Connexion #30

Ne cherchez pas à comprendre pourquoi, mes plans géniaux foirent magistralement à chaque fois que je cherche à les mettre en application. Il a suffit que j'effleure la boîte à verres de contact pour qu'un grognement s'échappe des lèvres de mon Oncle. Je précise qu'il n'avait pas ouvert les yeux ET qu'il me tournait le dos.

— Touche à ça et je mets ta tête dans une partie de ton anatomie que tu n'as encore jamais explorée.

Bref, me revoilà sur l'ordi. Il m'énerve, Raven. Il ne peut pas aller dormir chez lui, à la fin ?!

Vous savez que, la plupart des fois où je le voyais, lorsque j'avais trois ans, il était endormi comme une masse sur mon lit ? À partir du moment où Nuka et Jonah1 sont arrivés, il a de moins en moins dormi chez moi. Il régresse, non ?

Vous voulez que je vous raconte la manière dont j'ai croisé le chemin de Jo et Docteur House ? Non ? Allez, si ! Je vous raconte !

C'était une fois où Raven ne dormait pas. Je devais avoir environ quatre ans, voire cinq, mais pas plus parce qu'on avait pas encore de chien. À l'époque, il y avait une étudiante, O¤¤¤¤¤¤¤, qui était censée s'occuper de moi. Je dis ''était censée'', parce qu'elle passait les trois quarts du temps à faire du shopping avec son petit copain, ce qui fait que je me retrouvais seule. Bien, sûr, mes parents ont fini par l'apprendre – au cours d'une autre aventure à laquelle mes Oncles ne sont pas étrangers – et l'ont virée. Mais revenons à notre histoire : j'avais tanné mon Oncle pour qu'il joue aux legos avec moi et, passées quelques heures de harcèlement moral, il avait fini par accepter. La seule et UNIQUE fois où il avait bien voulu poser ses fesses sur le sol pour s'occuper un peu de moi comme un vrai Oncle devrait le faire.

— Ouuuuaaais ! Merci, Raven ! Merciiiii !

— Bon, ça va, ça va ! J'ai mal à la tête, alors n'en rajoute pas. Ah, non ! Ne m'embrasse pas ! Hem... Comment joue-t-on avec ceci ?

— T'as jamais joué aux legos ?

— Non.

— Tu jouais à quoi, alors quand tu étais petit ?

— À rien ! Allez, avait-il grogné, déjà exaspéré, explique-moi, qu'on en finisse.

— Alors en fait, regarde, tu prends les legos et tu fabriques des objets. Tu peux faire un robot ou un château. Tu veux qu'on fasse un concours de robots ?

C'était la période où je voulais plus que tout avoir un robot qui marche et parle2. Je compensais avec les legos.

— Hmm... Bon, oui, allez, vas-y, commence, je te regarde faire.

Le bon vieux truc des adultes qui veulent avoir la paix...

— Non ! O¤¤¤¤¤¤¤ aussi elle dit ça à chaque fois, et après elle part faire le ménage chez elle et après je m'ennuie toute seule, et après...

— Bon, bon, ferme-la une minute ! Comment on fait ?

Je lui avais expliqué en long, en large et en travers comment construire les jambes, le buste, le corps, les bras, la tête du robot. De mon côté, j'en avais commencé un pas mal du tout. À vrai dire, celui de Raven faisait un peu pitié.

Bon, allez, désolée, Ravy, ton robot faisait CARRÉMENT pitié. Comment tu voulais qu'il marche avec une jambe plus petite que l'autre ?

— Voilà, c'est bon j'ai fini ! avais-je clamé, toute fière de ma production digne d'une firme japonaise.

— Attends, m'avait interrompue Raven, les sourcils froncés, très absorbé par la construction de son robot. Je n'ai pas encore fini de lui faire des transme... Euh... Oui, hem. J'ai fini aussi.

— C'est quoi, ça ?

— Ah ! s'était-il exclamé, satisfait que je remarque l'étrange excroissance sur la tête de l'objet. Alors ça, en fait, c'est un logiciel de reconnaissance vocale, il permet d'analyser l'humeur de celui qui parle, ainsi que son âge, sa taille, ses goûts. Il reconnaît également plus de trois cents langues, ce qui lui permet de répondre de manière appropriée dans le langage approprié. Mais je n'ai pas encore eu le temps d'installer les transmetteurs de données.

— Ça ressemble plus à une patate, mais bon.

— Une patate ? Non mais tu es génétiquement stupide ou est-ce que tu peux soigner ça ? Et puis regarde ton machin, toi. Qu'est-ce que c'est que cette chose immonde ? Le jour où on appellera ça un robot, je t'assure que l'apocalypse sera imminente.

Je n'avais peut-être pas tout saisi dans son discours, mais j'avais parfaitement compris qu'il se moquait de mon chef-d'œuvre.

— T'es pas gentil.

Je me souviens de ce qu'il m'avait répondu aussi clairement que sa menace d'il y a dix minutes :

— Non. Mais moi, je suis beau et je suis intelligent. Toi, tu es laide et tu es stupide.

— T'es vraiment nul ! Je te déteste ! Crétin !

J'avais bondi sur mes jambes maigrelettes et donné un grand coup de pied dans son robot. L'objet avait valdingué dans la pièce. Raven avait fait une drôle de tête. Limite comme s'il allait se mettre à pleurer. Du moins, c'est ce qu'il m'avait semblé, à ce moment-là, et je pense que vous savez combien les petits enfants redoutent de voir un « grand » pleurer.

Sa bouche s'était tordue en une moue méprisante et il s'était levé à son tour. Mon Oncle est quelqu'un de plutôt petit, mais à l'époque, il me surplombait de cinquante bons centimètres. J'avais postillonné :

— T'es vraiment la pire personne que j'aie jamais rencontrée !

— Bah... c'est juste parce que tu ne sors pas souvent.

Il m'avait tourné le dos et s'était dirigé vers le sofa pour replonger dans les bras de Morphée. À cet instant, je m'étais précipitée sur lui, furieuse.

Je ne pense – du moins je n'espère – pas qu'il ait volontairement voulu me blesser. Mais il m'avait repoussée d'une façon si brutale que j'avais trébuché et que mon front était parti cogner le coin d'une étagère. Je ne me rappelle plus ce passage avec exactitude. Tout ce que je sais, c'est que je saignais beaucoup, que je pleurais et que Raven avait l'air de s'inquiéter pour moi. Je sais aussi qu'il avait téléphoné et qu'il n'a pas réussi à joindre tout de suite son interlocuteur. Même qu'il m'engueulait pour que je me taise tout en tenant un Sopalin sur mon front d'une main et le combiné de l'autre. Je sentais sa main trembler contre ma tête, ce qui m'avait fait pleurer encore plus. Au bout d'un moment de stress, il avait réussi à joindre celui qu'il voulait. Il avait conclu son échange par :

— Avec Jonah ? D'accord, à tout de suite.

Puis, il s'était assis à côté de moi en essayant de stopper l'hémorragie.

— Arrête de pleurer ! Si tu pleures, tu risques de mourir plus vite !

Authentique.

— Et voilà, je m'en fiche partout ! C'est pas possible d'être aussi empotée.

Authentique.

— Mais qu'est-ce qu'il fabrique ?! Et toi, hein, ça t'apprendra à manquer de respect aux grandes personnes !

Authentique.

— C'est incroyable que tu saignes autant... J'espère que tu ne vas pas te vider de ton sang !

Authentique.

— Je te jure que si tu continues à pleurer comme ça, le docteur te fera une piqûre énorme !

Authentique.

— Bon, allez, ça va. Viens me faire un câlin.

Non. Je déconne.

Et c'est là que j'ai rencontré Nuka. Très pédagogue, lui aussi. Après être entré dans la maison et après avoir fait une rapide analyse de la situation, il avait ouvert sa mallette de docteur.

— Si tu bouges, je te mange les mains !

— Mais tu me fais pas de piqûre ?

— Euh... Non, pourquoi ?

— Raven – snirrrfl – m'a dit que tu me ferais une piqûre.

— Raven est un idiot, m'avait souri un géant qui avait dû se baisser pour entrer dans la salle.

— T'es qui, toi ?

— Moi ? Pousse tes fesses, Ravy. Moi, c'est Jonah. Mais tu peux m'appeler Jo, tu sais.

— Bon, pas besoin de suturer, avait marmonné Nuka, on va seulement mettre de la colle et une compresse.

— Tu peux diagnostiquer dans ta tête, Nuka, je t'en prie ? lui avait demandé le géant.

— Pas quand j'ai faim.

Là, j'avais entendu un gargouillement phénoménal. J'avais dû ouvrir des yeux comme des soucoupes, parce que Jonah s'était brutalement levé pour rire en paix dans la cuisine. Il était rapidement revenu.

— Alors, la puce ? C'est Raven qui t'a fait ça ?

— Non, je suis tombée.

— Ah ! Jour à marquer d'une pierre blanche ! Raven et un blessé dans la même pièce : la blessure est accidentelle ! Je plaisante, Ravy.

Quand je pense qu'il me gronde dès que je dis un mot plus haut que l'autre à Raven...

— Ne m'appelle pas comme ça, avait ronchonné ce dernier.

— Tu veux un bonbon, dis ? m'avait alors interrogée le géant.

Il m'avait glissé un ours à la guimauve. Une ''cochonnerie'', comme dit ma mère, qui jamais n'aurait pu franchir le périmètre sacré de la maison anti-cochonneries.

— Tu jouais à quelque chose ?

— Oui, on a fait un concours de legos avec Raven.

Nuka et Jonah s'étaient figés. Ils avaient demandé en chœur :

— Raven a fait quoi ?

— Oh, ça va, hein, je m'ennuyais et elle me cassait les oreilles pour que je joue à son jeu. J'ai cédé, c'est tout. Pour avoir la paix.

Le toubib et le géant avaient échangé un regard lourd de sous-entendus.

— J'ai fini, avait conclu Nuka. Dans un mois, il n'y paraîtra plus. Tu laisseras la fille qui doit s'occuper de toi s'expliquer avec tes parents. Évite à l'avenir d'éborgner les petites filles Raven. Je peux me servir quelque chose dans la cuisine, gamine ?

— Oui, vas-y.

Nuka était vite parti, mais Jonah était resté quasiment jusqu'au retour de mes parents. Raven avait repris son occupation habituelle. Avant de partir, il avait empoigné le robot qu'il avait fabriqué et l'avait tendu à Jonah.

— Regarde, là. À quoi ça te fait penser ?

— Je ne sais pas, moi... Un genre de tubercule ?

Ça y est, Raven se réveille. Il faut que j'arrête d'écrire. Je n'ai pas envie qu'il lise ça...

*

1 - Je les ai rencontrés en même temps, je vous l'ai déjà dit ? NdN

2 - J'avoue : j'étais fan du jeu éducatif Adibou, où il y avait des robots. Si vous en avez marre de ces notes de bas de page, il ne faut pas hésiter à les ignorer superbement, hein ? NdN

*

Voilà :-D

MEEEERCI !!! (je ne le redirai pas assez !!!) pour vos reviews, vos votes et votre inconditionnel soutien ! Je vous adore !!!

J'espère que ce petit flash-back vous aura plu ? Moi, je l'affectionne énormément. J'aime aborder les petites facettes de Raven qui veut jouer au gros dur... sans vraiment y parvenir !

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Bonne journée, et bonne semaine !

Sea

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