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- C'est à propos de Joona ? me demanda Elsa.

- Je n'ai rien de particulier à dire, tentai-je d'un air détaché. Moi, j'ai juste besoin d'apprendre à maîtriser mon pouvoir. Après, je pourrais partir.

J'entendis Elsa s'arrêter derrière moi et fis de même. Manifestement mon ton avait trahi mes pensées. Je fermai les yeux, espérant qu'en les rouvrant, je serais sur le bord du lac où j'avais pris vie sans cette horrible sensation dans la poitrine. Comme si un trou béant ne cessait de grandir, m'engloutissant petit à petit. Je comptai mentalement jusqu'à cinq et relevai les paupières. Malheureusement, j'étais toujours à l'orée de la forêt gelée, le cœur brisé. Je me retournai pour faire face à la reine d'Arendelle. Elle avait ses yeux de glace rivés sur moi et semblait totalement sous le choc. C'est alors que je vis une larme perler à son œil.

- Pourquoi veux-tu partir ? bredouilla-t-elle.

- Pourquoi resterai-je, répondis-je alors. Je t'ai embrassé Elsa !

- Je sais, sourit-elle. J'étais là. Et c'était très agréable, ajouta-t-elle. Mais je...

- Tu es avec Joona, oui, j'ai compris ! m'écriai-je. Pourquoi ne me l'as-tu pas dit ? Pourquoi m'as-tu laissé t'embrasser ?

- Je ne sais pas. Je... Je n'ai pas su réagir. J'ai paniqué.

- Tu l'aimes ?

La question avait fusé sans que je n'aie pu y faire quoi que ce fût. Si j'en avais eu le pouvoir, je l'aurais ravalée dès qu'elle avait quitté ma bouche. Mais c'était impossible, évidemment. Elsa me sourit, tendrement.

- Ne te sens pas obligée de répondre à cette question, précisai-je tout de même.

- Nous allons nous marier, Jack. Bien sûr que je l'aime.

- Je t'avais dit de ne pas répondre.

Son sourire s'élargit et elle s'approcha. Elle tendit une main vers mon épaule, mais je ne la laissai pas faire. Cela suffisait, maintenant.

- Laisse-le rejoindre son royaume et épouse-moi à la place !

Je ne sais vraiment pas ce qui me passait par la tête. Je n'étais clairement pas moi-même, à ce moment-là.

- On n'épouse pas un homme qu'on vient de rencontrer, voyons, récita-t-elle comme une leçon.

- On se connait depuis presque toute ma vie ! m'écriai-je alors, un peu trop violemment.

Je ne savais pas quoi dire, en réalité. J'avais été dévasté de voir Elsa dans les bras de ce prince de je ne savais où et je voyais, à présent très clairement, qu'elle n'avait pas le moindre sentiment envers moi. Je n'étais qu'un pauvre garçon à qui elle était venue en aide. Et le pauvre garçon avait cru que toutes ces belles attentions étaient de l'amour. La vérité était que je n'y connaissais rien en amour. Le silence s'installa entre nous et dura quelques minutes.

- Veux-tu que je te laisse ? me demanda Elsa au bout d'un moment.

- Je voudrais que tu le laisses lui, en fait.

Elle soupira longuement et je compris que j'étais en train de me transformer en gamin capricieux. Je savais aussi que jamais je ne pourrais arrêter de penser à elle. À ses lèvres gelées et si douces. À ce moment que nous avions partagé. Seulement quelques secondes pour un baiser. Un baiser qui me hanterait jusqu'à la fin de ma vie. Dans cinq cents ans, réalisai-je alors !

- Je m'excuse.

- Ce n'est pas grave, me dit-elle de sa voix la plus douce. C'est moi qui suis désolée de t'avoir donné de faux espoirs.

- Nous ne ferions pas un couple terrible, de toute façon, repris-je en forçant un sourire. Je vais vivre cinq cents ans. Je suppose donc que je resterai jeune beaucoup plus longtemps que toi. Quand tu seras vieille et fripée, j'aurais probablement la même tête que maintenant. Cela sera bizarre. En plus, tu ne pourrais pas montrer ton mari à ton peuple, si on se mariait. Ce serait ridicule : la Reine Elsa et son mari invisible.

Je ne sais pas pourquoi, mais elle se mit à pleurer. Peut-être pressentait-elle ce que je m'apprêtais à lui dire. D'une manière ou d'une autre, elle devait tenir à moi. Un peu, tout de même.

- Je vais partir, Elsa...

Elle tomba dans mes bras et je sentis ses larmes dans mon cou. Je ne comprends pas bien pourquoi elle était si triste. Je savais bien pourquoi je l'étais, mais je n'ai pas versé de larmes. Pas à ce moment en tout cas.

- Je voudrais que tu restes, me chuchota-t-elle à l'oreille.

- On ne peut pas toujours avoir ce qu'on veut, lui répondis-je alors, essayant de me montrer moins affecté que je ne l'étais en réalité.

- J'ai encore des choses à t'apprendre, Jack Frost.

J'eus un frisson lorsqu'elle prononça mon nom.

- Regarde bien autour de Toi, Elsa. Il n'y a pas de neige dans le ciel. Pas de glace sur le sol. Tu m'as appris ce que je devais savoir. Je t'en remercie, ma Reine.

À cet instant, quelque chose d'inattendu se produisit. Je sentis ses mains se poser sur mes joues et son visage se rapprocha du mien, avec une lenteur incroyable. Maintenant que j'y pense, avec quelques heures de recul, je pense qu'elle voulait me laisser le temps de la réflexion. Me laisser l'occasion de la repousser et de refuser cet ultime baiser.

Il fut doux. Il fut long. Parfait.

- Je me souviendrai de toi, Jack Frost. Ne m'oublie pas, s'il te plaît, dit-elle finalement avec les yeux noyés de larmes. Passe nous voir.

Je ne répondis rien. Mes projets n'incluaient pas de passer par Arendelle. Je venais d'échafauder un plan sans faille. Et si le hasard me conduisait de nouveau par ici, je doutais fortement me souvenir du royaume dirigé par une Reine avec des pouvoirs similaires aux miens.

Il y eut encore quelques embrassades, mais trois minutes plus tard, elle redescendait de la montagne à cheval et je partis peu de temps après. C'est à ce moment que j'ai pleuré.

J'ai eu un peu de mal à retrouver l'endroit, mais je suis maintenant devant la clairière des Trolls. Cela peut vous paraître un peu soudain et irréfléchi comme solution. Mais il est évident que jamais je ne pourrais vivre loin d'Elsa tant que j'aurais le souvenir de nos deux baisers. Je suis effectivement très jeune, on pourrait même dire que je suis né d'hier. Mais je suis censé vivre vieux. Et avec un tel poids sur les épaules... je n'y arriverai jamais.

Les rochers se mettent en branle...

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L'épilogue arrive...

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