Chapitre 13. Secret

Elara

Pendant que Kael est sous la douche, je m'installe et sort mon livre de cours avec un soupir.

L’électricité magique et son fonctionnement...
Est-ce vraiment nécessaire d'apprendre tout ceci par cœur ?
Ce sujet est d’un ennui mortel. Pourtant, j’ai essayé...

Pendant une bonne heure, j’ai pris des notes, souligné des phrases compliquées et relu trois fois la même page sans rien comprendre.
Entre ces histoires d’usines qui transforment l’énergie magique en électricité et les descriptions techniques des circuits, mon cerveau est à bout.

Je pose mon stylo, ferme mes cahiers et attrape mon ordinateur portable. Ce sera moins productif, mais sûrement plus intéressant.
Avant d’ouvrir un nouvel onglet, je laisse mes pensées dériver un instant.

La journée a été... agréable.

Oui, je peux le dire.
Passer du temps au centre commercial avec Kael, aussi peu professionnel soit-il, m’a rappelé les sorties avec mes amies...
Ce genre de moment léger et insouciant me manque.

Ma mère avait trois amies proches, et leurs filles avaient à peu près mon âge.
Nous passions souvent du temps dehors, dans les centres commerciaux, dans des cinémas, et quand il faisait beau, nous allions jusqu'au fleuve.

Quand ma mère invitait ses amies à dîner, cet étage était convivial, bercé par les rires et les après-midi dans la salle de jeux.

Kael n’est pas vraiment un ami...
Il est trop râleur, trop brut, et il fait seulement son travail, mais au moins, il me donne l’impression d’être avec quelqu’un de normal, pas avec un garde du corps.

Je secoue la tête et clique sur le navigateur.
Le sujet abordé en cours ce matin continue de me trotter dans la tête.
Le rut.
C’est un phénomène que je connais à peine...

Mon père n’en parle jamais, et je n’ai eu qu’une seule vraie confrontation avec ce sujet.

Je fronce les sourcils en repensant à Gallia, mon ex petit ami.
C'était un Kitsune brun, athlétique, avec un sourire charmeur…
Du moins en apparence.

Nous avons été en couple quelques semaines l’an dernier, avant que je ne découvre son vrai visage...
Il était autoritaire, égocentrique, et surtout incroyablement agressif.
Il était sans arrêt en train de chercher la petite bête aux autres garçons de notre classe, et il s'est déjà battu plusieurs fois, pour montrer qu'il avait l'avantage...

J’ai vite mis fin à notre histoire. Heureusement, cette année, nos emplois du temps sont complètement décalés et je ne l'ai pas recroisé une seule fois.

Je tape "rut et traitement hormonal" dans la barre de recherche.
Le premier lien renvoie au site officiel de la Mégalopole.
J’y trouve des explications détaillées, presque trop techniques, mais je continue de lire par curiosité.

Le texte explique que le rut touche les hommes de toutes races dès leur majorité et devient plus intense à partir de 21 ans.
Ce déséquilibre hormonal peut provoquer une agressivité accrue, une perte de contrôle émotionnel ou rationnel, une sensibilité exacerbée aux phéromones et au contact physique, et bien-sûr, augmente le besoin sexuel.

Je me mords la lèvre.
Tout cela me semble si envahissant, presque effrayant...
Apparemment, pour pallier ces désagréments, des pilules de contrôle hormonal sont proposées.
Elles permettent de diminuer les pulsions en modifiant temporairement l’équilibre hormonal, mais leur utilisation prolongée peut entraîner une diminution de l’énergie, une sensation de vide ou une dépendance.

Je soupire en fermant l’onglet.
Je ne m’étais jamais rendu compte à quel point ce phénomène pouvait être compliqué à gérer...

Heureusement, chez les femmes, c’est plus simple. Enfin, autant que peut l’être un cycle hormonal classique, avec les douleurs durant les menstruations et la perte d'énergie pendant l'ovulation.

L’horloge sur mon bureau indique 19 heures passées.
Mon ventre gargouille doucement.
Il est temps de manger.

Je descends à la cuisine et réchauffe rapidement le repas.
Au menu ce soir, une soupe fumante et un steak grillé.
Simple, mais efficace.

Avec les deux assiettes sur un plateau, je remonte à la salle à manger.
Je pose les plats sur la table, puis me dirige vers la chambre de Kael pour lui annoncer que le repas est prêt.

C'est bizarre de ne pas manger seule...
Il m'arrive parfois de dîner avec mon père, mais ces moments se font rares.

Je toque à sa porte.
Pas de réponse...

J’attends un instant avant de frapper à nouveau, un peu plus fort cette fois. Toujours rien.

« Kael ? » Pas un bruit.

Je pousse la porte, prudemment.
La chambre est sombre, à peine éclairée par la lumière tamisée d’une petite lampe.

Kael est allongé sur le lit, en pyjama, et dort profondément.
Il respire lourdement, presque comme un ronflement discret.
Une bouffée de rire me monte à la gorge, mais je me retiens pour ne pas le réveiller.

Voir cet homme toujours sur ses gardes, râleur et bourru, dormir ainsi, c’est presque attendrissant.

Je m’approche pour le sortir de sa sieste, la main tendue, mais je m'interromps rapidement et écarquille les yeux.

Le haut de son pyjama, légèrement relevé, laisse entrevoir... quelque chose d'étrange...
Je plisse les yeux.

Je me fige en découvrant de quoi il s'agit.

Une queue.

Non, je dois me tromper.
Peut-être que c’est un… accessoire ? Un objet bizarre, qui traîne sous son pyjama ?

Je m’avance doucement, à pas feutrés, retenant presque ma respiration.
Kael ne bouge pas, toujours plongé dans un sommeil profond.
Je me penche légèrement pour mieux voir.
Non, ce n’est pas un accessoire...

La base de cette queue est de la même teinte que le reste et semble être connectée directement à sa peau, juste au-dessus de l’élastique de son pantalon.

Mon cœur tambourine dans ma poitrine.

Pourquoi Kael a-t-il une queue ?
Ce n’est pas normal...
C’est même, tout simplement impossible pour un Djinf.
Alors quoi ?
Est-ce qu’il m’a menti sur ce qu’il est ?

Mes pensées tourbillonnent.

Je me redresse précipitamment et recule de quelques pas, faisant grincer légèrement le plancher.
Kael bouge légèrement dans son sommeil, marmonne quelque chose d’inintelligible, mais il ne se réveille pas.

Je sors de la chambre aussi silencieusement que possible, refermant doucement la porte derrière moi.

Une fois dans le couloir, je me laisse aller contre le mur, les jambes légèrement tremblantes. Mon esprit est en ébullition.

Il faut que je sache.
Mais comment aborder ce sujet avec lui sans qu’il ne se braque ?
Ou pire, qu’il devine que je l’ai observé pendant son sommeil ?

Je retourne dans la salle à manger. Mon assiette m’attend, mais je n’ai plus vraiment faim.
La soupe refroidit lentement pendant que je réfléchis.

Kael a toujours été étrange, c’est vrai, mais je mettais ça sur le compte de sa personnalité. Son côté bourru, peu soigné, et pas du tout professionnel. Mais maintenant, tout cela prend une autre dimension...

Je me lève finalement et retourne à ma chambre, laissant mon repas à moitié entamé.
Une fois seule, je m’assois sur mon lit, les bras croisés, fixant un point invisible devant moi.

Il y a quelque chose que Kael cache.
Et ce n’est pas qu’une question d’attitude.

Le lendemain matin, je me réveille avec une étrange sensation, comme si je n’avais pas vraiment dormi.
Les souvenirs de la veille me hantent encore, mais je décide de jouer la comédie pour le moment.

Pas question de laisser Kael deviner que je sais quelque chose.

Je descends dans la cuisine pour préparer un café.
En remontant, Kael est déjà là, assis sur une chaise.
Il a l’air aussi grognon qu'hier matin. Ses cheveux noirs et violets sont en bataille, mais je ne peux m’empêcher de le regarder avec plus d’attention.

« T’as mal dormi ou quoi ? » demande-t-il en levant un sourcil.

Je sursaute légèrement, prise sur le fait. « Non, ça va. Juste... beaucoup de devoirs hier au soir. »

Il grogne quelque chose en guise de réponse et se concentre à nouveau sur la table, ses yeux violets dans le vague.

Je décide de jouer la carte de la normalité, bien que je meure d’envie de lui poser mille questions.

La matinée se déroule calmement, presque comme si rien n’avait changé.
Mais chaque fois que je croise son regard, une partie de moi se demande ce qu’il cache réellement.

Quand il s’apprête à sortir de la salle à manger, je me surprends à l’arrêter.

« Kael, attends. »

Il se retourne, l’air intrigué.

« Oui ? »

Je cherche mes mots, hésite.
Ce n’est pas le moment, pas encore.

« Euh… Tu veux du café avant de partir ? »

Il me regarde, visiblement surpris par ma soudaine sollicitude, mais il hoche la tête. « Ouais, pourquoi pas. »

Je prépare la cafetière, tout en essayant de garder mon calme.

Mais une chose est sûre : je vais découvrir la vérité.
Que Kael le veuille ou non.

×××

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