Chapitre 3 : Yohan
— Une dernière parole ?
— Je...
La détonation se répercute sur les murs comme un écho sinistre. L'odeur de soufre envahit mes narines, m'arrachant un soupir de satisfaction. Lentement, je relâche le doigt de la détente, savourant ce moment. Jamais je n'aurais laissé cette sale petite merde dire un mot. La terreur dans ses yeux, voilà un spectacle dont je ne me lasserai jamais.
Ses yeux sont grands ouverts, figés dans une expression d'horreur muette, mais il n'y a plus de signe de vie. Une fine traînée de sang s'écoule lentement de la plaie au centre de son front. Il savait très bien qu'il était sur mon territoire, il était venu en connaissance de cause. Lorsque mes hommes l'ont emmené il y a quelques heures, une excitation électrique avait parcouru tout mon corps. Si forte que j'en avais eu des fourmis d'anticipation dans les doigts. J'avais imaginé mille façons de le torturer, de le briser, de le faire parler. Mais, malheureusement pour moi et pour lui, il s'était mis à table beaucoup trop vite, gâchant ainsi tout mon plaisir.
Je relève la tête de son corps inerte et observe le panorama à travers les bâches accrochées à la façade, battant au gré du vent. Du 65ᵉ étage de cet immeuble encore en construction, nous avons une vue imprenable sur Lincoln Park. Je m'approche du bord et m'appuie contre un des piliers massifs qui soutiennent la structure. L'horizon s'étend devant moi, avec le lac Michigan scintillant sous la lumière du matin, une vaste étendue bleue qui semble sans fin. Pendant que mes hommes nettoient la scène, je range mon arme dans son holster, soigneusement fixé sous mon épaule. Je réajuste ma veste de costume, ferme un bouton, et remets correctement mes boutons de manchettes.
Un léger mouvement du coin de l'œil attire mon attention. Une seule personne est assez cinglée pour me déranger après une exécution. J'aime être seul dans ces moments-là, à savourer la solitude et le plaisir de l'acte accompli. Connor entre dans mon champ de vision, sortant un paquet de cigarettes de sa poche de costume. Il m'en tend une, que je glisse entre mes lèvres. J'allume la cigarette et tire une première bouffée, sentant la fumée remplir mes poumons avant de s'échapper lentement. Mes épaules se détendent alors que je répète ce rituel plusieurs fois, trouvant une étrange quiétude dans le tourbillon de nicotine et de tabac.
— Ça va mieux ? demande-t-il d'un ton prudent. Maintenant, il faut y aller. Nous avons autre chose à faire que de nous occuper des basses besognes.
— Par moment, j'ai l'impression que tu oublies qui commande et à qui tu dois le respect, dis-je, le regard noir et perçant.
Je vois un tressaillement à peine perceptible le parcourir. C'est mieux ainsi. Il ne faudrait pas qu'il pense pouvoir tout se permettre sous prétexte de notre longue amitié. Je me dirige vers l'ascenseur, sentant sa présence nerveuse derrière moi. Une fois dans la cabine, Connor appuie sur le bouton du rez-de-chaussée. L'ascenseur amorce sa lente descente et je m'adosse contre la paroi du fond. J'appuie ma tête contre le métal froid. Connor parle, ses mots se perdant dans un flot indistinct, mais je ne l'écoute pas. L'adrénaline pulse encore dans mes veines, me replongeant dans l'instant où j'ai ôté une vie. Je ferme les yeux et revis la scène, chaque détail gravé dans ma mémoire.
Les portes s'ouvrent sur un vaste hall encore en chantier. Nous le traversons en silence pour atteindre la sortie. À l'extérieur, la ville est déjà en effervescence, les rues grouillantes de vie. Je consulte ma montre : il est à peine 8 h, mais Chicago, la ville des vents, ne dort jamais. Des bourrasques balaient la rue, ajoutant à l'agitation ambiante.
Je marche vers la voiture, indifférent aux passants qui s'écartent sur mon passage. Leurs regards glissent vers mes tatouages, des motifs complexes couvrant mon cou et mes mains, symboles de ma vie passée et présente. Leur réaction de répulsion me convient parfaitement. Il ne vaut mieux pas qu'ils se trouvent sur mon chemin. Connor fait le tour de la voiture et ouvre la portière côté route, tandis que je vais faire de même. Mais un détail capte mon attention de l'autre côté de la rue. Une chevelure rousse flamboyante attire mon regard, un contraste saisissant dans la foule colorée de noir, de gris et d'autres couleurs aussi fades.
Je détaille rapidement cette femme, notant son allure élancée et sa démarche assurée. Une superbe femme sans nul doute. Elle vient de sortir d'un immeuble bien connu, le repaire de nos principaux ennemis. Intéressant. Je m'approche de la voiture, ouvre la portière et me penche pour parler à Connor.
— Tu vois la rousse élancée qui fend la foule comme si elle était le messie ? Trouve toutes les informations possibles sur elle.
— Elle te plaît, boss ? demande-t-il, un sourire narquois se dessinant sur son visage.
— Elle sort de chez Torio, répliqué-je en ignorant sa plaisanterie. On peut peut-être se servir d'elle. Et puis, c'est vrai, je n'aurai pas à me forcer pour la séduire. Une fois que j'aurai ce que je veux, je la jetterai, j'ajoute avec un sourire arrogant.
Connor acquiesce, comprenant l'enjeu. Tandis que je m'installe dans la voiture, une nouvelle vague d'excitation me parcourt. Le jeu ne fait que commencer, et je suis déjà impatient d'en découvrir les prochaines étapes. Je l'entends passer déjà des coups de fil à nos hommes et en particulier au hackeur de notre clan. Je sais qu'avant 12 h, le dossier contenant tout ce que je veux savoir, sera sur mon bureau.
Nous démarrons la voiture, Connor au volant. Tandis que nous nous faufilons dans le trafic matinal, je ne peux m'empêcher de penser à la femme que je viens de voir avec sa chevelure flamboyante. Elle est maintenant un pion dans un jeu d'échecs bien plus vaste. Dans ma bulle, je n'entends plus le bruit des klaxons et le bourdonnement des moteurs, mon esprit est déjà ailleurs, planifiant la prochaine étape.
Après avoir quitté la ville, nous empruntons une route isolée menant à une immense propriété ultra sécurisée à la périphérie de Chicago. Mon père préfère habiter ici, pour ma part, mon appartement en centre-ville me plaît bien plus. J'observe les hauts murs et les caméras de surveillance à la pointe de la technologie qui couvrent chaque centimètre carré. Nous ne rigolons pas sur la sécurité de notre quartier général. À l'entrée, des gardes lourdement armés contrôlent nos identités avant de nous laisser passer. Et cela, même si je suis le fils du chef de clan et que je commence déjà à prendre les rênes. Nous roulons sur une allée bordée d'arbres jusqu'à la villa, enfin ce qu'on appelle notre maison. Elle est placée au centre de jardins parfaitement entretenus.
Connor se gare près de l'entrée et nous rejoignons rapidement le hall. À l'intérieur, l'agitation règne. Chacun vaque à ses occupations, je distingue les techniciens analysant des informations sur des écrans géants dans la salle de contrôle. Je me dirige vers mon bureau, une pièce spacieuse avec de grandes baies vitrées offrant une vue panoramique sur les jardins et, au loin, nous pouvons deviner Chicago. Des tableaux modernes ornent les murs, et un bureau en bois massif trône au centre de la pièce. Même si je préfère le bureau plus moderne chez moi, je dois avouer que celui-ci est agréable.
Connor me suit, je n'arrive pas à savoir s'il est nerveux ou excité par ce qui se passe. Nous nous ressemblons sur ce point là, rien ne transparaît jamais sur nos visages. Une fois la porte fermée derrière nous, il prend la parole.
— Yo, on devrait peut-être réfléchir à deux fois avant de s'attaquer à Torio. C'est un gros morceau, son réseau est très étendu. Si nous frappons, il faut être sûr de notre coup. Et cette femme, on ne sait rien d'elle.
— C'est justement pour ça que je veux des informations, Connor, dis-je en m'asseyant derrière mon bureau. Nous devons nous préparer.
Il acquiesce avant de sortir pour se mettre au travail. Je sais que, même s'il n'est pas totalement d'accord avec moi, il fera ce que je lui dis. Je reste seul un moment, observant les jardins en contrebas. Les enjeux sont élevés, mais c'est précisément ce qui rend tout ça si excitant. Une heure plus tard, Connor revient avec un dossier.
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