Lundi 7 décembre - Magie ✨

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Les lundis n’étaient pas du tout les jours préférés de Lubeen. Loin de là. Ils étaient synonymes d’une nouvelle semaine, que Keir allait passer au bureau, lui au café… et annonçaient la fin d’un week-end en sa compagnie.

Son humeur reprenait des couleurs dès qu’il était au travail. Il aimait ce qu’il faisait, l’environnement et les personnes avec lesquelles il travaillait. Juste, parfois il préférerait grandement ne pas sortir de l’appartement, traîner entre le lit et le canapé, avec Keir contre lui, comme c’était le cas le week-end ou pendant leurs vacances.

Ce fut le moral entamé par une nouvelle semaine où il entrapercevrait son fiancé – maudits préparatifs de mariage qui lui prenait le peu de temps libre qu'il avait – que Lubeen prépara le petit-déjeuner.

C’était une petite routine bien huilée ; il se levait en même temps que Keir, et pendant que son petit-ami se préparait dans la salle de bain, lui s’occupait du petit-déjeuner. Cela ne prenait pas longtemps, surtout avec la Magie, puis il était ravi de le faire – et surtout, ravi de savoir que Keir avalait sa dose de poussière de Magie quotidienne.

– Mh, Lubeen ?

Le lundi était un jour propice pour les pancakes. Bien beurrés, dégoulinants de pâte à tartiner sans sucre – Keir était intransigeant sur le sans sucre depuis sa dernière ingestion. Lubeen aussi aimait les pancakes. Et Malloreen également. Celui-ci trouvait que ses pancakes étaient les meilleurs qu’il ait jamais mangés – est-ce que sa poussière de Magie marchait aussi sur les Lutins des Bois ? Et sur les autres Lutins des Foyers ? Il ne s’était jamais posé la question jusqu’à présent.

– Lubeen ?

D’un autre côté, que la poussière ait un effet ou non, l’autre Lutin les trouvait bons, ses pancakes. Et puis la poussière de Magie du Pôle n’avait aucun effet néfaste sur lui, donc on pouvait en conclure qu’il n’y avait que peu de risque pour son invité. Enfin, si les Lutins des Bois fonctionnaient pareil qu’un Lutin des Foyers. Il fallait se pencher sur la question sérieusement.

– Lubeen !

Une fois une belle fournée de pancakes s’empilant sur la table, le blond s’affaira aux boissons chaudes. Malloreen ne buvait que du thé, c’était relativement simple à faire apparaître. Il était habitué à Keir et son éternel expresso noir, auquel il avait enfin arrêté d'y mettre du sucre. Par contre, Keith et son café-crème saveur noisette et légère note de miel était toujours un petit défi à réaliser. Heureusement qu’il travaillait dans un café, sinon il n’aurait pas été capable de lui en faire convenablement.

– Oh, bon sang… Lubeen !

Et c’était important pour n’importe quel Lutin des Foyers de remplir sa mission avec le plus de précision possible. C'était également ce qu'il enseignait à Malloreen, hors de question de se rater. Il fallait démontrer son implication dans la tenue du foyer et le contentement des estomacs de toute personne présente dans son foyer.

En parlant de personne présente dans le foyer, qu’est-ce qu’ils attendaient tous pour passer à table ? Les pancakes refroidissaient sur la table et…

– Oh, la boulette, se figea-t-il alors, dans un sursaut.

Keir se tenait dans l’embrasure de la porte, les bras croisés et l’expression typique d’une « boulette Lubinienne » sur le visage… Malloreen le regardait aussi, consterné. Mais le pire regard qu’on portait sur lui, c’était sans doute celui de Keith. L’homme avait les yeux écarquillés au maximum, l’expression figée dans la plus pure surprise… et le choc, aussi, probablement un peu.

– Je ne te le fais pas dire, lui reprocha Keir, avant de regarder sarcastiquement sa montre : tu auras tenu sept jours ! Félicitations, je pensais que tu tiendrais beaucoup moins que ça…

La dernière partie était probablement sincère, mais ne tranquillisa pas du tout le Lutin des Foyers qui…

– Merde, c’est quoi ce bordel ! C’est quoi tous ces trucs qu’il vient de faire ?!

Keith faisait allusion à la Magie que Lubeen avait tout simplement pratiquée sous ses yeux éberlués pour faire apparaître le petit-déjeuner… Difficile de rater les éclats et volutes dorés qui faisaient apparaître des pancakes sur des assiettes en plein milieu de la cuisine. Même de si bon matin, à moitié réveillé, Keith savait que ce n'était pas normal.

– Je suis curieux de voir comment tu vas te sortir de là, nota Malloreen.

– Et pourquoi il n’y a que moi qui sois choqué ! enchaîna Keith, outré.

– Je suis désolé, j’ai totalement oublié, se lamenta Lubeen, j’avais… J’avais zappé !

Oh, je vous parle ! explosa Keith.

– Arrête de hurler comme ça, lui reprocha son frère, on t'entends très bien !

Le plus naturellement du monde, Keir s’installa à table et commença son petit-déjeuner, imité par Malloreen… puis Lubeen, qui avait perdu tout appétit et s’en voulait terriblement d’avoir ainsi levé le Secret.

Étant donné que tout le monde était assis dans la plus grande tranquillité, malgré ce qu’il venait de se passer sous ses yeux, Keith s’assit à son tour.

Il ne quittait pas Lubeen de son regard curieux et surpris, avec un éclat de méfiance suspicieuse.

– Lubeen est ce qu’on appelle un Lutin des Foyers, lui annonça son frère, dans le plus grand des calmes. Ce que tu l’as vu faire, c’est de la Magie… il n’y a rien de dangereux. Enfin, presque rien...

Keith alterna son regard entre les deux fiancés, abasourdi par la nouvelle. Il n’avait strictement aucune idée de quelle question poser en premier, tellement elles fusaient dans sa tête. Son trouble était clairement identifiable, aussi Keir enchaîna-t-il sa petite présentation préférée « qu’est-ce qu’un Lutin des Foyers et en quoi mon fiancé est plus que pratique au quotidien » – Lubeen n’appréciait que moyennement ce titre.

– On va être en retard, le coupa Lubeen, agacé par ladite présentation. Tu feras ton petit speech absolument pas vexant ce soir !

Keir aurait bien continué des heures, mais le fait était que son Lutin avait raison. Il était l’heure de se rendre au bureau. C’était bien la première fois que Lubeen le pressait pour partir un lundi !

– Mais attendez ! tenta Keith pour les retenir, vous allez nous laisser là, comme ça ? J’ai un milliard de questions, moi ! Est-ce que c’est sûr de manger ces trucs, déjà ?

– C’est une question légitime, dit Keir, t’es pas le plus doué non plus et je–

Lubeen lui lança un regard noir, en lui envoyant son coude dans les côtes et Keir cessa de faire le malin – mais n’ôta pas son sourire moqueur et amusé.

– Si tu as des questions, prière de les adresser à l’autre Lutin présent sous ce toit ! À ce soir !

Lubeen claqua la porte d’entrée sur Keith, qui la fixa un long moment en papillonnant des yeux. Malloreen, qui observait tout cela à distance, poussa un soupir. Merci de la corvée, songea-t-il, lorsque Keith se tourna vers lui, le pointant du doigt :

– T’en es un aussi, alors !

– Bien vu, Sherlock, soupira Malloreen.

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La suite de la matinée pouvait se résumer par « interrogatoire en règle ». Keith avait posé toutes les questions qui lui passaient par la tête, et ce, jusqu’au repas de midi…  Malloreen avait tenté de répondre à tout, dans la mesure de ses connaissances. Il était un Lutin des Bois, soit une espèce similaire, mais aussi différente de celle de Lubeen.

Lui, son truc, ce n’était pas de tenir un foyer, mais d’entretenir les bois et les êtres qui y vivaient. De veiller sur l’équilibre de l’écosystème de son lieu de vie, qui était, de préférence, loin des humains. Ses pouvoirs se concentraient donc sur ce but et sur rien d'autre.

– Et donc, tu ne sais pas faire apparaître le repas de midi, résuma Keith.

Malloreen fit un non de la tête :

– Je peux faire grandir des plantes à partir de pousses ou de graines, mais je suis incapable de faire la même chose que Lubeen. Je suis plus à l’aise avec les courges, j’aime beaucoup ça et…

– C’est pour ça, alors, le coupa Keith, que tu avais l’air aussi bien hier… on était chez toi.

Malloreen haussa les épaules :

– Ce n’est pas chez moi, mais c’est mon environnement normal de vie. Enfin, ça devrait l’être.

– Pourquoi est-ce que ça ne l’est pas, alors ?

Keith était à deux doigts de regretter la question quand il vit son visage et ses oreilles s’affaisser et son regard se baisser par terre.

– Je vivais dans un endroit où il y avait plein d’arbres, lui répondit-il alors, c’était le paradis sur Terre. Pour moi, en tout cas… malheureusement, les humains ont décidé de construire un complexe ou je ne sais quoi. Et pour ça… Ils ont tout rasé. L’Arbre-maison dans lequel je vivais a été déraciné.

Keith avait envie de s’excuser. Il ne savait pas trop pourquoi, ce n’était pas de sa faute objectivement… mais il se sentait coupable, parce qu’il avait lui aussi fait construire des complexes et bâtiments divers, du temps où il était un homme d’affaires influent et riche.

Qui savait combien de Lutins – ou autre ? – avaient vu leurs maisons être détruites de la sorte ? Aucune idée. Aucun Lutin ne s’était jamais plaint.

– Après ça, j’ai essayé de trouver un autre endroit pour vivre, mais… disons que notre espèce n’est pas réputée pour son sens de la solidarité et de l’accueil. Alors… j’ai bien dû m’adapter comme je le pouvais. J’ai essayé de trouver un foyer, mais je n’ai pas vraiment réussi à en garder un.

– Pourquoi ça ? T’es pas invivable comme type…

Il était même un colocataire appréciable. D’accord, ce n’était pas le boutentrain de service ou le mec le plus socialement à l’aise du monde… mais passer du temps avec lui était agréable. Keith aimait passer ses journées à ses côtés.

– Bien… les humains s’attendent généralement à avoir un Lutin des Foyers et… je ne sais pas faire la moitié de ce qu’un Lutin des Foyers est capable de faire.

– Oh… je vois le problème.

Un silence s’installa alors.

– Et Lubeen, dans tout ça ?

– Oh… il a grandi au Pôle Nord. Tu sais, le Père Noël, tout ça. Ils sont un peu naïfs, crédules, bourrés de bonnes intentions… et donc il n’agit pas avec moi comme le font les autres Lutins.

Keith n’était pas le moins du monde surpris.

– Je lui ai dit que c’était stupide de faire entrer un autre Lutin chez lui, mais… il n’a rien voulu entendre, donc je suis là, en attendant que ce soit moins le branle-bas de combat au Pôle pour que je m'y installe.

– Oh, je vois…

Keith se retrouva presque déçu de l’apprendre. Une chose lui venait d’elle-même sans qu’il ait besoin qu’on le lui confirme ; une fois là-bas, il n’y avait que peu de chance pour qu’ils se revoient un jour.

– Je ne peux pas faire apparaître le déjeuner, mais je peux le préparer, sourit finalement Malloreen en sortant une poêle d’un placard.

Cela mit fin à la conversation. Keith joua volontiers les commis.

Contrairement à Keir, il aimait cuisiner. Et il était plutôt doué. C’était son petit plaisir personnel, même si avec les années et ses emplois du temps toujours plus surchargés, il avait un peu délaissé sa cuisine… comme il avait délaissé d'autres choses également.

Les deux avaient cuisiné ainsi le repas de midi, conversant de cuisine, ingrédients et autres ustensiles, durant un long moment. Enthousiastes d’avoir quelque chose à faire de leur journée – et ne voulant pas que l’ambiance bon enfant ne s’arrête – ils passèrent l’après-midi dans la cuisine.

Au-delà de remercier à leur manière Keir et Lubeen pour leur hospitalité, ils avaient l’impression d’enfin avoir trouvé un but.

Quelque chose qui les motivait et leur donnait une raison de se lever le matin.

Ce qui n’était pas rien, ni pour l’un ni pour l’autre.

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Eeeeeet voilà, Lubeen aura tenu le secret une petite semaine 🤭 remarque c'est mieux que dans la première histoire, où il n'avait pas tenu 2h XD

À demain pour la suite 😏

Haydn ❄️

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