Chapitre 21 - La jumelle & La jumelle
— Non, non, non, cria Aldea , sa voix vrillée d'aigus. C'est impossible !
La jeune reine recula, le regard rivé au mur de marbre terni par le sang des malheureux morts à ses pieds, comme s'il risquait de la mordre. Une idée presque moins incongrue que l'ombre qui s'y trémoussait, poissant sa surface en une nappe d'huile frémissante, et dont les mouvements ne se souciaient aucunement de l'orientation des torches en surplomb.
— Vos petites illusions ne fonctionnent pas ! cria-t-elle. Qui que vous soyez, cessez votre mascarade, et montrez-vous !
Aldea parcourut du regard le cul de basse-fosse au fond duquel elle avait échoué. La lumière démultipliait les silhouettes brisées des cadavres, telle une armée prête à lui sauter à la gorge. Mais aussi oppressante que soit cette impression, aucune de leurs ombres ne bougeait de façon si... vivante que celle qui s'adressait à elle.
— Je peux difficilement me montrer plus que ça, dit l'illusion. Et de par ma nature, je suis navrée, mais je ne peux me mettre à nue.
La voix ne semblait par émaner de la silhouette obscure, du moins, pas de l'endroit ou une bouche aurait dû percer son « visage ». Elle s'écoulait dans l'oreille de la jeune reine, comme une connivence. Toujours dans son dos, où qu'elle se tourne.
— Je me suis cogné le crâne, marmonna-t-elle, une main pressée contre sa tempe à la recherche d'un hématome. Ça a dû m'amocher. Je vois des choses qui ne sont pas là.
À cette pensée, elle se figea. Pourquoi cherchait-elle des explications si compliquées ? On l'avait pourtant prévenu à mainte reprise. Tout cela n'est qu'une illusion causée par le voile. Cette soudaine réalisation balaya la peur qui menaçait de la submerger.
Elle avait failli se faire avoir !
Ce qui aurait dû être son ombre plaça ses poings sur ses hanches en une attitude vexée dont la familiarité cailla Aldea jusqu'à la moelle.
— Ca pour t'être cognée, tu t'es cognée. Mais non, je ne suis pas le fruit de ton imagination, et encore moins un effet du voile. Du moins, pas tout à fait.
— Mais c'est impossible, plaida Aldéa. Tu ne peux pas être...
— Vivante ? As-tu décidé de radoter maintenant ? Je vais finir par croire que j'ai bâclé ta remise sur pied
Le voile essaie de te piéger, le voile te trompe, psalmodia intérieurement la jeune reine. Ne l'écoute pas, ne crois rien de ce que tu vois.
L'ombre poussa un long soupir. Par le Dieu-Double, cette attitude lui rappelait quelque chose, mais quoi ? Réfléchis !
— Que puis-je faire pour que tu acceptes de me croire ? demanda la chose.
Aldea sentit dans son corps, plus que dans la voix de l'ombre, un soupçon de tristesse. Elle ignora sa question ; elle ne comptait pas donner au voile les munitions qui lui permettraient de mieux la tromper.
La jeune reine ne savait pas si elle pouvait distancer la chose sur le mur, d'autant plus qu'elle semblait émaner d'elle-même, attachée à l'ombre qui partait de ses pieds. Mais l'idée de rester proche de la tâche palpitante lui barbouillait le bide. Elle fit un pas en arrière, puis un autre.
Son pied accrocha un bras décharné qui dépassait d'une pile de corps. Elle tomba en arrière. Avant que le moindre cri ne puisse s'extirper de sa gorge, des filaments sombres s'extirpèrent de la silhouette projetée sur le mur, ondulèrent sur les cadavres, remontèrent le long de sa jambe, et s'enroulèrent comme des serpents autour de ses hanches.
Sa chute stoppa nette.
— Crois-tu qu'une simple illusion soit capable d'un tel prodige ? susurra l'ombre.
La chose la maintenait en équilibre précaire, inclinée en arrière, comme retenue contre un pan de vide. Aucune tromperie visuelle ne pouvait exercer la pression que la jeune reine sentait autour de sa taille. À moins que tout ce qu'elle avait vécu depuis son réveil après sa chute normalement mortelle ne fasse partie de la tromperie ? Oui ! Voilà une explication qui se tenait ! Sans ça, cela signifiait que cette... cette chose, la parasitait, physiquement et mentalement.
L'ombre lâcha un nouveau soupir.
— Je vais finir par croire que Sybill disait vrai, notre ingratitude ne connait pas de bornes. Un parasite vit aux dépens de son hôte, un parasite le diminue. Ce qui nous arrive est plus que ça, c'est même bien plus qu'une symbiose.
— Re... relâchez-moi, bafouilla Aldea. Tout de suite.
— Si j'étais facétieuse, je te prendrais aux mots et te laisserait terminer ta glissade jusqu'en bas du tas de cadavres.
L'ombre serpenta du torse jusqu'au bras de la jeune reine et, d'une légère traction, la ramena sur la terre ferme – du moins, le charnier ferme. Puis elle remonta le long de ses épaules, glissa sur son cou avant de réchauffer sa joue. Il émanait de ce touché une tendresse qu'Aldea n'avait pas ressentie depuis... la mort de Père. Cela lui rappelait les moments ou, toute jeune, il l'installait sur ses genoux après ses séances de jugement, et la berçait en lui narrant les exploits de ses ancêtres.
Après tout ce temps passé à être malmené, insultée, traité comme un vulgaire bout de chair dont on se contentait de disputer la valeur pécuniaire, la douceur aimante de ce toucher ravivait un manque profond.
— Nous avions de si beaux cheveux, dit l'ombre, son toucher réchauffant le crâne lisse de la jeune reine. Quel gâchis. Mais tu n'as plus rien à craindre maintenant. Je ne laisserais personne te faire de mal.
Aldea chassa ses larmes d'un mouvement rageur de l'avant-bras.
— Qui êtes-vous à la fin ?
— Tu le sais, bien que tu persistes à le nier de toutes tes forces
Les propos de la chose parcoururent l'échine de la jeune reine comme un frisson. Elle disait vrai. Son cerveau la détournait de la réalisation qui orbitait en périphérie de sa conscience, comme pour la protéger. Mais la protéger de quoi ? Mère avait raison sur un point : elle ne pouvait espérer être une bonne reine si elle fuyait les vérités douloureuses. Et puis, le mensonge est un bien piètre bouclier.
Aldea repoussa ses appréhensions, et se força à étudier les éléments à sa disposition. Dès ses premiers mots, l'ombre lui avait évoqué un sentiment familier. Que ce soit son timbre, ses intonations, certaines de ses attitudes, ou même son rire, tout baignait dans une puissante nostalgie.
Par le Dieu-Double...
Une fois ces éléments mis bout et bout, et si elle omettait l'impossibilité profonde qui en résultait, l'ombre ne pouvait être qu'une seule personne.
— Vous êtes... moi ? demanda Aldea, plus par principe que pour entendre une réponse qui ne faisait plus de doute.
— Exactement, tonna l'ombre avec la fierté du professeur qui vient d'enseigner une leçon difficile. Je suis toi, et tu es moi. Et en même temps, nous ne sommes ni l'une ni l'autre.
Son ombre la gratifia d'une légère pression contre la joue. Un étrange calme nimba la jeune reine. Bien que cette révélation lui apparaissait plus tortueuse qu'un compromis de vente entre usuriers, elle recelait une part rassurante. Les évènements avaient érodé sa confiance aux autres, mais l'ombre n'était pas une autre. Si elle disait vrai, et il semblait difficile de nier les échos familiers qu'elle éveillait, alors, elle n'avait pas à la craindre.
Les caresses tendres cessèrent. Les filaments sombres se résorbèrent dans la silhouette projetée au mur avec la vivacité d'une corde à violon qui lâche.
— Comment est-ce possible ? demanda Aldea. Une ombre n'est qu'une absence de lumière. Elle n'a même pas d'existence propre, et encore moins de conscience.
Un long silence enveloppa la jeune reine. Elle pouvait presque sentir l'« autre » réfléchir.
— Je ne suis pas certaine de le comprendre moi-même, répondit finalement celle-ci.
— Comment pouvez-vous en savoir autant sur ce que vous avez appelé « éveil » dans ce cas ?
— Tu peux te tutoyer, tu sais, dit l'ombre avant de se plonger dans un nouveau long silence. C'est comme si je l'avais toujours sût. C'est compliqué à expliquer, mais j'ai toujours été là, en parallèle de toi. (La silhouette se mit à faire les cent pas, glissant de gauche à droite sur le mur, comme Aldea en avait l'habitude lorsqu'elle répétait ses leçons.) Imagine un miroir. J'étais en quelque sorte un reflet, incapable de communiquer avec la personne qui s'y admire. Bien sur, je n'avais pas conscience de ce lien entre nous, pas vraiment. Je n'ai commencé à percevoir que quelque chose clochait qu'au moment ou tu t'es aventurée dans les caves. J'ai alors compris l'horreur de vivre tout à la fois séparément, et irrémédiablement lié à ma moitié.
— Vous avez... Enfin tu... (Aldea marqua une pause. Après tant d'années à respecter l'étiquette, le tutoiement lui laissait une impression d'insulte.) Tu as parlé du voile, c'est un de ses effets ?
— Pourquoi crois-tu que les gens y deviennent fous ? Plus tu descendais, et plus la distance qui séparait nos existences s'amenuisait. Mais ce rapprochement ne suffisait pas à nous réunir. Comme je te l'ai dit, sans la vengeance qui t'anime, qui nous anime, je n'aurai jamais pu percer le voile. Ta volonté a agi comme un phare qui m'a guidé jusqu'à ton plan d'existence. Sans cela, jamais nous ne serions enfin entières.
Ces explications alambiquées faisaient étrangement sens, comme les dernières pièces d'un puzzle complexe qu'Aldea ignorait avoir cherché à achever. Pourtant, elle ne pouvait se départir d'une idée angoissante. Et si le fait que les ombres vivent séparément de leur moitié, qu'elles ne soient jamais censées se réunir, était en réalité une bénédiction, voir une nécessité ?
— Dans ce cas, pourquoi l'humanité est elle si diminuée ? demanda son ombre.
— Cesse de lire mon esprit ! s'insurgea la jeune reine.
— J'aimerais pouvoir. C'est épuisant de s'entendre en double.
— Prêtends au moins ne pas m'écouter dans ce cas. Et pour ta gouverne, non, l'humanité n'est pas diminuée !
— En tant que reine de la Tour, toi plus que quiconque devrait savoir que c'est faux. Ne t'es-tu jamais demandé pourquoi les dernières générations se contentent de vivre en parasite, dans des ruines créées par d'autres, au lieu de bâtir leur propre chef-d'œuvre ? Pourquoi aucune création de l'histoire humaine récente n'arrive à la cheville des cités-monuments ?
— Parce que nous sommes des humains, et non des Dieux, s'écria Aldea incapable de masquer sa vexation. Comment peux-tu nous reprocher de ne pas arriver à la cheville de la création divine du Dieu-Double lui-même ?
Une vague d'hilarité secoua l'ombre dont les contours se gondolèrent en rythme.
— Pourquoi es-tu si certaine que le Dieu-Double est bel et bien un dieu ? Parce qu'il a accompli quelque chose dont tu te sens incapable ? As-tu une si piètre opinion de l'humanité pour n'avoir jamais envisagé que ce fameux Dieu-Double n'ait été qu'un humain ? Un humain éveillé dont les deux profils symboliseraient la part de chair et d'ombre ?
L'avalanche de questions frappa la conscience de la jeune reine avec la violence d'un passage à tabac. Elles faisaient bien trop sens, et malmenaient sa perception du monde au point du tournis
— Co... comment peux-tu savoir tout cela, si tu es moi ? demanda-t-elle entre deux respirations difficiles. Tu ne devrais pas en connaitre plus.. ce n'est pas... possible.
Son propre rire résonna en écho dans son crâne.
— Je n'ai aucune certitude. Et je dispose des mêmes informations que toi. J'ai juste plus de recul, et surtout, moins de scrupule à me laisser porter jusqu'à leurs conclusions. Même après t'être vautré au plus sale de sa fange, tu idolâtres toujours la Tour, et tu te raccroches tellement aux enseignements et aux traditions que tu en oublies de réellement voir ce qui est juste sous tes yeux.
Par le Dieu-D.. Rhâ bon sang ! Son ombre avait la sale manie de taper bien trop juste, et Aldea détestait être prise de court dans une joute verbale. Un détail la chiffonnait malgré tout.
— Cela n'explique pas pourquoi tu sais ce que me veut le primat Daelus.
— Je ne le sais pas, répondit l'ombre sans se laisser démonter. Mais réfléchis un peu. Ne trouves-tu pas que ses propos font parfaitement sens à l'aune de notre éveil ? Sinon, pour quelle raison nous envoyer à une mort assurée dans les caves ? Il devait savoir que tu avais la capacité d'accomplir ce miracle.
— Mais qu'a-t-il à gagner avec notre éveil ? Les bénéfices de me livrer à ma traitresse de sœur sont bien plus évidents.
— Aucune idée. Que dirais-tu de le traquer afin de lui poser la question directement ?
Aldea leva les yeux vers le noyau de l'escalier en colimaçon. La spirale régulière des rambardes donnait l'impression de vriller doucement, comme pour lui coller le tournis. Malgré son envie d'avoir une discussion entre quatre yeux avec cette enflure de Primat – juste avant de lui caler une longueur d'acier dans les boyaux – il lui faudrait surmonter une avalanche d'épreuves dont le poids paraissait bien écrasant pour ses maigres épaules.
— Comment comptes tu accomplir ce miracle ? demanda-t-elle une fois arrachée à sa contemplation. Avant même d'espérer échapper aux caves, nous devons sortir de la Gueule.
— Oh, ça ? C'est la partie la plus facile.
— Vraiment ? Comment ?
— De par ma nature, je perçois le plan des ombres. C'est de là que proviennent les brèches. Elles existent partout de par le monde tu sais ? Si elles sont dangereuses ici, c'est uniquement parce que le voile rapproche la frontière des ombres et du vivant.
À ces mots, elle fila au bas mur, et zigzagua entre les tas cadavres.
— Suis-moi.
Aldea n'hésita qu'un battement de cœur. Elle n'avait aucune envie de rester les pieds dans ce charnier. D'un pas presque assuré, elle suivit le chemin sombre tracé par son « autre moi » jusqu'à un amoncellement particulièrement haut. Celui-ci atteignait presque un linteau qu'Aldea reconnut aussitôt comme l'ouverture donnant sur l'escalier en colimaçon. L'ombre l'avait déjà escaladé.
Seul problème, si elle voulait faire de même , elle allait devoir y mettre les mains.
Le nez froncé, la jeune reine tâtonna à la recherche d'une prise qui ne lui donnait pas envie de vider ses tripes. Mais entre les membres décharnés pointant à des angles incongrus, les visages momifiés sur des expressions d'horreur, et le suintement noir qui s'écoulait tel du pus entre les corps, autant chercher un diamant au fond de latrines.
Aldea cessa ses explorations morbides. Idiote ! Il y avait bien plus simple.
— Est-ce que tu peux m'aider ? demanda-t-elle. À grimper ?
Une vague de satisfaction la saisit. Un filament d'ombre rebroussa chemin pour s'enrouler autour de son bras. Comme tracté par une corde intangible, Aldea n'eut alors plus qu'à se soucier de l'endroit ou poser ses chausses.
Une fois de l'autre côté, elle dévala une courte pente. Aidé par l'ombre, cela s'avéra un jeu d'enfant.
— Je pourrais m'y habituer, dit-elle, ravie de quitter cette crypte improvisée.
— N'en profite pas trop, répondit l'ombre. Je suis une reine tout de même.
L'hilarité de son autre moi l'emplit intérieurement. Aldea ne tint qu'un court instant avant de rire à son tour, en longs éclats francs qui lui firent mal au ventre.
Lorsque le silence morbide reprit ses droits, la jeune reine se sentit plus légère. Cet instant de connivence avait lavé une partie de ses tensions. Oui, vraiment, elle pourrait s'habituer à cette situation.
— Nous avons de la route, dit l'ombre une fois le calme retrouvé. Ne trainons pas.
Sa silhouette noire s'étirait sur une dizaine de pas devant la jeune reine. Elle se tordait à mi-parcours, comme pour contourner du vide. Aldea comprit l'implication de ce détour. Lorsqu'elle passa à côté de l'emplacement de ce qu'elle soupçonnait être une brèche, l'impression étrange ressentie lors de la descente lui titilla les boyaux.
Oui ! Parfait ! Tant qu'elle marcherait sur les traces de son autre, rien ne pourrait lui arriver.
C'est ainsi que, guidée par son ombre, Aldea entama la longue remontée hors de la Gueule. Maintenant qu'elle ne devait plus effectuer sa lente manœuvre d'éclaireur, elle progressait à un très bon rythme. Seules les ouvertures donnant sur les étages la forçaient à ralentir, tous les sens aux aguets. C'est de là qu'avaient surgi les moelles... et leurs horribles morsures. Elle ne comptait pas se laisser surprendre.
— Tu n'as rien à craindre d'elles, tenta de la rassurer son ombre.
— Comment peux-tu en être sur ? Elles ont bien failli me tuer.
— Elles sont attirées par le vide. Maintenant que nous sommes complètes, tu ne les intéresses plus. Du moins, j'espère.
— Tu n'es pas très rassurante.
— Tu sais donc quel aspect de ta personne améliorer dans ce cas, ricana l'ombre.
Malgré les explications de l'Ombre, Aldéa ne relâcha pas son attention. Cela ne l'empêchait pas de marcher bon train. La fatigue qui avait rendu la descente dans la Gueule pénible était quasiment absente. Elle débordait de vitalité, et contenait à grand-peine l'envie de presser encore plus le pas.
— Est-ce que tu sais de combien d'étages est faite la Gueule ? s'enquit-elle après plusieurs heures de marche monotone.
— Je dirais une cinquantaine environ. Nous approchons des dix derniers.
Déjà ? Aldea sentit un sourire étirer ses traits. Peut-être que les épreuves qui l'attendaient n'étaient pas si insurmontables.
— Ne te réjouit pas trop vite, dit l'ombre.
Avant que la jeune reine ne puisse demander pourquoi, elle entendit plusieurs éclats de voix. Un homme au timbre moqueur répondait à celui sec d'une femme.
Le limier et la baiseuse ! Pas de doute possible.
D'instinct, Aldea franchit la dizaine de pas qui la séparaient de la rambarde, et s'accroupit derrière. Merde ! Elle espérait avoir fait assez vite. Si le groupe d'arpenteurs se trouvait un peu plus haut, ils n'auraient aucun mal à l'apercevoir depuis l'autre côté du colimaçon.
— Qu'est-ce qu'on fait, murmura-t-elle ?
— Que dirais-tu de te venger ?
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