Chapitre cinquième ✓
" Il nous a suffit d'un regard pour lier à jamais nos destins "
Le Cheikh s'était réfugié dans la salle où il recevait des visites après la prière. C'est alors qu'il vit une femme entrer. Elle était voilée et complètement vêtue de noir. À quelques mètres de lui elle baissa les yeux.
Il sourit intérieurement, car il aimait toute sorte de manifestations de respect et même de soumission, comme ce regard abaissé. Il l'invita à entrer et ils s'installèrent sud un tapis oriental à texture épaisse.
- Salam alaykoum dit elle légèrement
- Alaykoum salam ma fille comment tu vas ?
- Alhamdoulilah tout va bien Cheikh
- Hmm présente toi ma fille
- Mon nom est Neima Ahmed Fokam, j'ai 22 ans et je suis marocaine de mère et camerounaise de père.
- Où sont tes parents ?
- Ils sont morts Allah y rahmo
- Allah y rahmo. Quel est la raison de ta venue ici ma fille
- Je voulais.... Je voudrais vous raconter mon histoire et vous demander conseil
- Je t'écoute
- Il y a de cela 7ans je vivais dans une famille à peu près heureuse, avec mon grand frère Vladimir Mahmat Ahmed, ma mère Khadija Karim Ahmed et mon père Prince Fokam. Tout était bien, mon père gagnait bien sa vie, mon frère finissait ses études de médecine, maman s'occupait super bien de nous et moi j'étais au lycée. Puis un jour, ma mère s'est faite assassinée...
Elle commençait à trembler et ses yeux peinaient à retenir ses larmes. Elle serra les poings. Le Cheikh était certes habitué à assister à de telles effusions de douleur, mais étrangement cette fois il se sentait quelque part concerné, il avait une profonde envie de l'aider, mais comment ? Sa condition de Cheikh lui interdisait tout contact avec une femme qui n'est pas sienne ou de sa propre famille. Elle cacha de ses mains son visage, du moins ses yeux puisque le voile ne montrait que ses yeux. Ses sanglots emplissaient de plus en plus la pièce et ce fut un supplice pour le Cheikh.
Pour une raison qui lui était jusque là inconnue, il dérogea à une loi, il commit un péché, en lui effleurant l'épaule. À peine l'avait-il touchée qu'elle sursauta, comme si le contact l'avait brûlée.
- Pardonne moi, si je t'ai brusquée, c'est haram je sais , mais tu as besoin de parler ma fille
Son regard était étrange elle le fixait longuement. Certainement pour le sonder.
Puis elle commença son récit. Plus les mots se succédaient, plus le Cheikh se sentit envahir d'une aversion vive pour le père de Neima. Savoir que de telles infâmies existent est une chose, en écouter le récit de la bouche d'une victime en est une autre. Juste pour sa douleur il aurait put commettre encore plus de péchés. Il s'admonesta à la paix intérieure en récitant des surates intérieurement.
- Un innocent est mort par ma faute et je n'y arrive plus Cheikh...
- Ma fille calme toi. Allah éprouve toujours ceux qu'il aime.. C'est le destin
- Malheureusement
- Ça va passer.. Ça va bien aller. Aucune épreuve sur ton chemin n'est au dessus de tes capacités. Puise la force en toi et tu t'en sortiras.
Elle se calmait peu à peu. Puis se laissant un peu aller, elle lui raconta quelques uns de ses souvenirs d'enfance. A plusieurs reprises elle rit, elle avait eu une enfance joyeuse, dans un cadre bon enfant. Le Cheikh se surprit à se demander à quoi elle ressemblait sous son voile. Il se demandait si son sourire était aussi beau que la douce mélodie de son rire. Si..
Il se rendit alors compte qu'il était encore en train de pêcher. En une seule séance il avait réussit à violer le Coran trois fois déjà, juste pour cette femme, qui n'a pourtant pas l'air différente de toute les autres qu'il a déjà eu à recevoir.
- Yemma quand elle nous a attrapé...hayayay ! On l'a senti passé, pendant 3 jours j'ai gardé les traces de ses doigts sur moi
Il rit pour la énième fois. Il se sentait bien, sans savoir pourquoi. Peut-être était-ce dû à son aura si pure, qui embaumait la pièce ?
- Ma fille il est tard, une autre personne a besoin de moi. Reviens quand tu veux. qu'Allah veille sur toi.
- Amin
Neima sortit de la mosquée le cœur véritablement léger pour une fois. Le poids de sa culpabilité s'était allégé et ça c'était grâce au Cheikh, elle ne pouvait que l'avouer. Elle héla assez vite un taxi puis sur le chemin elle échangea un peu avec Nathalie.
- Coucou ! Ça va toi ?
- Le bébé ou moi
- Toi bien-sûr... Répondit Neima souriante
- Hum t'es de bonne humeur toi
- C'est vrai je vais mieux
- Qu'est-ce que tu me caches vielle folle
Se sentant découverte, Neima s'empressa de trouver une diversion.
- Rien .... En faite as-tu pensé aux prénoms du bébé ?
- Oui Nasser si c'est un gars et Delilah si c'est une fille... Attends mais tu fuis le sujet là
- Wahou les prénoms sont trop beaux
- C'est certain qu'il se passe quelque chose.. Vas y raconte s'empressa Nathalie qui avait vu clair dans son jeu
- Désolée je viens d'arriver dit Neima ravie d'avoir trouvé une échappatoire
- Mais c'est pas gentil .... Attend comment ça arriver ? T'étais où ? Ne me dit pas que... Ahhhhh réponds vite.
Toute souriante elle descendit du taxi et pénétra son hôtel. Sa journée jusqu'ici était magnifique et ça elle le devait à son entrevue avec le Cheikh, qui a été le premier à la faire cesser de culpabiliser, pourtant il n'avait rien dit d'inhabituel. Était-ce son aura ? Sa présence ?
La suite était vide quand elle y accéda. Staline était certainement allé découvrir la ville et potentiellement se trouver du travail. Ne trouvant aucune occupation urgente, elle appela Nathalie, afin de lui raconter dans les moindres détails ce qui s'était passé plus tôt en journée, bien évidemment en passant par une description des plus nettes du Cheikh.
- Intéressant, il m'a l'air charmant ! Tu n'aurais pas de photos de lui ?
- Où suis je supposée les prendre ? Demanda Neima en levant les yeux au ciel
- Bah sur le net beta ! Quel est son nom ?
- Cheikh Oussein
Trente minutes après
- C'est lui là ? S'enquit Nathalie, lui ayant envoyé une photo du Cheikh
- Oui !!
-Il est .. MashAllah .... Moi je m'abonnerai direct à cette mosquée là
- Ho mais du calme hein.. T'as ton mini-mari dans le ventre là ! Faudrait pas le pervertir aussi
- Mais non t'inquiète, t'inquiète
Neima n'aurait su dire à quel moment elle s'était endormie, là sur ce canapé à peine plus grand qu'elle. Ses courbatures par contre lui rappelèrent son erreur. Péniblement elle se leva et fouilla la suite à la recherche de Staline. Recherche qui s'est d'ailleurs avérée infortune puisqu'il n'était pas rentré de la nuit. Elle fit sa toilette puis revêtit un simple Jean bleu et un Chandail à mailles jaune poussin. Elle associa à sa tenue l'habituel voile, et opta pour un voile blanc. Depuis qu'elle avait rencontré Staline, ou plutôt Edgar Cissé, elle s'était convertie à l'islam. Mais elle devait se l'avouer que c'était aussi sous l'impulsion de Nassim, ce cher marocain.
Après un petit déjeuner assez copieux, elle se mit à la quête de sa famille maternelle. Sa mère lui avait déjà conté des anecdotes de sa vie de jeune fille, et à chaque fois le quartier de Guéliz revenait dans ses histoires. C'est pourquoi Neima se dirigea vers là.
Munie de sa paire d'écouteurs, elle écoutait un des titres d' Adele sur le titre someone like you en mimant. Elle était à peine descendue de taxi, et s'apprêtais à traverser la route lorsqu'elle reconnut de l'autre côté de la route, le Cheikh. Beau comme d'habitude. Elle se demandait s'il connaissait l'imperfection. Du moins il n'en donnait pas l'air.
" En même temps c'est pas comme si je le voyais tous les jours... " Se dit elle intérieurement.
- Salam Alaykoum lui dit-elle au passage
Il la dévisagea un moment avant de lui répondre par un simple Salam. Suite à quoi il grimpa dans sa voiture sans plus lui accorder d'attention aucune. Pourquoi ce changement de comportement à son égard ? Ou alors l'avait-il déjà oubliée ? Elle ne se posa pas plus de questions, malgré la légère frustration qui lui pinçait les entrailles.
Toute la journée elle rechercha sa famille maternelle, Guéliz est un quartier immense et d'autant plus lorsqu'il est parcouru à pieds. Néanmoins les architectures et les couleurs chaudes des bâtisses donnent un air de convivialité. La jeune fille comprit alors pourquoi sa mère en était tant fascinée.
Le crépuscule s'annonçait déjà, et Neima avait les plantes de pieds douloureuses, à cause de la marche. Elle avait pût remonter les informations jusque ce qui devrait être le pâté de maison renfermant la maison d'enfance de sa mère.
Au loin, elle distingua une silhouette,
Une vielle femme ramassait le linge dans sa course. Neima s'en approcha pour lui demander des renseignements.
- Salam khalti
- Salam ma fille tu vas bien ?
- Oui merci et vous ?
- Bien alhamdoulilah
- Je suis à la recherche de la famille Karim Ahmed, je sais pas si vous pouvez me renseigner
Elle fronça les sourcils puis s'approcha d'elle.
- Khadija ? Demanda-t-elle en plissant les paupières
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