Chapitre 4 : Le manoir des Grims
Bonjour à tous ! Je suis très contente de voir tous vos commentaires et retours, ça me fait tellement plaisir que vous aimiez cette histoire, j'avais vraiment peur qu'elle n'intéresse personne ! Merci mille fois !
Je poste avec un jour d'avance spécialement pour l'anniversaire de AneesiE ! Bon anniversaire à elle et merci de me lire *keur keur*
Sinon dans ce chapitre vous allez découvrir la fameuse famille Grims. Le nom complet et canon est Grimsditch, mais j'ai pris la liberté de changer pour des raisons historiques qui seront expliquées. Vous allez également découvrir un personnage important (ou plutôt le redécouvrir pour ceux qui ont lu le bonus La Divine Tragédie de Perripuce) : Leonidas Grims. Issu à l'origine de L'héritage d'Ilvermorny, c'est lui qui a été le premier trait d'union entre nos univers à Perri et moi, et finalement il nous appartient un peu à toutes les deux. Voire il a été inventé pour créer cet univers partagé haha ! J'espère que vous aimerez !
J'ai conscience que l'histoire va doucement à se mettre en place mais il y a tellement d'informations et de nouveaux personnages que je préfère y aller doucement pour ne pas vous engloutir. Dites-vous que ce rythme sert l'histoire et j'espère que ça vous plait (et que ça vous plaira).
Bonne lecture !
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« Il existe des secrets de patrie comme des secrets de famille »
- Alfred Capus -
// 1er septembre 1979 //
Les pieds fermement ancrés dans le sol, Julian se retint de tourner sur lui-même pour avoir une vision globale du hall d'entrée. Juste le hall d'entrée. La pièce à elle seule devait faire l'équivalent de son salon dans leur appartement londonien. Même le lustre en cristal qui surplombait le tapis brodé de fils rouge et or devait valoir plus que toutes ses affaires. A côté de lui, Charlotte n'avait pas sa retenu et observait tout autour d'elle avec les yeux écarquillés. Elle paraissait encore plus jeune avec cette expression.
Instinctivement, Julian suivit son regard et leva les yeux vers les tableaux accrochés au-dessus de la rampe d'escalier. Une boule d'appréhension grandit au creux de son ventre en constatant que plusieurs peintures le dévisageaient ouvertement, l'air surpris ou consterné. Il ne savait pas si c'était à cause de leur arrivée ou de l'accueil de la jeune fille qui venait de leur ouvrir la porte.
Elle se tenait toujours dans l'embrasure et les regardait avec la même curiosité que les tableaux, une touche de mépris en prime s'il avait dû analyser la façon dont elle les détaillait sans vergogne. Julian tenta de lui trouver une quelconque ressemblance avec sa mère, Charlotte ou lui-même, mais elle avait des cheveux presque noirs et des yeux qui tiraient sur le bleu cobalt, ce qui tranchait avec leurs propres cheveux blond cendré et leurs prunelles vertes.
En constatant que sa cousine ne disait rien – du moins il supposait qu'elle devait être l'une de ses cousines – Julian reporta à nouveau son attention sur les tableaux et garda obstinément le silence lui aussi. Il en avait marre d'être toujours celui qui faisait le premier pas et qui brisait la glace parce que son père était incapable d'interagir avec le monde. Il était l'adulte, il était celui qui les avait forcés à déménager ; il était donc hors de question qu'il se renferme dans son mutisme habituel en ce moment déterminant.
- Ju'... regarde ! Chuchota Charlotte si bas qu'il faillit ne pas l'entendre.
Julian tourna la tête et son regard accrocha celui d'un tableau, tout en haut de l'escalier, qui toisait le hall de sa place. C'était celui d'une petite fille d'une dizaine d'année au milieu de plusieurs autres personnes. Un portrait de famille sûrement. Pourtant, elle lui semblait étrangement familière.
Avant qu'il ait pu y réfléchir davantage, le cœur battant, un autre portrait prit soudain la parole et le déstabilisa.
- Qui sont ces gens ? Geignit une femme en robe d'époque et à la lourde perruque poudrée. Miss Théodora, qui faites-vous encore entrer chez moi ?
- Oh tais-toi, s'exaspéra la dénommée Théodora. Ou je te remets du produit nettoyant dans les yeux. Je vous présente la grande tante Saranna, ajouta-t-elle d'un ton railleur. Vous allez l'adorer.
Les sourcils de la grande tante manquèrent de disparaître sous sa perruque poudrée sous le coup de l'indignation et elle pinça les lèvres avant de simplement disparaître de son cadre dans un reniflement vexé.
- Saranna... ? Répéta Charlotte, incapable de réfréner ses questions. Comme le nom de la maison ?
- Elle-même. C'était l'épouse du fondateur de la maison, notre ancêtre glorieux et bien-aimé.
Le ton de Théodora dégoulinait de sarcasme et Julian haussa un sourcil. Il n'arrivait pas à déterminer si elle était sérieuse ou non.
- Robert Grimsditch était un grand homme, intervint brusquement une voix. Et tu serais mieux avisée de ne pas te moquer de celui qui a bâti le toit que tu as la chance d'avoir au-dessus de la tête.
Julian se retourna pour faire face à la voix. Depuis ce qui semblait être le salon, une veille femme venait de faire son apparition. Appuyée sur une canne au pommeau en argent où trois corbeaux en plein vol étaient gravés, elle se tenait absolument droite dans sa longue robe au col en dentelle. De grands yeux verts, les mêmes que les leurs, lui mangeaient le visage et ressortaient encore davantage grâce à son front haut et ses traits anguleux.
- De plus, je ne crois pas t'avoir entendu souhaiter la bienvenue à nos invités. Cela serait très mal élevée, tu ne crois pas ?
- Oui grand-mère...
Théodora avait soudain perdu de sa superbe et son sourire moqueur, mais Julian pouvait voir qu'elle trouvait tout ce cérémonial aussi ridicule que le portrait de la grande tante Saranna.
- Eh bien ? S'impatienta la vieille femme en agitant sa canne. Qu'est-ce que tu attends ?
- Désolée... Bienvenue. J'espère que vous avez fait un bon voyage.
Le ton n'aurait pas pu être plus atone et la vieille femme soupira, l'air las et agacé à la fois.
- Bien, ça suffit. Va chercher ta mère et envoie un message à ton oncle. Dis-lui qu'il est attendu et que les Shelton sont arrivés. Je ne tolérerai aucun retard ni aucune absence au dîner. Allez, va.
D'un nouveau geste de sa canne, elle la congédia et Théodora s'éclipsa, non sans un dernier regard dans leur direction.
Le silence retomba dans le hall, rompu uniquement par le chuchotement incessant des tableaux. Julian crut vaguement entendre le nom de sa mère, mais il n'en jurait pas non plus tant un bourdonnement lancinant lui emplissait les oreilles. Entre le réveil à l'aurore, le voyage et le décalage horaire, la tête lui tournait presque. Il aurait aimé que son père prenne les devants pour le laisser respirer deux minutes, mais ce dernier était en train d'observer la bibliothèque basse près de la porte.
- Est-ce que c'est un exemplaire original de l'Abrégé des sortilèges communs et de leurs contre-attaques ? S'extasia son père.
- L'un des dix premiers exemplaires, oui, confirma la vieille femme. Il appartenait justement à Robert Grimsditch. Mais en tant que chercheur, je suppose que vous le connaissez par cœur ?
- Oui évidemment... C'est un ouvrage brillant. Mais les éditions originales avaient sans doute des annotations plus précises ou devaient être différentes de celles d'aujourd'hui et certains spécialistes pensent même que...
- Papa, coupa Julian, épuisé. On pourra peut-être en parler un autre jour, non ?
Son père s'interrompit, surpris, mais sa voix s'éteignit et il redressa ses lunettes sur son nez d'un air contrit. Julian se sentit mal sur le coup, surtout en sentant le regard de sa sœur peser sur lui, mais il n'avait pas la force d'entendre un énième discours sur les éditions originales.
- Evidemment, nous aurons tout le temps d'en parler plus tard, convint la vieille femme. Vous devez tous être fatigués. Julian et Charlotte, je présume ?
- Oui madame... murmura Lottie.
- S'il vous plait : Isadora. Je pense que « grand-mère » serait un peu précipité pour vous comme pour moi. Mais je suis ravie que vous ayez pu venir avant votre rentrée à Ilvermorny. Cela faisait longtemps que j'attendais de vous rencontrer. Vraiment.
Julian aurait aimé lui dire que c'était réciproque, mais ça aurait été mentir. Encore une fois, il se demanda pourquoi il n'avait jamais entendu parler d'elle, ni d'aucun membre de cette famille.
- Si vous voulez, je vais vous montrer vos chambres et on viendra vous prévenir quand le dîner sera servi. Vous pourrez rencontrer tout le monde.
Elle indiqua l'escalier du bout de sa canne, mais son père la retint. Il parut hésiter sur ses mots une seconde avant de se décider :
- Merci... dit-il. Pour tout, je veux dire. Merci de nous accueillir chez vous.
- Ethan, c'est aussi chez vous. En ce qui me concerne, Aurélia n'aurait jamais dû partir, ce n'est qu'un juste retour des choses à leur place. Maintenant suivez-moi.
Cette fois, Isadora n'attendit pas leur réponse et s'engouffra dans les escaliers, sa canne rythmant ses pas à chaque marche. Julian s'empressa d'attraper son sac et celui de Lottie, puis lui emboîta le pas. Le sang lui battait contre les tempes. Il ne savait pas comment prendre la remarque de sa grand-mère. Pourquoi Aurélia aurait dû rester si elle était en froid avec le reste de sa famille ? Et les qualifier de « choses » était peut-être un peu excessif ? Au vu de l'expression de Charlotte – il connaissait sa sœur par cœur – elle pensait comme lui.
Les bras douloureux, il poursuivit malgré tout sa montée de l'escalier mais s'arrêta instinctivement au niveau du portrait de famille qui avait attiré son attention en arrivant. Avec quelques secondes de retard, il reconnut au centre grand-mère Isadora, bien plus jeune, les cheveux blonds rassemblés en chignon mais toujours vêtue d'une robe à col haut en dentelle. Elle était le portrait d'Aurélia. A ses côtés se tenaient un homme à la moustache auburn fournie, un jeune adolescent brun et deux petites filles d'une dizaine d'année. Si l'une avait de belles boucles auburn comme son père, celle qui avait accroché son regard un peu plus tôt arborait une chevelure blonde semblable à celle de grand-mère Isadora plus jeune et une expression boudeuse qu'il mit encore plus longtemps à reconnaître. Sous le coup de la stupeur, il faillit en lâcher les sacs et seul le réflexe de Charlotte leur permis de ne pas dévaler les escaliers.
- Ju', qu'est-ce que tu fais par Merlin ? Râla-t-elle en ployant sous le poids de son sac. Avance ! Cette maison est tellement grande qu'on risque de se perde si on ne la suit pas et on connait ton sens de l'o...
- Lottie ! L'interrompit-il avec urgence. Regarde.
- Quoi ?
- Le portrait !
Charlotte finit par tourner la tête et il sut qu'il avait raison en voyant son corps se raidir. Elle contempla la peinture plusieurs secondes, sa bouche s'ouvrant et se refermant plusieurs fois comme si elle voulait dire quelque chose mais que les mots lui manquaient.
- C'est maman... murmura-t-elle. C'est elle, pas vrai ?
Il acquiesça doucement.
- Oui... Elle devait avoir dix ans, pas plus...
- Huit, corrigea soudain Isadora qui était revenue sur ses pas.
Julian manqua de sursauter, mais la stupeur paralysait sans doute trop sans corps pour véritablement obtenir une réaction extérieure. Au contraire, son cœur s'emballait – sûrement pour la dixième fois aujourd'hui – et il sentait ses entrailles se contracter douloureusement. C'était étrange de voir sa mère si jeune, encore une enfant. Il avait l'impression de découvrir une nouvelle personne et en même temps il retrouvait ses traits familiers. Ses yeux surtout. A la maison, il n'y avait pratiquement aucune photo d'elle plus jeune. Elle avait dû tout laisser en Amérique en partant.
- Elle avait huit ans. C'était son anniversaire ce jour-là, se remémora-t-elle. Nous voulions immortaliser l'évènement et une peinture semblait plus marquante qu'une simple photographie. Le problème c'est que cela prend évidemment plus de temps à réaliser et Aurélia n'aimait pas rester immobile bien longtemps. Elle a fait la tête tout le long.
Julian déglutit. Il ne s'habituait toujours pas à entendre parler d'elle au passé.
- Aurélia pouvait être butée, oui, admit son père. Elle a toujours refusé qu'on fasse des portraits sorciers, juste des photos. Je comprends mieux...
- Je ne pensais pas la traumatiser à ce point.
Malgré le visage impassible d'Isadora, Julian perçut la pointe d'émotion dans sa voix. Il avait tellement passé la journée à angoisser à l'idée de découvrir les Grims qu'il ne s'était jamais demandé ce que sa grand-mère pouvait bien ressentir en les voyant arriver, près de vingt-cinq ans après le départ de sa cadette, sur le pas de sa porte.
- C'est vous, là ? Demanda soudain Charlotte en pointant le tableau.
- Oui, c'est moi, confirma-t-elle. J'avais bien moins de rides, mais c'est bien moi. Et là, à ma droite, c'est mon défunt mari. Votre grand-père Gerbert. Et nos trois enfants : Robert, Cordelia et évidemment votre mère. Je sais, ils ne se ressemblent pas, n'est-ce pas ? Ajouta-t-elle avec un amusement pincé. Vous les rencontrerez au dîner ce soir avec leurs propres enfants, même si vous avez déjà eu un aperçu de Théodora.
Il ne risquait effectivement pas d'oublier sa rencontre si chaleureuse avec sa cousine quelques minutes plus tôt.
- Mais allons-y, ne nous attardons pas ! Je dois encore vous montrer la maison.
Son émotion envolée, Isadora se remit en marche. Julian ne la connaissait peut-être pas, mais elle lui renvoyait l'image d'une femme qui ne s'attardait pas sur ses sentiments si elle avait quelque chose d'utilitaire à faire. Même si le sentiment en question était le souvenir de sa fille.
Instinctivement, Julian se remit en marche, et il eut presque l'impression que le portrait de sa mère le brûlait derrière la tête et le suivait du regard. Ils ne s'arrêtèrent pas au premier étage. Isadora continua de monter les escaliers, le bruit de sa canne amorti par le tapis rouge qui recouvrait les marches. Ils venaient de dépasser le palier du deuxième étage lorsqu'elle reprit la parole en s'adressant à eux par-dessus son épaule :
- La maison a été construite sur des fondations magiques, expliqua-t-elle. Elle s'agrandit ou rétrécit au fil des générations, selon le nombre de membres de la famille. Pour l'instant, les espaces communs – le salon, la cuisine, le bureau, la salle-à-manger et la bibliothèque – se trouvent au rez-de-chaussée. Le premier étage est réservé à mes appartements et je vous prierai donc de ne pas vous y rendre sans mon autorisation.
- Bien sûr, approuva son père, nerveux.
- Mon fils Robert habite le deuxième étage avec sa femme et son fils. Et Cordelia et Théodora occupent le troisième étage toutes les deux. Comme vous ne resterez que quelques jours, vous y demeurerez aussi. Il reste deux chambres. Ethan, vous pouvez bien entendu en prendre une, et la deuxième sera pour toi Julian. Charlotte, tu as le choix. Tu peux dormir avec Théodora ou avec ton frère. Je ne savais pas si à ton âge... ?
Ils se tenaient désormais en haut des escaliers, dans le couloir du troisième étage, et Charly ne paraissait pas essoufflée contrairement à lui. Son endurance ne lui permit donc même pas de faire passer son hésitation pour un manque de souffle.
- Je... je ne sais pas...
- Théodora n'est pas méchante, rassura Isadora. Un peu... sauvage de prime abord, c'est tout.
L'argument ne parut pas rassurer Charly plus que ça. Julian attendit fébrilement sa réponse. Ils n'avaient jamais partagé une chambre, mais la simple idée que sa sœur disparaisse de son champ de vision à l'heure actuelle l'angoissait. Il ne dut pas parvenir à cacher son sentiment car dès que Charly croisa son regard, elle se tourna vers leur grand-père, déterminée.
- Je pense que je vais rester avec Ju'... Pour deux nuits, ça devrait aller...
- Comme tu préfères. Je vous laisse donc vous installer. Vos chambres sont juste là, au bout du couloir. Notre elfe viendra vous chercher quand le dîner sera servi.
Elle parut vouloir ajouter quelque chose, peut-être des mots moins procéduriers, mais elle y renonça avant de s'éloigner en s'appuyant sur sa canne. Julian la regarda redescendre l'escalier, incapable de se décider sur ce qu'il ressentait vis-à-vis de la vieille femme. Elle ne lui avait pas paru très chaleureuse, mais pas froide non plus.
- On va poser nos affaires ? Proposa Charlotte, ployant toujours sous le poids de son sac. Tu vas t'en sortir, papa ?
- Hum ? Oh bien sûr, ma chérie. On se retrouve pour le dîner, je vais étudier un peu en attendant.
Surprenant, pensa Julian avec ironie. Une fatigue sourde lui tomba soudain dessus et il abandonna l'idée de faire une remarque à son père qui visiblement ne voyait pas de problème à les laisser se débrouiller dans une maison, une famille et un pays inconnus.
- Comme tu veux, marmonna-t-il sans le regarder. A tout à l'heure.
Il traina les pieds jusqu'à la porte qu'avait indiqué grand-mère Isadora, Charlotte sur les talons. Il espéra ne pas se tromper de pièce et ouvrit le battant en bois sombre. Derrière lui, sa sœur siffla.
- Est-ce que tout est grand ici ? S'émerveilla-t-elle.
- C'est un truc américain...
La chambre, recouverte de lambris, aurait pu être sombre sans le lustre en fer forgé qui illuminait la pièce grâce à de la lumière de sort. Nimbée d'une aura dorée, les meubles anciens donnaient un aspect chaleureux surprenant à la chambre, et les flammes qui crépitaient dans l'âtre de la cheminée renforçaient son ambiance feutrée. Un grand lit à baldaquin, dont les pieds étaient gravés en forme de corbeau, trônait au milieu.
D'un bond souple, Charlotte se hissa sur le matelas qui s'enfonça sous son poids et elle rebondit, un grand sourire aux lèvres.
- Merlin, Ju' ! Regarde ! On dirait un lit de princesse !
- Ce n'est que pour deux nuits tu sais...
- Oh arrête de faire ton rabat-joie, râla-t-elle. Viens !
Amusé, il traversa la chambre pour la rejoindre. Il pouvait bien le reconnaître, être sur ce lit donnait l'impression de se trouver dans un conte de fée.
- Pas mal, apprécia-t-il.
- Génial oui !
Ils éclatèrent de rire. Charlotte bascula sur le dos, le souffle court, et vrilla ses yeux verts si semblables aux siens et à ceux de leur mère – et à ceux de leur grand-père Isadora désormais – avant de soupirer.
- Alors ? Souffla-t-elle. T'en penses quoi, toi ?
- De ?
- D'Isadora... De la maison, de tout... ?
Julian garda le silence de longues secondes. Toutes ses pensées se bousculaient dans sa tête et il n'arrivait pas à mettre de l'ordre dans ce qu'il ressentait. Il détestait ça.
- Je ne sais pas encore, avoua-t-il. La maison fait un peu vieux jeu et sang-pur. C'est pire que chez les Bones. Et pour Isadora... Pareil, elle m'a l'air un peu « sorcière traditionnelle », mais pas méchante. Je veux dire, elle paraissait contente de nous rencontrer, non ?
- Si, je crois, confirma Charlotte. Et je n'ai pas eu l'impression qu'elle avait voulu que maman s'en aille donc elle n'a pas dû la mettre dehors après ses études.
- Non, c'est sûr. Si maman est partie, c'est soit parce qu'elle le voulait, soit parce qu'on l'y a forcé, mais ça ne devait pas être grand-mère Isadora... Peut-être son père ? Le moustachu, là, sur le tableau ?
Un éclat de rire raisonna depuis la porte et ils se redressèrent tous les deux, surpris. Le cœur battant, Julian remarque soudain le garçon adossé au chambranle. Il ne l'avait pas entendu arriver. Grand et fin, il devait être plus âgé que lui de quelques années. Malgré ses oreilles un peu décollées et ses yeux bleus cobalt rapprochés, il dégageait une certaine prestance avec son dos bien droit et sa robe de sorcier de qualité.
- Le moustachu, comme tu dis, lança-t-il, aurait été incapable de faire du mal à un veau-de-lune. Grand-père Gerbert était l'homme le plus gentil au monde, ce n'est pas lui qui aurait mis sa fille à la porte. Si votre mère est partie, c'est qu'elle l'a voulu.
- Désolée, on ne voulait pas...
- C'est notre chambre, coupa Charlotte. Et c'est mal poli d'écouter les conversations !
- C'est ma maison, rétorqua le garçon.
Sans y être invité, il entra dans la chambre. Il avisa leurs valises, posées près du lit à baldaquin, et les détailla du regard d'un air indéchiffrable.
- Les cousins anglais, j'imagine ? Dit-il. Julian et Charlotte ?
- Charly, corrigea sa sœur.
Julian se retint de lever les yeux au ciel mais il ne voulait pas présenter autre chose qu'un front uni devant cet inconnu.
- Charly... Noté. Moi, c'est Archer.
En voyant que son nom ne leur évoquait rien, il précisa :
- Archer Grims. Le fils de Robert.
- Robert, le frère de notre mère ? Se rappela Charlotte. Donc tu es notre cousin ? Comme Théodora ?
Il hocha la tête et Julian tenta de suivre tous les liens de parentés, dessinant un arbre généalogique mental dans sa tête.
- Si tu veux qu'on t'appelle Charly, je te conseille d'appeler Théodora Théa. Sinon elle mord, prévint-t-il presque avec sérieux. Et Théa est ma cousine, la fille de ma tante Cordelia. Vous suivez, c'est bon ?
- Non, répondirent-ils en cœur.
Archer eut un rictus suffisant.
- Quoi ? On ne vous apprend pas la généalogie en Angleterre ?
Julian savait grâce à Matthew que certaines familles sang-pur accordaient beaucoup d'importance à la généalogie tant la pureté du sang leur était précieuse. Ce n'était pas le cas des Bones dont le nom remontait pourtant au XIXe siècle et qui comptait parmi les branches de leur famille des Dumbledore ou des Greengrass. A l'inverse, il avait entendu dire que les Malefoy et les Black par exemple enseignaient à leurs enfants leur arbre généalogique et ceux des grandes familles sur le bout de la baguette et que cette coutume faisait partie intégrante de l'éducation sang-pur. Était-ce le cas pour Archer et Théa ?
- Pas dans notre famille, non, répondit-il finalement.
Cette information arracha un froncement de sourcil à Archer.
- Votre père vient d'une famille Non-Maj', c'est ça ?
- Un problème ? S'enquit Charlotte, cassante.
- Oh non, aucun, c'était juste pour situer le contexte. Pas d'inquiétude, on n'a rien contre les Non-Maj' ici du moment qu'ils nous laissent tranquille. Et un sorcier est un sorcier, pas vrai ?
Etrangement, Julian n'avait pas l'impression que son cousin mentait. Isadora elle-même avait eu un comportement tout à fait normal vis-à-vis de son père. Il supposa que toutes les familles sang-pur n'étaient pas les mêmes.
Archer avait l'air de vouloir continuer la conversation, mais la tête d'un elfe de maison à la peau fripée apparue soudain depuis le couloir.
- Maître Archer, maître Julian, maîtresse Charlotte, salua-t-il respectueusement. Le dîner est près, Lady Isadora me fait venir vous chercher.
- Arrête de l'appeler Lady, s'agaça Archer. Elle n'est pas noble qu'on sache.
- Lady Isadora mérite le plus grand respect et le plus grand honneur, affirma l'elfe. Tikky le sait.
- Il perd la boule, confia Archer en désignant sa tête d'un geste équivoque. Allez, venez.
Pas reposé le moins du monde, Julian se força malgré tout à se lever. Il n'avait pas prévu de défaire ses affaires pour deux jours de toute façon et ses valises pouvaient bien attendre. Alors qu'ils allaient descendre, Théa arriva elle-même de l'étage au-dessus. Elle ralentit en les apercevant en compagnie d'Archer et plissa les yeux.
- Archer ! Tu nous fais l'honneur de sortir de ta chambre ?
- Très drôle...
- Quoi c'est vrai, non ? Comment avance ta correspondance avec ta mystérieuse inconnue ?
Le visage d'Archer s'enflamma. Julian se retint de sourire et il se positionna légèrement devant Charlotte pour dissimuler son expression trop amusée pour être polie.
- Théa, gronda leur cousin. Tais-toi par Morgane !
Pour toute réponse, Théa les dépassa en souriant, l'air fière d'elle. Sans un mot, Archer lui emboîta le pas et ils suivirent le mouvement sans broncher. S'il les perdait, Julian avait peur de ne pas réussir à retrouver la salle à manger. En arrivant dans le hall, il prit soin d'éviter de regarder le tableau représentant sa mère plus jeune et il se demanda une seconde s'il aurait dû attendre son père pour descendre dîner. Il faillit rebrousser chemin, mais les autres se dirigeaient déjà vers la sortie et il renonça.
Heureusement, Tikky l'elfe de maison avait dû prévenir son père avant eux car il était déjà attablé devant un énorme plat de dinde aux champignons à côté de grand-mère Isadora et d'une femme au visage sévère mais gracieux. Julian la reconnut avec difficulté grâce au portrait de famille. Une seule des petites filles avaient les cheveux auburn du patriarche et la femme devant lui arborait précisément cette même couleur, même si les boucles et les rubans de l'enfance avaient été remplacés par un chignon élégant. Il s'arrêta net, frappé par sa ressemblance avec sa mère. Si on excluait la couleur des cheveux, les deux sœurs avaient la même bouche fine, le même front bombé, le même nez trop en trompette pour être harmonieux, et surtout les mêmes yeux vert pâle. Sous le coup de la surprise, son nom lui échappa et elle parut trop choquée en les voyant pour se présenter.
- Morgane... souffla-t-elle.
- Non, ce n'est que nous maman, railla Théa.
- Très spirituel, commenta Archer, on ne l'avait pas fait dix fois celle-là.
- Théa, arrête de faire la maligne, assieds-toi, sermonna leur grand-mère. Ce n'est facile pour personne. Et Cordelia, reprend-toi.
Mais les yeux de Cordelia restèrent fixer sur eux. Julian imaginait que s'il voyait l'image de sa mère en elle, la réciproque devait être vraie. De leur père, ils avaient peut être hérité leur menton rond et leur taille moyenne, mais c'est à leur mère qu'ils devaient tous les deux leurs cheveux d'un blond cendré et leurs yeux verts.
- Cordelia, insista Isadora d'une voix ferme. La politesse, voyons !
- Bien sûr, pardon, murmura-t-elle finalement. Enchantée.
Julian tiqua devant son ton cérémonieux. Tout, dans cette famille, lui paraissait décidément procédurier, comme une parodie de retrouvailles. Tout le monde avait l'air d'en avoir conscience, particulièrement Théa, mais personne n'avait pourtant l'air de vouloir se laisser aller à une quelconque spontanéité.
- Bonjour, dit Charlotte à côté de lui. Ravie de vous rencontrer...
- Allons, nous n'allons pas nous vouvoyer non plus, rabroua à nouveau leur grand-mère. Ethan, les enfants, je vous présente donc ma fille cadette, Cordelia.
Sur sa droite, Julian remarqua le tic de son père et il se rappela ce qu'il avait dit dans le taxi. D'après lui, si sa mère avait quitté les Etats-Unis, c'était à cause d'une dispute avec sa sœur aînée.
- Où est Robert ? Continua-t-elle. Archer, où sont tes parents ? J'avais dit que tout le monde devait être là !
- Aucune idée... Ils sont partis vers midi pour le travail, je pensais qu'ils reviendraient ce soir, mais tu les connais. Les Dragots, ça n'attend pas.
Isadora jura tout bas.
- Je vous prie de m'excuser, dit-elle. Mon fils et son épouse travaillent au Gouvernement des Finances et des Dragots à un poste important et ils doivent se rendre disponibles en cas de besoin. Même si l'économie se porte bien, le cours du Dragot a quelque peu chuté ces derniers mois à cause des investisseurs anglais qui se retirent. La Grande Bretagne n'est pas dans un moment facile, évidemment...
- Vous n'avez pas de Mornilles ? Ou de Noises et de Galions ? Demanda Charlotte, sûrement pour éviter de s'étendre sur la situation du pays.
- Non, pardon, ça me semblait évident. La monnaie ici est le Dragot. Je vous emmènerai faire du change si vous le souhaitez, Ethan.
- Oui... Merci...
Vu son expression, il venait de se rappeler que la monnaie n'était effectivement pas la même et Julian se maudit de pas avoir anticipé. En face d'eux, Archer et Théa regardaient son père avec circonspection et il sentit son ventre se serrer. Si les Grims se rendaient compte au bout de seulement dix minutes de repas à quel point leur père était incapable de gérer les affaires quotidiennes, la situation allait devenir compliquée.
Presque comme si le destin avait entendu son inquiétude, l'attention générale fut détournée lorsque Tikky l'elfe de maison arriva. Ses petites oreilles en triangle arrivaient à peine au niveau de la table.
- Lady Isadora, dit-il en s'inclinant. On sonne à la porte.
- Ah ! Est-ce enfin Robert et Dilysa ?
- Non, ma Lady. Il s'agit de monsieur Leonidas.
De concert, Cordelia et Archer laissèrent échapper un soupir agacé. Grand-mère Isadora les fusilla du regard.
- Il est venu de Boston ? Je comptais ne le prévenir que demain de l'arrivée des Shelton. Celui-là, vraiment... maugréa-t-elle. Fais-le entrer, Tikky. Il ne va pas rester sur le perron.
L'elfe s'inclina et s'empressa de repartir vers le hall. Julian essaya de tendre l'oreille, curieux. Le nom de Leonidas lui disait vaguement quelque chose, peut-être parce que sa mère avait dû le laisser échapper, mais il n'avait pas la moindre idée de qui il pouvait s'agir.
L'homme qui entra dans la salle à manger quelques secondes plus tard se révéla être grand et élégant. D'un air avenant, il enleva son chapeau et son long manteau marine, et son imposante mâchoire carrée s'étira en un sourire ironique.
- Eh bien, quel accueil ! Vous pourriez au moins faire semblant d'être heureux de me revoir après tous ces mois.
- Tu n'étais pas attendu ce soir, Leo, rétorqua Isadora. Tu aurais, pour ta part, au moins pu envoyer une lettre pour nous prévenir.
- Oh, ma chère tante, toujours aussi chaleureuse. Votre réaction est précisément la raison pour laquelle je n'ai pas prévenu. Cordelia, cache cette grimace, tu vas vieillir prématurément. Et ce n'est pas une façon de dire bonjour à ton cousin préféré.
- Seul cousin, siffla Cordelia. Je m'en passerais bien.
- Tu as la rancœur au cœur, ma pauvre amie.
- Comment est-ce que je pourrais ne pas l'avoir ? Sans toi, elle serait peut-être là ce soir avec nous.
Leonidas perdit brusquement son sourire de comédien. Le sang battant à ses oreilles, Julian repassa la phrase de sa tante. « Elle ». Parlait-elle de sa mère ? Il ne voyait pas bien ce qu'un cousin inconnu pouvait bien faire là-dedans.
- Toujours la même rengaine, dit-il d'une voix dure. Regarde-toi en face si tu cherches un coupable. Et je vous remercie au passage de m'avoir prévenu que sa famille débarquait aujourd'hui, ajouta-t-il, sardonique. Je vois que vous avez, vous aussi, perdu votre papier à lettre.
- Il suffit ! Enragea soudain grand-mère Isadora, faisant sursauter tout le monde. Quel spectacle sommes-nous en train de donner ! Mon pauvre Gerbert se retournerait dans sa tombe ! Maintenant, Leo, puisque tu es là, je t'en prie prend la place de Robert, il n'arrivera sûrement plus. Et je ne veux plus un mot sur le départ d'Aurélia, est-ce que c'est clair ? Ce n'est ni le moment, ni l'occasion. Nous sommes là pour rencontrer les Shelton et ne pas leur donner l'envie de fuir au premier repas de famille.
L'ambiance, tendue, devint glaciale. Leonidas s'assit finalement, le dos raide, puis se tourna vers eux avec la même curiosité que s'il découvrait une terre étrangère.
- Les voilà donc, s'exclama-t-il chaleureusement. Ethan, bien sûr. Ça fait longtemps, évidemment. Ravi de te revoir.
- Moi de même. Aurélia parlait encore de vous... Elle vous aimait beaucoup.
Si le sentiment de son père était louable, Julian le maudit malgré tout. Au vu des expressions d'Isadora et de Cordelia, elles n'avaient pas reçu les mêmes égards. Ce constat parut ravir Leonidas.
- Et Julian et Charlotte, évidemment ! J'aurais aimé vous rencontrer plus tôt et en d'autres circonstances.
Cette fois, le « moi aussi » resta coincé dans la gorge de Julian. Ça semblait hypocrite et dénué de sens devant un homme dont il ne connaissait pas l'existence il y a encore dix minutes. Leonidas ne parut pas s'en formaliser et se servit une généreuse part de dinde. La montre à gousset accroché à son veston étincela dans la lumière du chandelier central.
- Vous savez, j'étais le cousin de votre mère. Nous passions tous nos étés ensemble, enfants.
- Où ça ? Demanda sa sœur.
- En France. Nous y possédons une magnifique villa dans le Sud. Vous pourrez y venir cet été.
- Tu n'y viens plus depuis des années, intervint Cordelia.
Il se tourna vers elle avec ce même air faussement avenant.
- Et bien peut-être que j'ai envie de changement. Après tout, c'est à l'ordre du jour, non ? D'ailleurs, j'ai entendu dire que tu avais été nommé Président des élèves par tes professeurs, Archer ? Félicitations ! Tes parents doivent être fiers.
Archer redressa le menton, pompeux.
- Nous sommes tous très fiers d'Archer, confirma grand-mère Isadora. Il a passé l'été à se préparer pour sa nomination et ses efforts sont récompensés.
- Tu parles, se moqua Théa, il envoyait des lettres à son inconnue oui !
- Théa, laisse-le tranquille par Morgane...
- Elle dit ça parce que même dans ses rêves un troll ne voudrait pas de sa réputation...
- Archer ! S'écria si froidement tante Cordelia que même Tikky, qui arrivait avec un plateau de victuailles, battit en retraite. Un de mot de plus et je te fais sortir de cette table, est-ce que je suis claire ?
Il déglutit et hocha la tête. Julian dévisagea sa tante. Elle n'avait pas l'air de plaisanter et était devenue presque livide sous son fard à paupière. Leonidas la regardait même avec une certaine tristesse. Complètement perdu, son père gardait le nez dans son assiette et sa sœur n'osait plus bouger un muscle. Pour une fois, il les comprenait tous les deux. Ce dîner n'avait aucun sens et tout le monde semblait prêt à se sauter à la gorge.
- Très bien, je pense que nous devrions tous reprendre nos esprits, dit lentement Isadora. Tikky, amène donc la suite. Quant à nous, laissons un peu la parole à nos invités.
Pris de panique, Julian réprima l'envie de secouer la tête. Il n'avait aucune envie de prendre la parole.
- Alors Charlotte, dis-nous, que...
- Charly, rectifia Julian spontanément. Elle préfère Charly.
Surprise, Charlotte lui coula un regard interrogateur. Depuis un an, il refusait d'utiliser ce surnom, mais ce soir, entouré d'inconnus, il voulait lui faire plaisir et lui donner le sentiment qu'elle pouvait être elle-même.
- Charly, bien. Aimes-tu quelque chose en particulier ? Une matière ou une activité ?
- Le Quidditch, répondit-elle sans réfléchir.
- Le quoi ? Chuchota Théa.
Personne ne fit l'effort de lui expliquer.
- Noble sport, approuva Leonidas. Tu jouais dans une équipe à Poudlard ?
- Oui, j'étais poursuiveuse pour Poufsouffle ... Enfin, je venais encore d'être prise comme remplaçante pour le dernier match, et le capitaine m'avait dit que je serai sûrement titularisée à la rentrée mais...
- Vous avez déménagé.
- Oui... Peut-être que si Vous-Savez-Qui est arrêté bientôt, je pourrais reprendre mon poste en revenant...
- Vous-Savez-Qui ? Répéta Théa, presque goguenarde. Qu'est-ce que c'est encore que ce nom ?
- C'est juste... Le mage noir... On n'aime pas prononcer son nom, expliqua Charlotte sans se démonter et Julian ressentit un élan de fierté envers elle. Il y a une sorte de tabou autour, comme si ça pouvait le maintenir à distance... Certains disent que si on prononce son nom, il nous retrouvera. Les mangemorts pourraient débarquer chez vous. Je suppose que ça rassure les gens, ça le rend moins concret à leurs yeux.
- C'est quoi des mangemorts ?
La question parut déstabiliser Charlotte et Julian la comprenait. Ça lui paraissait aberrant à lui aussi que quelqu'un ne sache pas qui étaient les mangemorts.
- Les partisans de Vous-Savez-Qui, répondit son père factuellement.
C'était la première fois depuis plusieurs minutes qu'il ouvrait la bouche.
- Son armée, renchérit Julian. Ce sont eux qui parcourent le pays la plupart du temps pour menacer les gens ou... ou les tuer...
- Et personne ne fait rien ? Votre gouvernement reste inactif ? Ils devraient être arrêtés non ?
- Ce n'est pas si simple, Archer, nuança Leonidas, visiblement irrité par l'attitude du fils de sa cousine. Si les pouvoirs publics pouvaient arrêter cette guerre, ils le feraient...
- Et alors ? Qu'est-ce qu'ils attendent ? Des gens sont morts, non ?
De l'autre côté de la table, Charlotte blêmit et son père resta figé sur sa chaise, prostré, comme s'il avait oublié son repas. Julian dévisagea son cousin. Il leur rappelait à eux que des gens étaient morts ? Comme s'ils ne le savaient pas et comme si l'absence de sa mère à cette table – voire leur présence en elle-même – n'étaient pas déjà des rappels assez douloureux.
- Ils sont masqués, rétorqua Julian, incapable de se retenir plus longtemps. On ne sait pas qui se cachent sous les cagoules, ils agissent en toute impunité grâce à la protection de Vous-Savez-Qui. Et lui non plus, on ne sait pas qu'il est... Ils sont tous des fantômes.
- Evidemment, si vous persistez à ne pas les appeler par leur nom, objecta Théa.
- C'est idiot, renchérit Archer. Je veux dire, c'est un simple nom. Les gens s'accrochent à du folklore.
Julian ressentit une montée de colère en lui et il serra sa fourchette à s'en faire blanchir les jointures. Ni Théa ni Archer ne comprenaient. C'était facile de critiquer quand on était de l'autre côté d'un océan, loin des attaques et de la peur qui avait infiltré chaque foyer d'Angleterre.
- Ils s'accrochent à l'espoir, répliqua sèchement Charlotte.
Avec Archer, ils se fusillèrent du regard par-dessus le gâteau à la fraise ramené par Tikky.
- Et Dumbledore ? Lança brusquement Leonidas. Il va agir, j'en suis sûr. J'ai des contacts en Angleterre qui me donnent des nouvelles, notamment sur lui. Il doit aider le Ministère ou faire quelque chose. C'est ce que rapportent les rumeurs.
- Qui sait, avec Dumbledore ? Lui répondit Isadora. Cet homme est imprévisible !
Visiblement, la réputation du directeur de Poudlard dépassait les frontières et Julian ressentit un maigre soulagement devant ce nom familier qui lui évoquait des banquets et de remises de Coupe des Quatre Maisons.
- D'ailleurs, Leo, en parlant de tes contacts en Angleterre. Pourquoi Lysandra n'est pas avec toi ?
- Lysa devait retrouver une amie. Tu la connais, je n'allais pas l'obliger à venir.
- Déjà que tu n'étais pas invité, marmonna Cordelia.
Leonidas l'ignora et se tourna vers eux.
- Lysandra est ma femme, expliqua-t-il. Elle est anglaise, elle aussi. Je pense que vous vous entendrez bien.
Julian acquiesça poliment. Il se sentait épuisé à essayer de retenir tous ces noms qu'on lui envoyait à la figure. Sa fatigue dû se lire sur son visage car Isadora attrapa soudain sa canne posée près d'elle et donna un coup sec sur le plancher.
- Bien, je pense que nous pouvons tous nous retirer. La journée a été longue et votre voyage d'autant plus fatiguant. Nous parlerons demain. Leo, tu es le bienvenu si tu veux rester pour la nuit... ?
- Non merci, ma tante. Lysa m'attend. Mais je reviendrai demain ou avant votre départ pour Ilvermorny.
Ilvermorny, songea Julian. Pas de doute, il avait hâte d'y aller, juste pour quitter cet endroit. Côte à côte avec Charlotte, ils fuirent presque la salle à manger et remontèrent dans leur chambre. Le lit à baldaquin lui évoquait d'un coup moins celui d'un conte de fée.
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Alors ? Verdict ? ^^
Eléments tirés du canon/de Pottemore :
- Le Gouvernement des Finances et des Dragots existe. J'ai donc imaginé que le Dragot était la monnaie des Etats-Unis à partir de cette information.
- Même si la famille Grimsditch existe, les membres mentionnés ici sont tous issus de mon imagination. Seul le fondateur de la famille, Robert Ier, vient de Rowling. Je lui ai inventé une femme et une descendance, mais j'en reparlerai.
- Leonidas Grims est mon personnage à l'origine, mais il a été inventé pour mettre en place mon univers partagé avec Perripuce. Il lui appartient donc également, ne soyez pas surpris de le retrouver dans ses écrits !
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Prochain poste : Chapitre 5 - Mercredi 28 octobre
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