Jour 0 : Enfant (pas) sage
Bonne lecture :3
✨🐰✨🐰✨
Kate raccrocha, mit son smartphone en veille en poussant un râle frustré, avant de fusiller la pauvre machine à café qui lui faisait face d'un regard noir. « Noir », c'était une façon de parler... parce que ses yeux étaient d'un bleu singulier. Elle remit sa chevelure brun chocolat ondulée en place, ruminant mentalement, avant de noter que sa manucure avait besoin d'un sérieux rafraîchissement. Si seulement elle avait le temps de s'en occuper !
Quand la machine fut assez chaude, elle se fit couler un espresso serré. Le temps que sa boisson chaude soit prête, elle observa son reflet dans ladite machine à café. Sa peau était plus pâle que d'ordinaire, comme ses cernes plus prononcées et il lui semblait que ses rides ressortaient plus encore que la veille... et ce n'était pas son fond de teint et son anticerne qui y pourraient quo ique ce soit.
– Ah, Kate, la salua-t-on joyeusement, tu as une sale tête, de si bon matin !
Kate marmonna une insulte que son interlocuteur ne comprit pas, avant de lui lancer un regard glacial. L'autre ne se laissa pas démonter et se fit couler un espresso à son tour, tout sourire dehors.
Les deux se connaissaient depuis leur première année d'étude au sein d'une école londonienne prestigieuse. Bien qu'ils ne se côtoient pas assidûment à cette époque, ils échangeaient de temps à autre. Ils avaient même travaillé sur un projet de groupe en seconde année, si elle se souvenait bien – mais là s'arrêtaient leurs rapports. Du moins, jusqu'à ce qu'ils se retrouvent tous les deux à travailler pour la même agence.
Depuis qu'ils étaient devenus collègues, qu'ils échangeaient plus, les deux s'étaient rapprochés. Ce n'était pas dans leurs natures respectives de parler de leur vie privée et personnelle, mais avec le temps qui s'écoulait, ils en étaient venus à s'ouvrir l'un à l'autre...
Durant ces années, Kate avait assisté au ballet des amantes de Keir, ne comprenant pas vraiment ce que les femmes pouvaient trouver à ce Dom Juan de bas étage... Elle, elle restait totalement hermétique à ses charmes – enfin, ses soi-disant charmes, comme elle le corrigeait souvent. Elle s'amusait un peu de la situation, l'observant de loin en levant les yeux au ciel et en poussant des soupirs régulièrement.
Heureusement, ces dernières années, il s'était calmé. Une tornade blonde, en tout point son opposé, avait débarqué un beau jour dans sa vie, et depuis, ils filaient le parfait amour. Elle avait un peu de mal à comprendre comment ils pouvaient s'attirer l'un l'autre – ils étaient tellement différents ! – mais il était vrai que d'après la légende urbaine, les contraires s'attiraient...
Lubeen s'était fait sa petite place au sein de l'agence et passait régulièrement nourrir son mari – et comme il en ramenait assez pour nourrir un régiment, tout le service en profitait.
– Quoi ? Même pas une pique en retour ? S'étonna Keir, tu es malade ?
Elle se contenta d'un haussement de lèvre contrarié et d'un regard électrique dirigé sur son collègue.
– Alice a encore fait des siennes, spécula Keir, je parie que tu n'as plus de nounou pour finir la semaine.
– Je n'ai plus de nounou tout court, s'agaça-t-elle. Je suis sur la liste rouge de toutes les nounous de la ville, si ce n'est pas du pays ! J'ai un dossier à boucler et un contrat de la plus haute importance à négocier, et je n'ai personne pour garder la tornade ambulante qui me sert de fille !
– Elle a de qui tenir.
Elle le fusilla d'un regard noir :
– Ce n'est pas le moment de plaisanter, si tu veux mon avis, lui reprocha-t-elle, je ne sais pas comment je vais faire pour la faire garder !
Alice avait dix ans, de grands yeux bleus comme sa mère, des cheveux châtains et le visage parsemé de petites taches de rousseur qui lui donnait un air de chipie adorable.
En réalité, elle était une chipie – et parfois, elle était adorable. La plupart du temps, elle était intenable, parfaitement consciente des barrières qu'elle franchissait pour se divertir... oui, Alice, c'était le portrait craché de sa mère, même si celle-ci ne voulait pas l'admettre.
– Elle a des actions chez Bêtises & Associés – à moins qu'elle n'en soit à la tête, ce qui ne m'étonnerait pas, maugréa sa mère.
Keir ricana. Il n'était pas fan des enfants, surtout quand on lui demandait de s'en occuper, mais il aimait bien la petite Alice. Elle avait toujours des choses à raconter, une imagination fertile – surtout quand il s'agissait de faire tourner ses nounous en bourrique.
– Tu peux toujours demander à Lubeen de la garder quelques jours – il sera ravi, il adore ta gamine.
C'était arrivé qu'il aille chercher Alice à l'école pour la ramener au bureau, quand une nounou venait à manquer ou était malade. Passons le goûter à base de bonbons, chocolats et autres sodas qu'il avait l'habitude de lui donner... ce qui rendait Alice intenable et sa mère folle.
Elle lui lança un de ces regards entendus où il n'y avait pas besoin de mots pour comprendre le message :
– Avec plaisir – et qui s'occupe de garder ton mari, exactement ?
– T'exagères, sourit Keir, il l'a déjà gardée plusieurs fois, ils ont survécu tous les deux !
– On parle de l'état de ma cuisine et de mon salon ? Ma femme de ménage a failli poser sa démission ! Et je ne te parle pas de tout le sucre qu'il lui a fait avaler !
Ça, Keir s'en souvenait. Il frissonnait toujours quand son Lutin approchait du sucre de trop près... Heureusement, il ne lui était pas venu à l'idée d'en avaler une bouchée. C'était Alice qui avait tout ingurgité – et Keir estimait égoïstement que cela n'était pas du tout son problème.
Mais avec un peu de chance, Lubeen la garderait au café, devant témoin – ou irait au parc avec elle pour qu'elle se défoule... en tout cas, Kate refusait catégoriquement que les deux tornades restent seules chez elle. Sa cuisine se souvenait encore du gâteau qu'ils avaient fait – tout comme sa femme de ménage.
– Donc tu te plains depuis des années pour rien, conclut-elle.
– J'essaye de t'aider et c'est tout ce que tu trouves à me dire ?
Kate soupira en se massant la nuque, histoire de se calmer.
– Je ne vais pas avoir trop le choix, souffla-t-elle alors. Si seulement je pouvais trouver quelqu'un capable de la garder... est-ce que c'est si compliqué de garder une gamine de dix ans, franchement ?
– Une gamine de dix ans, je ne pense pas, mais la tienne, sûrement...
– Donne-moi encore plus de raison de redouter que Lubeen la garde, je t'en prie !
Keir roula des yeux en souriant. Lubeen avait un bon feeling avec les enfants, c'était indéniable... bon, d'accord, il fallait parfois le canaliser lui, mais au moins tout le monde dormait bien la nuit suivante. Et puis il avait retenu la leçon ; pas de bazar sans nom chez Kate sous peine de la voir fâchée. Et Lubeen n'aimait pas fâcher les gens.
Kate referma son ordinateur portable en pestant après les demandes de dernières minutes et les clients contrariants. Elle observa l'heure – c'était bientôt le moment pour elle de récupérer sa fille à l'école. Avec un peu de chance, elle pourrait travailler de chez elle... si Alice ne passait pas son temps à aller et venir dans son bureau pour des raisons aussi diverses qu'inventives.
Au moment où elle rouvrit son ordinateur pour vérifier que tout était en ordre avant son départ, on frappa à la porte. À travers la vitre, elle identifia sans mal Lubeen, qui avait le bon goût de lui apporter des donuts et un café avec un grand sourire.
Lui, au moins, savait comment se comporter avec les working mum débordées.
– Keir m'a dit que tu avais beaucoup de travail, dit-il en déposant ses offrandes sur le bureau. Un donut végan au caramel et un café noir – j'espère que j'ai juste ?
Kate hocha la tête en le remerciant. Elle but une gorgée de café et mordit dans le donut, un peu plus détendue qu'avant.
– Je dois bientôt rentrer m'occuper d'Alice et j'ai un milliard de choses à faire avant demain !
– Je peux aller la chercher et la ramener ici si tu veux, proposa-t-il, Keir va travailler tard aussi.
– Laisse tomber, souffla-t-elle, je vais bien devoir m'y faire... c'est impossible de trouver quelqu'un capable de garder Alice durablement. Cette petite diablesse sait la jouer fine, crois-moi.
Lubeen la toisa un moment sans rien ajouter, perdu dans ses pensées.
– Je crois que j'ai peut-être une solution, dit-il enfin, avec un grand sourire. Enfin, c'est Keir qui m'en a parlé, mais sans moi il ne peut pas faire grand-chose, du coup c'est un peu comme si c'était mon idée, non ?
Au regard que Kate lui lançait, il comprit de lui-même qu'il valait mieux en venir au fait :
– Si tu comptes la menacer de ne pas avoir de cadeau à Noël, sache que c'est inutile... j'ai essayé.
– Jamais je ne ferais un truc pareil, s'outra-t-il, c'est horrible de dire une chose pareille à un enfant ! C'est Keir qui t'a donné cette idée ? Ça lui ressemble un peu trop !
La mère refermait son ordinateur portable, avant de le glisser dans son sac à main.
– C'est quoi ton idée ? demanda-t-elle finalement.
– Je vais te montrer un truc qui va te changer la vie ! sourit le Lutin.
Kate en doutait grandement. Quoi qu'il lui présente, sa vie ne changerait pas. Enfin, peut-être qu'elle aurait moins de problèmes de nounou – ça l'arrangerait grandement... mais elle connaissait la propension de Lubeen à s'enthousiasmer un peu trop pour tout et n'importe quoi. Il traînait tellement à l'agence qu'à force, elle le connaissait. Puis il déteignait sur son époux – c'était agaçant, même si elle s'en amusait aussi beaucoup...
Elle ne pouvait pas imaginer à quel point elle se trompait alors.
✨🐰✨🐰✨
Et voilà pour ce jour 0 !
RDV demain pour la suite ✨
Haydn
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top