Chapitre 54 - Déménagement
Chapitre Cinquante-Quatrième
« Louis ? Tu veux pas qu'on échange ?
— Comment ça ?
— Tu vas en marche arrière et moi en marche avant ?
— Et pourquoi on échangerait ?
— Parce que tu es gentil, répondit Rika avec un joli sourire qui était adressé au garçon en face d'elle. Et parce que ce tapis est vraiment lourd donc, si chute il devait y avoir, il vaut mieux que je tombe sur toi plutôt que l'inverse.
— On échangera quand on sera descendu, concéda le garçon. »
Mais ils n'avaient pas échangé en descendant du camion de déménagement, parce qu'à peine avaient-ils mis un pied sur l'allée gravillonnée qui menait à la porte d'entrée toute neuve de la maison qu'une jeune femme était arrivée vers eux. Elle avait chaleureusement salué Louis et avait embrassé Rika alors même que cette dernière ne savait pas qui elle était.
« Je vous laisse deux secondes. Je vais demander où je peux mettre ma petite fleur à Magda, expliqua l'inconnue en désignant le bébé qui dormait dans la nacelle. Et puis ensuite, je vous aide pour les derniers cartons.
— Dépêche toi ! Il en reste plus beaucoup !
— T'inquiètes, rit la jeune femme en entrant avant eux dans la maison. Magda ! »
Une fois qu'elle fut certaine qu'elle ne pouvait pas être entendu par la nouvelle arrivante, Rika tenta de prendre un air détaché et demanda:
« C'est une amie ? Ou peut-être une de tes ex ?
— Pourquoi tu demandes ?
— Comme ça. Pour savoir...
— Mmmhmmmh. Ouais, c'est une ex. Et le bébé, c'est ma fille. »
Rika dû afficher une drôle de tête parce que Louis ne réussit par a arrêter son fou rire.
« Je rigole Rika. C'est pas ma fille.
— Mais c'est ton ex, s'imagina la jeune femme sans laisser le temps à Louis de répliquer. Allez avance, on va pas dormir dans l'allée.
— Tu voulais pas qu'on échange ?
— Avance Van Den Wall ! »
Ça avait été le dernier aller-retour pour Rika et Louis. Tous les cartons de l'appartement de Nieuwe Prinsengracht avait enfin tous trouvé une place dans la nouvelle maison sur l'IJ. Et dès que Martijn avait entendu que c'était enfin terminé, il avait presque couru vers la nacelle du bébé posée à côté de la cheminée tant rêvée par Martijn.
« Salut toi... fit-il avec cette voix si particulière qu'on ne réserve qu'aux bébés ou aux animaux. Comme va ma nièce préférée ? Ça va ? Ça va ma Faustine ? »
Rika qui observait la scène d'un œil amusé, eut un déclic quand elle entendit le prénom du bébé. Faustine. C'est pour ça que le visage de l'inconnue de tout à l'heure ne lui paraissait pas si inconnu que ça. C'était Suzanne. La sœur de Martijn ; pas une ex de Louis. Elle se risqua un regard à ce dernier qui s'était assis juste à côté d'elle.
« Vas-y... Rigole...
— C'était trop tentant... se justifia Louis. T'aurais vu ta tête. Tellement drôle...
— Je te déteste.
— On sait tous les deux que c'est pas vrai. »
C'était une phrase que Louis avait dit pour la blague. Sur le coup, ça lui avait paru être drôle. Sauf qu'au moment même où les mots avaient passé ses lèvres, il s'était dit que Rika n'allait peut-être pas trouver ça très drôle. Et ça n'avait pas loupé. Elle n'avait pas trouvé ça drôle du tout. Parce qu'il n'avait pas le droit de lui dire ça comme ça. C'est lui qui avait voulu de cette situation, c'est lui qui lui avait demandé du temps avant de leur laisser une deuxième chance. Tous ces choix, c'était lui. Parce que Rika, elle, elle lui avait demandé de leur laisser une seconde chance, elle s'était excusée des dizaines de fois, elle avait tenté de recoller les morceaux, elle lui avait demandé de ne pas l'oublier.
« Pardon.
— Ça va, répondit-elle d'une voix froide.
— Frederika...
— Ça va, je te dis. Je reviens. »
Rika se releva du coussin sur lequel elle s'était installée pour retrouver Magda, Erda et Romy dans la cuisine. Les deux premières avaient commencé à ouvrir des cartons à la recherche désespérée des verres alors que Romy, accoudée à l'îlot central, observait la pièce avec un regard critique.
« Tu vois Marty avait raison. La cuisine blanche, c'est beaucoup mieux. L'autre ça aurait fait trop sombre avec le plancher.
— Ouais, enfin de toute façon c'est un peu trop tard pour changer, fit remarquer Magda la tête perdue dans un carton. Ils sont là, Erda !
— Qui a eu l'idée des équipes ? interrompit Rika en s'asseyant sur le seul tabouret haut qui avait été monté.
— Ah ! Ça, c'est Laura, dénonça Romy en levant les mains en signe d'innocence. Et c'est elle qui a fait les équipes aussi.
— Donc l'idée de me faire passer l'après-midi avec Louis, c'est elle.
— Ça s'est mal passé ? questionna Magda alors qu'Erda et Romy partaient vers le jardin avec les verres.
— Non ! Non, c'est pas ça... C'est que... Enfin voilà quoi. Ce que je veux dire, c'est : comment voulez-vous que j'avance si vous passez votre temps à me ramener à ce que j'ai foiré ? »
Magda se tenait de l'autre côté de l'îlot, face à Rika. Elle attendait que la pièce se vide doucement, tout le monde avait l'air de suivre Erda dans le jardin. Elle n'en pouvait plus de voir Rika regarder Louis comme ça, elle n'en pouvait plus de la voir malheureuse. Ça avait bien trop duré.
« Rika. Écoute. Nous, on veut juste que vous vous rendiez compte que vous vous aimez encore.
— Mais ça, je le sais que je l'aime encore. Mais je ne veux pas le brusquer.
— Ouais... Enfin si tu ne le bouscules pas un peu, ça va pas avancer votre histoire. Alors bon... Tes états d'âmes, tu les remballes.
— Ouais mais c'est de ma faute si on en est là.
— C'est de votre faute à tous les deux ! Arrête de culpabiliser. Y a aucune raison pour que lui continue de vivre sa vie et que toi, tu mettes tout sur pause dans l'espoir où il reviendrait un jour. Si tu ne le pousse pas, il bougera pas. Alors fais lui comprendre que tu ne l'attendras pas toute ta vie.
— Et je fais ça comment ? Je lui pose un compte à rebours ?
— Non. Tu fais des rencontres. Tu lui fais comprendre que s'il prend pas rapidement une décision claire, il va te perdre. Définitivement. »
X+X+X+X+X
On n'était pas jeudi, mais pourtant Magda était assise à une des tables de leur café. Elle avait passé la matinée au lycée pour les préparatifs de la rentrée du lundi suivant, puis elle s'était décidée à écrire ses vœux. Ça lui avait pris comme ça, sans réelles raisons, devant la photocopieuse. Alors à la sortie de l'école, elle avait directement été au café. Elle s'était acheté une salade en guise de déjeuner et avait trouvé une petite table au rez-de-chaussée. Avant même de commencer à manger, elle avait arraché la dernière page de son carnet bleu toujours dans son sac pour l'installer près dans son petit bol. Et puis elle s'était lancée, avait raturé, recommencé, effacé encore et encore, car aucune des premières phrases qui lui apparaissaient n'était satisfaisante. Il s'agissait ici de parler de son amour pour Martijn et ce n'était pas rien. Hors de question de se rater.
Honnêtement, elle ne s'était pas rendue compte du temps qui s'était écoulé et ce fut la voix d'Andrea, sa serveuse préférée, qui la sortit de sa tentative désespérée d'écriture.
« T'attends quelqu'un ?
-Pardon ?
-Je te demandais si tu attendais quelqu'un ce soir ? sourit Andréa en voyant l'air désorienté de sa cliente la plus habituelle. Pas Martijn. On n'est pas jeudi.
-Ah ! Non. Non, j'attends personne.
-Et qu'est-ce que tu fais ici ? T'as pas bougé de tout l'après-midi.
-Je tente d'écrire mes vœux. Ça fait un moment que je procrastine à vrai dire et je m'étais dit que venir ici m'aiderait. Mais pas tellement en fait... Il est quelle heure ?
-Dix-huit heures.
-C'est vrai ?! s'étonna Magdalena en appuyant sur l'écran de son téléphone sans réaction de ce dernier. J'ai plus de batterie...
-T'en fais pas. Je suis certaine que Martijn te cherchera ici en premier lieu, assura Andrea en récupérant la tasse vide de café sur la table. Et tu as réussi à écrire quelque chose ?
-Rien du tout, se lamenta la future mariée. J'arrive juste pas à commencer.
-Ouais... Pas facile... Ça vaut ce que ça vaut, mais je me souviens que ma tante avait commencer ses vœux par une citation qu'elle trouvait inspirante. Tu peux peut-être commencé par ici ?
-Mmmh... Pourquoi pas... De toute façon, ça ne coûte rien d'essayer.
-Je te laisse mon téléphone pour chercher le temps que je t'apporte un nouveaux café, prévint la serveuse en sortant son smartphone de la poche de son jean. Je reviens.
-T'es géniale ! Merci Andrea. »
Cette dernière lui adressa un sourire avant de repartir vers le comptoir exempt de quelconques clients. Magda n'eut pas à chercher très longtemps les quelques mots qui allaient la lancer. Non, en quelques survols d'écran, ils lui étaient apparus. C'était cette vieille citation de Zola à laquelle elle n'avait jamais vraiment cru. Elle rechaussa ses lunettes devant ses yeux, fit tourner une fois son crayon entre ses doigts - un vieux tic dont elle ne pouvait se débarrasser - et entama une nouvelle phrase. Cette fois-ci, ce fut la bonne.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top