Chapitre 28. Cage brisée

Elara

Je suis effondrée...
Assise sur le sol de ma chambre, je serre mes genoux contre ma poitrine, tremblant de tout mon être.
Les sanglots me secouent, irrépressibles, et ma respiration est hachée, douloureuse.

Mes pensées tournent en boucle, emportées par un tourbillon de rage et de tristesse.

Kael.

Il était là, maladroit, râleur, et pourtant... Il commençait à occuper une place, un espace que je pensais vide jusqu’à maintenant.

Ces derniers jours, il s’était dévoilé, même un peu confié. Ses remarques cinglantes avaient laissé place à des gestes protecteurs, des regards presque... doux.
Et moi, stupide que je suis, j’ai baissé ma garde. J’ai commencé à croire qu’il resterait.

Mais maintenant, il est peut-être en prison...

Je jette un regard tremblant au bijou dans ma main. Ce pendentif est si important pour lui qu'il a risqué tout ceci...

Une vague de désespoir me submerge à nouveau.
« Kael... »
Je murmure son nom, comme si cela suffisait à le faire revenir, à effacer l’injustice de cette situation.
Comment a-t-il pu finir ainsi ? Comment Jordan, le simple assistant de mon père, a-t-il pu lui faire ça ?

Je ne comprends pas.

Jordan... L’idée qu’il m'ait vue avec Kael dans mon lit me donne envie de hurler.
Il était censé travailler pour protéger notre famille, pas pour livrer quelqu’un comme un criminel.
Quel genre d’homme fait ça ?
Et pourquoi ?

Un bruit sourd me tire brusquement de mes pensées. Je relève la tête, essuyant mes joues d’un revers de manche. La porte s’ouvre brutalement, et Jordan entre.
Son regard est glacial, son visage dur.

« Qu’est-ce que tu fais ici ? » Ma voix tremble, mais je ne détourne pas les yeux.

Il referme la porte derrière lui, avançant de quelques pas dans la pièce.

« Je pourrais te poser la même question, Elara. Mais je vais aller droit au but. Tu es en train de te perdre à cause de cet Incube. Il fallait l’arrêter au plus vite. »

Ses mots me frappent comme une gifle. L’air quitte mes poumons, et je me lève d’un bond, serrant le bijou contre moi.
« Tu l’as vendu. C’est de ta faute ! Mon père n’aurait jamais pu le trouver sans toi. »

Il hausse les épaules, comme si tout cela n’était qu’une formalité.

« Et alors ? Ce Kael était une menace. Ton père voulait s’en débarrasser, et je l’ai aidé. »

Mes mains tremblent, et une colère sourde commence à remplacer ma tristesse. « Une menace ? Pour qui, exactement ? Pour toi ? Pour lui ? »

Il ricane, un rire froid et méprisant.

« Tu es aveuglée, Elara. Ce type n’a rien à faire ici. Il n’est pas Lumineux. Il aurait fini par te blesser, ou pire... » Il lance en observant les draps défaits sur mon lit. « Alors oui, je suis content qu’il soit derrière les barreaux. C’est là qu’il doit être. »

Sa voix résonne comme un coup de tonnerre, et ma colère explose. Je fais un pas vers lui, les poings serrés. « Tu ne sais rien de lui Jordan !! Tu es la seule menace ici. »

Ses traits se durcissent, et il avance vers moi, et avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, il attrape mon visage d'une main, déformant ma bouche et m'arrachant une plainte audible.

« Calme-toi. Tu ne sais pas de quoi tu parles. Cet Incube, ce monstre a infiltré ton esprit ! »

Mon cœur s’emballe. Il est trop proche. Trop imposant.
Il me fait mal.
Une peur instinctive s’empare de moi, mais je refuse de reculer.

« Je t’ordonne de sortir de ma chambre ! »

Il ne bouge pas.

Un sourire cruel se dessine sur ses lèvres. « Tu n’as aucun pouvoir ici, Elara, nous ne sommes que tous les deux. »

Soudain, je sens une chaleur intense émaner de ma poitrine, du bijou que je tiens fermement contre moi.
Elle explose autour de moi avant même que je puisse comprendre ce qui se passe.

Une lumière orangée envahit la pièce, et des flammes surgissent, créant une cage de feu entre Jordan et moi.

Je reste figée, tremblante, mes yeux écarquillés. Ce pouvoir... il n’est pas à moi. Il vient du bijou, j’en suis sûre.

Jordan s’arrête net, ses yeux remplis de stupeur et de peur. « Qu’est-ce que... ? »

Je lève la tête, mes doigts serrant toujours le médaillon. Les flammes dansent, menaçantes, mais je ne ressens aucune brûlure. Au contraire, elles m’entourent comme une armure vivante.

« Je t’ai dit de reculer, » dis-je, ma voix plus forte, plus assurée.

Il recule enfin, ses traits crispés de colère.

« Va dire à mon père, » je crache, alors que les flammes s’intensifient autour de moi et que mes cheveux blancs se soulèvent, « que je ne le laisserai pas faire. Je sortirai Kael de là, et ni toi, ni lui, ni personne ne pourra m’en empêcher !!! »

Jordan serre les dents mais ne dit rien. Il fait volte-face et quitte la pièce, claquant la porte derrière lui.

Quand le silence retombe, je m’effondre sur mes genoux. Les flammes s’éteignent lentement, et la pièce retrouve son calme. Je fixe le bijou dans ma main, mes pensées en vrac.

« Kael... qu’est-ce que c’est que ce pouvoir ? » murmuré-je, incapable de calmer les battements frénétiques de mon cœur.

Le silence dans la pièce est lourd, étouffant. Mes mains tremblent encore autour du médaillon, mais les flammes se sont dissipées, ne laissant derrière elles qu’un faible éclat orangé sur le métal. Je respire profondément, essayant de calmer mon cœur qui bat à tout rompre.

Je n’ai pas le temps de m’attarder sur ce qui vient de se passer. Kael est en prison, et chaque seconde perdue est une chance de moins de le sortir de là.

Je me relève d’un bond, essuyant mes joues d’un geste rapide. Mes pensées tourbillonnent, mais une chose est claire : je dois bouger.

Je prends un sac et y glisse quelques affaires indispensables, y compris le médaillon. Mon regard tombe un instant sur le miroir. Mon reflet est un mélange de peur et de détermination.

« Ça suffit, » je me souffle, pour moi-même.

Je passe la porte, la colère grondant encore dans ma poitrine. Mes pas résonnent dans le couloir désert, rapides et déterminés. Quand j’atteins l’ascenseur, je presse le bouton plusieurs fois, impatiente. La cabine arrive enfin, et je m’y engouffre.

En bas, l’air est différent, plus lourd. Le hall de l’immeuble est baigné d’une lumière tamisée, mais mon cœur se serre en voyant ceux qui m’attendent. Une poignée d’Anges et de Kitsunes se tiennent là, postés comme des statues.
Leur présence est une barrière évidente...

Tous sont au service de mon père.

Je ralentis, mais pas longtemps. Je me redresse et m’avance vers eux.

« Laissez-moi passer. » Ma voix est ferme, mais un peu trop aiguë à mon goût.

Ils ne bougent pas.

Je m’arrête devant eux, mes poings se serrant sur mes hanches. La tension monte, et je sens une bouffée de colère remonter à la surface.

« Je vous ai dit de me laisser passer. Vous savez très bien qui je suis. »

Aucune réaction. Leurs regards froids restent fixés devant eux, indifférents à mes paroles.

La colère bouillonne en moi. Mon cœur tambourine dans ma poitrine, et je suis sur le point de craquer lorsque Jordan apparaît derrière eux.

Il avance lentement, son expression indéchiffrable. Mais je vois quelque chose dans ses yeux, comme une lueur d’hésitation.
Peut-être même de la peur.

« Laissez-la passer, » ordonne-t-il d’un ton sec.

Les gardes échangent des regards, mais finissent par s’écarter. Jordan me fixe un instant, comme s’il cherchait à comprendre ce qu’il a vu plus tôt dans ma chambre.

Moi, je n’ai rien à lui dire. Je le dépasse sans un mot, toujours avec la sensation de sa main sale sur mon visage.

La porte principale se referme derrière moi, et je m’enfonce dans les rues de la ville. L’air nocturne est frais, presque glacial, mais je ne ressens rien d’autre que le vide en moi. Mes pas sont rapides, mais mon esprit est en ébullition.

Kael. Il est là, quelque part, enfermé. Et je suis perdue.

Je sors mon téléphone et compose le numéro de mon père. Une fois. Deux fois. Trois fois. Chaque tentative tombe sur sa messagerie.

« Réponds, papa… » murmuré-je, désespérée. Mais rien.

Le bruit de la ville m’enveloppe : des voitures qui klaxonnent, des rires lointains, le souffle du vent entre les immeubles, la magie qui glisse comme un voile empoisonné partout. J’avance, sans savoir où aller, cherchant désespérément une idée, un plan.

La colère et la panique se mélangent en moi. Tout cela est injuste, insupportable.
Mon père ne peut pas faire ça.
Il n’a pas le droit.

Alors que je continue d’errer, mes pensées se cristallisent en une seule résolution : peu importe ce qu’il faut faire, je ne le laisserai pas détruire Kael.

×××

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