1. Dr. Bleye
Seul le tic-tac agaçant de l'horloge venait perturber le silence du cabinet. Le Dr. Bleye, un vieux psychiatre, fixait son patient. Ce dernier était un adolescent.
— Je n'ai rien à vous dire, déclara-t-il.
Le Dr. Bleye fronça ses sourcils épais et broussailleux.
— Voilà qui est contrariant.
Nouveau silence. Le docteur reprit :
— Tu sais, nous nous inquiétons pour ton bien-être mental.
— Sans blague...
— Bien évidement. Pourquoi y serions-nous indifférents ?
Le garçon imagina quelle pourrait être sa réponse :
Pourquoi ? Vous voulez que je vous dise pourquoi ? Ca fait des jours que je suis né et vous ne me laissez pas intégrer le Programme ! Sans l'Equilibre, je ne suis pas humain, vous le dites vous-même ! Je doute que vous vous en fassiez pour un simple Déséquilibré.
— 712, tu m'écoutes ?
Gardant le silence, le garçon renonça à dire ce qu'il pensait...S'il se montrait rebelle, il n'intégrerait jamais le Programme. Pas de Programme, pas d'Equilibre. Et sans l'Equilibre, pas moyen d'intégrer la Société.
Le psy écrivit quelque chose sur son carnet.
— Tu dois apprendre à nous faire confiance, 712. Nous agissons dans ton intérêt.
Le garçon serra les poings et les mâchoires.
— Pourquoi est-ce que je ne peux toujours pas intégrer le Programme ?
Il en avait marre d'attendre.
— Allons, patience. Tu viens à peine d'être libéré de ta Capsule. Elle a abrité ton corps durant seize ans, en inculquant à ton cerveau toutes les bases nécessaires à ton entrée dans le Programme. Je sais que tu n'as pas la notion du temps, mais à l'échelle humaine, c'est plutôt long. Alors quelques jours de plus...
— Les autres Nouveau-nés n'attendent pas autant, répliqua 712.
— Les infirmiers m'ont rapporté que tu avais souvent de terribles maux de tête. Nous voulions te garder en observation.
— Mais ça va, maintenant. Je vais bien.
Le psy se leva, l'air pensif. Il contourna son bureau et vint se mettre derrière 712. Puis, il le prit par les épaules et lui demanda, suspicieux :
— Vraiment ? Et, tu n'as rien remarqué disons... d'anormal ?
712 s'immobilisa.
— Non, finit-il par articuler.
— Ça ne te dérange pas de monter sur le Comportomètre, dans ce cas ? Il peut dire si tu es un menteur.
712 jeta un œil avec anxiété vers le coin de la pièce où se trouvait ledit Comportomètre. Il était constitué d'un large plateau au sol et d'un écran au sommet. Lorsqu'on montait dessus, l'écran affichait diverses informations, dont la mesure en pourcentages des défauts et des qualités.
— Les résultats seraient faussés. Je n'ai jamais suivi le Programme, donc je suis bel et bien un menteur... Après tout, le but du Programme est de me rendre meilleur, pas vrai ?
Le Dr. Bleye plissa les yeux un instant avant d'éclater de rire.
— Manipulateur, avec ça... Cela dit, tu as raison : il est temps que tu rejoignes le Programme.
— Ah oui ?
— Oui... Et dépêche-toi de devenir meilleur, comme tu dis. Ton temps est compté.
— Qu'est-ce que vous voulez dire ?
Bleye désigna la montre tactile au poignet de 712 :
— Tu vois cette chose ? Elle indique l'heure, mais aussi le temps qu'il te reste pour obtenir l'Équilibre. Regarde, clique sur cette icône.
712 s'exécuta et lu « 629 jours ».
— Que se passe-t-il si mon temps s'écoule et que je n'ai toujours pas l'Equilibre ?
Le psy ne répondit pas. Il se contenta de lui indiquer la sortie.
— Tâche de bien te comporter, 712. (Puis il ajouta, comme s'il se parlait à lui-même : ) Certaines choses sont plus lourdes à porter que les défauts.
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