Échange au clair de la lune et à l'ombre de sa peau
A D A M
Il y a dans ce monde des choses que l'on pense à jamais acquises mais qui s'avèrent être fausses.
J'ai aimé mon père, il a longtemps de ça, quand il n'était pas un connard fini, que nous vivions bien avec nos problèmes et nos aspirations.
Je pensais aussi qu'admirer son père et l'aimer était une chose acquise chez moi, qui ne changerait pas vraiment avec les années. Et putain, comme je me suis lourdement trompé !
Je regarde le ciel enfin découvert, dévoilant des astres sombres qui se font silences dans la nuit, et un reniflement déchire le monde d'une manière que je dois dire bien dégueulasse.
J'entends l'eau du Pont couler lentement et je sens le froid d'hiver gêler ma peau mais, je m'en fou. J'en ai rien à cirer de tout ce qui m'entoure, je ferme les yeux et je repense à ma vie en faisant succomber une cigarette entre mes lèvres sèches. Je ferme les yeux, je pense, je rêve mon passé et je m'étonne pour tout ce qui a osé se barrer de mon existence et le remplacer.
L'ancien Adam n'aurait jamais pu lever la main sur son propre père, ne se serait jamais rebellé contre lui, ne l'aurai jamais insulté de la sorte... L'ancien Adam avait trop de respect pour tout ce qu'était son paternel. Tout a disparu dans la nuit noire de ces jours noirs, où le monstre sous mon lit s'est enfin éveillé et a eu soudain soif de mon bonheur.
Je renifle à nouveau en crachant, tel un malheureux dragon, la fumée qui protège des trésors et tant..., trop de secrets.
Soudain, j'entends des pas se rapprocher rapidement du Pont et quand je trouve enfin la force d'ouvrir les yeux, c'est elle que je vois.
Ça me fait presque un choc de la revoir en chair et en os après ces quelques jours de correspondance où, seuls les mots s'avéraient être présents.
Elle a le souffle court, comme si elle avait couru une éternité sous le regard mélancolique de la lune céleste. Elle enlève ses écouteurs noirs et je la vois comme mon imagination n'est même pas capable de la voir : réelle.
Je m'appelle Myla...
-Myla...
C'est le seul mot que je peux sur l'instant prononcer. Dans la nuit, sous la lune et les étoiles qui lui sourient, elle semble tombée du ciel et s'être cassée la gueule sur terre.
Elle s'assoie près de moi dans un petit soupire, elle ne parle pas et nous restons silencieux, là, dans l'instant sans vraiment oser bouger, par peur de tout briser autour de nos connards de karmas respectifs. Soudain, elle enlève son manteau et le pose sur mes épaules mais je me brusque et le lui rend.
-J'en veut pas.
Dans l'éclat de la lune, je la vois lever les yeux au ciel et pointer du doigt mon nez qui coule, qui s'acharne à renifler comme un malheureux robinet qui tente d'avaler sa source.
J'ai oublié à quel point sa peau cuivrée fait ressortir la noirceur de ses cheveux, Myla semble être un camouflage, une statue de bronze parmis les autres statuts qui luttent contre les intempéries. Sur sa peau lisse dans la couleurs des caramels les plus sombres, la vie se dessine et chante, se pète la voix au travers d'elle. C'est son corps entier qui semble avoir absorbé toute l'horreur du monde au dépit de rendre l'univers un tant soit peu meilleur. Elle est toute de noir parceque le monde est lumière et couleurs, et qu'elle lui a tout donné sans rien se laisser.
Myla finit par poser de force une nouvelle fois son manteau contre mes épaules et bizarrement je ne bronche pas cette fois... Peut-être parce qu'elle arrive au moment où l'envie de sombrer à jamais dans les pensée morbides m'assaillent ?
Alors que sa main s'apprêtait à quitter le manteau, je sens ses tremblement et je ne peux m'empêcher de m'emparer de sa main pour l'observer dans la nuit.
Je voix la bosse de l'écriture qui s'est formée à force de vouloir s'exprimer sans toutefois le pouvoir, je vois les rides sur ses mains et le creux de son poignet, je sens dans ses veines, contre son pouls, dans son sang, la blessure de la vie ainsi que la douceur, la chaleur, l'humanité tapie.
Elle retire alors son poignet et ses yeux écorchent un tics nerveux qui fait plisser son œil gauche et dans le silence du soir, je vois ses yeux scintiller, je vois qu'elle a sué et pleuré.
Je ferme à nouveau les yeux pour voir encore plus sombre que la nuit, penche la tête en arrière et rencontre l'abri de la pierre en tirant sur ma cigarette.
Soudain, je n'aspire plus qu'un dioxygène froid, glacial, trop réel pour mon corps. Quand je rouvre les yeux, je vois Myla jeter au loin la clope.
Je hausse un sourcil quelque peu confu.
-Jeter une clope par terre, bonjour la pollution.
Je tire de ma poche de pantalon une boîte de cigarettes qui m'est à nouveau de suite arrachée. Irrité et à bout de toutes les patiences du monde, je bondis sur mes pieds et fait face à Myla qui me montre ce qui est écrit sur la boîte, cette citation même que tout le monde a fini par connaître par cœur, comme gravée dans notre propre peau.
Je soupire et me rassois près d'elle.
-La vie tue aussi. À la différence, quand on fume, on sait de quoi on va crever. C'est marrant pas vrai ?
J'ai voulu récupérer mon paquet quand soudain, Myla l'a jeté derrière moi, dans l'eau froide qui emporte la vie.
-Non mais c'est quoi ton problème, bordel de merde ?! Tu sais combien ça coûte un seul de ces putains de paquets au moins ?
Elle me regarde alors et comme la première fois que nous nous sommes vu, elle glisse ses doigts contre sa bouche pour signaler son silence et je l'ai détesté rien que pour ça.
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