2.
— Elie, tu es là ? Tu m'entends ?
La voix tremblante de Lisa résonnait dans l'espace froid qui l'entourait.
— Oui, je suis là, ma belle. Où es-tu ?
— Je sais pas trop. Dans une sorte de cage je crois. Putain, il fait plus noir que dans le trou du cul d'un chien, c'est flippant.
Elie éclata d'un grand rire sonore qui résonna sinistrement dans l'espace clos. Son amie avait toujours eu le don de sortir des expressions qui la rendait hilare.
— T'es une grande malade, Lisa.
— Chut, j'ai peur. Je contrôle pas c'que j'dis.
— C'est ça qui est marrant. Mais t'inquiète pas, moi aussi, je suis dans une cage, il me semble. Je sens des barreaux sous mes mains.
— On peut les tordre, tu crois ?
— Ça n'est pas vraiment le but du jeu, je pense, s'esclaffe Elie.
— Bon, et donc, on doit faire quoi ?
— Je sais pas. Fouille autour de toi, voir si tu trouves quelque chose.
Les deux jeunes femmes tâtonnèrent dans le noir à la recherche d'un quelconque objet ou d'un interrupteur.
— Lisa ?
— Quoi ?
— Ne te fiche pas de moi, mais je viens de me rendre compte que j'avais aussi des chaînes à mes poignets.
— Pas moi. Comment as-tu pu ne pas le...
— J'en sais rien, commence pas. J'avais pas senti, je pensais qu'on m'avait mis des gros bracelets et c'est tout.
— C'est stressant Elie. Il est débile ce jeu, finalement. Je suis pas bien, là.
— Mais t'inquiète, ça va aller.
Le haut-parleur résonna alors, faisant sursauter les deux amies :
« Deux femmes enlevées, attendant que leurs preux chevaliers les libèrent. Preux chevaliers, à vous de jouer ! »
*
De leur côté, Max et Jean reprenaient leurs esprits dans une petite pièce carrée aux murs de briques claires sur lesquels étaient accrochés deux écrans. Ils relayaient des images des caméras de surveillance infrarouges installées dans la salle où les filles étaient détenues. Le premier écran montrait Lisa, agenouillée et apeurée, qui parlait, les mains accrochées aux barreaux de sa cage. Le second, Elie, les poignets encerclés de lourdes chaînes, tâtonnait de ses mains le sol de la sienne.
— Je n'aime pas du tout ça, bougonna Max sans quitter l'écran montrant sa chérie des yeux.
— C'est vrai que c'est pas agréable de les voir comme ça, répondit Jean sans s'émouvoir. Mais c'est un jeu, ajouta-t-il en haussant les épaules, désinvolte. On va s'en sortir, on n'est pas con !
— Parle pour toi.
— Et ton pote ? Il est où ?
— Aucune idée.
Jean, curieux par nature, se retourna pour observer la salle qui l'entourait. Un fugace sentiment d'oppression le traversa alors que ses yeux ne sondaient que des briques, et il se tourna à nouveau vers les écrans. Il aperçut alors deux leviers, un sous chaque moniteur, avec les inscriptions oui au-dessus et non au-dessous.
— Qu'est-ce qu'on doit faire d'après toi ? demanda Max en baissant les yeux sur le levier qui lui faisait face.
— Fouiller, trouver des indices.
Les deux hommes se répartirent la pièce et explorèrent chaque recoin, chaque fissure, sans rien trouver. Soudain, la voix du haut-parleur retentit à nouveau, les stoppant dans leur recherche :
« Max Talpot, trente-cinq ans. Barman. »
Interloqué, Max se tourna vers son ami.
— C'est toi qui leur as dit ça ?
— Non, du tout.
— Comment peuvent-ils le savoir alors ?
— J'ai bien une idée, mais ça m'étonnerait que ce soit ça.
Max s'apprêtait à demander des précisions lorsque la voix au micro reprit :
« As-tu confiance en ta compagne, Max ? »
— Pas quand elle fait la cuisine, mais sinon oui.
Plusieurs secondes s'écoulèrent sans que la voix n'intervienne. Jean, le front plissé et les sourcils froncés, réfléchissait.
— Je pense que tu dois répondre en actionnant la manette, Max.
Ce dernier écarquilla les yeux puis se frappa le front devant sa bêtise et répondit :
— Mais oui, c'est logique ! Bien vu, mon pote.
Max se rapprocha du levier et l'actionna vers le haut. Une lumière apparut sur l'écran de Lisa qui sembla crier de joie, et se mit à secouer frénétiquement les barreaux de sa cage.
— Ouais, ça marche ! On doit certainement pouvoir les libérer de cette façon, s'exclama le trentenaire tout à coup surexcité.
Jean observait son ami, ravi de voir ce casanier s'amuser un peu. La voix au micro reprit :
« Es-tu vraiment sûr de pouvoir lui faire confiance ? Penses-tu que ta compagne n'a aucun secret pour toi ? »
Sans prendre le temps de la réflexion, Max actionna à nouveau le levier vers le haut, et la voix criarde de Lisa s'éleva dans la petite salle : « Saleté de cage ! Mais ouvre-toi bordel ! »
Le son qui accompagnait maintenant l'image fit naître un large sourire sur le visage de Max.
— Putain, Jean, je te déteste de m'avoir emmené ici, mais j'avoue que j'aime l'idée d'être celui qui libère ma femme, souffla le trentenaire en entendant sa tendre.
Jean ne répondit pas, mais lui rendit son sourire avant de reporter son attention sur l'écran. Lisa chouinait à nouveau et semblait s'adresser à Elie que les garçons n'entendaient que vaguement, contrairement à la compagne de Max qui parlait sans discontinuer. La jeune femme blonde paniquait, mais jurait à son amie qu'elle était persuadée que la lumière s'était allumée grâce à son homme.
Le haut-parleur grésilla à nouveau :
« Max, j'ai devant moi le téléphone portable de ta charmante Lisa avec, sous les yeux, une intéressante conversation qu'elle a eu avec ton ami David. Je peux même voir quelques échanges de photos. Lui fais-tu toujours confiance ? »
Beaucoup moins euphorique, Max lâcha brusquement le levier et se tourna vers Jean.
— Il bluffe, hein ? Ils ne fouillent pas vraiment dans nos affaires personnelles ?
— Mais... mais oui. Il bluffe, c'est obligé, tenta de le rassurer son ami.
Un doute s'insinua toutefois dans l'esprit des deux hommes.
*
David secoua la tête et serra les poings. Enfermé dans une pièce sans fenêtre ni porte, il cherchait depuis plusieurs minutes le moyen d'en sortir. En entendant les interventions de la voix au micro, il ne pouvait s'empêcher de se demander dans quel genre de jeu il s'était embarqué.
Furieux de son incapacité à trouver une issue, il frappa de toutes ses forces sur les murs de plâtre autour de lui, martelant sans discernement jusqu'à ce qu'un pan de l'un d'eux cède enfin sous la violence de ses coups. S'extirpant à la hâte de sa cellule, il déboucha sur un long couloir plongé dans la pénombre, et seulement agrémenté d'un haut-parleur et d'une caméra de surveillance au plafond, à l'autre bout du passage.
Une large tache sombre se devinait dessous. David s'y précipita, fonçant tête baissée, pensant à une porte. Mais alors que son pied se posait sur une plaque de bois, celle-ci céda. Le jeune homme se sentit tomber sans rien pouvoir faire.
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