Esprit fissuré
Lorsque Zhongli retourna chez Ajax, il s'attendait à l'y trouver, mais il s'avéra que le bâtiment était vide. En d'autres circonstances, il ne s'en serait pas formalisé, ayant l'habitude que le Fatui soit introuvable lorsqu'il exerçait son rôle d'Éxécuteur. Seulement, cette fois, la situation était tout autre. Le roux était blessé et, surtout, il était supposé rester chez lui pour se reposer, comme il le lui avait promis.
Qu'il n'ait pas tenu sa parole attrista l'Archon, mais que pouvait-il y faire ? Il ignorait où il se trouvait. Pourtant, il se mit à le chercher dans tout Liyue. Il n'aimait pas l'idée de ne pas savoir où il était. Il n'aimait pas l'idée qu'il soit probablement seul, potentiellement en danger et très certainement en train d'ignorer son état physique.
†
C'était une mauvaise idée, Ajax le savait. Il avait promis à Zhongli de laisser à ses blessures le temps de guérir, mais voilà qu'il se trouvait au milieu d'une plaine déserte, à attendre la personne concernée par sa nouvelle mission. C'était, cette fois, une simple transaction entre les Fatuis et un marchand.
Il devait, certes, être discret, car il valait mieux que cette affaire reste secrète, mais ce travail n'était guère compliqué et ne laissait place à aucun imprévu. Du moins l'espérait-il car, dans le cas contraire, il savait que son aimé ne manquerait pas l'occasion de lui reprocher son imprudence.
Il en avait conscience, mais il détestait être inactif. Afin de faire passer le temps jusqu'à ce que celui qu'il attendait arrive enfin, il tenta de comprendre quel intérêt cette transaction revêtait pour les Fatuis. De ce qu'il en savait, le chargement qu'il devait récupérer était constitué de matières premières qui ne se trouvaient pas en Liyue.
Plus précisément, il s'agissait de produits d'Inazuma et de Sumeru. Il y réfléchit un moment, mais, ne sachant pas ce qu'il devait récupérer précisément, il ne parvint pas à établir de lien logique entre les infimes éléments qu'il avait à disposition. Non pas qu'il en avait quelque chose à faire. Il ne s'en préoccupait en réalité aucunement. Il devait juste les récupérer, payer le marchand et s'en aller.
Ce qui l'étonnait, c'était qu'il lui avait spécifiquement été précisé qu'il n'avait pas à faire l'inventaire des marchandises. De tels cas se produisaient parfois, mais cela n'arrivait que lorsqu'il s'agissait de petites transactions sans importance et ce n'était jamais à lui que l'on confiait ce genre de tâches insignifiantes.
Ce faisant, il ne comprenait pas ce qu'il faisait là. Selon lui, il aurait été plus judicieux de déléguer ce travail à un Fatui de rang inférieur et de lui confier une autre mission, plus adaptée à l'Éxécuteur qu'il était. Ajax continua d'attendre le marchand, pensant cette fois à Zhongli et aux arguments qu'il lui fournirait pour justifier son absence chez lui alors qu'il devait se reposer.
Le commerçant arriva finalement, à bord d'une charrette tirée par un cheval. Ils s'échangèrent des salutations d'usage, procédèrent à la transaction et tout fut fini. Le roux se dirigea vers la cité portuaire, ignorant qu'une silhouette profita de son départ pour s'approcher du marchand sans bruit et mettre fin à sa vie d'un coup de poignard au cœur.
Le Snezhnayen apporta son chargement à l'endroit qui lui avait été indiqué. Il se détourna ensuite avec l'intention de s'en aller, ayant terminé ce pour quoi il était venu, mais quelqu'un l'interrompit, s'adressant à lui.
« Un autre travail vous a été attribué, Jeune Sire. » lui dit un Fatui, en lui tendant l'ordre de mission. « Aucune durée n'a été définie pour sa réalisation, mais il est dans votre intérêt qu'il soit effectué au plus tôt. Assurez-vous d'être entièrement seul avant de prendre connaissance des détails.
- ... Très bien. »
Sans un mot de plus, il se saisit de ce que tenait l'homme, le fit disparaître dans ses poches et put enfin partir. Sur le chemin de son domicile, il prit le temps de flâner et de discuter de tout et de rien avec quelques personnes. Il ne les connaissait pour la plupart pas. Il voulait juste se changer les idées, oublier pendant quelques instants qu'il était un Fatui, oublier son rôle, son travail, les missions qu'on lui confiait jour après jour et ce faux nom qu'il devait porter.
Jamais encore il n'avait été si désireux de n'être qu'Ajax. Jamais encore il n'avait souhaité avec tant d'ardeur que Tartaglia n'existe pas. Si Tartaglia n'existait pas, il se sentirait heureux sans restriction aux côtés de Zhongli. Or, puisque cette fausse identité faisait partie de lui, puisqu'elle le conditionnait au fait d'être un Fatui, il n'arrivait jamais vraiment à se détendre.
Il soupira, fatigué par tout ce qu'il devait gérer en même temps, et termina de rentrer chez lui. Il s'attendait à y trouver Zhongli, mais il s'avéra que le bâtiment était vide. Quelque part, cela l'arrangeait. Il ne voulait pas que son compagnon le voit dans cet état. Il se rendit dans sa chambre et s'assit au bord de son lit, soudainement las. Il voulait se reposer, oublier tout ce qui lui pesait, mais cet ordre de mission dans sa poche le préoccupait.
Voulait-il vraiment le regarder ? Voulait-il vraiment se renseigner, au risque de découvrir qu'il devait à nouveau tuer quelqu'un ? Ne pouvait-il pas le brûler, le détruire, faire comme si ce morceau de papier n'avait jamais existé ? Il prit l'objet de ses angoisses dans sa main, le fixa pendant plusieurs secondes sans savoir ce qu'il devait en faire, puis décida de le mettre sur sa table de nuit, jugeant préférable de se reposer avant de faire un choix.
Il se défit de son poignard, de son œil divin et de son masque, les posa près de lui et s'allongea, se sentant lourd et à bout. À peine eut-il fermé les yeux qu'Ajax sombra dans un sommeil agité par le cauchemar récurrent qu'il faisait ces derniers temps.
Il se déroulait toujours de la même façon : un rendez-vous avec Zhongli, un moment agréable entre eux, puis l'instant fatidique où, inévitablement, il blessait son conjoint, son amour, sa lumière. Il perdait le contrôle de cette part de lui assoiffée de sang, de combat et de violence, blessant cet homme auquel il tenait tant.
Il se réveilla brusquement, le souffle court, la vision brouillée par ses larmes, tremblant, assailli par la crainte, les remords et la haine. La crainte de faire du mal à celui avec lequel il voulait passer sa vie. Les remords d'être incapable de faire ce qu'il fallait pour qu'ils puissent être heureux à jamais. La haine envers les Fatuis, envers ses armes, envers son œil divin, envers son masque, envers Tartaglia.
De la haine envers lui-même, pour être lâche au point de refuser de se débarrasser de ce qui le faisait souffrir, par simple peur de découvrir qu'il n'était qu'un incapable et un faible. Il avait peur de se confronter à ce qu'il était réellement. Il avait peur de réaliser que le véritable lui n'était pas capable de rester auprès de Zhongli, peur de comprendre qu'il n'en était pas digne.
Assailli par les remords, la peur et le désir d'abandonner, l'esprit d'Ajax se fissura sous la pression de tout ce qu'il vivait au quotidien. Son regard dériva vers son masque, vers son œil divin, vers l'ordre de mission qu'il n'avait toujours pas regardé. Son regard dériva vers son poignard. À cet instant, une envie hésitante s'empara de lui, tandis qu'il se saisissait de l'arme. Voulait-il réellement rester dans cette vie où ce qu'il désirait lui était inaccessible ?
¤
Hey hey !
J'espère que vous allez bien (surtout après ce chapitre qui respire bien la joie)
Je vous souhaite une bonne journée ^^
(On va certainement revoir notre cher blondinet, au prochain chapitre)
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