n’avait jamais pris le temps de s’intéresser à cet homme. La guerre lui semblait lointaine, abstraite, et elle ne savait pas grand-chose du roi, pas même à quoi il ressemblait jeune. Luc marchait devant elle, silencieux, comme absorbé dans ses pensées. Elle, en revanche, se laissait distraire par les photographies, effleurant parfois du regard une vitrine ou un cadre.

Soudain, elle s’arrêta net devant une grande photographie en noir et blanc accrochée à un mur. Elle représentait un groupe de jeunes soldats, leurs uniformes impeccables, leurs visages graves mais empreints de jeunesse. Au centre de l’image, un homme se tenait droit, un léger sourire aux lèvres, l’air confiant et charismatique. Il devait avoir une vingtaine d’années, pas plus, mais son regard imposait une autorité naturelle. En dessous de la photographie, une plaque gravée indiquait : « Wolfman de Manse, jeune officier au début de sa carrière militaire ».

Edna sentit son cœur s’emballer. Ce visage… Elle le connaissait. Pas comme une figure publique, ni comme un personnage de l’histoire de Manse. Non, elle l’avait déjà vu ailleurs, dans un cadre bien plus intime.

Elle plongea la main dans son sac, où elle gardait un petit carnet dans lequel elle avait glissé la vieille photo de famille héritée de sa grand-mère. Elle en sortit la photo, ses doigts tremblants.

C’était une image jaunie par le temps. On y voyait sa grand-mère, jeune et radieuse, debout à côté d’un homme inconnu qui tenait un enfant dans ses bras. Elle avait souvent contemplé cette photo sans jamais comprendre qui pouvait être cet homme. Mais à présent, il n’y avait plus de doute. Le sourire, les yeux, la posture… L’homme sur cette vieille photo était le même que celui de la photographie dans le musée.

Le roi Wolfman.

— Tout va bien ? demanda Luc en remarquant son trouble.

Edna leva les yeux vers lui, ses pensées en ébullition. Elle hésita une seconde avant de répondre.

— Je… Ce visage… Je le connais, balbutia-t-elle, montrant la vieille photo qu’elle tenait.
Luc s’approcha et fronça légèrement les sourcils en regardant l’image.

— Qu'est-ce que ça veut dire ? demanda-t-elle en le fixant avec une intensité presque accusatrice.

Luc resta silencieux un instant, ses pensés à lui aussi fusaient dans sa tête.

— La photo, le collier... Edna, ça veut dire que tu es...

Luc calcula sur ses doigts.

— Que tu es la petite-fille du Roi.

Edna sentit un frisson lui parcourir l’échine.

— C'est pour ça qu'on a tué ma famille ? Tu penses que les soldats qui nous cherchent savent quelque chose ?

Luc se frappa un peu le visage.
— Avec ma soeur on se doutait que la mort de tes parents avaient été provoquée par eux, maintenant je comprends mieux pourquoi. Quand à la Manse, je ne pense pas qu'ils aient encore fait le lien.

Edna se tourna vers Luc.
— Qui eux ?

Luc n'eu pas le temps de répondre, les soldats étaient revenus sur leurs traces.

— Allons-nous en maintenant !

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