Chapitre 3 - Gulf


Mew attrapa mon poignet et me sourit.

— Tout va bien ? demanda-t-il, inquiet.

— Oui, Phi, retournons travailler.

Tout allait vraiment bien ? Je n'en étais pas du tout persuadé. En marchant derrière Mew, vers la salle de répétition, sa main me tenant toujours, je ne pouvais le quitter des yeux.

Cela ne se reproduira plus. Ce n'est rien. Cela ne veut rien dire.

Ces quelques mots tournaient en boucle dans mon esprit. Ce n'était rien ? Comment cela pouvait n'être rien ? Alors que mon cœur avait quasiment explosé dans ma poitrine, que j'avais ressenti un désir si puissant pour cet homme. Et pire, ce moment qui ne voulait rien dire m'avait ouvert les yeux sur mes sentiments pour Mew. Il n'était pas un simple ami, je devais être franc avec moi-même : je le désirais...

Il fallait que ça se reproduise, je mourrais d'envie que cela recommence. Je ne voulais pas que la réaction de son corps soit physiologique, je voulais en être la raison, je voulais que notre désir soit partagé. Je voulais sentir ses mains sur moi, et pas seulement pour les besoins du script, mais qu'il me touche vraiment. Mon ventre se contracta à cette pensée. J'observai ses mouvements souples, le jeu de ses muscles sous ses vêtements, la courbe de ses épaules, de sa taille, de ses reins...

J'étais fou ? Avais-je sombré dans la folie ? Ou étais-je encore endormi ? Je me sentais sonné, j'avançais comme un robot. Seul le contact des doigts de Mew me semblait réel.

Avant d'entrer dans la salle, il se retourna, posa ses mains sur mes épaules et ses yeux me scrutèrent. Je feignis une attitude décontractée et répondis à sa question muette par un sourire léger, mais j'étais loin de me sentir serein.

Le reste de la journée se déroula normalement. Mew ne me quitta pas un instant, il semblait légèrement nerveux, soucieux. Il multiplia les contacts et ne me quitta pas du regard. Ma réaction avait vraiment dû l'inquiéter. je sentais son besoin d'être rassuré, c'est pourquoi, je le laissais faire sans rechigner.

Sa proximité, ce jour-là, prit une autre signification pour moi. Je me surpris plusieurs fois à humer son odeur, à le dévisager rêveusement. À chaque contact que j'initiai, ce qui n'était pas dans mes habitudes, il semblait tellement surpris et heureux.

L'équipe ne sembla pas s'étonner de nous voir ainsi scotchés l'un à l'autre, ils en avaient pris l'habitude ces dernières semaines. Par contre, pour moi, tout était différent. Je réalisai que mes sentiments avaient irrémédiablement changé.

Ce soir-là, quand la porte de mon appartement se referma derrière moi, je restais immobile au milieu de la pièce, les bras ballants, l'esprit vide. La sonnerie de mon téléphone me fit sortir de ma transe en sursaut. Le nom de Sumalee apparut sur l'écran. Je restai interdit. Que pouvais-je lui dire ? J'avais passé une bonne partie de la journée à fantasmer sur une autre personne, sur un homme... Comment répondre normalement à ma petite amie après ça ?

Je ne pouvais pas lui parler, pas tout de suite. J'avais besoin de temps pour réfléchir et faire le point. Je rejetai son appel en soupirant et me dirigeai lentement vers mon lit où je me laissai tomber, las. Je sentais l'odeur de Mew sur moi, je fermai les yeux et son image m'apparut. La sensation de son corps contre le mien me revint à l'esprit. Une boule de chaleur grossit dans mes reins. Je me roulais dans les couvertures comme pour reproduire la sensation de ses bras autour de moi.

La vérité crue s'imposa : je le désirais depuis longtemps, il m'avait attiré dès les premiers instants. Le trouble qui s'emparait de moi dès qu'il s'approchait, je le ressentais depuis notre rencontre. Mon corps ne mentait pas, je ne pouvais pas contrôler le sang qui affluait à mon visage quand il m'intimidait avec son aura sexy.

J'osais enfin m'avouer que j'avais auditionné pour des boys love, pas seulement car ils offraient une opportunité pour ma carrière, mais aussi pour me prouver quelque chose, une attirance envers les hommes que j'avais toujours refoulée. Et Mew venait de me prouver ma véritable nature.

Lors de notre première scène de baiser, je l'avais embrassé, vraiment embrassé. Tout simplement parce que j'en crevais d'envie. Je voulais savoir ce que je ressentirais en embrassant un homme. Et pas n'importe quel homme : Mew... Je n'avais pas pu résister ce jour-là, il était si proche de moi, les lèvres offertes. L'excuse que j'avais trouvée, à ce moment-là, était pure connerie. Tous les autres baisers que nous avons échangés, ils n'étaient pas feints. Je l'embrassais parce que j'adorais ça...

Je lâchais un long soupir en me frottant le visage à deux mains. Je me redressais brutalement et commençais à faire les cents pas comme un lion en cage.

Je ne pouvais pas rester comme ça. J'attrapai mes clés et me ruai dehors. Il fallait que je le voie, je devais mettre les choses au point, je devais... Je ne savais pas. Je devais le voir, c'est tout.

Le trajet jusque chez lui me parut une éternité. Je sautai littéralement du taxi au bout de sa rue et finis les derniers mètres en courant. Fébrile, j'actionnai la sonnette plusieurs fois, le cœur tambourinant dans ma poitrine, cherchant à reprendre une respiration normale. La lumière de son entrée s'alluma et j'aperçus sa silhouette à travers la porte vitrée. Je frissonnai d'anticipation. La porte s'ouvrit et son visage inquiet apparut.

— Gulf ? Mais qu'est-ce qui...

Je ne lui laissai pas le temps de finir sa phrase. Mes mains agrippèrent son visage et je m'emparai de ses lèvres avec fougue. Il écarquilla les yeux de surprise. Il resta stupéfait quelques secondes, puis ses mains me repoussèrent.

— Gulf, attend ! Qu'est-ce que tu fais ?! lança-t-il, interloqué.

J'avais du mal à réfléchir, le souffle court. Je fixai ses lèvres qui m'attiraient comme un aimant.

— S'il te plait, Khun Phi, embrasse-moi, soufflai-je d'une petite voix suppliante. Mes yeux se soudèrent aux siens. J'y lus une multitude de sentiments contradictoires. Il luttait contre lui-même.

— Ne me repousse pas, murmurai-je en me rapprochant de lui.

Ma main se posa sur sa joue, du pouce, je lui effleurai les lèvres. Il ferma les yeux.

— Je sais que tu ressens la même chose que moi.

Ma phrase fit son petit effet, il ouvrit les paupières et je découvris un désir ardent dans son regard. Sans attendre, je réduisis l'espace entre nous, plaquant mes lèvres sur les siennes. Cette fois-ci, il répondit à mon baiser. À tâtons, sans relâcher notre étreinte, nous entrâmes dans le couloir. Du pied, il ferma la porte.

Ses bras m'enlacèrent et il me plaqua sur le mur. Mes mains trouvèrent le chemin de ses cheveux, j'entrouvris les lèvres et sa langue s'insinua à la rencontre de la mienne. Il laissa échapper un gémissement presque animal et resserra son étreinte. Mon corps était déjà en feu, je le désirais tellement que je ne pus me retenir de frotter mon sexe dur contre lui.

Immédiatement, il rompit notre baiser. Nous étions soudés l'un à l'autre. Seules nos respirations saccadées rompaient le silence de sa maison. Nous nous observions intensément. Cherchant à reconnaître les sentiments que nous ressentions dans les yeux de l'autre.

— Gulf... murmura-t- il d'une voix profonde.

Sa main lâcha ma taille pour caresser doucement ma joue. Je fermai les yeux pour mieux apprécier le contact de ses doigts. Il approcha son visage du mien et posa délicatement ses lèvres sur ma paupière, sur le bout de mon nez et sur mes lèvres. Ce baiser tendre et délicat fit gonfler mon cœur dans ma poitrine. Ce que je ressentais, c'était plus que du désir, tellement plus.

Cette prise de conscience me fit monter les larmes aux yeux. Je gardai les paupières closes pour ne pas montrer mon trouble à Mew. Il frotta son visage contre le mien puis déposa des baisers légers dans mon cou et posa son front sur mon épaule.

— Tu vas me rendre dingue, Gulf, dit-il dans un petit rire.

Un sourire se dessina sur mes lèvres.

— J'avais tellement peur tout à l'heure, continua-t-il à voix basse, sa main, qui n'avait pas quitté ma joue, glissa doucement et ses doigts m'agrippèrent la nuque.

Immobile, les yeux clos, j'attendais, le cœur battant qu'il continue. Sa tête reposait toujours sur mon épaule, comme si dire ses mots était plus facile sans nous regarder.

— J'avais peur que tu me rejettes, peur de perdre ce qui nous lie...

Sa voix trembla et je sentais mes larmes poindre, pendant que mon cœur se serrait dans ma poitrine.

— Mais la vérité, c'est que...

Sa voix se brisa et une larme coula le long de ma joue.

— Je t'aime Gulf... murmura-t-il d'une voix tremblante.

Il resserra son étreinte avec force, plongeant son visage dans mon cou.

— Je t'aime tellement. 

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