Chapitre 2. Bijou étrange

Elara


Après avoir quitté le gala de façon inattendue, je ne peux m’empêcher de sourire.

L’incident avec la petite fille m’a libérée de ce défilé d’apparences où tout n’est que jugement et regards perçants.
Ce sauvetage m’a offert une échappatoire bien plus élégante qu’une simple fuite...

Dans le calme de ma chambre, une paix apaisante s'installe.
C’est un cocon, une bulle de silence après la cacophonie étouffante du gala.

Les bruits lointains de la ville se glissent encore à travers les fenêtres, presque comme une mélodie sourde qui n’atteint que peu mes sens.

Je m’avance vers la salle de bain.
Sous la lumière tamisée, les murs de mosaïque étincellent dans des nuances de vert et d’or, rappelant les forêts denses d'autrefois.

J’ouvre le robinet, et bientôt, le gargouillement de l’eau résonne, une promesse de chaleur et de réconfort. La vapeur envahit peu à peu la pièce, et l’odeur de lavande imprègne l’air, mêlée au parfum humide et familier de l’eau qui coule.

En me glissant sous le jet, je ferme les yeux.
L’eau chaude caresse ma peau et mes cheveux, m’apaisant, effaçant le poids de la soirée et me ramenant à moi-même.
Je m’abandonne à la sensation, laissant chaque goutte couler le long de mon dos, traçant des chemins invisibles le long de mes muscles tendus.

Peu à peu, les images de la soirée s’évaporent, mais une vision reste tenace.
Le visage de cet inconnu.
Au plutôt ses yeux, d’un violet énigmatique, presque brillants.

Qu’est-ce que je ressens vraiment à ce sujet ?
La question flotte un instant avant de se dissiper, comme la vapeur qui entoure mon visage.
Une curiosité brûlante, oui, mais aussi une tranquillité étrange.
Je suis vivante, toujours là, et c’est tout ce qui importe ce soir !

Quand je sors de la douche, enveloppée dans la chaleur du coton doux, je me glisse dans ma chambre et enfile une tenue de nuit confortable.

Le tissu léger frôle ma peau pâle, apportant une sensation de liberté bienvenue après les contraintes des robes mondaines.
La fraîcheur du sol sous mes pieds ancre mes pensées et me ramène au calme de l’instant présent.

Je remarque alors le pendentif posé sur ma table de nuit.

Il brille d’une lueur étrange, comme s'il attendait d'être redécouvert.
Un élan d'excitation s’empare de moi, mon cœur battant un peu plus vite.
Je m’approche, le souffle suspendu, et le prends délicatement entre mes doigts.

Sous la lumière tamisée de la chambre, le pendentif scintille, projetant des éclats d'or et d'argent.

À cet instant, je ressens une chaleur familière se diffuser dans ma paume, comme un écho de quelque chose d'ancien, un lien oublié.
Je le fais tourner lentement, émerveillée par la finesse des détails, de sa brillance profonde.

Puis, d'un coup, je sens une étincelle frémir au creux de ma main.

Un instant plus tard, les flammes jaillissent de mes doigts, comme une réponse silencieuse au pendentif. Mon cœur bondit, mais mes gestes restent naturels.

Ce feu, c’est mon pouvoir...

Je le connais, je l'ai maîtrisé peu à peu au fil des années.
Dans un mouvement fluide, je fais onduler les flammes, les tissant et les déliant dans l’air avec une aisance familière.

En voyant les flammes tournoyer autour de mes doigts, je pense à ma mère.

Elle contrôlait le feu avec une grâce inégalée, capable de créer des scènes magiques, enfantines, rien qu'avec des étincelles et des flammèches.
Je la revois faire apparaître des animaux minuscules en feu pour m’amuser, comme des oiseaux dansant dans le creux de sa paume, ou des papillons lumineux qui voltigeaient autour de moi.

Son contrôle était parfait, chaque flamme répondait à sa volonté sans jamais déborder. Aujourd'hui, ce sont mes propres flammes qui s'enroulent, virevoltent, dansent autour de moi.

Pourtant, ce soir, quelque chose est différent...

Les flammes sont plus intenses, plus vives, presque comme si elles pulsaient d’une énergie nouvelle. Chaque mouvement de ma main les façonne avec une précision que je ne connaissais pas avant.

Un sourire émerge sur mes lèvres alors que je réalise que ce changement est sûrement lié au pendentif.
Il agit peut-être comme un catalyseur, amplifiant ma maîtrise du feu, me permettant d’en explorer des nuances insoupçonnées ?

Je continue de faire danser les flammes, les élevant dans un ballet aérien autour de moi, savourant cette nouvelle connexion avec mon élément.
Le sentiment est grisant, comme si un feu nouveau s’éveillait en moi, ravivant un héritage que je ne soupçonnais pas.

Les flammes tournoient, ondulent, prennent des formes que je n’avais jamais maîtrisées auparavant, des serpents, des vagues, comme des mots secrets écrits dans l’air.

Absorbée dans ce spectacle, je me sens invincible.
Pour la première fois, le feu ne me fait plus peur.

Au contraire, il me rassure, me fait me sentir plus vivante que jamais. La chambre se gorge de cette lueur douce et mouvante, une mélodie silencieuse se mêlant aux battements de mon cœur.

Soudain, un bruit me fait sursauter. La porte s’ouvre brusquement, et mon père entre, les yeux écarquillés. Il s’arrête, pétrifié, fixant les flammes dansantes autour de moi.

« Elara ! » Sa voix résonne, tendue et pleine d'une inquiétude aiguë.

Je me fige, et dans un souffle, les flammes s’éteignent, me laissant dans la pénombre de ma chambre.
Seul le pendentif brille encore, scintillant faiblement.
Je me tourne vers lui, essayant de chasser la culpabilité qui s’éveille en moi tout en cachant rapidement le bijou.

« Quoi ? » je murmure, tentant de paraître innocente, même si mon cœur bat à toute allure.

Son regard perçant s’ancre dans le mien, et sa voix se fait plus grave. « Tu ne peux pas t’entraîner seule comme ça, Elara ! C’est dangereux, tu le sais bien. »

Je sens la frustration derrière ses mots, un mélange de peur et de colère. Sa moustache blanche s'agite toujours dans ces cas-là.

Je baisse les yeux, incapable de soutenir son regard, et murmure : « Je voulais juste voir si… je pouvais mieux contrôler mon pouvoir. »

Il s’approche de moi, et je peux voir la bataille intérieure qui se livre en lui. Il veut comprendre, mais il est aussi effrayé par ce qu’il vient de voir.

Finalement, il prend une profonde inspiration et dit plus bas.

« Écoute, Elara, il y a des intrus dans le quartier. On ne sait pas ce qu’ils veulent, mais je refuse que tu prennes des risques inutiles. Surtout cette semaine, avec tes cours de magie. »

L’idée de ces intrus me fait frissonner, et aussitôt, mon esprit retourne à la silhouette de cet inconnu.
Est-il l’un d’eux ?

Une vague d’excitation mêlée de crainte m’envahit. Le pendentif, le feu, cet homme mystérieux…
Tout cela semble entrelacé dans un dessein que je peine à saisir.

« Tu sais à quoi ils ressemblent ? » je demande, tâchant de garder une voix calme.

Mon père secoue la tête, son visage assombri.

« On ne sait rien de leur apparence, ni de leurs intentions. Mais ils ne sont pas d’ici, ça, c’est certain. Je veux que tu restes sur tes gardes. » Il marque une pause, son regard s’adoucit un instant. « Ton statut fait de toi une cible, Elara. Promets-moi de ne rien tenter d’irréfléchi. »

Je hoche la tête, consciente de l’inquiétude légitime qui brille dans ses yeux.
Pourtant, une partie de moi se rebelle. Je ressens une irrésistible curiosité, un besoin de comprendre ce qui m’entoure, d’explorer ce lien nouveau avec le pendentif et les mystères de mon pouvoir.

« Je serai prudente, promis. Mais tu sais que je dois m’entraîner, Père. C’est indispensable pour que je puisse un jour être autonome. »

Il soupire, un mélange d’agacement et de résignation.

« Je sais… mais rappelle-toi, je ne peux pas toujours être là pour te protéger. Garde ça en tête, d'accord ? »

Il me quitte, jetant un dernier regard préoccupé dans ma direction, et je l’observe s’éloigner.
Un sourire doux naît sur mes lèvres.

L’excitation qui frémit au fond de moi, cette étincelle de découverte, me pousse à ne pas m’arrêter là.

Je pose de nouveau les yeux sur le pendentif en souriant plus franchement.
Cette découverte est un véritable cadeau.

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