Chapitre 4 - La Glace à la cerise

Chapitre Quatrième

Martijn était parti à pied de chez lui. Il ne savait pas trop où il allait mais, inconsciemment ou pas, ses pas l'avaient menés chez Louis. Il avait tapé le code qu'il connaissait par cœur sur le digicode, il avait monté les escaliers automatiquement et s'était retrouvé devant la porte de l'appartement bien avant qu'il ne comprenne comment. Il avait entendu Louis râler juste après qu'il ait frappé.

« Martijn ?! fit Louis surpris de voir son ami en pleurs derrière sa porte.

-C'était sa pilule, expliqua soudainement Martijn. La plaquette qu'on a vue. C'était sa pilule.

-Mais tu m'avais dit que vous...

-Je sais ce que j'ai dit, Louis. Je peux dormir ici ?

-Oui, oui. Rentre. »

X+X+X+X+X

Louis regarda l'horloge à côté de sa porte d'entrée. Neuf heures et demie. Martijn aurait déjà dû être au travail. Sauf qu'actuellement, Martijn dormait sur son canapé. Et il dormait comme un bébé ; Louis n'avait pas le courage de le réveiller. Alors il avait pris le portable de son ami et avait envoyé un message au patron de ce-dernier pour lui signaler que Martijn ne pourrait pas venir au travail aujourd'hui. Louis avait fini son café et était parti de l'appartement en direction de son travail, non sans avoir laissé un mot sur le frigo pour son ami.

Quand il était revenu le soir, Martijn était toujours sur le canapé. Mais cette fois-ci, il était réveillé, assis et regardait la télé.

« T'as bougé ?

-J'ai pris une douche.

-Bien. Je suis passé te prendre de la glace à la cerise. La Häagen-Dazs. Ta préférée.

-Merci, répondit Martijn en prenant la boîte que lui tendait Louis. Magda m'a appelé.

-Et vous vous êtes dit quoi ?

-Rien. J'ai pas répondu. Elle m'a laissé un message. Elle m'a dit qu'elle irait au café demain soir, et qu'elle m'y attendrait.

-Tu comptes y aller ?

-Non.

-Tu devrais y aller.

-Je pense pas non.

-Pourquoi tu n'écoutes jamais mes conseils ?

-T'y connais quoi au couple, toi ?

-J'ai déjà été en couple, je suis donc légitime à te donner mon avis, se défendit Louis en s'asseyant à côté de Martijn. Je suis resté trois ans avec Laura.

-Et depuis ?

-Depuis rien. Je te l'accorde. Mais j'ai trois ans d'expérience. Et suite à ces trois ans d'expérience, je te dis que tu devrais aller la voir demain. Et tu devrais écouter ce qu'elle à te dire.

-Je suis pas sûr d'avoir envie de savoir.

-T'as envie de savoir. Moi, j'ai envie de savoir ; alors j'imagine que toi aussi. Et puis de toute façon, tu ne vas pas pouvoir l'éviter très longtemps. Donc bilan: tu devrais y aller dès demain soir.

-J'irai pas. »

X+X+X+X+X

Magda avait peur. Peur que Martijn ne vienne pas. Peur que pour la première fois, en huit années de rendez-vous, ce jeudi, Martijn ne vienne pas. Il était dix-neuf heures et plus ça allait, plus l'angoisse montait chez elle. Elle avait cette boule dans le ventre qui grossissait et qui n'était pas prête de partir. Elle hésita à envoyer un message à Louis. Elle savait que Martijn avait dormi chez lui les deux dernières nuits, Louis l'avait prévenue par message pour ne pas qu'elle s'inquiète. Elle s'était quand même inquiétée.

Magda reporta son attention sur la copie qu'elle devait corriger. Elle avait dit à ses élèves qu'elle leur rendrait avant les vacances. Ils allaient la détester parce qu'elle n'allait pas leur rendre avant les vacances. Elle n'avait pas la tête à corriger leur devoir ; même les bêtises que Jorik avait écrit dans sa copie ne la faisaient pas rire, parce que non, si on devait retenir un point positif du Brexit ce n'était pas qu'il y avait une équipe de moins à l'Euro de football.

« Ils ne te font pas rire aujourd'hui ?

-Martijn... »

Magda ne savait pas si elle était soulagée ou si elle avait encore plus peur maintenant qu'il était en face d'elle.

« Je t'ai pris un Americano, commença-t-il en posant un gobelet sur la table à côté de sa trousse vert d'eau.

-Merci, murmura-t-elle. Je savais pas si t'allais venir.

-Il y a vingt minutes, moi non plus. Mais j'avais quelque chose à te dire et je pense que c'est mieux si on en parle en face à face.

-Je peux m'expliquer avant que tu décides quoi que ce soit ? »

Martijn la regarda en frottant son nez, et rien qu'avec ce petit rictus, Magda sut que, quoi qu'elle dise, ça n'allait pas changer grand-chose.

« On peut aller marcher ?

-Euh... Oui, répondit Martijn quelque peu surpris. Oui, on peut. »

Magda lui avait souri, mais il n'avait pas répondu. Elle avait rassemblé ses copies, les avait fourrées dans son sac à main et avait attrapé le café que Martijn lui avait apporté.

« On peut y aller. »

Ils étaient sortis du café côte à côte. Sans dire quoi que ce soit, ils avaient pris la direction du Rijksmuseum. Ils avaient déjà fait ce trajet des dizaines et des dizaines de fois ; mais aujourd'hui, ce trajet n'était pas comme tous les autres. Parce qu'aujourd'hui, la main de Martijn n'était pas dans la sienne. Parce qu'aujourd'hui, Martijn ne s'appliquait pas à la faire rire. Parce qu'aujourd'hui, quand ils étaient passés à côté du vendeur de churros, ils ne s'étaient pas arrêtés pour en acheter. Magda savait qu'elle devait lui parler. Même si Martijn ne voulait pas l'écouter. Tant pis. Elle devait s'expliquer, ne serait-ce que pour elle. Ils arrivaient près du musée quand Magda reprit la parole.

« Je veux une famille avec toi, Martijn. Vraiment. C'est ce que je veux.

-Ah bon ? C'est pas ce que j'ai cru voir hier ? »

Le ton de Martijn était froid. Glacial même. Il donna des frissons à Magda.

« Je ne le veux pas comme ça.

-Quoi ?

-Je... Je ne veux pas d'enfants parce que c'est pas le moment. Et puis, je ne veux pas être enceinte. Je ne veux pas d'un truc qui pousse dans mon ventre, j'ai peur de ne pas aimer être enceinte. Je sais que c'est bizarre mais... En fait, je... Je ne veux pas voir mon corps se transformer parce que j'ai mis trop de temps à accepter ce à quoi je ressemblais. Parce que je ne veux pas que tu me regardes différemment. Parce que ce que j'ai peur de ce nouveau regard que tu pourrais poser sur moi.

-Pourquoi tu ne me l'as pas dit dès le début ?

-Parce que je suis une femme et que je devrais avoir envie de ça. Je devrais avoir envie d'avoir cet enfant dans mon ventre. Je devrais avoir ce désir de maternité. Et ce désir devrait être plus fort que tout, mais non. Et j'aurais aimé pouvoir passer au-dessus de ça par amour pour toi, mais je n'y arrive pas.

-Et t'as mis quatre mois à te rendre compte de ça ? Et surtout tu t'es dit que c'était pas nécessaire de me tenir au courant quand ça t'ait apparu ?

-Je n'avais jamais pensé à ça avant, Martijn. Tu dois me croire. J'en ai pris conscience quand je me suis mise à paniquer à mon retard de règles. Quand j'avais la boule au ventre en faisant ce test de grossesse. Quand je me suis sentie soulagée quand j'ai pu voir que c'était négatif. Le truc, c'est que je savais pas comment te le dire, parce que t'avais envie de ça, ça crevait les yeux. Et l'idée d'une famille te rendait tellement heureux... Je ne pouvais pas briser tout ça. Donc j'ai commencé à reprendre la pilule sans te le dire.

-Et t'aurais gardé ça pour toi pendant encore combien de temps ?

-Je sais pas. J'en sais rien. J'y ai pas réfléchi. Je vivais ça au jour le jour.

-J'arrive pas à croire que tu me l'aies caché.

-Je suis désolée, Martijn.

-Je sais. Quand tu fais des conneries, t'es toujours désolée. »

Martijn avait accéléré le pas pour aller s'assoir sur un banc. Magda était restée un peu en arrière, elle ne savait pas si elle devait aller s'assoir avec lui ou si elle devait le laisser un peu seul. Elle regarda un moment Martijn assis sur ce banc. Ce banc face à la fontaine du Rijksmuseum ; et cette scène la ramena presque deux ans en arrière. A une époque où leur amour leur faisait déplacer des montagnes.



Magdalena regardait les jets d'eau de la fontaine s'ouvrir les uns après les autres. Si on ne prêtait pas attention, on pouvait penser qu'ils s'allumaient au hasard mais Magda pouvait assurer que non. Ça faisait une bonne heure qu'elle les observait et en réalité, il y avait un ordre. Un ordre bien précis. D'ailleurs maintenant, elle pouvait dire que le jet gauche allait éjecter de l'eau. Puis celui de droite, puis au centre, puis à droite, puis à gauche, encore à gauche, puis à droite, puis au centre.

« Il est trop mignon ce chien, fit une voix en s'asseyant à côté d'elle.

-Lequel ?

-Celui qui essaye d'attraper le jet d'eau en s'asseyant dessus. »

Magda sourit en voyant ledit chien qui s'était remis à courir après un nouveau jet d'eau.

« Comment tu m'as trouvée ?

-Quand t'as pas le moral, on fait toujours des soirées qui se terminent ici. Alors je suis venu.

-Merci, chuchota-t-elle avant de reprendre. Martijn ?

-Oui ?

-Tu vas rester avec moi ? Pendant le procès. Tu vas rester avec moi ?

-Si tu veux que je reste, je serai là. Je te l'ai promis Magda. Tant que tu voudras de moi, je serai là. C'est pas parce que je t'ai dit ça y a des années que ce n'est plus vrai. C'est toujours vrai et ça le sera toujours.

-Si t'es pas là, j'y arriverais pas. Je suis pas assez courageuse pour faire ça toute seule. »

Magda sentit le bras de Martijn passer autour de ses épaules, il la tira vers lui. Magda se laissa faire et sa tête alla se poser sur son épaule. Martijn embrassa ses cheveux pour la rassurer.

« T'as changé de shampooing ?

-J'en ai plus alors j'ai pris le tien ce matin, sourit doucement Magda. Et si on perdait ? Peut-être que papa avait raison et qu'il aurait dû me représenter...

-Non, t'as fait le bon choix. C'était pas une bonne idée que ce soit lui. Comment veux-tu qu'il défende sa fille face à son violeur. L'avocate que vous avez pris est tout à fait compétente, et vous n'allez pas perdre.

-Martijn... C'est sa parole contre la mienne. La parole d'une pauvre étudiante en histoire contre celle d'un banquier londonien. Parfois j'ai l'impression de faire tout ça pour rien...

-Tu dis la vérité. Pas lui. Il faut que t'ailles au bout Magda. Tu ne fais pas ça pour rien. Tu fais ça pour nous et surtout pour toi. Tu en as besoin. Et ça fait trois ans et demi qu'on se prépare. Il faut qu'on aille au bout. Ça va aller. Tant qu'on est ensemble, il ne peut rien nous arriver. »



Martijn était toujours assis sur ce banc, il finit par tourner la tête vers Magda. Il articula un « viens » en sa direction. Alors Magda était allée s'assoir à côté de Martijn.

« Je ne vais pas partir avec toi en France demain.

-Quoi ? Non ! Tu ne peux pas faire ça. C'est l'anniversaire de ma mère cette semaine.

-Tu lui diras que j'ai pas pu venir, qu'on a pris du retard sur l'organisation d'une expo et que j'ai pas pu avoir mes vacances.

-Martijn... Pourquoi tu veux faire ça ? Ça va nous faire du bien ces vacances.

-Je ne pense pas. Je pense que... Qu'il faut qu'on fasse une pause.

-Quoi ? Non, non, non. Martijn, faut pas du tout qu'on fasse de pause. Ça va pas s'arranger si on fait une pause.

-Magda, j'ai l'impression qu'on n'a plus du tout la même vision de notre futur. Et je pense que passer une semaine séparés pour penser à comment on voit notre avenir, ça va nous faire du bien.

-Ça n'existe pas les pauses, Martijn. Les pauses c'est juste des pré-ruptures ; et je veux pas de pré-rupture. Martijn, viens avec moi.

-C'est pas une pré-rupture Magda. C'est juste une semaine de réflexion. On verra ce qu'on fait quand tu vas rentrer.

-Martijn..., sanglota Magda tout doucement pour que personne ne la remarque.

-Et on ne va pas s'appeler non plus: pas d'appels, pas de SMS, rien. On ne va pas communiquer cette semaine. Je veux vraiment qu'on prenne le temps de réfléchir à nous. On n'y arrivera pas si on est l'un sur l'autre, il faut qu'on prenne de la distance. Réellement.

-Je ne veux pas faire ça.

-Arrête de pleurer Magda.

-Mais non ! Non, j'arrête pas de pleurer Martijn ! T'es en train de me quitter ! Alors non, je ne vais pas arrêter de pleurer !

-Je ne te quitte pas Magda, c'est juste une pause pour penser à nous et voir ce qu'on veut.

-Et on fait quoi si, quand je vais rentrer, toi, tu ne veux plus de moi ? »

Martijn ne répondit pas et prit Magda sans ses bras. Il ne répondit pas parce qu'en toute honnêteté, il n'en avait aucune idée.



--- NDA ---

Hello les pioupious 🐣❤️


Vous avez crus que je vous avais oublié hein ;) Mais non ! Ça risque pas mais vous savez ce que c'est: vacances, boulot, foot, sport, ... Pas de temps pour nous. 


Enfin bref. Ce chapitre est là. Bon alors pour ceux qui espéraient une réconciliation cette semaine c'est loupé... Et vous l'aurez compris, la semaine prochaine, on retourne en France mais probablement sans Martijn. ... ... ... Désolée. 🤭


Petite question présentation: est-ce que le flash back est assez clair ? Je déteste écrire "flash back" c'est moche et ça fait genre l'auteur qui arrive pas à se faire comprendre. Alors dîtes moi que je suis une auteur qui sait se faire comprendre ^^


Sinon, je sais que certain était intéressé. Je proposerais un nouvel exercice sur le cahier demain !! (plus tôt que 23h c'est promis ^^). J'espère voir certains d'entre vous au rendez-vous. Et pour les curieux, sachez que vous pouvez participer quelque soit votre niveaux que vous soyez auteur ou lecteur sur WattPad ;) 


Allez je vous fait plein de bisous footballistiques, 

Félicitation aux Belges qui lisent ceci, et rendez-vous mardi soir. Et là... Y a plus de "fraternité européenne" qui comptera. Chacun chez soi. 😈😘❤️


Uthopie. 🐥❤️⚽️

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