Ce dimanche-là était particulier. La neige était tombée toute la nuit et recouvrait la ville d'un voile blanc, qui faisait naître la joie chez certains et l'agacement chez d'autres.

Alice faisait partie de l'équipe « joie ». Elle avait à peine bondi de son lit ce matin qu'elle débarquait dans le salon, où Veectoria regardait la TV, pour lui annoncer la joyeuse nouvelle, des yeux pétillants et le sourire impatient.

Veectoria, comme la plupart des Lutins des Foyers, n'aimait pas le froid... mais elle ne voulait pas crever la bonne humeur de la petite humaine. Alice dû attendre que sa mère se lève, une demi-heure plus tard, puis que le petit-déjeuner passe, avant qu'enfin le signal du départ ne lui soit envoyé.

Elle avait sauté dans ses vêtements, enfilé ses boots de neige et son bonnet, avant que les deux adultes n'aient le temps de débarrasser la table.

Pendant qu'Alice profitait de la neige pour se défouler, sa mère était partie courir. Elle ne pensait pas faire un grand tour, mais elle voulait tout de même y aller. Ça laissait le temps à Alice de s'amuser avec des camarades de son âge.

Veectoria observait les enfants jouer dans la neige, soit entre eux, soit avec leurs parents, soit avec les chiens de la famille. Tout le monde avait l'air ravi de retomber en enfance quelques instants...

La Lutine buvait un thé bien chaud de la thermos qu'elle avait préparé devant ce spectacle, emmitouflée dans son Bonnet métamorphosé en veste bien chaude et bien épaisse. Elle avait un bonnet de Kate sur la tête, un de ceux qu'elle mettait pour aller skier, ainsi qu'une bonne paire de gants. Ce qui ne l'empêchait pas d'avoir froid !

– Hé, Veeck ! Tu viens nous aider, s'il te plaît ?

Veectoria retrouva la terre ferme – elle laissait ses pensées divaguer depuis quelques minutes – pour trouver Alice à quelques mètres de là, lui faisant un grand signe de la main avec un large sourire. Elle avait fait un bonhomme de neige avec quelques enfants.

La Lutine prit le torse du bonhomme de neige, trop lourd et trop imposant pour les enfants, afin de le mettre en place. Elle fit de même avec la tête, avant de porter une petite fille pour qu'elle donne vie au bonhomme en lui installant des yeux et un nez.

– Il est parfait ! Souriait la Lutine, félicitations, tout le monde !

– On a décidé qu'il s'appelle Olaf, dit Alice, et il ne fondra jamais, lui aussi !

– Je crois qu'il faudrait un peu de Magie pour ça, tu ne crois pas ?

Alice hocha la tête, mais assura à ses camarades, qu'elle savait en faire, de la Magie. Veectoria sourit. Alice avait effectivement appris quelques tours de magie humains, avec des trucs, ce qui n'avait rien à voir avec la Magie qu'elle pratiquait elle-même... mais ça, les petits humains n'avaient pas besoin de le savoir.

Trois bonshommes de neige rejoignirent Olaf – il s'agissait de sa famille et d'un compagnon à quatre pattes – avant qu'Alice et Veectoria ne se retrouvent seules. Les autres enfants étaient rentrés avec leurs parents au fur et à mesure.

– Tu vas me manquer, Olaf, dit Alice en lui faisant un câlin, mais tu es froid et tout mouillé !

Veectoria caressa sa joue pour enlever l'eau fondue sur celle-ci, avant de lui proposer un chocolat chaud. Elle tenait à ce que sa mère voit Olaf et sa famille, hors de question de rentrer avant que Kate ne les rejoigne !

Une fois le chocolat dégusté, Alice trouvait d'autres enfants pour continuer son armée de bonhommes de neige. Veectoria les aidait, observant les petits humains s'organiser. C'était ce qu'elle préférait dans son travail... observer les enfants. Elle les voyait grandir, apprendre, appréhender leur environnement, évoluer doucement, mais sûrement, vers la vie d'adulte...

Tandis qu'elle se perdait dans ses pensées, elle en fut sortie de la manière à laquelle elle s'attendait le moins ; une boule de neige lui avait atterri sur le bonnet. Elle se tourna, observant une bataille de boules de neige qui avait lieu un peu plus loin... trop loin pour qu'il s'agisse d'un accident.

Et, effectivement, il ne s'agissait pas du tout d'un accident... une autre boule de neige lui atterrissait sur le bout du nez.

Ce fut à ce moment qu'elle vit Kate, une boule de neige à la main, et la même expression que sa fille quand elle passait de petit ange à démon... d'un coup, elle comprit ce à quoi les nounous d'Alice avaient dû faire face, même si la petite n'était sans doute pas aussi redoutable que la mère !

– Je ne t'ai pas fait mal ? demanda Kate.

– Tu veux la guerre, tu vas l'avoir ! Lui lança Veectoria, avec un sourire amusé.

Discrètement, elle utilisa sa Magie pour former une boule de neige, qu'elle envoya vers Kate... qui s'en protégea comme elle pu.

– On a de l'expérience, à ce que je vois, nota Kate.

Elle lança une nouvelle boule de neige vers la Lutine, qui lui rendit la pareille, et ainsi de suite pendant un petit moment... elles se déplacèrent, doucement, mais sûrement, vers un autre groupe en pleine bataille, et se retrouvèrent au milieu d'un champ de bataille chaotique où tout le monde se lançait des boules de neige dans tous les sens !

Ce qui devait arriver arriva ; une boule de neige atterrit droit dans le visage de Veectoria, ce qui lui fit perdre l'équilibre et tomber dans un tas de neige. L'impact du coup et la froideur de la neige donnaient une sensation bizarre !

– Veeck, ça va ? S'inquiéta Kate, qui l'avait rejointe, tu as mal ?

Autour d'elles, on avait cessé la bataille pour s'assurer que tout allait bien.

– Ça va ! Je me suis laissé surprendre...

Elle attrapa les mains gantées de Kate, qui la releva, et s'assura que son nez n'avait rien. À part une douce couleur rouge à cause du froid, celui-ci semblait intact.

– C'est bon, feu vert pour reprendre ! Lança Kate au groupe, tu veux qu'on aille boire quelque chose, le temps que tu aies moins mal ?

– On dirait une sorte de capitulation, non ? sourit la Lutine, joueuse.

Kate ne s'attendait pas à cette réaction ni à cette expression de sa part. Sous ses airs de Lutine angélique et d'élève modèle, Veectoria semblait avoir un petit diable intérieur, qui était de sortie ce jour-là... Alléchée par son attitude, Kate refusa de lui céder la victoire et la bataille de boules de neige reprit de plus belle.

Vers la fin, Kate comme Veectoria sentaient la fatigue pointer le bout de son nez, malgré le bon moment qu'elles passaient. Elles avaient mal au visage à force de sourire, la gorge gênée à force de crier...

Lorsque Kate tomba au sol, en plein dans un tas de neige, Veectoria s'approcha pour l'aider à se relever, comme l'humaine l'avait fait pour elle avant. Elle s'apprêtait à lui proposer un chocolat chaud pour enterrer la boule de neige de guerre, mais... quelqu'un la bouscula un peu vigoureusement. Alice se retrouva sur Kate, qui l'avait retenue comme elle avait pu.

– Ça va ? Demanda l'humaine avec un sourire.

– Je... Je crois ?

Leurs regards s'accrochèrent alors. Il y avait moins de dix centimètres entre les lèvres de l'une et de l'autre... leurs iris semblaient aimantés. Trop pour se détourner facilement.

Le temps s'était suspendu autour d'elles, il n'y avait plus de bruit, plus d'agitation, plus de température fraîche, plus personne... simplement elles.

Ce moment hors du temps et de l'espace aurait pu durer une éternité ou deux. Après tout... Elles étaient bien. C'était un moment agréable dans lequel se figer à tout jamais...

Malheureusement, il prit fin quand Alice avait pointé le bout de son nez rouge pour s'assurer que sa mère et Veectoria allaient bien.

– Je vous ai vues tomber  ! Tu as mal, Veeck ? Et toi, Maman ?

Veectoria se releva, le visage rougi – et cela n'avait rien à voir avec la fraîcheur de la température – avant d'aider Kate à se relever.

– On va bien, ne t'inquiètes pas, sourit Kate, quand Alice l'enserra dans ses bras. Tu nous surveilles, si j'ai bien compris ?

– Pour être sûre que vous n'ayez pas mal ! vous faites que tomber et prendre des boules de neige !

– C'est le principe, sourit Veectoria, mais je pense qu'on a assez joué pour la journée.

– On capitule ? La nargua Kate, avec – Veectoria le jura – de petites cornes sur le front.

– Maman a gagné ! conclu Alice, ça veut dire que tu as un cadeau de consolation, Veeck !

Alice prit la main de la Lutine dans la sienne, avant qu'elles ne se dirigent vers la sortie du parc.

– Je lui offre toujours quelque chose quand elle fait de son mieux, mais que le résultat n'est pas celui attendu, indiqua Kate. Ça l'encourage et ça rend la défaite moins dramatique. Enfin, je trouve.

– C'est une bonne idée, sourit la Lutine, elle a l'air ravie de ma défaite, en tout cas !

Elles prenaient la direction d'un marché de Noël proche pour y faire un petit tour avant de rentrer.

Quelques minutes plus tard, elles trinquaient avec un vin chaud et un chocolat chaud, devant un paquet de churros et de la sauce au chocolat-noisette. Veectoria était presque ravie d'avoir perdu la bataille. L'ambiance était magique, entre les lumières et décorations du marché de Noël, les sourires de Kate et sa fille, le chocolat chaud succulent...

Après la collation, elles déambulèrent dans les allées du marché de Noël quelques instants. Aucune des trois n'avait réellement envie de rentrer, surtout maintenant que les estomacs étaient pleins.

– Oh, Maman ! s'écria soudainement Alice, lâchant la main de Veectoria pour se précipiter devant un stand.

Il y avait du monde devant celui-ci, principalement des enfants, et leurs parents derrière qui essayaient de négocier pour qu'ils avancent, sans avoir à débourser d'argent pour acheter quelque chose.

Veectoria observait l'immense chalet scintillant de mille feux, rempli à craquer de peluches, toutes plus mignonnes et poilues les unes que les autres. Il y avait de toutes les espèces, de toutes les tailles, de toutes les couleurs ! Des chiens, des chats, des rennes, des baleines, des requins, des éléphants, des lions, des pingouins, des crocodiles, des tigres... mais surtout : de magnifiques lapins, dont certains totalement blancs, comme l'était le lapin d'Alice.

Les yeux des peluches scintillaient de paillettes, de couleurs variées, naturelles ou non... les formes animales étaient harmonieuses et ressemblantes, tout en restant mignonnes et attractives. Leurs poils avaient l'air tellement doux !

Tandis que Veectoria observait l'étal avec de grands yeux pétillants comme les enfants autour d'elle, Alice négociait avec sa mère. Elle avait déjà un nombre incalculable de lapins blancs dans sa chambre... mais sa mère finit par céder.

Elle en prit même deux : un lapin blanc à taille réelle et un plus petit, en porte-clefs. Sous les regards envieux des autres enfants... et de Veectoria, un peu, aussi.

La Lutine fut plutôt surprise quand, finalement, Alice lui tendit les deux lapins. Veectoria la regarda un moment, ne comprenant pas trop... la fille arborait le même sourire que sa mère, un brin joueur et satisfait :

– Tiens ! J'en ai déjà tout pleins ! et comme ça, tu penseras à moi quand tu seras avec une autre famille !

Veectoria ne réagit pas pendant plusieurs secondes, sincèrement touchée par ce geste. Elle se retrouva avec les peluches dans les bras, Alice qui lui faisait un câlin et Kate qui enlaçait ses épaules quand une larme dévala sa joue rosie.

C'était la première fois depuis bien longtemps que quelqu'un lui offrait un cadeau. Celui-ci la touchait plus que les autres, parce qu'il ne s'agissait pas de nourriture, de vêtements, de carte cadeau ou d'un livre... c'était un souvenir de cette journée, quelque chose qui lui rappellerait Alice et sa mère dès qu'elle les verrait...

Ça valait bien plus que la valeur pécuniaire des peluches. Ça valait tout l'or du monde et toute la poussière magique qu'il soit. Ça n'avait pas de prix... et à présent, c'était à elle. Rien qu'à elle.

✨🐰✨🐰✨

Sorry j'ai totalement zappé de vous publier le chapitre hier TwT

Du coup c'est double dose aujourd'hui :D

Haydn