13 - The Decision.

" Ma Chère Amie,

J'ai essayé. J'ai essayé d'aller vers le monde, mais il est évident qu'il ne veut pas de moi. De toutes mes forces, j'ai ignoré ma rancœur et tendu la main. De toutes leurs forces, ils m'ont fait comprendre que je n'ai pas ma place dans leur société. Tout me dégoûte ici-bas. Et je dégoûte le monde.

Pourtant, alors que j'écris ces mots, mon esprit s'embrume d'agréables souvenirs.

Mes nombreuses soirées, où assis sur le sable blanc, je laissais mon regard se perdre dans l'écume des vagues.

Mes nombreuses nuits, où à la belle étoile, j'écrivais mes pensées vagabondes sur un petit carnet.

Mes nombreux après-midi, où enfermé dans ma chambre, je jouais des mélodies au piano en chantant.

Et tout ce temps, à lire et relire vos lettres qui me remplissaient d'espoir. Je ne vous remercierai jamais assez pour avoir tenté de me sauver. Pour avoir éclairé mon obscur quotidien.

Merci.

Désormais, j'ai fait mon choix. Je ne peux plus rester vainement dépendant de vous, je ne peux pas vous imposer ce fardeau.

Alors je m'en vais.

Je ne supporte plus ces trop nombreuses crises qui me font sombrer dans la folie.

Je ne supporte plus de voir mon corps recouvert de blessures.

Je ne supporte plus ces pensées sombres qui me détruisent.

Je ne suis plus qu'un vulgaire mélange d'alcool et de cigarette, qui ne sait même plus différencier l'irréel de la réalité.

J'en viens à me demander si vous êtes bien réelle. Peut-être que je suis devenu fou et que ces lettres étaient le fruit de mon inconscient cherchant inutilement une raison de ne pas céder.

Je ne sais pas. Je n'ai pas envie de savoir.

J'aimais aller m'asseoir près de la mer, sur le sable. Il y avait un reflet, à la surface de l'eau. Celui de mon sourire que je croyais d'espoir, si j'ignorais que je ne cherche qu'à revoir un visage ami sur l'onde silencieuse, paisible compagne de ma solitude.

Mais le roulis des vagues s'engouffre dans une brèche, l'engrenage s'immobilise. La noyade est inévitable. Je n'ai pas réussi à nager à contre-courant.

Qu'il est merdique ce monde.

Je ne sais pas comment terminer cette lettre. J'aimerai vous dire encore tant de choses. J'aurais tant aimé vous rencontrer.

J'aurais voulu entendre le son de votre voix, me plonger dans votre regard.

J'aurais voulu vivre l'une de ces comédies romantiques hollywoodiennes où l'histoire finit bien.

J'aurais voulu encore tellement de choses.

Et j'en regrette tant d'autres.

Je n'ai aucune envie de terminer cette lettre, ça me fend le cœur. Je vous serai éternellement reconnaissant.

Ma Chère Amie, merci pour tout.

Je vous ai aimé.

Yuka. "

Vite. Aryo traversait en courant la dernière allée qui le séparait de l'appartement de son ami.

Vite. Les larmes dévalaient, ravageaient déjà ses joues rougies.

Vite. Avant qu'il ne soit trop tard.

Il survola presque l'escalier de l'immeuble et ouvrit violemment la porte d'entrée.

– Yuka ! Hurla-t-il de toutes ses forces alors que seul le silence lui répondait.

Il se précipita sur le corps de son ami, endormit sur le canapé. Il se mit à le secouer, à le serrer contre lui, comme un enfant abandonné s'accrochant désespérément.

– Yuka, tu peux pas me faire ça ! Pleurait le jeune homme à chaudes larmes, la voix tremblante et suppliante.

Son aîné se releva en soupirant, regrettant son réveil brutal. Lorsqu'il ouvrit les yeux, il ne put s'empêcher de poser un regard attendri sur son ami. Il s'était presque allongé lui, avait enfoui son visage larmoyant dans son cou et ses mains agrippaient avec force son sweat.

– Aryo, chuchota-t-il en passant doucement la main dans les cheveux du jeune homme. Ne pleure pas s'il te plaît.

Il n'était pas sûr d'employer les bons mots, si tant est qu'il y en avait. Que pouvait-il dire après tout ? Comment l'expliquer ? C'était impossible, il n'y avait pas de mots pour ça.

– Comment peux-tu me demander ça ?! S'énerva Aryo en resserrant ses poings.

– Tu as raison, déclara-t-il presque dans un murmure, tout comme tu as raison de t'énerver, je le comprends. Après tout, je ne suis qu'un lâche, un abruti et un égoïste.

– Ça suffit ! Cria Aryo relevant la tête. Ses joues étaient trempées, ses yeux rouges et ses lèvres tremblaient. Arrête de te dénigrer ! Tu n'es pas comme ça, tu vaux tellement mieux !

Yuka ne put répondre. Il entrouvrit légèrement la bouche, surpris, puis se mordit la lèvre inférieur pour retenir ses larmes.

– Pardonne-moi Yuka, je ne pense même pas que tu sois lâches. Continua Aryo en posant à nouveau sa tête sur le torse de son ami, je sais à quel point tu en as besoin. C'est moi l'égoïste dans cette histoire, je ne peux pas m'empêcher de penser que j'ai besoin de toi. S'il te plaît, ne t'excuses pas.

Yuka se redressa entièrement pour serrer son ami dans ses bras. Il ne voulait pas que celui-ci voie ses yeux embués de larmes. Il pleurait. Il s'en voulait profondément. Mais il ne pouvait pas revenir en arrière, il devait le faire.

– Je ne trouve rien d'égoïste dans ta réaction, au contraire elle me touche beaucoup. Tu sais, même si je ne suis plus physiquement présent, je ne t'abandonne pas. Je veillerai toujours sur toi, je te le promets. Affirma-t-il d'une voix rassurante alors que ses larmes dévastaient déjà son visage. Mais il ne devait rien laisser paraître, il devait tenir, pour lui. Laisse-moi partir Aryo, et soit heureux pour moi, d'accord ? Tout ira bien pour toi, j'en suis sûr. Tu as un bel avenir qui t'attends, tu es bien entouré et je veillerai sur toi. Sa voix se brisa en un sanglot. Putain Aryo je suis désolé. Pleurait-il en serrant le jeune homme contre lui. Il caressa en tremblant ses cheveux et enfouit son visage dans son cou. Je suis désolé, se mit-il à répéter inlassablement.

– Faut qu'on arrête de s'excuser, on a l'air ridicule. Finit par ricaner nerveusement Aryo en essuyant ses larmes. Et ça nous ressemble pas de pleurer autant. Ajouta-t-il en rigolant en ébouriffant gentiment les cheveux de son aîné.

Celui-ci esquissa un sourire en desservant son étreinte et essuya à son tour ses joues. C'était la première fois qu'il pleurait sincèrement devant Aryo, la première fois sans être en plein milieu d'une crise. C'était agréable, il se sentait comme soulagé. Il prit le temps d'observer le visage de son ami, il voulait en retenir le moindre détail ; de cette mèche de cheveux qui retombait légèrement sur son front à ce minuscule grain de beauté à côté de son œil gauche. Il fit un grand sourire, emplit de tristesse et d'amour, et se pencha pour le serrer à nouveau dans ces bras.

– Aryo ? Demanda-t-il, presque dans un murmure.

– Oui Yuka ? Lui répondit-il avec une voix trahissant ce même sourire.

– Merci pour tout.

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