"Nous avons nettoyé la résidence où vous résidiez et maquillé la mort de vos hôtes en une mauvaise chute. L'un serait tombé dans les escaliers et l'autre en voulant le rattraper, l'aurait suivi, causant leurs décès. Puisqu'ils sont âgés, cela passera. 

Luff et Ava Rosa eurent une pensée désolée pour le couple qui les avait si gentiment accueilli, ils n'avaient rien pu faire. 

- Merci de vous être occupé de cela. 

- Je vous en prie, nous vous avons aménagé deux chambres au centre de la guilde, deux anciennes pièces servant de débarras, ainsi vous serez protégés au mieux. 

- Ces deux chambres sont collées ? 

- Non, il y a la salle de réunion entre. 

- Nous n'utiliserons donc que l'une d'elle, Luff ne doit plus s'éloigner de moi ne serait-ce que quelques minutes. 

Le jeune homme hoche piteusement la tête, hanté par les regrets. 

- Bien. Que devons-nous faire maintenant ? Nous sommes entièrement dévoués à vous aider, affirme Daniel.

- Je vous remercie. Nous devons trouver un remède pour votre chasseresse, quel est son nom ? 

- Maria. 

- Voilà, nous devons trouver un remède pour Maria. Il faut éplucher toutes les sources que nous possédons pour trouver une solution.

- Nous possédons des archives recensant des milliers de capacités vampiriques, nous y chercherons une semblable. L'idéal serait d'avoir un échantillon pour l'étudier... grimace le vieil homme. 

- Je vous le fournirai, assure Luff sous le regard surpris de l'assemblée. 

- Comment ? 

- Je possède cette capacité, Lodea Redesky m'a mordu lorsque nous étions enfants, me transmettant ce pouvoir macabre. Je ne l'ai jamais utilisé donc il est sûrement bien moins puissant que le sien ou celui de ses sbires mais c'est un début. 

Les chasseurs restent un moment sidérés devant cette révélation tandis que le vampire tente de garder la tête haute. Ava Rosa lui adresse un regard de soutien.

- Soit... C'est une bonne chose pour nous, je suppose, finit par reconnaître Daniel en tentant un sourire crispé."

Luff acquiesce et quitte la pièce, ne supportant plus la tension qui y règne. Ava Rosa s'excuse auprès des personnes présentes et lui emboîte le pas en maugréant. 

"Idiot, attend moi ! 

- Tu m'appelles plus souvent idiot que par mon prénom ces derniers temps, grimace-t-il en obtempérant. 

- Peut-être parce que tu le portes mieux, rétorque-t-elle sans une pointe d'humour. 

- Peut-être...

La vampiresse se place en face de lui avant de lui asséner une claque monumentale qui secoue fortement le jeune homme. Les yeux exorbités face à ce geste soudain et inattendu, il attend une explication mais Ava Rosa se contente de tourner les talons et reprendre sa route. 

- Pourquoi ?! s'écrit-il alors. 

- Tu n'es pas capable de le deviner seul ? Si tu ne m'avais pas laissé, rien de tout ça ne serait arrivé ! Le couple humain serait encore en vie, la chasseresse aussi...Et cette Maria ne serait pas dans un état critique. Tu as gravement failli à ta tâche, en trois mille ans, c'est la première fois qu'un serviteur commet une faute aussi énorme. Alors ta claque, tu la mérites, idiot ! hurle-t-elle, toujours de dos. 

Elle attire tous les regards sur eux, les chasseurs abandonnent leurs occupations et quittent leurs bureaux pour voir ce qu'il se passe. 

- Je ne pouvais pas deviner qu'une telle chose arriverait ! Je voulais juste voir ma famille, les miens ! Mais évidemment tu es incapable de comprendre ce genre de sentiments...

- N'utilise pas ce ton condescendant avec moi ! Je suis ta maîtresse, tu as sacrifié ta vie en te mettant à mon service et il est temps pour toi d'en assumer les conséquences ! Tu n'es plus le chasseur vampire Luff Butler, tu es le serviteur de l'Éternelle et rien d'autre ! 

Elle s'approche de lui, une aura mortelle l'enveloppant. Le garçon fait quelques pas en arrière, terrifié. Il finit par s'incliner le plus bas possible, ne pouvant supporter le regard furieux d'Ava Rosa. 

- Veuillez m'excuser, je vous supplie de me pardonner, je ne faillirai plus, gémit-il. 

La peur s'incrusta en lui et ses membres se mirent à trembler. Tous les chasseurs présents s'enfermèrent à double tour ou prirent la fuite le plus loin possible de la vampiresse, prenant conscience du pouvoir effroyable de celle-ci. 

- Agenouille-toi, Luff Butler, ordonne la vampiresse d'une voix méconnaissable. 

Il obéit aussitôt, le corps de la jeune femme émane une puissance telle qu'il ne peut lutter, telle que personne ne pourrait lutter. Luff se sent honteux, ridicule, humilié, agenouillé devant cette femme mais il n'a pas le choix. Il n'a pas d'autre choix que d'obéir. Après tout, n'est-ce pas lui qui s'est engagé à son service ? Qui a choisi de se présenter à l'élection ? 

Il aurait dû faire une croix sur son ancienne vie dès ce jour-là au lieu de profiter de la gentillesse d'Ava Rosa et de s'y accrocher comme un enfant. 

- Désormais, tu ne me quitteras plus. Tu ne t'éloigneras pas plus de quelques mètres. Je n'accepterai plus aucune divergence. Si tu n'es pas à la hauteur, tu mourras. Que ce soit de mes mains ou de honte après avoir été délaissé par l'Éternelle. As-tu compris, Luff ? 

- J'ai compris. Je jure de ne plus commettre d'erreur. 

- Bien... Va t'entraîner, je t'observerai de loin."

Sur ses mots, elle inspire une grand bouffée d'air et ferme les yeux. Petit à petit l'aura menaçante perd de son ampleur jusqu'à disparaître complètement. Luff reprend doucement son souffle. 

Quand il finit par se relever encore un peu tremblotant, la vampiresse a disparu. Seuls quelques chasseurs l'observent, peureux. Il ignore leurs regards, Ava Rosa venait de l'afficher au grand jour et il n'était pas prêt d'assumer. 

Il prit de grandes inspirations avant de se décider à traverser le couloir par de grandes enjambées. Il se changea rapidement, enfilant une tenue de sport basique et prit la direction de la salle d'entraînement. 

"Ah Luff, l'Éternelle nous a prévenu que tu allais venir t'entraîner. Elle a proposé que l'on fasse du corps à corps aujourd'hui, cela te convient ? interroge gentiment un chasseur accompli. 

Le jeune homme lui rend un faux-sourire : "J'aurai préféré lancer des poignards mais ce n'est pas comme si j'avais le choix, là", grogne-t-il intérieurement.

- C'est parfait, allons-y."