Chapitre 1 - Nouveau Départ
Chapitre Premier
Magdalena Valencourt n'arrivait pas à dormir. Aujourd'hui avait été une journée lourde en émotions. Aujourd'hui, elle avait reçu son diplôme.
Avec ses vingt-sept ans fraîchement fêtés, elle était enfin diplômée et dans la vie active, comme tous ses amis. À la rentrée prochaine, elle ne retournerait pas à la faculté. Non, elle serait enfin professeur d'histoire en terminale au lycée français Van Gogh et, au fond, ça la stressait un peu. Même si ce n'était pas sa toute première fois où elle allait se retrouver seule devant une classe, cette année allait être sa première rentrée en tant que professeur titulaire et elle trouvait cela assez angoissant.
Mais ce n'était pas ça qui empêchait de Magda de dormir. Non. Ce qui l'empêchait de dormir, c'était ce dont Martijn lui avait parlé tout à l'heure. Parce que tout à l'heure, Martijn lui avait parlé d'enfant. Sauf que, en plus de sept ans de relation, Martijn ne lui avait jamais parlé d'enfant.
Magdalena avait fêté la fin de ses études d'abord au restaurant avec ses parents et ses frères qui étaient venus pour sa remise de diplôme ; puis elle avait fêté ça avec ses amis, ils étaient passés de bar en bar pendant une bonne partie de la nuit. Puis Martijn et Magda avaient fini par rentrer chez eux. Ils avaient fait l'amour. Ça avait été doux, Magda avait eu l'impression qu'ils le refaisaient pour la première fois. Elle avait trouvé ça étrange et agréable à la fois. Alors qu'elle s'était installée contre l'épaule de Martijn à tracer des arabesques du bout des doigts sur le ventre de ce dernier, Martijn lui avait parlé d'enfant ; il lui avait demandé si elle avait déjà pensé à ce qu'ils aient des enfants. Ou au moins un. Magda avait été honnête, non. Non, elle n'y avait pas pensé. Martijn n'avait pas insisté et il avait fini par s'endormir. Magda n'avait pas réussi à faire de même. Alors elle avait décidé de se lever et était allée se servir un verre d'eau dans la cuisine. Appuyée contre le plan de travail, elle observait le reflet de la lumière du lampadaire dans l'eau du canal en contrebas. Elle ne remarqua pas Martijn qui s'était levé et qui la fixait.
« C'est à cause de ce que je t'ai dit que tu n'arrives pas à dormir ? finit-il par demander, faisant ainsi sursauter Magda.
-Tu m'as fait peur...
-Désolé. Alors c'est à cause de moi ?
-Nee.
-T'es sûre ?
-Ja.
-Magda... Regarde-moi, s'il te plait. Je vois bien qu'il y a quelque chose. Je te connais. Parle-moi.
-Tu m'as prise de court, Martijn.
-Tu n'y as jamais vraiment pensé toi ?
-Pas sérieusement, non. Et j'ai l'impression que pour toi, c'est déjà très réfléchi. Comme d'habitude. »
Martijn baissa la tête quelques secondes, toujours appuyé contre l'arche en bois qui ouvrait le mur de leur cuisine. Il faisait de petits cercles sur le plancher du bout du pied. Il réfléchissait. Il voulait bien choisir les mots qui allaient suivre. Il se devait de choisir ceux qui ne blesseraient pas Magdalena. Parce qu'elle avait raison, pour lui, tout ça était déjà bien réfléchi. Bien plus que ce qu'il voulait bien laisser entendre.
« C'est vrai que... Ça fait un petit moment que j'y pense... Mais... Je voulais attendre que tu aies fini tes études pour t'en parler. Je voulais que... Que soit... Plus stable pour nous.
-T'as pas beaucoup attendu non plus. C'est la grossesse d'Hannah qui t'a donné des idées ?
-Entre autres. Magda... Je ne vois pas ce qui nous empêcherait de passer le cap, nous aussi. J'ai un boulot stable, on gagne plutôt pas mal notre vie, mes œuvres complètent assez bien nos fins de mois. Toi, tu vas commencer ton boulot et t'as la sécurité de l'emploi. On est prêt.
-Et ton idée de lancer ta galerie ?
-On peut voir ça plus tard, non ? C'est pas pressé. En tout cas, si on parle enfant, ce n'est plus ma priorité.
-J'ai l'impression que tu me parles d'enfant parce que tu crois que c'est le moment. Tu crois qu'on est arrivé à un moment de notre vie où il faut parler enfant.
-Non, je dis ça parce que toi. Et parce que nous. Je t'aime Magda. Ça fait sept ans que je t'aime et je crois qu'aujourd'hui, je t'aime encore plus que quand je t'ai rencontrée.
-Martijn... C'est pas aussi simple que ça.
-Bien sûr que si, c'est aussi simple. Ce bébé ça serait une manière de... De nous prouver notre amour. Et puis un bébé c'est aussi casser la routine. C'est pas toi qui trouvais, il y a quelques jours, qu'on était trop routinier ?
-Si c'est que ça, je peux trouver plein d'autres idées pour casser la routine et je peux te le prouver dès ce week-end.
-On mange avec tes parents avant qu'ils repartent.
-Et bah la semaine prochaine.
-Lundi soir, tu as dit qu'on sortait avec Louis, vérifia Martijn en regardant le calendrier de la cuisine. Tu dois manger avec Erda mardi midi. Mercredi, tu vas au musée avec ma sœur. Jeudi, t'as noté « cinéma ». J'imagine qu'on y va ensemble. Vendredi, rien de prévu. Samedi, on doit aller aider Jan pour l'aménagement de la chambre de leur futur enfant. Tu vois, tout est prévu dans notre vie.
-C'est un reproche ?
-Non. C'est une constatation. Je te demande juste de prendre tout ça au sérieux. S'il te plaît. D'y réfléchir, vraiment.
-Ok. Je vais y penser.
-Tu vas vraiment y penser, ou tu dis ça pour me faire plaisir ? »
Magda avait haussé les épaules. Elle avala la fin de son verre d'eau en regardant Martijn dans les yeux et lui dit:
« Je vais me coucher. »
X+X+X+X+X
On était vendredi soir, et c'était plutôt calme à la galerie. Martijn traînait sur son téléphone pour chercher un truc à faire ce soir avec Magda. Mais rien ne lui plaisait. Il avait la sensation que ça se terminerait en soirée télévision et il se dit que ce n'était peut-être pas plus mal, ça lui plaisait bien. Il pourrait même passer prendre des pizzas sur le chemin du retour et cette idée le fit sourire.
« J'espère que c'est l'idée d'une soirée avec moi qui te fait sourire comme ça, fit la voix de Magda. »
Martijn releva la tête pour voir Magdalena juste devant lui avec, elle aussi, un immense sourire. Il remarqua tout de suite l'énorme sac de voyage qu'elle avait dans les mains. C'était celui qu'il lui avait offert pour son anniversaire.
« Hey ! Qu'est-ce que tu fais là ?
-Je viens casser la routine. C'est un peu ce que tu m'as reproché y a deux semaines. Donc, là, je viens casser la routine.
-Qu'est-ce que tu veux dire ?
-Vous fermez à dix-huit heures, c'est ça ?
-Ouais, répondit Martijn en se balançant sur sa chaise. Pourquoi ?
-Tu verras bien, lui répondit Magda en souriant. Je vais attendre avec toi.
-Dix-huit heures, c'est dans cinq minutes, tu sais.
-Et bien, je vais attendre cinq minutes avec toi. Ça te dérange ?
-Non. Viens. »
Magda alla prendre une chaise qui était près de la réserve et s'installa à côté de Martijn.
« C'est ton prochain tableau, là ?, fit Magda en désignant les quelques feuilles qui traînaient sur le bureau.
-Ce sont des idées, oui. C'était plutôt calme aujourd'hui, j'en ai profité.
-J'aime bien celui-ci, dit Magda en prenant la deuxième feuille.
-Ouais, je sais. Enfin, je sais pas vraiment. C'est juste que maintenant, j'arrive à savoir ce qui va te plaire à l'avance. Genre, la quatrième devrait te plaire aussi.
-Ah ouais ! Carrément !
-Chut, sourit Martijn. Bonjour Madame. »
La cliente qui venait de rentrer les salua d'un mouvement de tête. Elle passa de tableau en tableau pendant plusieurs minutes. Pendant tout ce temps, Magda et Martijn restèrent au bureau en silence.
« Comment tu sais à quel moment faut aller la voir ? finit-elle par chuchoter.
-Je sais pas. J'y vais au talent. Genre là, faut que j'y aille. »
En disant cela, Martijn se leva et s'approcha de la femme qui était rentrée quelques minutes avant la fermeture. Magda les entendit discuter quelque temps, Martijn lui adressait son plus beau sourire à chaque fin de phrase. Cela fit rire Magda, elle se souvenait des premiers jours de Martijn dans cette galerie. Il rentrait souvent déprimé, le soir, sans être arrivé à vendre une seule toile de qui que ce soit. Il n'arrivait pas à monétiser l'art. Aujourd'hui, ces soirées étaient loin derrière lui et vendre un tableau n'était plus qu'une formalité. En tout cas, tant que ce n'étaient pas les siens.
Cette fois-ci, la femme n'acheta pas le tableau. Martijn lui laissa tout de même sa carte de visite et la raccompagna vers la sortie. Une fois qu'elle fut assez éloignée, il ferma la porte à clef et mit l'alarme en marche puis il retourna voir Magda toujours derrière le bureau.
« J'espère qu'elle ne nous a pas fait louper l'avion...
-Qui a dit qu'on prenait l'avion ?
-On prend pas l'avion ?, fit Martijn avec une petite moue de déception.
-Tu veux qu'on prenne l'avion ?
-Oui !
-Bon d'accord. On va à Schiphol alors.
-Tu sais pas où on va ?
-Non.
-J'ai le droit à une explication ?
-L'idée c'est d'aller à l'aéroport, du coup, et de prendre le premier avion qui nous plaît. Rien d'organisé.
-Sérieusement ? Et le chat ?
-Chez Louis. Toi, tu travailles ni lundi, ni mardi, c'est ça ?
-Ouais.
-Bon bah on rentre mardi. On y va ? J'ai appelé un taxi. »
Dans le taxi qui les amena à Schiphol, Martijn passa en revue toutes les destinations qui lui faisaient envie: Zurich, Munich, Vienne, Dublin, Berlin. Magda, elle, si elle devait faire un choix, serait bien retournée à Milan. Ils y étaient déjà allés l'année précédente et elle avait adoré cette ville.
« Alors ?, demanda Martijn alors que Magda scrutait le tableau des départs.
-Londres ? Y a un vol dont l'embarquement commence dans une heure et demie.
-Va pour Londres, c'est parti ! »
X+X+X+X+X
Deux jours de visites avaient suffi à Martijn. À partir de lundi, il avait décidé qu'ils allaient passer leur dernière journée à ne rien faire. Sa plus grande excuse était que ce week-end devait lui permettre de se reposer et pas de se tuer à visiter une ville. Voyant que Martijn refusait de bouger du lit et même de s'habiller, Magdalena avait fini par céder en riant. Il l'avait attirée dans le lit et tous les deux avaient fini par se rendormir après de longs baisers. Il devait être autour de midi quand Magda se réveilla. Elle était réveillée, mais elle n'arrivait pas à se décider à ouvrir les yeux.
« Hello, murmura Martijn à côté d'elle.
-Hello, répondit-elle en se collant à lui. Ça fait longtemps que t'es réveillé ?
-Non. Une dizaine de minutes. Tu veux qu'on descende manger quand t'auras ouvert tes petits yeux ?
-On peut pas se faire monter un déjeuner ?
-Si on peut, répondit Martijn en resserrant ses bras autour de Magda et en fermant ses yeux à son tour.
-Marty ?
-Mmmh ?
-J'ai réfléchi à ce que tu m'as dit.
-Qu'est-ce que je t'ai dit ?
-Sur les enfants.
-Pourquoi tu m'en parles maintenant ?
-Parce que j'ai rêvé de ça cette nuit.
-Qu'est-ce que tu veux me dire ?
-Je pense que t'as raison. On s'aime et... Au fond, il n'y a aucune raison qui nous empêche de le faire. Mis à part qu'il va falloir se faire à l'idée que des week-end comme ça, totalement à l'improviste, c'est fini, mais... On est prêt.
-On a bien profité, non ? Y a plus de place sur le mur de l'entrée.
-Oui, on a bien profité, sourit la jeune femme. Et puis en faire moins, ça ne veut pas dire ne plus en faire du tout.
-Tu veux vraiment retourner à Milan ?
-Oui ! »
Martijn rit à la réponse de Magda. Il resserra son étreinte autour des épaules de la jeune femme. Ils restèrent un long moment en silence, tellement longtemps que Martijn crut que Magda s'était rendormie. Mais non: parfois, il sentait ses doigts bouger sur son ventre. Il finit par reprendre la parole:
« Plus sérieusement, Magda, t'es sûre de toi ? Je veux dire à cent pour-cent ? Parce qu'on s'engage à deux et à vie. Ça sert à rien si toi, tu n'es pas prête.
-Je crois que je me sens prête. Mais de toute façon je ne serai jamais sûre à cent pour-cent, donc... Faut se lancer. Et avec toi, j'ai même pas peur.
-Moi non plus. Même pas peur, sourit Martijn.
-Tu sais quoi, on va même commencer aujourd'hui, décida Magdalena en se détachant de l'étreinte de Martijn pour se lever.
-Si tu veux commencer, reviens dans le lit.
-Attends... J'arrive... »
Elle se dirigea vers la salle de bain de leur chambre d'hôtel. Martijn l'entendit chercher quelque chose dans sa trousse de toilette. Elle finit par réapparaître dans l'embrasure de la porte avec une plaquette de médicaments dans les mains.
« Tu vois ça ?
-Non, c'est quoi ?
-Ma plaquette de pilule. Eh bien, cette plaquette, c'est poubelle, expliqua Magda en joignant le geste à la parole. »
--- NDA ---
Hello les pioupious 🐣❤️
Aujourd'hui c'est l'anniversaire de Magdalena. C'est pour ça que j'ai choisi cette date pour ce premier chapitre d'ailleurs.
J'attends tout vos premiers retours. Je suis à la fois assez anxieuse et pressée de les lire.
Alors je vais pas m'attarder plus que ça et je vous donne rendez-vous vendredi pour le chapitre 2 ! ;)
Beaucoup d'amour,
Uthopie. 🐥❤️
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