Chapitre 35 - La Lettre De Pierre

Chapitre Trente-Cinquième

Tous les ans, pour l'anniversaire d'Agnès ses quatre enfants font le déplacement jusqu'à la maison familiale. Et comme à chaque fois que les quatre frères et sœurs se retrouvent chez leurs parents, ils avaient ressorti le petit tableau de leur enfance et qui désignait celui qui allait devoir promener le chien. Et le tableau était catégorique, c'était à Charlie d'aller promener Yankee cet après-midi. Mais Charlie était parti faire du vélo avec Ariel depuis deux heures et personne ne savait à quelle heure ils comptaient leur faire honneur de rentrer. Alors Magda s'était sacrifiée pour s'occuper de la promenade du chien, mais son frère ne payait rien pour attendre, elle l'avait assurée. Martijn avait tenté de défendre Charlie avec des « Mais laisse-les ! Ils sont amoureux. Ils vivent dans un autre monde ». Mais Magda se foutait pas mal que son frère vive dans son monde ou non et qu'il soit amoureux ou non ; ce qu'elle voyait, c'était qu'elle devait promener le chien, et elle n'en n'avait pas du tout envie. Martijn avait tout de même accepté de venir avec elle, mais ça n'avait pas suffit à Magda pour qu'elle y aille avec le sourire.

Il était quinze heures et Yankee attendait bien sagement, assis juste à côté de la commode de l'entrée, que quelqu'un daigne attraper la laisser qui reposait dessus.

« Magda ! cria Martijn en attrapant la laisse. On y va ?! Faut pas qu'on rentre trop tard ce soir.

-Oui, je sais ! J'arrive ! »

En attendant que la jeune fille descende, il accrocha Yankee à la corde qui servait de laisse et ouvrit la porte.

« Magda ! Je t'attends dehors ! s'écria-t-il. Alex, où est-ce que tu étais ?

-Je suis allée chercher le courrier. C'est Granny qui m'a demandée.

-T'as bien fermé la porte ?

-Oui ! Et y avait une lettre pour Magda dans la boîte aux lettres.

-Comment ça ?

-Tiens, fit Alexandre en tendant une enveloppe toute blanche à Martijn. Faut que j'aille donner le reste à Granny.

-File. »

Alors que le garçon disparaissait à l'intérieur de la maison, Martijn observa avec plus d'attention l'enveloppe que venait de lui donner son neveu. Le nom de Magdalena avait été écrit au bic noir. Il y avait aussi l'adresse mais aucun timbre.

« Marty ? On y va ?

-T'as reçu ça, informa-t-il de but en blanc.

-Ici ?

-Oui. Alex vient de la ramener.

-Qu'est-ce que c'est que cette connerie ? Y a un nom dessus ?

-Non. Rien. Tu l'ouvres ? »

Magdalena attrapa ce qui lui tendait Martijn et déchira le haut rapidement. Elle parcourut le texte en un coup d'œil.

« C'est qui ?

-Pierre.

-Ton ami du lycée ?

-C'est ça. »

Magda semblait interpellée et bousculée par le texte qu'elle lisait. Sans réfléchir, Martijn mis la laisse dans les mains de sa fiancée.

« Prends le temps de la lire. Je pense que c'est mieux que tu la lises seule. »

Magda ne répondit même pas à Martijn, elle était déjà en pleine lecture. Elle appela doucement Yankee et partit seule vers la grille, le papier toujours dans les mains. Martijn la regarda s'éloigner seule en mourant d'envie de savoir ce qu'il y avait dans cette lettre. Mais ce n'était pas le moment. En attendant, il était rentré dans la maison.

« Bah le chien ? s'étonna Primaël qui était sur le canapé sa fille allongée à côté de lui.

-Magda y va seule finalement, expliqua Martijn en rapprochant le fauteuil près du canapé. C'est quoi le dessin animé ?

-Mulan, répondit Primaël en levant les yeux au ciel. Et ça vient tout juste de commencer.

-Tu regardes avec nous, Marty ?

-Un petit peu, oui.

-Pourquoi pas tout ?

-Parce que j'ai un rendez-vous avec Magda.

-Demain tu regardes un dessin animé avec moi ?

-Tu ne voulais pas qu'on prépare ton déguisement pour Halloween, demain ?

-Ah si. On pourra faire ça en même temps, non ?

-Oui, on pourra tout faire en même temps, répondit Martijn alors que son attention se portait sur Mulan.

-Super ! s'exclama Silena en se rallongeant sur le canapé.

-C'est un rendez-vous pour le mariage que vous avez ?

-Ouais. On doit commencer la préparation de la cérémonie.

-Grosse journée, donc.

-Me fais pas flipper comme ça...

-Je rigole ! Ça ira, tu verras. C'est pas comme si ma sœur adorait tout organiser comme elle l'imagine et ne laissait pas toujours le temps d'évoquer tes propres idées.

-Papa..., se plaignit Silena qui tentait d'écouter le film.

-T'exagères, rit Martijn en se calant bien au fond de son fauteuil.

-À peine et tu le sais comme moi, rit Primaël. »

X+X+X+X+X

« Tu veux en parler ? demanda soudainement Martijn alors qu'il remontait dans la voiture avec Magda après avoir quitté la salle paroissiale.

-De ?

-De ce qui te tracasse. Tu ne semblais pas dans ton assiette toute l'après-midi. C'est la lettre que tu as reçue tout à l'heure ?

-C'était pour s'excuser. La lettre de Pierre, c'était une lettre d'excuse, expliqua-t-elle devant l'air interrogateur du jeune homme.

-C'est une bonne chose, non ?

-Je ne sais pas. Je ne sais pas quoi en penser pour être honnête. Il explique qu'il est au courant pour notre mariage. On dit merci à Clarisse.

-Ils se voient ?

-Elle entraîne sa fille au basket. Il explique aussi qu'il s'est trompé, mais que tout ça lui paraissait juste... Surréaliste, impensable et impossible. Que ça ne pouvait pas avoir eu lieu juste sous ses yeux. Et puis il s'excuse. Beaucoup. J'ai l'impression que cette lettre, c'est juste pour soulager sa conscience.

-Chacun réagit comme il peut face à ça. Tu l'as bien vu avec tes frères. Baptiste n'a rien dit, Prim' a eu besoin d'être tout le temps avec toi et Charles s'énervait contre la Terre entière. On ne peut pas blâmer quelqu'un pour sa réaction parce qu'on ne la choisi pas vraiment.

-Tu le défends !?

-Non, Magda. Non. Ce que j'essaye de te dire c'est que chacun a réagi comme il a pu ; et que c'est compliqué de juger. Après je comprends tout à fait que ce qu'il ait pu te dire t'aies blessé et déçue.

-Mais enfin Martijn ! C'était déjà pas facile de leur dire tout ça. D'assumer tout ce qui m'était arriver devant mes amis, devant ma famille...

-Je sais, Magda... Je sais...

-Et tout ce qu'il a trouvé à me demander, c'est si je n'avais aucun souci à briser la vie d'un mec brillant.

-Je sais, Magda.

-Alors pourquoi tu le défends ?!

-Je ne le défends pas. Je lui en veux aussi. Énormément. J'essaye juste d'avoir un peu de recul, et de t'expliquer que c'est difficile de juger, et que ça fait plusieurs années maintenant ; peut-être qu'on pourrait prendre de réfléchir à tout ça, non ?

-Je crois que c'est ce qu'il attend, confia Magdalena. Mais je suis pas certaine d'être prête pour ça.

-Pourtant, il y a quelques mois, tu regrettais de ne pas pouvoir mettre son nom sur la liste des invités et c'est tout à fait compréhensible. Mais il fait un premier pas vers toi, c'est une occasion d'en faire un toi aussi.

-Et toi, t'as envie d'en faire un vers lui ?

-Je sais pas. Honnêtement, j'en sais rien. Mais j'imagine que je peux y réfléchir. »

Et Magda ne dit plus rien. Martijn avait bien compris qu'il venait de toucher une corde sensible et comme souvent Magda se refermait sur elle-même. Elle se décida à reparler alors qu'ils étaient arrivés chez les Valencourt. Le moteur était coupé et il s'apprêtait à descendre du véhicule.

« Il a recommencé. »

C'était comme un murmure, et Magda avait la tête désespérément tournée vers la fenêtre et pourtant Martijn avait très bien compris ce qu'elle venait de lui dire.

« Augustin ?

-Oui. Y a trois mois, son ex l'a quitté. Elle affirme qu'il lui a fait les mêmes choses qu'à moi. »

Martijn n'avait pas su quoi dire alors il avait attrapé la main de Magda et s'était laissé tomber dans le siège.

X+X+X+X+X

« Magda ! Je suis trop contente de te voir ! s'exclama Garance en ouvrant sa porte d'entrée.

-Moi aussi, Garance. Moi aussi, confirma Magdalena en riant. Tu peux me lâcher là ?

-Oui... Oui. Pardon. Mais t'es venue toute seule ? Ton mari n'est pas avec toi ?

-On est pas encore marié, fit remarquer la jeune femme en souriant. Et Silena et Alex les ont réquisitionnées avec Baptiste pour faire leur déguisement d'Halloween. Et moi, je suis réquisitionné pour la visite des maisons cette nuit.

-Tradition de famille américaine ?

-C'est ça.

-Je t'ai préparé un bon petit thé, fit Garance alors que Magdalena s'occupait d'accrocher son blazer au porte-manteau de l'entrée. Celui que tu m'as offert à Noël. Je l'adore.

-C'est parfait Garance. Merci. Et moi, je t'ai apporté ça, fit Magda avec un sourire en posant une enveloppe sur la table de verre.

-Qu'est-ce que c'est ?

-Ton faire-part.

-T'en a fait même pour tes témoins ? sourit Garance. T'as peur qu'on oublie la date ?

-Non, non ! C'est juste que Louis en voulait un, alors on en a fait pour tout le monde.

-Je vois, je vois. Vas-y ! Assieds-toi, je t'en prie.

-C'est quoi toute cette pile ? demanda l'invité en apercevant un monticule de catalogue sur le bout de la table.

-J'ai apporté tout ce que j'avais et j'ai aussi des photos de toutes les robes qu'on a pu voir avec les filles quand on a fait les magasins. Tu vas voir, on va être trop belles. Regarde !

-On n'attend pas Marie ?

-Elle va arriver. T'inquiète. »

En joignant le geste à la parole, Garance attrapa le premier des magazines et sa tablette pour montrer à Magda tout ce qu'elles avaient pu essayer. Effectivement, Marie n'avait pas tardé, et elle avait pu participer à tous les débats, de la couleur de la robe, à la longueur, en passant par les fleurs qui seraient dans les cheveux des demoiselles. Cela leur avait pris des heures avant de s'arrêter sur des robes bleu turquoise. Chacune pourrait choisir le modèle qui lui convenait le mieux, mais toujours dans le même ton.

« Une bonne chose de faite ! les félicita Garance. On va être super belles. Et toi, tu vas être magnifique. Et Martijn aussi. Et tout ce mariage va être magnifique !

-J'espère.

-Mais oui ! assura la militaire d'un air enjoué alors que son téléphone sonnait. Faut que je réponde, vous m'excusez les filles ? »

Marie et Magdalena firent oui de la tête et Garance sortit par la porte-fenêtre dans la petite cour de son immeuble.

« T'es sûre que ça va toi ? finit par demander Marie qui voyait bien que quelque chose tracassait son amie depuis le début de l'après-midi et qu'elle n'arrivait pas à l'oublier.

-J'ai reçu une lettre, hier.

-D'un admirateur secret ?

-De Pierre.

-Ah. »

Magda regarda son amie droit dans les yeux. Elle lui cachait quelque chose, elle le sentait.

« T'étais au courant ?

-Avec Bastien, on a mangé avec lui la semaine dernière.

-Et ?

-Il avait évoqué le fait qu'il voulait t'écrire.

-Il m'a écrit trois pages quand même.

-Tu les as là ?

-Mmmh, fit Magda en se levant de sa chaise et en attrapant l'enveloppe qu'elle gardait dans son sac. »

Marie attrapa les quelques feuilles qui lui étaient tendues et se lança dans la lecture. Quand elle eut fini, Magda put enfin poser la question qui trottait dans sa tête depuis un moment.

« T'étais au courant ?

-Pour ?

-Gus.

-Non. J'avais appris qu'il s'était séparé de sa copine, mais je ne connaissais pas cette histoire. Tu vas faire quoi ?

-Pour Gus ? Rien. C'est derrière moi. Je ne veux pas entendre parler de lui, et encore moins en ce moment. Il a gâché suffisamment de choses dans ma vie ; et ce procès été suffisamment dur à vivre pour Martijn et moi sans qu'on ait besoin qu'il revienne alors qu'on prépare le plus beau jour de notre vie. Et quant à son ex... Elle ne veut pas porter plainte. C'est son droit. J'espère juste qu'elle s'en sortira et qu'elle sera heureuse.

-Et pour Pierre ? Tu vas faire quoi ?

-J'ai très envie de croire qu'il est honnête et sincère. Parce que j'aurais vraiment aimé qu'on soit tous réunis pour mon mariage et je vois bien que ça ne sera jamais le cas. Ça me donne l'impression de ne pas pouvoir me détacher de mon passé alors que je viens juste de dire que je m'en étais détachée. Je suis en pleine contradiction !

-Magda, coupa doucement Marie. C'est normal.

-Tu crois ?

-Oui. La seule question que tu dois te poser, c'est ce que tu as envie de faire toi. Au fond de toi, de quoi as-tu vraiment envie ?

-J'en ai parlé à Marty ce matin, et je m'étais dit qu'on pourrait peut-être l'inviter à la mairie. Enfin, je sais pas... Je sais plus.

-T'es pas obligée de prendre une décision aujourd'hui même. Prends le temps de digérer et assimiler tout ce qu'il te dit dans cette lettre. Mets-toi bien au clair avec ce que tu ressens, avec ce que tu as envie de faire. Parle-lui-en à Martijn. Et alors tu pourras prendre une décision. Mais n'oublie pas que quoi que tu décides, si tu suis ton intuition, ça sera le bon choix.

-Et comment je le préviens si je décide ? T'as son numéro ?

-Oui. Tu m'appelles et je te l'enverrais de suite. C'est un détail technique ça, sourit Marie.

-Merci.

-Pas de soucis, assura son amie en posant sa main sur celle de Magda alors que Garance revenait dans le salon. C'était qui ?

-Mon supérieur.

-Qui t'appelle sur ton téléphone perso alors que t'es en permission ? remarqua immédiatement Magda.

-Et puis tu nous as pas dit qu'il était relou ton supérieur ? rajouta Marie avec un petit sourire en coin. »

Garance se tourna immédiatement vers la cuisine et alluma la cafetière.

« Je vous fais un café ? Parce que c'est une longue histoire donc va falloir faire le plein de caféine pour tenir, sourit la militaire. »



--- NDA ---


🐣❤️


Il me reste une minute pour vous publier ce chapitre. Je m'étais promis de le faire ce dimanche...

Il est juste là pour vous remercier des 3000 vues sur ce deuxième tome. Je sais que le saut dans le temps et le fait de retrouver une Magda plus mature, plus responsable (la plupart du temps) a été une vraie surprise pour beaucoup d'entre vous. Mais vous êtes toujours là, et pour ça je vous dis un énorme MERCI !!!! 


Je vous aime très fort et vous souhaite une sublime semaine, 


Des bisous d'amour et d'amitié,


Uthopie. 🐥❤️

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