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Genre : Don, mystère

Elle mit une rose dans le grand vase déjà bien rempli. C'était un rituel qu'elle avait pris l'habitude de faire, et en fin de journée le vase était toujours plein.

Elle s'assit sur sa chaise près de la table, attendant le prochain client. C'est un homme qui entra dans la petite tente. C'était une tente éclairée aux bougies, et décorée de bijoux et tissues colorés disposés sur les murs en toiles.

Luna était voilée au niveau de la bouche, comme toutes les diseuses de bonne aventure de Lucrèm. C'était une façon pour elles de garder un certain anonymat, du moins c'est ce que supposait Valérin. Il se tortillait sur sa chaise comme s'il allait subir le jugement dernier.

Aucun des deux ne dit quoi que ce soit. Luna mélangeait les cartes de tarots sans logique apparente. Lui l'observait, plus terrifié que jamais.

Après tout il avait entendu parler d'elle. Cette femme mystérieuse qui se disait capable d'arranger le passé, bien plus que prédire l'avenir. Elle était très réputée dans le milieu, tout comme elle était crainte. On disait que sa magie était inégalable, incroyable et surtout réelle, bien que beaucoup de personnes considéraient qu'elle n'était qu'un charlatan parmi tant d'autres.

Pour Valérin, elle était la seule à pouvoir l'aider. Il ne voulait pas connaître son avenir, il voulait changer son passé, coûte que coûte. Et, il savait que cette séance avait un prix bien plus conséquent que celle d'un concurrent.

« Vous avez la rose rouge ? Avait-elle demandé.

– Oui, bien sûr, dit-il tremblant, tout en sortant la rose de son sac.

– Bien, nous pouvons commencer dans ce cas. »

Elle déposa les cartes face cachée sur la table.

« Choisissez-en une », lui ordonna-t-elle.

Il s'exécuta sans dire un mot. Il ne comprenait pas bien le but de tout ceci. Pour lui, il suffisait de dire à cette femme ce qu'il voulait changer et puis elle n'aurait plus qu'à faire son truc. Cependant, il ne dit rien, et ne fit rien à l'encontre de la diseuse de bonne aventure - drôle de nom d'ailleurs pour une telle spécialité -, après tout il avait déjà payé.

La carte qu'il avait retournée ne lui inspira rien, et à cet instant Luna aurait pu lui dire n'importe quoi qu'il n'en penserait pas moins. C'était des dessins ésotériques semblant muets de sens.

« Bien, dites-moi ce que vous aimeriez changer ?

– Un garde de la cité a volé ma fille, j'aimerais pouvoir l'en empêcher. Je n'ai aucun moyen de la récupérer maintenant, et j'ai bien peur qu'ils l'aient vendus en tant qu'esclave, ou pire. Vous devez me laisser une chance de partir avec elle avant qu'ils ne pénètrent ma maison. Elle est la seule personne qui me reste. Elle est mon tout, et j'ai l'impression de devenir fou sans personne à qui parler. »

Luna ne dit rien et récupéra toutes ses cartes. Elle se leva et les rangea.

« Qu'avez-vous vu dans la carte que j'ai choisie ? » s'informa-t-il, curieux.

Mais elle ne répondit pas. Au contraire, elle revint s'asseoir, avec cette fois un bocal rempli de... petites perles ?

Elle ouvrit le bocal en verre et en choisi une bien ronde et colorée.

« Avalez ça et tout s'arrangera. »

Valérin fut surpris, mais s'exécuta. Après tout il ne risquait rien à le faire. Il mit l'objet dans sa bouche. Au final, ce n'était pas une perle, ça ressemblait plus à un bonbon, sucrée et doux.

Un moment après, elle le renvoya chez lui, lui affirmant que tout recommencerait une fois rentré. Heureux mais dubitatif, il se leva et partit, ça lui avait tout de même coûté une rose.

Elle prit la rose et la plongea dans le vase, satisfaite.

Sa journée était terminée et plus les jours passaient plus elle avait de clients. Tout le monde connaissait son prix : une rose rouge. C'était illégal à Lucrèm, mais les gardes ne disaient rien, ils savaient.

Ils savaient, que la confiserie qu'elle délivrait ne servait que d'illusion, c'était leur petit secret.

Ils kidnappaient les gens, et pour éviter la mauvaise presse mondiale, Luna délivrait cette drogue qui rendait heureux, qui faisait oublier. En retour elle avait le droit d'avoir des roses rouge, ces roses blanches que l'on baignait dans le sang.

Valérin était rentré et il était heureux, il ne savait pas pourquoi, il savait juste comment : c'était cette femme, la diseuse de bonne aventure, celle qui demandait une rose rouge.

Elle prit son vase et ferma sa tente en sortant. Elle se dirigea dans la pénombre vers ce lieu dont elle avait l'habitude, comme tout rituel, et déposa les fleurs sur la tombe. La seule de tout le cimetière qui était fleurie par les fleurs du sacrifice, celle de sa mère.

On disait que ces fleurs pouvaient exaucer les vœux. Comme ses clients qui croyaient en son don, elle, elle croyait en cette superstition.

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