Chapitre 2 - Mew


Je restais quelques secondes interdit en regardant Gulf s'éloigner à grands pas. Un frisson glacé me parcourut le dos, un sentiment de peur m'envahit. Qu'avais-je fait ? Je devais avant tout reprendre contenance pour ne rien laisser paraître face à l'équipe qui s'activait dans la pièce. Quand Mild lança joyeusement :

— Nos deux tourtereaux sont enfin réveillés !

Je ne pus que simuler un rire pathétique, en me passant la main dans les cheveux. Il fallait que je rattrape Gulf, que je lui explique... Mais expliquer quoi exactement ?

J'avais perdu le contrôle.

Le sentir si détendu contre moi, sentir son corps, la courbe de ses fesses fermes, son odeur, sa chaleur, cela m'a rendu fou. Ce n'était pourtant pas la première fois que nous dormions ensemble pendant nos workshops. Être si proche l'un de l'autre nous permettaient d'être à l'aise à l'écran. Notre intimité se ressentait dans nos personnages de Tharn et Type. Tout ça c'était la version "officielle", pour moi, la réalité était tout autre :

J'aimais passionnément cet homme.

Dès les premières minutes où nos regards se sont croisés, il m'avait irrésistiblement attiré. Je ne pouvais pas m'empêcher de le toucher, de le prendre dans mes bras. Je devais garder le contact avec lui, cela m'était devenu vital. Mais je savais bien que mes sentiments n'étaient pas partagés. Il était hétéro et avait une femme dans sa vie. Pourtant, il acceptait cette proximité, il semblait même l'apprécier et parfois il la recherchait. Dès qu'il faisait un geste vers moi, mon cœur manquait un battement. Je ne pouvais réprimer l'espoir que cela créait en moi.

Tout à l'heure, le sentir si proche était déjà merveilleux, mais quand sa main avait glissé sur ma peau pour entrelacer intimement nos doigts, j'ai perdu pied. Je n'avais pas bougé d'un cil, le sentant sombrer dans le sommeil. Pourtant la tempête faisait rage en moi. Je luttais pour ne pas embrasser son cou offert, de ne pas glisser ma main sous son t-shirt et caresser sa peau, pour ne pas soulager la tension de mon sexe tendu en me frottant contre lui. Je ne pus que rester immobile et laisser tout ce torrent de désir lentement s'écouler pour me calmer. Bien trop vite, il s'était réveillé et avait bougé. En plein trouble érotique, je n'avais pu que le retenir et lui faire sentir la force de mon désir pour lui.

Grave erreur.

Je n'étais plus un gamin, j'avais une certaine expérience, mais Gulf me rendait fou. Comment réparer ça ? Me levant lentement pour ne pas attirer l'attention, je me dirigeais vers la sortie. Je devais le rassurer. Nous ne pouvions pas perdre ce que nous avions, les enjeux étaient trop grands et je ne pouvais plus vivre sans lui.

Je le cherchais un certain temps dans différentes pièces. Heureusement, tout le monde était occupé et personne ne semblait trouver bizarre de fureter partout. Je finis par le trouver dans la loge, là où nous nous faisions maquiller et habiller pour les shootings. Il était debout au milieu de la pièce, l'air hagard. Mon cœur se serra, je n'osais approcher.

— Gulf ?

Il ne bougea pas.

— Gulf... Je suis désolé, c'était involontaire... dis-je en tendant le bras vers lui.

Il me fit face et son regard me stoppa net dans mon élan. Il semblait tellement perdu.

— Je...

Je ne savais pas comment exprimer mes sentiments, je devais le rassurer, mais mon amour pour lui hurlait pour sortir au grand jour.

— Pardonne-moi, cela ne se reproduira plus, furent les seuls mots que je pus articuler.

Il eut un léger mouvement de recul et ses yeux me scrutèrent. La panique s'insinua en moi, il allait me détester, me repousser, m'abandonner. Comme un millier de fois avant ça, mon corps réagit d'instinct et je l'étreignis de toutes mes forces.

— Pardonne-moi. Je suis tellement désolé, je ne l'ai pas voulu. Je ne voulais pas te mettre mal à l'aise.

Il resta sans aucune réaction, raide dans mes bras.

— Nous sommes des hommes, tu sais que ça arrive parfois, dis-je avec le ton le plus naturel et enjoué dont je fus capable.

Je devais désamorcer la bombe, calmer le jeu.

— Ce n'est rien, je t'assure. Cela ne veut rien dire.

Ce mensonge semblait le seul moyen de le rassurer. Pourtant, il me repoussa et me scruta d'un regard où je crus lire un éclair de colère. Puis lentement son visage s'adoucit et un léger sourire apparut sur ses lèvres.

— C'est bon, Phi. Je ne vais pas en faire toute une histoire. J'ai juste été surpris. C'est une chose naturelle, pour nous les hommes. Tu as dû rêver d'une superbe femme ! me houspilla-t-il.

Mon cœur se serra. Lui seul pouvait faire réagir mon corps, mais il ne le saurait jamais. La crise était terminée, nous pouvions retourner à notre travail. Pourtant, je n'étais pas totalement serein. Comment arriverais-je à ne pas me trahir encore ?

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