Chapitre 27 : Un monde sans amour
Hello tout le monde !!! Comment ça va ? Il fait gris et pluvieux, mais pas encore trop froid, mais ça y est je suis en mood automne j'avoue haha !
Alors, plein de choses à dire cette semaine ! Pour commencer, si certain.es n'avaient pas vu la notif, j'ai posté la dernière partie du bonus sur Julian et Noah pendant les évènements d'Ombres et Poussières. Les vues n'ont pas vraiment décollé donc je me suis dis que peut-être l'info n'est pas passée, mais en même temps j'ai posté un lundi matin quand tout le monde était occupé parce que j'ai pas capté que j'étais la seule à être en week-end décalé haha !
Ensuite, je suis contente que le dernier chapitre vous ait permis de mieux comprendre Emilia, ça me tenait à coeur !
Troisièmement, je commence doucement à communiquer dessus, mais Perri et moi seront comme les deux années précédentes au Salon du Livre de Montreuil le dimanche 3 décembre. A vos calendriers ! C'est un peu devenu le rdv de rencontres où on passe un bon moment à parler de nos fanfics, à répondre à vos questions et à juste délirer toutes ensemble en fangirlant haha ! Hésitez pas à me contacter si vous êtes intéressé.es.
Et enfin... Place au chapitre. Attention, on rentre dans l'arc des vacances ; un arc qui va tout bouleverser. Drama à venir mouahaha ! Ah et WARNING : présence d'une scène un peu explicite dans le chapitre. Comme d'habitude, rien de cru, mais vous êtes prévenu.es.
Sur ce teasing... Bonne lecture !!
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Chapitre 27 : Un monde sans amour
« Please lock me away
And don't allow the day
Here inside where I hide
With my loneliness
I don't care what they say I won't stay
In a world without love »
- Peter and Gordon, A World Without Love-
// 23 décembre 1980 //
Les rues de New-York avaient l'air de sortir d'un téléfilm de Noël à deux jours de la fête en question et Julian manqua de renverser un énième passant, trop absorbé dans sa contemplation d'un homme en costume rouge et blanc, un saut et une cloche à la main en train de récolter de l'argent pour une association à grands renforts de « oh oh oh » joyeux. Il y avait bien quelque chose de magique à cette atmosphère recouverte d'un manteau de neige épais. Les vitrines des magasins brillaient plus fort que d'habitude et même le pas pressé des new-yorkais semblait avoir légèrement ralenti pour profiter du spectacle. C'était à la fois complètement différent de Londres et sensiblement familier... New York était juste trop verticale pour donner l'illusion du vieux continent et toute l'attention se cristallisait sur les longues rues enneigées et les décorations suspendues qui faisaient presque offices de ciel, faute de réussir à distinguer le vrai au-dessus des buildings.
Les doigts engourdis par le froid, il ne s'attarda pourtant pas avant de s'engouffrer dans une bouche de métro. Il n'avait pas beaucoup de temps devant lui et il tenta de maîtriser son rythme cardiaque, nerveux. Tout s'était décidé à la dernière minute. Hier soir, après le départ de Matthew qui devait dormir pour une fois à Boston chez Leonidas pour passer une presque journée entière avec son oncle et sa tante le lendemain, il s'était enfermé dans sa chambre dans l'espoir de fuir la morosité de Théa et les questions de sa mère. Elle commençait à se rendre compte de la tension entre eux et lui avait demandé si tout allait bien, mais il n'avait pu qu'esquiver la question, mal à l'aise. Il avait juste hâte de retrouver Matthew : tant qu'il était avec lui, il pouvait échapper aux regards et aux piques de Théa. Normalement, il était censé le retrouver aujourd'hui à 16h30 à Boston. C'est le plus tôt qu'il avait réussi à négocier avec Lysandra qui voulait quand même profiter de son neveu pendant ces vacances. Alors quand il avait refermé la porte de chambre hier soir, il s'était dit que la journée de demain allait être longue jusqu'à l'heure des retrouvailles... Mais ça avait été sans compter la fameuse lettre.
La fameuse lettre de Noah, arrivée vers minuit à la fenêtre de sa chambre sous forme d'avion en papier emprisonné entre les serres de la chouette de Raphaël alors qu'il dessinait Manhattan à grands coups de fusain. Il s'était levé d'un bond pour la récupérer, le cœur battant.
Elle n'avait fait que quelques lignes et, alors qu'il montait dans la rame de métro à l'instant, il l'effleura du bout des doigts dans sa poche.
« Please lock me away
And don't allow the day
Here inside where I hide
With my loneliness
I don't care what they say I won't stay
In a world without love »
Tu me manques, Jules...
Demain ? A midi ?
Juste en-dessous, un dessin avait accompagné les paroles de chanson et la proposition : celui de la façade d'un hôtel. Le Sorcellelit, le seul établissement hôtelier sorcier de New York. Il le connaissait pour s'y être rendu l'hiver dernier avant le départ de Hanna.
Depuis hier soir, les mots s'étaient gravés dans son esprit et il se força à réprimer son sourire pour ne pas se faire dévisager par les gens autour de lui. A moins de vouloir passer pour un fou, sourire dans le métro était une règle tacite interdite, il l'avait assez pris à Londres pour le savoir. Autant se trimballer avec une pancarte qui disait « touriste ». Mais peu importe...
Il vibrait d'une énergie mal contenue depuis son réveil ce matin et il ne pouvait pas l'endiguer. Il ne savait toujours pas où Noah avait trouvé les paroles de la chanson de Peter and Gordon - peut-être pendant son roadtrip - mais il avait fini par en comprendre le message à deux heures du matin à force de les relire à s'en faire piquer les yeux : « je vous en prie, enfermez-moi donc ; laissez la nuit s'installer dans mon jardin secret où réside avec moi ma solitude ; je me fiche de ce qu'ils peuvent bien dire, jamais je ne vivrai dans un monde sans amour ».
La signification était claire et faisait écho à un de leur dernier échange dans le train la semaine dernière. Noah lui avait demandé ce qu'il ferait s'ils étaient vraiment seuls, si le monde avait été différent et qu'il n'y avait pas une barrière à maintenir entre eux. La réponse se trouvait entre les paroles des chansons. Noah refusait d'attendre que le monde change, la patience n'avait jamais été son fort. Il ne voulait pas se faire enfermer dans un hôpital psychiatrique, il ne voulait pas rester enfermer avec sa solitude, il refusait ce monde sans amour dans lequel ils étaient obligés d'évoluer. Il fallait juste avoir l'audace de son affranchir.
Et heureusement pour eux, s'il y avait bien quelque chose dont Noah ne manquait pas, c'était d'audace.
Dans un bruit strident, la rame s'arrêta enfin et Julian sortit du métro avec l'impression de sentir le regard de tous les passagers braqués sur lui... Comme s'ils pouvaient savoir qui il allait retrouver d'une certaine façon et son impatience se doubla de nervosité alors qu'il ressortait dans le froid glacial de décembre. Il ne lui fallut que quelques minutes pour se retrouver dans le fameux bâtiment à l'air abandonné entouré de barrière de chantier. Il s'y glissa souplement et, contrairement à l'année dernière, n'hésita pas à passer les portes tournantes sans vitre qui ouvrait sur une obscurité dévorante. Il le savait mieux que personne : la magie n'était qu'illusions.
Dès qu'il passa à travers les portes tournantes, il se retrouva dans l'immense hall d'hôtel au plafond en ciel d'hiver, le même qu'à l'extérieur. Face à lui, le comptoir était toujours le même et se trouvait devant un grand mur composé de petites cases numérotées où étaient accrochées des centaines de clés. En fer rouillé, en or ouvragé, pendue à une corde...
- Bienvenue à l'hôtel Sorcellelit, lança une sorcière derrière le comptoir. Je peux vous aider ?
Elle était seule contrairement à la dernière fois et il s'approcha jusqu'à repérer le badge épinglé sur sa poitrine. Holly. Oui, c'était ça... Le souvenir paraissait si vieux aujourd'hui.
- Hum, bonjour... dit-il en se râclant la gorge. (Il réalisa qu'il ne savait même pas si Noah avait réservé sous son vrai nom, mais ça lui sembla soudain dangereux de le donner). Euh, je viens voir quelqu'un... J'ai oublié le numéro de chambre.
- Pas de problème, répondit Holly en gardant sa façade professionnel et son sourire bien en place. Je vais regarder dans le registre. Nous avons toujours les mesures de sécurité en place décidées par le MACUSA, il faut que nos clients annoncent l'identité de leurs invités en amont... Vous savez, à cause de...
- ... ce qui se passe en Angleterre, oui, je sais.
Elle lui avait servie le même discours l'année dernière et Holly dut entendre son accent anglais - elle ne l'avait clairement pas reconnu à force de voir passer des centaines de sorciers par jour - et parut embarrassée.
- Oui donc, je disais... reprit-elle en ouvrant son registre. Votre nom ?
Il hésita une seconde, tendu. Ne pas paraître suspect en prenant trop de temps à répondre, mais penser comme Noah... Il en était capable.
- Jules... entonna-t-il d'une voix traînante, incertain.
- Jules Smith ! Ah oui ! s'exclama Holly d'un air ravi avant qu'il puisse aller plus loin. Je vous ai trouvé, votre cousin a pris la chambre, il est arrivé tout à l'heure, je m'en souviens. Chambre 215.
Le ventre noué, il referma mécanique le poing autour de la clé qu'elle lui tendait.
- Les escaliers sont par-là, indiqua-t-elle. Bon séjour chez Sorcellelit.
- Merci...
Avec empressement, il s'éloigna, un souffle coincé dans la poitrine. Il envoya un remerciement muet à Merlin et à tous les mages en mettant un pied sur la première marche de l'escalier et celui-ci s'anima tout seul vers les étages. La chance était vraiment de leur côté sur ce coup-là.
Les jambes encore lourdes, il arriva devant la chambre 215 et ouvrit la porte sans s'attarder. S'il croisait quelqu'un maintenant - même un client banal de l'hôtel - il était persuadé de faire une crise cardiaque tant son niveau de stress était haut. A peine le battant se referma-t-il dans son dos qu'il sentit un corps près de lui.
- Jules...
Il entrevit seulement des boucles noires avant d'ouvrir ses bras instinctivement et Noah entra en collision contre lui. Ils s'accrochèrent l'un à l'autre avec force.
- Mon surnom et le nom de famille le plus répandu d'Angleterre, t'as rien trouvé de mieux, souffla-t-il contre son cou. Et le coup du cousin. Merlin, t'es vraiment impossible...
- Quoi ? Jules Smith, ça te plaît pas ? rétorqua Noah dans un rire en resserrant sa prise autour de sa taille.
- On s'en fiche, je croyais que t'avais plus d'autorité que mon acte de naissance de toute façon.
Au souvenir de la phrase qu'il avait prononcé après la nuit où sa mère était revenue, Noah éclata de rire et s'écarta légèrement. Le souffle douloureux bloqué dans sa gorge s'échappa enfin et il se remit à sourire d'instinct en découvrant ses yeux bleus, son rictus effronté, sa nervosité mal dissimulé malgré tout...
- Hey Jules... murmura-t-il.
Julian sentit la pression se renforcer dans sa poitrine juste à ces mots.
- Hey... j'ai reçu ta lettre...
- Je vois ça... j'avais peur d'attendre toute la journée tout seul dans cette chambre d'hôtel. Ça aurait été gênant pour mon ego.
- Ah oui... je t'ai pas dit ? Je passais juste te dire que je pouvais pas rester, je dois aller voir Matthew. Du coup, je vais y aller...
Du pouce, il désigna la porte derrière lui et Noah plissa les yeux avant de le tirer plus amplement dans la chambre, l'éloignant de la sortie.
- Nope, déclara-t-il avec assurance. Aujourd'hui, c'est toi et moi, tant pis pour Bones. Il qu'à se trouver quelqu'un d'autre pour occuper ses vacances. Archibald, tiens.
- Il a deux ans !
- Alors ils s'entendront très bien.
- Noah...
Amusé, il s'esclaffa et se laissa guider jusqu'au lit où ils s'assirent sur le bord, face à face. Le cœur toujours un peu trop rapide, il prit le temps de détailler ce qui l'entourait. La pièce était une chambre d'hôtel standard, tout ce qu'il y avait de plus banal : moquette bleu-gris, bureau avec lumière de sort pour éclairer au-dessus, un grand lit, et une porte vers une salle de bain adjacente.
- Pas trop mal, apprécia-t-il.
- Ouais... j'ai pensé que ça serait mieux que notre dortoir pour une fois. Pas de risque que Liam débarque avec son appareil photo pour vendre une photo scandaleuse aux tabloïds.
- Ni de Wilde ou Enjolras à cause d'un manuel de potion oublié. Bonne idée. (Il se reconcentra sur Noah, habité par un sens de vivre quelque chose de presque irréel à être là tous les deux). Comment t'as fait pour venir ? Hilda a rien dit ?
Noah secoua la tête.
- Non, je lui ai juste dit que je voulais aller me balader mais pas au Village pour pas croiser Othilia au cas où. Elle a été étonnement... compréhensive.
- Oh...
Son estomac se contracta involontairement au nom d'Othilia et Noah lui renvoya un regard désolé sans s'excuser à voix haute. Il supposait qu'il n'avait pas à le faire après tout : la rupture, bien que complexe, avait été réelle. Sa tension dû tout de même être un peu trop évidente car Noah glissa sa main vers son genou jusqu'à venir l'envelopper doucement, mine de rien, et il ressentit un nouveau soubresaut à l'estomac, bien différent. Il veilla à ne pas baisser les yeux, comme si tout était normal et Noah s'aligna sur sa conduite avant de poursuivre, imperturbable :
- Je crois qu'elle m'imagine me morfondre avec le cœur brisé et que sortir me fera du bien... Alors je ne dis pas que tout ce qui s'est passé avec Othilia ne fait pas encore mal d'une certaine façon, mais en fait si je tourne en rond à la maison, c'est plus à cause de toi. Ça m'arrange juste de laisser Hilda croire ce qu'elle veut.
Il sentit un sourire étirer ses lèvres.
- A cause moi, hum ? releva-t-il.
- T'as lu ma lettre, non ? rétorqua Noah, défieur.
Il l'avait même encore dans sa poche, oui. Les mots « tu me manques » dansèrent dans son esprit et la chaleur de la main de Noah contre son genou irradia soudain tout le long de sa jambe.
- Ouais, je l'ai lu... Pas mal, les paroles de chansons. Ça change des Beatles.
- Déçu ?
- Non. J'aime bien celle-ci aussi.
Elle ne vaudrait jamais Hey Jude à ses yeux, mais il avait la sensation que ça serait le cas pour toutes les autres chansons qu'il entendrait pour le reste de sa vie. Il aurait voulu demander des précisions sur le sens des paroles malgré tout, sur le choix de Noah sur celles-ci en particulier pour être sûr qu'il ne s'était pas trompé sur leur interprétation, mais il reprit avant qu'il ne puisse le faire.
- Et toi ? Comment t'es venu ?
- Ca a été plus compliqué, admit Julian en grimaçant. A cause de Ronan toujours en cavale, tante Cordelia et ma mère sont un peu à cran pour nous laisser sortir, mais j'ai dit que j'allais retrouver Matthew à Boston en prenant le WASP. En vrai, je dois le retrouver que plus tard... On a plusieurs heures devant nous. Je me suis dit qu'une demi-vérité passerait mieux.
- Un demi-mensonge, tu veux dire.
Il haussa les épaules. Ça dépendait simplement de la perspective et Noah eut un léger sourire.
- Je déteins sur toi, Jules, ça va pas du tout.
- Ma mère m'a menti sur sa mort pendant un an, répliqua-t-il avec un peu de mordant que prévu. Je crois que j'ai gagné le droit de lui mentir sur qui je vais voir un après-midi.
Le sourire de Noah s'effaça et il regretta presque sa phrase. Presque parce qu'il la pensait trop pour la retenir.
- Je croyais que ça allait mieux... Entre vous, je veux dire ?
- Un peu, si, reconnut-il malgré tout. Hier, on s'est occupés d'Archibald avec Elizabeth, il a fait ses premiers dessins. Et c'était sympa, c'est vrai. On a dessiné ensemble tous les deux ensuite... Elle fait des efforts, je le vois.
Il disait la vérité. Au cours du semestre, il avait doucement réapprit à lui parler par lettres et même si le courant pouvait encore être tendu, ça n'avait rien à voir avec l'été dernier. Le début des vacances avait même été paisible, complice... C'est juste qu'il n'arrivait pas encore à surmonter totalement sa gêne par moments et il n'arrivait pas à le prévoir. Le souvenir de son enterrement ressurgissait particulièrement, tout comme les larmes de Lottie et l'air hagard de son père, et sa colère se rallumait alors d'un coup telle une étincelle prête à faire repartir un feu mourant. Il faudrait encore un peu de temps et aujourd'hui était un bon exemple car ça touchait à son secret ultime : il n'était pas prêt à partager Noah. Il aimait même cette idée de chambre d'hôtel, à l'abris des regards, loin du monde extérieur. Ne pas avoir ce poids sur les épaules était libérateur.
Son regard reparcourut la pièce, curieux d'observer leur rejuge une fois de plus, et Noah se râcla la gorge alors que sa main se mettait à tressauter contre son genou.
- Je sais que ça peut sembler... manquer de subtilité, lâcha-t-il avec retenue comme s'il craignait sa réaction. Mais c'est juste que c'est le seul lieu auquel j'ai pensé... Mais y'avait pas d'arrière-pensée, promis...
- Hum ?
Il mit une seconde à comprendre, perdu dans sa contemplation, puis un sourire lui monta aux lèvres.
- Un manque de subtilité, toi ? se moqua-t-il. Non, je ne vois pas pourquoi je t'accuserai de ça.
- C'est ça... Très drôle, Jules.
- Pardon. Sur une échelle de « c'est juste une expérience » à « je me glisse dans ton lit », la chambre d'hôtel se situe où ?
Noah rejeta la tête en arrière en poussant un soupir venu du fond de sa gorge et il sourit un peu plus, fier de lui. Sur son genou, la main de Noah s'était au moins décrispée. Il ne savait même pas s'il voulait qu'elle reste là ou qu'elle se mette à bouger...
- Je te laisse plus jamais parler avec Aileen, c'est décidé, décréta Noah. Pas si ça se retourne contre moi. Le sarcasme, c'est mon domaine.
- Mais pas ton monopole, répliqua-t-il.
Il reçut un vague regard amusé en retour.
- Sors pas de grands mots en espérant t'en sortir.
Le « fais-moi taire alors » était sur le bout de sa langue, mais il n'osa pas franchir le pas de peur de paraître trop cliché. Son corps vibrait juste d'une énergie nerveuse maintenant que Noah avait souligné « l'arrière-pensée » qui pouvait se cacher derrière ce lieu de retrouvailles et il ne savait pas vraiment comment lui faire comprendre que ça ne l'aurait justement pas dérangé s'il en avait eu une en l'amenant ici. Les rideaux de la chambre avaient même été tirés, renforçant l'idée de refuge coupé du monde, et ça n'aidait pas son cerveau à se concentrer.
- Plus de grande répartie ? lança Noah, goguenard. Ça y est ?
- Non...
Faute de mot, il vint déposer sa main sur la sienne, le cœur à nouveau un peu trop rapide pour quelqu'un simplement assis sur un lit. Il avait horriblement conscience de l'espace autour de lui, de la façon dont son geste était peu naturel, mais son envie était plus forte. Son envie de quoi, il n'aurait en revanche pas été capable d'exactement la mesure ni la définir.
Noah baissa les yeux sur leurs mains jointes, l'air surpris une seconde, mais il le laissa tracer du bout des doigts des lignes et des signes alambiqués qui lui arrachèrent un frisson. Il aimait l'idée de réussir à faire frissonner Noah pour une fois...
- Et c'est moi qui manque de subtilité ? articula ce dernier d'une voix rauque.
- Hum ?
Il joua l'innocent pour sauver la face une seconde, le visage brûlant, mais Noah se contenta de rire.
- C'est pas ce que tu voulais ? Dans le train ? lui rappela-t-il et Julian déglutit. T'avais dit que t'aurais aimé qu'on soit seuls, que personne puisse arriver sans prévenir...
- Oui, j'ai dit ça...
- Et alors ? Maintenant que c'est fait, tu ferais quoi ?
Noah haussa un sourcil, clairement dans l'attente de quelque chose tout en restant sur la retenu, comme s'il ne voulait pas dépasser une ligne invisible. C'était un jeu d'équilibriste pour tester ce que l'autre voulait, mais il sentit au moins la boule chauffée à blanc dans sa gorge fondre pour descendre dans son ventre. Visiblement, il avait réussi à se faire comprendre, même si ce n'était pas suffisant. Il fallait que ça vienne de lui.
- Bon au diable la subtilité, s'exaspéra-t-il, incapable de penser à une façon de formuler les idées qui tournaient trop vite dans sa tête.
Il lâcha la main de Noah pour la déposer entre eux sur le matelas et s'en servir comme levier. Penché en avant, il rompit la distance en une fraction de seconde, nerveux, mais Noah ne loupa pas le signal envoyé et inclina son visage vers lui. Ils avaient assez tourné autour du chaudron. Ça faisait même un an qu'ils tournaient autour. Alors dès que leur bouche se trouvèrent, ce fut... libérateur. Il ne trouva pas d'autre mot pour le décrire tant c'était vertigineux et, contrairement à toutes les autres fois où il n'avait jamais bien su quoi faire de ses mains, il leva celle de libre vers Noah pour venir la placer à la base de sa nuque. Ses doigts frôlèrent ses boucles et il se mit à sourire. C'était grisant.
- T'as raison, la subtilité c'est surfait, approuva Noah contre ses lèvres dans un murmure brûlant.
Sans cesser de l'embrasser, il se repositionna jusqu'à se redresser à moitié et ses mains vinrent à leur tour vers lui. Julian se laissa faire. Dans des gestes désordonnés, ils remontèrent sur le lit en se détachant et en se reconnectant en baisers empressés. Rien n'était précis et il sentit quelques fois leurs dents cogner, mais son esprit se vidait de toute pensée cohérente dès que la langue de Noah venait chercher la sienne, hésitante mais entreprenante.
En quelques secondes à peine - sans bien savoir comment - il se retrouva allongé sur le côté, face à Noah, la boule dans son ventre complètement évaporée. Il ne restait plus qu'un trouble attisé par chaque baiser, une envie qui ne cessait de battre en lui à coups sourds. Cette envie était familière, il l'avait ressenti à chaque fois que les choses s'étaient faites plus aventureuses avec Noah et même lorsqu'il avait été seul sous le couvert de l'obscurité, seul avec ses pensées.
Mais ici ? A l'abris des regards ? Tout était démultiplié. Le champ des possibles semblait s'étendre devant eux et son esprit s'embruma alors que les mains de Noah descendait de son visage vers son cou, puis son torse et sa taille. La seule fois où il avait été proche de cet état, ça avait été l'hiver dernier dans sa chambre au manoir quand tout le monde était parti à Central Park et que les lèvres de Noah avaient embrassé son cou avec avidité. D'un coup, toutes ses terminaisons nerveuses crièrent pour retrouver cette sensation et il fit appel à toute sa volonté pour s'écarter, haletant.
La main de Noah s'immobilisa au niveau de sa hanche, ferme et lourde au-dessus de son pull.
- Trop ? souffla-t-il.
C'était la même chose qu'il lui avait demandé cette fameuse fois-là aussi et ça ne fit que renforcer le parallèle. Le tiraillement sous sa peau se raffermit.
- Non...
- T'as pas l'air sûr ?
Il expira, habité par une chaleur confuse.
- Si, si... articula-t-il, les joues rouge.
- Sûr ? Parce que vraiment, on n'est pas obligés. Je sais que ça peut... paraître trop... Mais on arrête quand tu veux, on repart se balader, on reste là à parler, je m'en fiche.
Noah n'avait pas l'air de savoir décrire ce qu'ils étaient en train de faire autrement que par « trop » et il ne pouvait pas lui en vouloir. Lui aussi tout lui semblait être « trop » à cet instant, notamment sa respiration, son envie lancinante dans son bas-ventre, mais surtout la perspective vertigineuse de l'intimité entre eux. Il n'avait jamais bien réussi à s'y projeter avec Hanna et même si tout était différent - plus intense - avec Noah, il n'était pas sûr de savoir ce qu'il voulait vraiment, ni comment le communiquer, ni même comment tout ça devait se dérouler. Sa nervosité revint soudain en force. Avec Othilia, tout avait dû être plus simple, les rôles et les actions semblaient tellement plus définies entre une fille et un garçon...
- Désolé, s'excusa-t-il automatiquement. Je...
- De quoi ? rétorqua Noah avant même qu'il ne puisse élaborer.
- Je sais pas...
Mortifié, il tourna la tête pour lever les yeux vers le plafond, la poitrine comprimée.
- De pas savoir quoi faire ? tenta-t-il dans un filet de voix.
Il ne vit pas exactement la réaction de Noah, mais il l'entendit lâcher un rire étouffé et incrédule.
- Attends, parce que tu crois que je sais ? Morgane, je suis plus convaincant que je le croyais. Jules... au risque de briser ta vision parfaite de ma personne, j'en sais pas plus que toi.
- Mais avec Othilia... ?
- C'est pas la même chose. Oui, j'ai découvert... beaucoup avec elle, mais t'es pas Othilia. Il y a même une sacré différence entre vous, il me semble, mais je te ferai pas l'affront de l'énoncer. (Il appuya sa remarque d'un rictus). Donc non, Jules, je sais pas plus que toi ce que je suis en train de faire, pas totalement. Je sais juste que... j'en ai envie.
Les derniers mots, prononcés plus bas que les autres, l'électrisèrent. D'un coup, il cessa de fixer le plafond et détailla Noah profondément, allongé en travers du lit à côté de lui. Ils étaient si proches que leurs jambes se rencontraient et il avait horriblement conscience de chaque point de contact entre eux. Lui aussi en avait envie, c'était indéniable.
Soudain frappé par un sentiment paradoxal, il ne put retenir un rire étouffé, ses émotions en vrac à l'intérieur de lui. Noah haussa un sourcil.
- Quoi ? voulut-il savoir, amusé.
- Je sais pas. Je crois que... j'imaginais pas que tu puisses dire ça, c'est tout, admit-il en détournant à nouveau la tête, incapable de faire cet aveu à Noah en face. J'aimerais pouvoir envoyer une lettre dans le passé et dire au « moi » d'il y a un an qu'on en serait là maintenant.
- Oh...
Le sourire de Noah vacilla.
- Je sais... je suis désolé...
Il ne douta pas de sa sincérité. Une seconde, il faillit lui dire qu'il n'avait pas à l'être car c'était en partie vrai, mais il ne voulait pas non plus balayer toute la douleur que la situation impossible de l'année dernière avait provoqué chez lui. Une situation dont il avait été à moitié responsable aussi, mais Noah s'était toujours montré plus fuyant. Il n'oubliait pas combien les mots « je ne suis pas avec toi, pas plus que t'es avec moi ! » ou « c'est juste une expérience » avait pu faire mal.
- C'était pour ça, les paroles de la chanson ? souffla-t-il alors dans un éclair de réalisation. Pour ne plus lutter, ni mentir ?
Il avait retourné son attention vers Noah, désormais légèrement redressé avec sa tête soutenue par sa main. L'autre était toujours bien en place sur sa hanche et ne cessait de faire un petit mouvement de va-et-vient qui rendait sa concentration difficile.
- Ouais, quelque chose comme ça, acquiesça-t-il, sérieux. C'est une vieille chanson anglaise, ma mère m'a envoyé des vinyles à écouter. Je pense que c'est autant pour se faire pardonner de cet été que pour agacer Hilda, mais elle a rien dit. J'en ai écouté quelques-uns depuis le début des vacances et celle-ci... je sais pas, je m'y suis retrouvé.
- Ah ?
Noah hocha la tête.
- Hum... Ça parle de quelqu'un qui préfère être enfermé plutôt que d'écouter ce que disent les autres et de vivre sans amour. C'était un peu nous, en fait. Je l'ai compris cet été... je préfère qu'ils... viennent me chercher pour me foutre à l'asile plutôt que... de te perdre ou plutôt que de vivre toute ma vie avec dans un monde où... je peux pas t'aimer... C'est aussi simple que ça.
Julian inspira profondément. La voix de Noah avait flanché, hésitante, mais il était allé au bout et d'un coup il eut envie de pleurer sans comprendre comment s'était arrivé. Jamais au cours de toute sa vie il ne s'était senti aussi important et aimé qu'à cet instant. Peu importe qu'ils doivent se cacher pour se voir dans un hôtel aux rideaux tirés, Noah venait de faire exploser son cœur et tout se brouilla dans son esprit.
- Ca fait plusieurs fois que tu dis ça, murmura-t-il, la gorge serrée. Le mot « aimer »...
Encore une fois, la subtilité semblait ne plus faire partie de son vocabulaire. Il était trop à cran pour s'en soucier. Noah, lui, roula des yeux.
- Tu veux me l'entendre dire, c'est ça ? fit-il en se penchant au-dessus de lui, son visage suspendu au-dessus du sien. J'ai été long à l'admettre, je sais... Fuir les choses, c'est ma spécialité, mais Jules... (Il déglutit, marquant une pause avant de reprendre, solennel). J'ai plus envie de fuir, je te l'ai dit. Et c'est même plus une question à ce stade. Je peux te le dire, je t'aime. Je peux te le dire mille fois même, si c'est ce que tu veux entendre parce que ça sera vrai à chaque fois... Et oui, ça me terrifie, mais je sais même plus ce que ça fait de ne pas t'aimer. Je suis amoureux de toi, bon sang.
Il avait cru il y a quelques secondes que Noah ne pourrait pas faire plus exploser son cœur qu'il ne l'avait déjà fait. Evidemment, il aurait dû savoir que Noah aimait jouer avec les limites, il aimait même les dépasser. Et là... ? Merlin, là, elles étaient toutes franchies sans ambiguïté. C'était ce que Noah venait de lui offrir : un monde sans ambiguïté, simplement une vérité qui le laissa le souffle court, plus heureux qu'il avait jamais espéré l'être le jour où il avait croisé ce regard bleu pour la première fois, il y a une éternité dans le train qui le menait vers Ilvermorny et sa nouvelle vie.
Pour la énième fois, il se retrouva incapable de s'empêcher de sourire. D'une certaine manière, ça aurait dû le terrifier lui aussi, mais ce n'était pas le cas. Non, pour la première fois depuis le début de toute son histoire avec Noah, il se refusait à avoir peur, pas dans un moment comme ça. Pas à cause d'une déclaration pareille.
Parce qu'à cet instant, rien n'était plus important que leur corps pressé ensemble et il eut la sensation qu'il arrêterait juste d'exister si Noah cessait de le regarder exactement de la façon dont il le regardait là tout de suite.
Alors il ne chercha plus à réfléchir. Mû par l'émotion logée partout dans son corps, il tendit la main pour la replacer sur la nuque de Noah et l'attira contre lui. Emporté par l'élan, ils rentrèrent en collision comme deux astres brûlants dans le ciel, incapables de lutter contre la gravité naturelle qui s'exerçait autour d'eux. A l'image de toute la relation depuis le début - depuis le regard sur le haut du balcon dans le hall ; depuis le « je sais » et « j'ai cru comprendre » à leurs présentations l'un à l'autre ; depuis leur premier baiser dans un monde sous-terrain ; depuis l'ultimatum ; depuis le « hey Jules » - ils ne pouvaient pas se détacher l'un de l'autre. Et tout céda.
Le gémissement qui s'échappa de sa gorge fut étouffé par les lèvres de Noah, chaudes et demandeuses contre les siennes. Seulement, il avait envie de plus et même s'il ne savait toujours pas comment l'exprimer, il pouvait se faire comprendre. Il brisa le baiser, grisé, puis bascula la tête vers l'arrière pour lui donner un meilleur accès à son cou. Noah n'eut aucun mal à saisir le message. Exactement comme l'hiver dernier, il vint y déposer sa bouche, laissant le long de sa peau jusqu'à sa clavicule une ligne de feu humide qui fit vriller tout son esprit. A chaque baiser, il faisait jouer sa langue, venait mordiller, le rendant supersensible à chacun de ses frôlements et gestes plus appuyés entre leur corps. Leur hanche notamment ne cessait de se rencontrer et il crispa ses doigts entre les boucles de Noah, en ébullition.
Il ne savait pas s'il voulait que les choses aillent plus vite ou plus lentement, les deux auraient sûrement été nécessaires selon la partie de lui qu'il écoutait, mais une chose était certaine : il avait besoin de le sentir encore plus proche. Profitant d'un instant où Noah reprenait son souffle, il le repoussa doucement jusqu'à réussir à se redresser sur ses coudes et une de ses mains s'infiltra sous son t-shirt pour le relever de quelques centimètres. Sous sa main, il sentit le ventre de Noah se contracter et un souffle haché tomba de ses lèvres.
- Jules...
- Qui porte un t-shirt alors qu'il neige à New-York ? lança-t-il sans réfléchir.
C'était visiblement la dernière chose à laquelle Noah s'attendait car il cilla, surpris, avant d'éclater de rire.
- C'est tout ce que t'as à dire ? rétorqua-t-il. Commenter ma tenue ?
- Non, t'as raison. T'as qu'à l'enlever, comme ça on en parle plus.
A peine prononça-t-il les mots qu'il fut fier de lui d'avoir trouvé une répartie pareille pour une fois et Noah sourit un peu plus en secouant la tête.
- C'est officiel, je déteins trop sur toi, trancha-t-il.
Ça ne l'empêcha pas de passer son t-shirt par-dessus sa tête et Julian expira, étourdi. Il arrivait à peine à croire que ça ait fonctionné mais Noah se repositionna au-dessus de lui et toutes ses pensées le quittèrent une fois de plus. Alors qu'ils s'embrassaient à nouveau, plus lentement cette fois, il prit le temps d'analyser la sensation. Agréable, intime, humide, désordonné, excitant. Dans le même temps, il laissa courir ses mains partout où elles pouvaient aller sans oser les faire descendre trop bas et il adora arracher chaque frisson à Noah dès qu'il le sentait sur sa peau nue.
Désormais, il avait définitivement trop chaud et l'inconfort commença à le gagner au bout de quelques minutes. Entre le couvre-lit sous lui et son pantalon qui l'enfermait un peu trop, il avait besoin de se libérer lui aussi. Ses baisers devaient devenir un peu trop relâchés car Noah sentit le changement et, avant qu'il ne puisse se justifier, il sentit son pull commencer à se remonter sur son ventre. Avant même de comprendre vraiment l'idée, son corps agit et il leva les bras en se creusant le dos pour que Noah puisse le lui enlever. Ils durent s'y reprendre à trois fois en riant en même temps, mais le vêtement finit par céder.
- Tu vois, le t-shirt c'était plus simple, se vanta-t-il en l'envoyant au pied du lit sans cérémonie.
- J'y repenserai quand la neige aura fondu.
- C'est ça, Jules, un vrai expert météo.
Amusé, il laissa échapper le rire qui monta dans sa gorge comme des bulles de champagne. A bien y regarder, il avait l'impression d'être un peu enivré dans le sens premier du terme, comme si tout ce qui se passait lui faisait tourner la tête. Dans son bas-ventre, le tiraillement se fit plus fort que jamais et quand Noah commença à se rallonger sur lui, il le guida sur le côté dans leur position initiale, face à face. Il avait peut-être besoin de mettre un tout petit peu de distance.
Le rythme reprit plus doucement : Noah s'adapta sans rien dire, le laissant maître des choses, et ils réduisirent les baisers pour se laisser le temps d'explorer l'autre d'avantage. Un jeu long et exaltant commença alors : leurs mains parcoururent le corps de l'autre, traçant des formes invisibles du bout de leur doigt, s'attardant aux endroits qui arrachaient des soupirs ou des gémissements... Noah caressa son torse et son ventre et en réponse sa respiration se détraqua un peu plus alors que ses mains à lui passaient dans son dos jusqu'à ses reins. A nouveau, il stoppa sa course avant de passer la frontière tacite qu'aucun d'eux n'avait l'air de vouloir franchir avant l'autre.
Il en devint petit à petit frustré. Entre ses jambes, le désir s'était fait plus pressant, mais il voyait bien ce qui retenait Noah : il ne ferait rien de plus explicite sans qu'il entame lui-même quelque chose. Sa nervosité revint en arrière-fond, lancinante mais moins forte que tout à l'heure. L'exploration de leurs mains l'avait libéré d'une certaine réserve et il sentait sa détermination se battre avec sa peur de mal faire. Il était toujours en train de débattre avec ses sensations quand Noah remonta sa main droite le long de son flanc, de son torse, puis de son cou pour y revenir caresser le creux de sa gorge du pouce, là même où il l'avait embrassé intensément il y a presque une heure. Trop pris par son esprit, le plaisir qui le traversa le prit presque par surprise et un gémissement rauque s'échappa de ses lèvres.
C'était assez, ils avaient trop joué. Le visage à moitié enfoui contre l'oreiller de l'hôtel, il se jeta dans le vide et sa main descendit enfin un peu plus bas, passant la bordure du pantalon en toile que Noah avait mis pour se fondre dans le monde Non-Maj' de New York, loin du Village. Un énième rappel qu'ils étaient seuls pour une fois, sans personne pour les juger.
- Bon sang, Jules...
Ca aurait dû être interdit. Personne ne pouvait prononcer son prénom de cette façon et son bas-ventre tirailla un peu plus immédiatement alors qu'il sentait pour la première fois sous la paume de sa main le désir de Noah pour lui. Seul une couche de vêtement faisait barrière, mais ça n'avait plus beaucoup d'importance à ce stade et il reprit son exploration, exactement comme il l'avait fait un peu plus tôt pour chaque parcelle du corps de Noah. Il y avait un côté presque surréaliste à être si proche de lui dans tous les sens du terme et il resta attentif à chaque réaction que Noah laissait transparaître, ajustant maladroitement ses gestes en fonction. Ça fonctionnait plutôt bien s'il en croyait les bruits qui échappaient à Noah et la litanie de « Jules » à chaque fois qu'il osait plus franchement laisser libre court à ses mouvements. Il ne pouvait plus avoir aucun doute sur son désir. Les mains de Noah s'étaient d'ailleurs immobilisées, signe qu'il n'arrivait plus vraiment à réfléchir. Il en tira une fois encore une certaine fierté.
Le moment était sûrement mal choisi, mais il aurait presque aimé le dessiner à cet instant, saisir son regard brumeux, ses boucles désordonnées, son corps tendu... Toutes les couleurs se mêlaient, aspiré par Noah devenu le point focal de toute son attention et jamais il ne lui parut aussi saisissant.
Ça avait été sa première réflexion à son sujet. Noah était saisissant dans son attitude, dans son regard prêt à défier le monde, mais rien n'en était plus la preuve aujourd'hui que cette action d'hurler à la face de tous : « emprisonnez-moi si vous voulez, je ne vivrai pas dans un monde sans amour ». Il comprit plus que jamais les paroles de la chanson. En ayant vécu ce qu'ils étaient en train de vivre, il savait qu'il ne pourrait plus jamais y renoncer : il avait tout donné à Noah. Son cœur, ses états d'âme et son corps.
Pris par cette réalisation, il fit à nouveau ralentir le rythme pour souffler légèrement. Noah ne protesta pas quand il remonta sa main et ils se remirent à s'embrasser, goûtant tout le temps devant eux.
- Ça va ? murmura Noah malgré tout après quelques minutes.
- Hum...
Il avait du mal à former une pensée cohérente pour aligner une phrase. Au lieu de ça, il se rapprocha plutôt et enfouit son visage contre Noah, mû par le désir de le sentir proche. Aussitôt, celui-ci passa un bras en travers de son corps. Ils restèrent à nouveau de longues minutes dans cette position et il sentit enfin son rythme cardiaque ralentir un peu. Dans son bas-ventre, son désir était toujours là, alimenté par la caresse du bout des doigts de Noah le long de sa colonne vertébrale, mais il avait besoin de ce temps pour eux. Il réalisa seulement à ce moment-là qu'il n'avait pas répondu à sa déclaration, pas par de mots en tout cas, et il les fit jouer dans sa tête plusieurs fois... Ça aurait été l'instant parfait pour les exprimer lui aussi, ces trois petits mots au sens tellement symbolique, mais quelque chose le retenait encore. Le fantôme de la douleur de l'année dernière sans doute, la peur de s'élancer encore une fois dans le vide après l'avoir fait il y a seulement quelques heures.
Il tentait de démêler les dizaines de pensées contradictoires qui l'assaillaient lorsque, brusquement, deux coups secs résonnèrent à travers la chambre. Il manqua de sursauter, paniqué, et Noah se tendit contre lui, alerte.
- C'est à la porte... ?
Ils se redressèrent à demi d'un même mouvement. Deux nouveaux coups furent portés au battant - c'était indéniable cette fois-ci - et une voix s'éleva soudain par-dessus. Une voix horriblement familière qui le glaça d'effroi : Leonidas.
- Julian ? appela-t-il derrière la porte. Ouvre, allez !
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*Sors un oeil prudent* C'est bon tout le monde est encore en vie ? Je vous ai pas perdu ? Vous hyperventilez de stress ?
Comment vous dire que ça a été un de mes chapitres préférés à écrire haha ? On se demande pourquoi ! Vraiment, je l'avais en tête depuis le début du tome 1, elle m'est très vite venue. D'ailleurs, pour les plus attentifs d'entre vous, j'y avais fait référence dans une des partie du bonus Cendres et Lumières avec Julian et Noah adulte mouhaha !
Bon sinon, petit debrief. La chanson pour commencer. Je l'adore - sûrement parce qu'elle a été écrite par Paul McCartney (oui on s'éloigne des Beatles, mais pas vraiment en fait - et les paroles m'ont toujours fait penser au Nolian, à un hymne qui déclare qu'ils refusent de vivre dans un monde de solitude sans amour. Pour moi, cette chanson est autant leur hymne que Hey Jude en somme. Je vous la mets juste en dessous si vous voulez l'écouter ou relire le chapitre avec la musique ^^
Ensuite, la scène un peu sexy haha ! Bon, rien de très explicite non plus mai on passe une étape et ça me tenait à coeur de le montrer. La relation du Nolian passe beaucoup par le physique - la découverte de l'autre, se tenir souvent la main, se toucher, voler un contact par-ci par-là - et ça me semble tellement vital pour un couple à qui on interdit d'être ensemble. Il y a un manque qui se créer et la barrière peut vite tomber quand ils sont enfin seuls. Après évidemment, il y a toute la maladresse des premières fois et ça m'amuse beaucoup de les décrire.
Et puis surtout... Ca nous a mené au premier "je t'aime" everybody !!! On applaudit Noah-C'est-Une-Expérience-Douzebranches pour ce revirement. En vrai, j'espère que ça ne vous a pas paru trop brusque, mais pour moi ça correspond tellement à Noah : être dans l'extrême. Il a une peur profonde de l'abandon, mais dès qu'il la dépasse, Noah est profondément entier; là où Julian reste encore sur la réserve.
Quant au cliffhanger de fin... Et bien il faudra attendre deux semaines mouhaha! Allez, ça va passer vite ^^ Je vous laisse patienter avec les memes de Lina.
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