Rose Georges Adams,

Je me suis trompé, Cole est resté. Il n'a rien dit à propos du baiser, n'a rien laissé transparaître. Peut être s'était-il simplement dit que ce serait égoïste de sa part de partir ? J'ai été soulagé de constater sa présence ce matin mais, au son de l'éventualité qu'il ne demeure pas à coeur joie, j'aurais presque préféré qu'il me fuit deux ou trois jours. Rose, Cole est resté le même. Il n'a pas cherché à coiffer ses cheveux blonds, partant dans tous les sens sur son crâne. Il a hésité quelques minutes avant de s'approcher du tourne-disque pour y lancer un morceau de Bob Marley, effrayé d'une quelconque réaction de ma part depuis l'histoire du fameux vinyle. Et j'ai dû lui effacer la crème qui s'était égarée au bord de ses lèvres lors du petit-déjeuner. Rose, même si ce geste m'était habituel, lorsque mes yeux ont dérivé sur sa bouche, j'ai eu du mal à m'y détourner. J'ai tant de curiosité à propos de ce qu'il s'est passé. Mais sais-tu ce qui me perturbe le plus ? Tout est si brouillé en moi que je n'arrive pas à en avoir un avis. Rose, je ne sais pas si j'en suis mal à l'aise ou si cela m'est égal, je ne sais pas si j'ai aimé ou détesté, je n'arrive pas à déceler un sens ou une vérité à cet événement. Je meurs complètement d'envie de le questionner. Même de l'embrasser de nouveau, pour ne pas être surpris et, alors, bien comprendre ce que j'en pense. Mais il y a quelque chose qui me dissuade de faire ou de dire quoi que ce soit. Et ce quelque chose est un quelqu'un. Et ce quelqu'un en aurait bien son mot à dire. Emilie. Emilie, sa femme. Car, quoi que je finisse par en songer, Cole est un homme qui me sera à jamais intouchable, un homme appartenant à une femme. Et quelque part, c'est aussi mon cas.

Mickael.