Chapitre 15. vérité
Elara
Après une journée entière passée dans ma chambre, à supporter Kael se plaindre à travers les murs, je décide que ça suffit.
Il a l’air de vraiment souffrir. Et cette histoire de rut… Je n’avais jamais été confrontée à ça avant. Le simple fait de le voir dans cette situation me perturbe plus que je ne veux l’admettre.
Je soupire, me redresse de mon bureau et quitte ma chambre. Si Kael ne fait rien pour se soigner, quelqu’un doit le faire.
Je descends à l'étage inférieur, mes pas résonnant dans le couloir silencieux. Mon objectif est clair : trouver mon père et lui demander s’il a des pilules pour le rut. J’imagine déjà sa réaction embarrassée...
En entrant dans la salle de réunion, je tombe justement sur lui . Il est en train de consulter un dossier, son expression concentrée.
« Père ? »
Il lève les yeux, un peu surpris de me voir ici. « Elara ? Quelque chose ne va pas ? »
Je serre mes mains devant moi, cherchant comment aborder le sujet sans que ça paraisse bizarre.
« Est-ce que tu aurais… des médicaments pour le rut ? » Je rougis immédiatement, évitant son regard. « C’est pour Kael. Il ne va pas bien. »
Mon père reste un instant figé, comme s’il analysait mes mots. Son regard se remplit d’une sorte de tristesse.
« Oui, bien sûr, » dit-il doucement. Il fouille dans une armoire murale et en sort une petite boîte blanche. « Ce sont des pilules pour calmer les effets du rut chez les Djinf. Assure-toi qu’il les prenne immédiatement. »
Je prends la boîte, mes doigts tremblant légèrement. « Merci. »
Mon père me sourit faiblement, mais je sens qu’il voudrait dire quelque chose. Pourtant, il se contente de poser une main légère sur mon épaule avant de retourner à ses affaires.
Je remonte rapidement. À chaque pas, je me demande si je fais bien de m’occuper de ça. Kael pourrait mal le prendre. Peut-être qu’il ne veut pas qu’on l’aide.
Arrivée devant sa porte, j’hésite un moment avant de toquer.
« Kael ? C’est moi. »
Il ne répond pas immédiatement, mais au bout de quelques secondes, la porte s’ouvre.
Il se tient là, et je reste un instant figée. Ses cheveux longs, noirs aux reflets violets, sont trempés de sueur, collant à ses joues rougies.
Son torse hâlé, à moitié découvert, est couvert de gouttelettes qui descendent lentement. Son regard violet, habituellement vif et provocateur, est assombri par une fatigue évidente.
« Quoi ? » demande-t-il d’une voix rauque et grinçante.
Sans un mot, je lui tends la boîte de pilules.
Il la prend et lit rapidement l’étiquette. Immédiatement, il grimace.
« C’est écrit pour Djinf… » murmure-t-il, comme si il se parlait à lui-même.
Je prends une inspiration. C’est le moment parfait pour poser la question qui me trotte en tête depuis hier.
« Kael, » dis-je doucement, croisant son regard. « Je peux te poser une question ? »
Il hausse un sourcil, un rire sans joie s’échappant de ses lèvres. « T’avais tout le temps de le faire pendant le jeu de cartes tout à l’heure. Pourquoi maintenant ? »
Je me mords la lèvre. « Parce que c’est important. »
Son expression change légèrement. Il fronce les sourcils et me fixe intensément.
« Ok, » finit-il par dire. « Mais à une condition : si tu me poses une question, je t’en pose une aussi. Marché conclu ? »
Je hoche la tête, la gorge serrée.
« Vas-y, commence. »
Kael me fixe, son regard brillant d’une intensité qui me coupe le souffle.
Il semble hésiter, ses lèvres s’entrouvrant légèrement comme s’il cherchait ses mots. Pourtant, au lieu de parler, il s’avance, raccourcissant la distance entre nous.
Son souffle est irrégulier, haletant, et je sens la chaleur qui émane de lui.
Sa main se lève lentement, presque tremblante, et frôle mon cou.
Le contact m’envoie un frisson inattendu, me paralysant sur place.
« Qu’est-ce que tu fais ? » je commence, mais ma voix se brise avant même que je ne termine ma phrase.
Soudain, son mouvement devient rapide, précis. Il glisse un doigt sous le col de ma robe et tire brusquement sur mon pendentif.
« Hé ! » je m’exclame, reculant d’un pas sous le choc.
Kael ne semble pas prêter attention à ma réaction.
Il fixe le bijou qui pend désormais entre ses doigts, ses traits tendus se relâchant légèrement. Il esquisse un sourire qui fait briller ses canines. C'est un sourire qui ressemble plus à un mélange de soulagement et d’épuisement.
« Alors c’est là qu’il était, » souffle-t-il, levant le pendentif à hauteur de ses yeux. Il relève la tête vers moi, son expression devenant presque implorante. « C’est à moi. Je peux le récupérer ? »
Je reste bouche bée, incapable de répondre immédiatement. Tout se bouscule dans ma tête.
J'avais raison.
Ce pendentif était bien le sien...
Je secoue la tête, retrouvant mes esprits. « Attends ! » dis-je, la panique montant en moi. « Finalement, j’ai deux questions. »
Kael soupire, visiblement exaspéré. Il vacille légèrement sur ses pieds, mais il hoche la tête, ses cheveux trempés de sueur collant à son front.
« Pose-les, » dit-il, d’une voix faible, presque lasse.
Je prends une inspiration pour calmer les battements affolés de mon cœur.
« Est-ce que… est-ce que tu es ici pour le pendentif ? »
Il me fixe, ses yeux sont soudain vides, comme s’il puisait dans ses dernières forces. Finalement, il hoche lentement la tête.
Mon cœur se serre. Alors, c’est ça...
C'est pour ça qu'il ne voulait rien dire, qu'il paraissait si secret...
« Et… » je prends une autre inspiration, essayant d’ignorer la peur qui monte en moi. « Est-ce que tu es vraiment un Djinf nocturne ? »
Kael ricane, mais ce rire n’a rien de chaleureux. Il est amer, sans joie, et me fait frissonner.
« Regarde par toi-même, » il lance, sa voix quasi éteinte brisant le silence de la pièce.
Sa main glisse dans son dos, et il en ressort… une queue.
Je retiens un hoquet de surprise, mes yeux s’écarquillant devant cette révélation. Sa queue, de la même couleur que sa peau, luisante, serpente légèrement dans l’air, comme un animal indépendant.
Alors, c’était vrai.
Il n’est pas un Djinf nocturne.
Avant que je ne puisse poser une nouvelle question ou exprimer mon incrédulité, Kael vacille une nouvelle fois.
Cette fois, il tombe lourdement sur un genou, sa respiration devenant plus laborieuse.
Il murmure faiblement, sa voix à peine audible : « Je suis… un Incube. »
Puis, il s’effondre.
Je reste figée, incapable de bouger, mon esprit refusant de traiter ce que je viens de voir et d’entendre.
Un Incube ? Je n’ai jamais rencontré cette race avant, mais je sais une chose.
C'est un Sombre...
Une race qui n'a rien à faire ici, au centre de Syl-Anor.
Le pendentif glisse de ses doigts inertes et tombe sur le marbre blanc.
Je m’agenouille précipitamment à ses côtés, mon cœur battant à tout rompre.
« Kael ? » je murmure, en secouant légèrement son épaule. Mais il ne répond pas.
Sa peau est brûlante sous mes doigts, comme s’il était en proie à une fièvre intense. Je sais que je dois faire quelque chose, mais quoi ?
Tout ce que je peux faire, c’est essayer de l’aider, même si je ne comprends pas encore ce qui se passe...
×××
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top