Chapitre 1

Maintenant que j'avais la vieille forteresse de Volterra dans mon champ de vision, je commençais à me demander si je n'avais pas fait une erreur en prenant cette décision sur un coup de tête quelques jours plus tôt.

Diplômée d'une licence d'histoire depuis bientôt un an, j'avais préféré arrêter mes études pour entrer dans la vie active d'une adulte indépendante. Hors la réalité s'était avérée bien plus compliquée puisque mes trois années de fac n'avait pas beaucoup d'intérêt sur le marché du travail et que j'avais dû enchaîner les petits boulots dit de « dépannage » : serveuse, caissière, faire le ménage des personnes âgées, m'occuper des enfants des autres... désormais j'avais besoin de quelque chose de sérieux et c'est pourquoi j'avais jeté un œil aux propositions d'emploi à l'étranger par dépit. Après quelques jours de recherches, j'étais tombée sur une annonce cherchant à engager une secrétaire en Italie. Et rêvant naïvement de ses paysages, de son histoire ou encore de sa gastronomie, sans parler du soleil, j'avais étudié la proposition sous tous ses angles. Après tout j'avais un niveau en italien plutôt correct grâce à mes cours de lycée et d'université, et l'annonce semblait intéressante. Pas besoin de niveau universitaire élevé, et j'estimais que faire des photocopies, répondre au téléphone et autres tâches administratives basiques étaient à ma portée. Autrement dit, cette entreprise Vontruri avait éveillé ma curiosité et son emplacement dans la petite ville médiévale de Volterra, qui avait un passé historique presque aussi passionnant que ma petite cité rémoise, m'avait convaincue. J'avais donc rendu mon minuscule studio qui se trouvait dans un quartier pourtant paisible sans le moindre remord et avait embarqué mes affaires qui n'étaient pas si nombreuses avec moi. Direction l'aventure, persuadée que cette nouvelle vie serait palpitante. Ma candidature avait été acceptée si rapidement que j'avais dû relire le mail de Charmion Vontruri plusieurs fois pour être certaine de ne pas faire d'erreurs avant de prendre néanmoins une quelconque décision.

« Chère Charlie Leroy,

J'ai bien pris connaissance de votre lettre de motivation ainsi que de votre CV. Nous sommes ravis d'apprendre que vous êtes motivée par ce travail, c'est donc avec plaisir que je donne suite à votre candidature.
Nous aimons l'excellence, et nous ne voyons pas de meilleures façons que de l'intégrer au sein de notre établissement en vous choisissant, les français possèdent exactement ce que nous recherchons... »

Mais maintenant que je me trouvais en train de circuler dans les ruelles étroites de la ville italienne, je commençais à avoir des doutes. Déjà parce que je n'avais rien trouvé sur internet au sujet de cette entreprise, mais comme tout le monde n'avait pas forcément un site, j'avais décidé de lui laisser le bénéfice du doute plutôt qu'imaginer directement avoir signé un pacte avec une quelconque mafia. Et puis bon le salaire semblait correct, avec des horaires de bureau classique, ainsi qu'un logement de fonction au sein de l'entreprise... mais une appréhension commençait à m'envahir et je sortis mon téléphone pour vérifier une nouvelle fois les instructions ainsi que l'adresse, n'aimant pas être en retard à un rendez-vous. Déjà que j'avais pris la liberté de ne pas respecter le code vestimentaire, mieux valait ne pas trop en faire dès le premier jour. Quoique j'étais actuellement vêtue d'un débardeur fluide brun, avec un léger décolleté en dentelle marron que j'avais glissé dans un slim blanc. J'avais mis par-dessus une veste de tailleur beige avec une paire de spartiates de la même couleur, ce qui était particulièrement neutre me concernant. La personne qui m'avait fait parvenir les instructions avait insisté sur le fait de porter ne tenue sobre, épurée tout en restant élégante, surtout rien d'extravagant. La robe était vivement conseillée, or, je détestais les robes, d'ailleurs je n'en avais pas une seule, je me tordais la cheville à tous les coups avec des talons, et je détestais les vêtements discrets. Je ne mettais rien de vulgaire, c'était toujours respectueux. En revanche c'était coloré, très coloré même. Je portais très souvent des hauts jaune canari, bleu roi, vert sapin, violet aubergine, rose dragée... je mettais vraiment de tout, sauf du orange, une teinte dont j'avais horreur. Mais j'aimais mettre de la couleur dans ma vie, et sur mes doigts grâce à une jolie collection de vernis pétants ! J'espérais pouvoir revêtir mes plus belles couleurs par la suite quand j'aurais réussi à m'intégrer et puis je n'avais pas l'impression de paraître négligée non plus.

Après avoir longuement observé la forteresse de pierre de loin avec une certaine fascination, je parvins à trouver l'entrée du garage indiqué dans le mail, qui se trouvait à l'extérieur du centre historique de Volterra. Et alors que j'y engageais ma petite Peugeot jaune canari, je fus surprise de voir un long tunnel souterrain s'étendre devant mes yeux tandis que la porte se refermait pour me plonger dans une obscurité absolue. Je parvenais à voir uniquement grâce aux phares de mon véhicule. Une désagréable sensation commençait à m'envahir et mes doutes revinrent. Jetant un œil à la seule sortie qui était derrière grâce à mon rétroviseur, quelqu'un toqua à ma vitre, me faisant sursauter alors qu'un faible spot lumineux s'éclaira au-dessus de ma tête. Une silhouette encapuchonnée me faisait signe de me stationner sur l'un des emplacements vides et je ne pus m'empêcher de remarquer les autres véhicules à l'arrêt, allant des voitures les plus simples à celles qui valaient certainement le triple de la mienne. Je pris soin de m'exécuter en veillant à ne pas frôler l'une des carrosseries déjà présentes. Après avoir lissé ma veste d'un air confiant, je sortis du véhicule avec un sourire poli, faisant de mon mieux pour ignorer cette sensation de malaise qui grandissait en moi. La personne qui m'avait si courtoisement accueilli m'attendait plus loin près d'une porte qui devait mener à l'extérieur. Après une brève hésitation, je préférais laisser mes affaires dans le coffre et revenir les chercher plus tard. Je rejoignis donc finalement celle que je soupçonnais d'être une femme au vu de sa carrure alors que je mettais en réalité les pieds dans un escalier en colimaçon qui remontait à la surface. Ce dernier déboucha ensuite sur une sorte de couloir qui était éclairé grâce à quelques vitres très anciennes, me rassurant déjà plus que le garage lugubre où j'avais abandonné mon petit bolide.

Une des mains gantées se posa sur sa capuche qu'elle retira pour me laisser voir son visage. Dire que j'étais estomaquée serait un euphémisme. J'avais devant moi ce qui était certainement l'une des plus belles femmes que j'avais pu voir. Non, après réflexion, elle était la plus belle femme que j'avais pu voir dans ma vie, point. Son visage n'avait pas la moindre imperfection dessus avec un teint si blanc qu'il semblait être fait en porcelaine. Il était encadré par une ravissante chevelure blonde cendrée et ondulée, qui avait l'air si soyeuse que j'étais persuadée que si je passais la main dedans, elle serait aussi douce que je l'imaginais. Si j'étais incapable de voir ses vêtements entièrement dissimulés sous sa cape, en revanche je n'eus aucun mal à voir ses yeux. Surprise, je fis un pas en arrière. J'ignorais s'il s'agissait de lentilles ou de leur couleur naturel, tout ce que je savais c'est qu'ils étaient rouges, d'un rouge vif, et qu'ils suivaient le moindre de mes mouvements. Le pire était que je n'arrivais pas à me décider, est-ce que je devais avoir peur de ses yeux ou reconnaître que la jeune femme devant mes yeux n'en était que plus belle avec ? Espèce de cinglée va...

Je me raclais discrètement la gorge pour reprendre mes esprits sous le regard amusé de la blonde. Je n'étais visiblement pas la première personne à avoir ce genre de réaction en sa présence.

- Euh... Charmion Vontruri ?

L'amusement qui illuminait ses yeux anima son visage, un sourire se dessinant sur ses lèvres légèrement rosées tandis qu'elle me répondait dans un français des plus parfaits.

- En réalité, c'est Chelsea. Chelsea Volturi pour être exacte.

L'incompréhension devait être plus que visible sur mon visage pourtant elle ne chercha pas à l'effacer, j'aurais même juré qu'elle se délectait de l'incompréhension qui m'envahissait. En attendant, je ne comprenais pas pourquoi elle m'avait donnée une autre identité.

- Vous êtes de la mafia... ? M'aventurai-je à demander sans trouver que ma question était stupide, après tout l'Italie avait aussi des organisations pas forcément recommandables.

Oui je n'en démordais pas avec cette idée, et je me disais qu'il valait mieux que je le sache directement. La belle blonde se mit à rire, d'un son si mélodieux qu'il commençait à me donner des complexes sur ma propre personne.

- Ah ma chère Charlie, crois-moi, tu aurais préféré cela... ! Cela dit je suis ravie que tu sois bien plus jolie en vrai, cette photo ne te mettait pas du tout en valeur.

Je sentis le sang me monter aux joues, signe évident que je rougissais malgré moi. Charmion, ou Chelsea, je ne savais pas trop, fixa mes joues durant quelques secondes tandis que je me faisais la réflexion qu'il était vraiment temps que je trouve une photo plus récente pour la prochaine offre d'emploi. J'avais remplit le formulaire d'embauche avec tellement de précipitation que je n'avais pas eu le temps de refaire des photos d'identités digne de ce nom et que j'avais dû ressortir les fameuses photos de classes individuelles du lycée, consciente que ce choix n'était pas le plus judicieux. Mais qui étaient déjà préférables à un selfie équipé d'un filtre snapchat avec des oreilles de chats quand même...

- En fait, je vais aller droit au but avant de te laisser commencer ton travail. J'ai volontairement omis de te faire part d'un détail dans le mail, histoire que tu ne disparaisses pas dans la nature juste après. Même si Demetri n'aurait eu aucun mal à te retrouver sans même avoir besoin de te rencontrer.

Ce fut à ce moment-là que je commençais à me sentir vraiment prise au piège, essayant d'analyser chaque parole que prononçait la jeune femme qui se trouvait devant moi.

- Il n'y a pas d'entreprise Vontruri n'est-ce pas ? Soufflai-je en réalisant que finalement j'aurais bien dû me méfier de l'absence de site internet, regardant furtivement les lourdes portes qui se trouvaient derrière la blonde et qui devaient être la sortie la plus proche.

- Non en effet, sourit-elle de plus belle. Tu vas travailler pour les Volturi, le clan de vampires le plus puissant au monde, lâcha-t-elle sur un ton rempli d'évidence.

Je clignais des paupières à plusieurs reprises en me pinçant les lèvres pour retenir un rire. Vraiment, je mourrais d'envie de lui rire au nez, pourtant elle l'avait dit d'une voix tellement calme et posée que je pourrais presque y croire. Puis mes yeux rencontrèrent à nouveau les siens, toujours aussi rouge que la première fois. Et curieusement, au lieu de l'insulter de folle et de me précipiter pour de bon sur la porte, mon cœur s'emballa tandis que je reculais de plusieurs pas par précaution.

- Je suis là pour quoi au juste, vous servir d'esclave sexuelle en pleine orgie ?

J'avais posé ma question sur un ton calme malgré la petite note aiguë qui avait retenti à la fin de ma phrase. Chelsea continua à me sonder du regard avant d'éclater de rire. Pas un rire digne des méchants dans les films, non elle riait véritablement de joie. Et honnêtement, j'ignorais si c'était une bonne nouvelle. Moi qui avait passé tellement de temps à regarder la nouvelle série sur les vampires de Mystic Falls au point de boire une infusion de verveine tous les soirs, visiblement j'étais servie.

- Tu es là pour faire exactement ce qui était précisé dans l'annonce.

L'annonce. J'avais plus l'impression d'avoir répondu à une recherche animalière qu'à une offre d'emploi.

- Vous avez vraiment besoin de moi pour faire ça... ?

- Eh bien oui, c'est une tâche pour les humains, nous avons autre chose à faire très chère.

- Je peux encore changer d'avis n'est-ce pas ?

Elle fit quelques pas dans ma direction qui provoquèrent un autre emballement de mon rythme cardiaque, sa bonne humeur ayant été remplacée par une mine sérieuse, qui ne gâchait en rien sa beauté soit dit en passant.

- Ecoute-moi bien Charlie, tu t'es faite toi-même prisonnière de cette forteresse. Les humains ne doivent pas savoir notre existence, c'est l'une de nos lois. Si tu essaies de t'échapper, nous serons dans l'obligation de t'éliminer. Si tu fais bien ton travail, peut-être, et je dis bien peut-être, les maîtres te récompenseront par l'immortalité. Si tu fais une erreur, même la plus infime, ta vie s'arrêtera sans que tu n'aies le temps de t'en rendre compte. Me suis-je bien fait comprendre ?

J'eus un instant l'envie de demander s'ils avaient souvent besoin de renouveler leurs annonces pour trouver une secrétaire avant de me dire qu'il valait mieux que je reste dans l'ignorance, j'aurais ma réponse bien assez tôt. Déglutissant difficilement, je me contentais d'hocher très lentement la tête en guise de réponse. Qu'est-ce que je pouvais répondre de censé à ça de toute façon ?

Chelsea retrouva un sourire satisfait avant de me faire signe la suivre, traversant le couloir d'un pas rapide, me devançant quelque peu. Il nous fallut descendre un vieil escalier de pierres, franchir deux autres couloirs ténébreux avant de descendre un autre escalier en bois cette fois, et utiliser un ascenseur avant d'arriver dans un autre couloir à un étage inférieur. Dans un coin sur la droite se trouvait un bureau en bois massif, très imposant, composé d'un ordinateur dernier cri, d'une photocopieuse, d'un téléphone sans fil et d'un espace de rangement.

- Tu as de la chance, tu vas pouvoir utiliser le nouveau secrétariat. On a dû le changer comme il n'a pas résisté à l'assaut de Santiago, tu es la première à t'en servir.

Chouette alors, des vampires ont réalisé une nouvelle zone de travail rien que pour moi. J'en ai de la chance. En fait, j'avais du mal à accepter le fait que j'allais travailler entourée de vampires. Je pense que dans le fond je n'y croyais pas vraiment malgré la beauté irréelle de Chelsea. Tant que je n'en aurais pas eu la preuve visuelle, je continuerais à en douter. Même si je me mettais dans un coin de la tête de ne pas énerver ce Santiago. Je préférais d'ailleurs ne pas savoir si c'était ce qui avait provoqué l'arrêt de mort de la fille que je remplaçais. Encore une chose que tu ne veux pas savoir Charlie.

- Bien, exceptionnellement, tu commenceras ta journée à 13h. Je vais d'abord te faire visiter les locaux que tu auras à utiliser. La porte derrière ton bureau, elle contient tout ce qui te servira à écrire, remplacer l'encre et compagnie... au fond du couloir devant toi, sur la droite, c'est le couloir qui mène à la salle où les maîtres reçoivent en temps normal la visite de vampires du monde entier, même si c'est plutôt calme en ce moment. Si tu prends tout de suite à gauche, tu accèdes à une autre salle plus éloignée où les maîtres se retrouvent, elle sert moins que l'autre d'ordinaire mais comme je te l'ai dit, notre communauté nous évite ces derniers temps, donc ils sont le plus souvent dedans. Pendant un temps, nous avons dû carrément nous passer de secrétaire mais Aro a insisté sur le fait d'en reprendre...

Elle me désigna trois couloirs sombres situés juste en face du bureau alors que je notais bien le fait que je n'avais pas l'air de leur être indispensable.

- Chaque étage est accessible par des escaliers situés au bout de chaque couloir, seul l'accès au secrétariat est équipé d'un ascenseur. Celui de droite mène aux appartements des vampires de la forteresse, tu as interdiction de t'y rendre, sauf autorisation spéciale, ce qui m'étonnerait fort. Celui du milieu permet d'accéder aux salles d'entraînements, de réception, les bibliothèques, les jardins, pièces auxquelles tu n'auras pas accès non plus... le couloir de gauche dessert ton étage, contrairement aux autres, le tien est à un niveau inférieur à ton poste de travail. Plus tu es haut gradé, et plus tu vis en hauteur. Tu y trouveras ta chambre, les cuisines, mais aussi les laveries. Des vampires subalternes sont chargés de faire le ménage du palais et de nos biens, mais il y a peu de chances que tu les croises. Bien, suis-moi.

Très peu réactive aux explications, j'essayais de tout retenir sans parvenir à lâcher un mot. Tandis qu'on s'enfonçait dans le couloir de gauche, qui était vraiment très mal éclairé au passage, Chelsea m'expliqua un peu qui étaient les Volturi, et notamment ceux qui en étaient à la tête. D'après elle, comme leur monde était calme, j'avais peu de chances de devoir leur transmettre un message. Oh tu sais avec la chance que j'ai... j'eus aussi le droit à un rapide condensé de leur situation actuelle. Comme quoi cela faisait pratiquement cinq ans que le clan soi-disant royal était en froid avec le reste de sa communauté, et que cela faisait seulement une petite année qu'ils réengageaient des secrétaires, des fois que la situation s'améliore... c'était tellement incompréhensible ce que j'entendais que je remarquais à peine ses efforts pour m'expliquer le fonctionnement, comme si elle savait que tout cela était inutile et qu'elle devrait resservir le même discours à la prochaine standardiste.

Puis elle me laissa devant la porte de ma chambre. Tout en me rappelant d'être au bureau pour 13h après m'avoir gentiment signalé avoir accédé à mon compte en banque pour le rendre intraçable tandis qu'une vague de sueur m'envahissait à nouveau. Je n'eus même pas le temps de parler de respect de la vie privée que la blonde était déjà loin.

Ce fut donc avec une sensation indescriptible d'impuissance que je pénétrais dans mon nouveau chez-moi. La température était encore plus basse qu'au standard, me faisant frissonner et réaliser que j'avais intérêt à bien m'habiller. La gorge serrée, j'observais le lit deux places qui trônait sur la droite, l'encadrement en bois étant posé contre le mur. Sur la droite était disposé une commode et un miroir, le tout dans une teinte beige. La salle de bains annexe, entièrement blanche comprenait une douche, un lavabo, ma propre machine à laver, trop aimable, un miroir et des toilettes derrière un paravent. Ouais. Ok. Niveau confort c'est le strict minimum mais pour des « vampires », j'imagine que c'était déjà trop. Il n'y avait même pas de fenêtre dans ma chambre. Sûrement pour s'assurer que je ne me tire pas en douce. Quoique, vu que j'étais sous terre, à part une vue sur les égouts, je ne vois pas trop à quoi m'aurait servi une vitre. Et dire que je suis venue ici pour en profiter et admirer le paysage.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top