Chapitre 1
Je suis en retard. Comme d'habitude. Je suis impressionnante, je n'ai rien d'autre à dire. De base, j'étais à l'heure, mais depuis, j'ai oublié de prendre une veste, ce qui peut accessoirement être utile et j'ai fait un aller-retour supplémentaire pour prendre mes clefs de voiture. Ma sœur, Mahima, est en train de se moquer de moi à force, elle qui a toujours l'art d'être excessivement à l'heure ne comprend pas une seule seconde comme je fais pour être aussi désorganisée.
Quand je monte enfin en voiture, je suis officiellement encore à l'heure, il me reste vingt minutes, soit le temps exactement qu'il faut normalement pour se rendre à Kingston, sauf que mes chiffres sont fossés puisqu'ils sont à partir de conducteur expérimenté, alors que moi, ce sera la première fois que je ferai le trajet. Donc je peux dire que je suis déjà en retard. Génial. Premier trajet en voiture seule et déjà en retard, ça promet pour le futur franchement, c'est très encourageant.
Quoi qu'il en soit, j'arrive enfin à Kingston à notre point de rendez-vous avec cinq bonnes minutes de retard, heureusement que je connais Pâris et que je sais qu'il ne m'en tiendra pas rigueur, peut-être même qu'il se doutait déjà de mon retard.
— Bon anniversaire Kam, me souhaite-t-il en me rejoignant quand je sors de ma voiture.
Alerte événement exceptionnelle, Pâris est en chemise en plein mois de juin ! C'est à peine si j'y crois ! Il doit définitivement être fou de moi vu comme il est frileux au quotidien.
— Merci bien, tu as passé un bon week-end ?
— Il est de mieux en mieux. Et toi ?
Je ne peux pas m'empêcher de sourire, il est trop mignon.
— Tranquille. Wow, tu as mis une chemise, ça doit être un jour exceptionnel.
Après tout, j'ai bien le droit de me moquer un peu de lui.
— Je risque surtout de regretter, je vais finir par avoir froid.
— Je te passerai ma veste au pire, rigolé-je en le pensant plutôt sérieusement, j'étais prête à partir de chez moi sans, je suis largement capable de m'en passer.
— De une, merci de ne pas me ridiculiser et de deux, je crains que malheureusement, elle soit trop petite pour moi de toute manière.
— On va se promener ? proposé-je sans relever sa forme de fierté, même si dans un sens, il a peut-être raison.
Nous nous baladons main dans la main pendant plusieurs minutes dans le parc face à l'hôpital, en faisant le tour plusieurs fois en discutant, savourant l'après-midi qui va passer bien trop vite. Après un moment, Pâris me propose d'aller à la Marina de Margate. J'accepte sans problème, j'adore cet endroit et il est juste sublime. Sans compter que ce n'est pas en ville, mais en bord de mer, ce qui présente un avantage incontestable. Après un court débat, nous décidons de prendre sa voiture et non la mienne, non pas parce qu'il n'a pas confiance en moi en termes de conduite, plutôt parce que sa Mazda est quand même un peu plus confortable que ma Kia, pour une première voiture, c'est une bonne voiture. La route se passe sans encombre et passe plutôt vite, en moins de vingt minutes, nous sommes garés au niveau de l'air à bateau.
J'allais sortir, mais au même moment, je vois une petite vieille à l'air aigri. Sauf que cette vieille peau, je la reconnais, c'est madame Fix, la pire prof que je n'ai jamais eue, une prof qui ne devrait jamais être autorisée à enseigner à qui que ce soit. Elle ne comprend rien à rien, elle est désagréable, hautaine, incompétente et elle rabaisse tous ses élèves, même les meilleurs, une véritable saloperie. Mais très honnêtement, aujourd'hui, j'ai tout sauf envie de la croiser, encore moins de lui parler. Pourquoi diable doit-elle sortir son chien maintenant ? Elle n'aurait pas pu attendre un peu plus longtemps ?
— Oh non... murmuré-je en voulant absolument me trouver un trou de souris.
— Qu'est-ce qu'il y a ? s'inquiète Pâris en me regardant fixement.
— Là-bas, il y a madame Fix qui promène son chien, c'était ma prof d'anglais quand j'étais à Margate et vraiment, je la déteste, si jamais elle nous voit, elle va se taper la causette, ça va être insupportable, je ne me souvenais plus qu'elle habitait dans cette rue...
— Tu veux qu'on fasse quoi ? me questionne-t-il en regardant vers le point que j'indique. On peut attendre dans la voiture si tu veux ?
— Non, c'est bon, ça va aller, du moins j'espère, mais tu es prévenu, c'est une emmerdeuse et si on a un problème, on saura qui accuser.
Courageusement, je sors de la voiture en fusillant du regard la petite vieille et son chien, qu'elle ne s'avise surtout pas d'ouvrir la bouche, je ne veux pas l'entendre. Quand Pâris passe son bras par-dessus mes épaules, madame Fix semble vouloir crier au scandale, mais je décide de l'ignorer royalement, c'est ma vie, elle n'a rien à redire. Voulant m'en éloigner au plus vite, au passage j'entraîne Pâris vers le ponton principal de la marina.
— C'est si beau ici, j'ai toujours trouvé ça incroyable, remarqué-je en marchant le long de plateforme.
— Je ne t'ai pas amené ici pour rien, déclare-t-il plutôt fièrement.
— Je t'ai déjà dit que je t'aime ? vérifié-je en me posant vraiment la question.
— Je crois bien oui, affirme-t-il en embrassant mes cheveux.
Une fois au bout du ponton, je m'assois pour admirer la mer et il fait pareil, même si le bois soit un peu humide et vaseux. Nous restons comme ça un moment, jusqu'à ce que j'affirme avoir faim, me doutant bien que le connaissant, il aura quelque chose à manger dans sa voiture.
— Si tu veux, j'ai des muffins dans ma voiture, je vais te les chercher, propose-t-il immédiatement.
Je m'en doutais, je l'aurais parié. Parce que franchement, je n'ai pas choisi la dernière des tâches en tant que copain, au contraire même, il est parfait, intelligent, débrouillard, peut-être un peu frileux, mais ça se compense avec son talent en cuisine et son charme naturel.
— Tu es un ange, c'est incroyable, mais j'y vais, c'est bon, affirmé-je motivée, m'imaginant déjà très bien en faire disparaître discrètement.
— Serait-ce un moyen de te réchauffer ? vérifie-t-il comme régulièrement en semblant absolument vouloir m'entendre dire un jour que j'ai froid.
Mais non seulement les fois où j'ai froid sont rarissimes, mais en plus, c'est encore plus rare que je l'avoue, surtout en premier.
— Absolument pas, j'ai juste envie d'en piquer plusieurs au passage.
— Je les ai faits pour toi de toute manière, remarque-t-il ne se doutant pas qu'il ne faut pas dire une chose pareille, il ne va plus jamais revoir la couleur de ses muffins. Prends mes clefs, ce sera plus simple pour ouvrir la voiture. Et fais attention, le ponton glisse.
Non, mais il croit quoi l'autre ? Que je ne sais pas tenir sur mes deux pattes ? Il est sérieux ? Et il se permet vraiment d'insinuer une chose pareille ?
— Tu penses sérieusement que je n'ai pas d'équilibre ? Je peux même courir, aucun risque que je tombe, déclaré-je confiante.
Même si je suis confiante et que je le fais, je ne démarre rien de plus qu'un petit footing, c'est pour l'énervé, pas pour me mettre en danger non plus, je me doute bien que ce n'est pas des plus prudents de courir sur un ponton comme ça. Je suis au milieu de la plateforme lorsque je ressens un petit choc que niveau de la poitrine et que littéralement, je me vois tomber, comme si j'étais une spectatrice de mon propre corps. Et l'instant d'après, je me sens vraiment glissé, comme si j'avais été déconcentrée en pensant tomber avant de tomber. Sans avoir plus le temps d'y réfléchir, j'atterris sur les fesses, les jambes dans le vide en me rattrapant de justesse avec les mains pour ne pas tomber dans l'eau. Heureusement que j'ai de bons réflexes, parce que je ne sais définitivement pas ce qui c'est passé. Ça ne me ressemble pas de tomber, encore moins de perdre l'équilibre et jamais au grand jamais je n'ai eu de flashs comme ça. Je commence même à m'inquiéter pour ma santé mentale.
— Oups... fais-je en me sentant un peu bête, mais ne comprenant surtout pas ce qu'il s'est passé.
— Ça va ? s'inquiète Pâris à deux doigts de la panique en se levant.
— Oui, t'inquiète, je ne me suis pas fait mal.
Faux, je me suis quand même bien cogner le cul... Je vais avoir un beau bleu aux fesses, en plus de mettre rapper les mains. Mais je ne me suis rien fait de grave, alors tout est sous contrôle.
Je suis déjà en train de me relever quand il arrive à ma hauteur, n'ayant même pas besoin de son aide pour ça. Je dois aussi m'être un peu rappée la jambe gauche, parce que ça me brûle un peu le haut de la cuisse en m'appuyant dessus. J'ai dû faire une belle chute quand même, je ne suis vraiment pas douée, je ne sais pas comment j'ai pu me débrouiller.
— Kam... Ta jambe... remarque Pâris soudain livide.
— Quoi ma jambe ? m'étonné-je soudain moi aussi inquiète, devinant déjà que ce n'est pas la bonne jambe...
Craignant le pire, je me penche pour voir de quoi il parle, sachant déjà où regarder : jambe gauche, du milieu de la cuisse jusqu'au pied. Et j'ai bien raison, c'est encore et toujours ma jambe gauche, depuis que j'ai six ans, je n'ai plus aucune sensation dans cette partie-là du membre, alors à chaque fois que je m'y blesse, le seul moyen de m'en rendre compte, c'est en surveillant.
Et pour le coup, j'ai été forte, très forte même. Je ne sais pas exactement comment, mais j'ai déchiré mon pantalon et je me suis entaillée la jambe, sans doute assez fort vu la quantité de sang qu'il y a, mais je ne prends pas le temps de regarder plus en détail, me sentant déjà mal en voyant la quantité de sang que j'ai perdu.
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