Chapitre 8
Thousands of ghosts in the darkness
Lost in a strange neighborhood
The lights from the warm houses haunt them
They forgot what they lost
But they know it was good
Morgane scrute les étalages de viande surgelée d'un regard inquisiteur. Par-dessus son billet de courses, Azura ne peut s'empêcher de lui jeter des œillades amusées. L'April's n'a pour lui rien de merveilleux ; mais pour ses amis, nés et élevés à Sunnyside pendant qu'Azura a vadrouillé quatre ans dans les rues surpeuplées d'une mégapole, le magasin doit faire l'effet d'un gigantesque labyrinthe.
« Vous avez trouvé ce dont vous aviez besoin ? demande Gaël en les rejoignant, un panier déjà rempli accroché au bras.
- Non. »
Il reste coi face à la réponse simpliste de Morgane, s'attendant sans doute à ce qu'elle la développe. La jeune fille demeure muette encore un instant avant de lever un bras au ciel, désespérée.
« Ils sont vraiment obligés d'avoir autant de steak hachés différents ? Un bœuf mort est un bœuf mort. Comment je fais pour deviner quel pourcentage de gras ma sœur veut dans sa viande ? J'aurais dû l'emmener avec moi. Elle adore April's, en plus. Je sais pas ce qu'elle trouve à cette espèce d'usine. »
Elle se retourne, le front plissé, et contemple en silence le panier plein de Gaël.
« Je vois qu'il y en a un qui s'adapte bien au changement, remarque-t-elle.
- J'ai l'habitude de faire les courses ici tout seul, explique le garçon. Toutes les épiceries près de chez moi ont fermé.
- Oh, chez nous aussi. Y en avait une bio, juste au coin de la rue, où on pouvait aller tous les jours si on voulait. C'était top. »
Bien qu'il soit déjà au courant, Azura ne peut s'empêcher de froncer les sourcils. Le marché du travail n'était déjà pas très florissant à Sunnyside, mais là ... Combien de familles ont dû mettre la clef sous la porte face à la concurrence d'April's ?
« Il s'est installé quand, exactement ? demande-t-il à ses amis. Le magasin, je veux dire.
- Il y a deux ou trois ans ? estime Gaël (du regard, il interroge Morgane qui hoche la tête). Pourquoi ? Tu penses que ça peut être lié à ... »
Il baisse d'un ton sans oser finir sa phrase. L'air grave, Azura hoche la tête à son tour.
« On doit négliger aucune piste. »
Gaël et Morgane approuvent en silence. Malgré lui, Azura sent un frisson d'excitation parcourir son dos. Il a l'impression d'être un détective en plein devoir.
Les trois adolescents s'arrêtent au milieu des légumes frais pour y chercher le bonheur de Holly (qui, le matin-même, lui a confié une liste de la taille de son avant-bras déchiffrée à grand peine par les talents de Morgane). Pensif, Azura se caresse le menton avec son billet de courses. Un fenouil. Holly a besoin d'un fenouil. Il adorerait lui en apporter un, mais il n'a aucune idée de ce à quoi ressemble un fenouil.
Il interrompt sa contemplation pour demander à Morgane d'éclairer sa lanterne mais, là où il s'attendait à trouver son amie, rencontre un manteau de pluie vaguement familier. Lui aussi penché sur les légumes, son propriétaire se redresse pour dévisager Azura d'un grand regard vert d'eau. Ils se reconnaissent au même instant.
« C'est toi ! s'exclame Tori en se débarrassant du casque audio posé sur ses oreilles. Je pensais que c'était juste quelqu'un qui te ressemblait. Qu'est-ce que tu fais ici ?
- Euh, bafouille Azura.
- Question rhétorique. Je sais bien qu'on vient pas à April's pour jouer aux billes. Alors, tu t'habitues à Sunnyside ? »
Une sorte d'électro dépressif, étouffé par la distance, s'échappe du casque carmin. Tout en parlant, Tori fait tourner en rond le concombre dont il vient de s'emparer. Azura le suit des yeux sans parvenir à s'en défaire. La main gauche du détective est couverte de cicatrices.
« Euh ... ouais, finit-il par dire. C'est pas si mal.
- T'es sérieux ? C'est la mort, cette ville. Les trois quarts des gens passent leur temps libre à zoner ici tellement y a rien d'autre à faire. On est couverts quand il pleut et climatisés quand il fait chaud, un vrai paradis.
- Je sais, je suis né ici. À Sunnyside, je veux dire, pas dans un April's.
- Ah ? »
Tori penche la tête sans cesser de le dévisager. Sans trop comprendre pourquoi, Azura se sent rosir. Il n'a tout de même pas honte à ce point de défendre sa ville ?
« Tori ? intervient tout à coup la voix de Morgane. Qu'est-ce que tu fais à April's ? T'as pas un tueur en série à attraper ?
- Les pauses, Morgane. Les pauses. C'est important. »
Peu perturbé par l'arrivée soudaine de la jeune fille, Tori adresse à celle-ci un sourire en forme de crochet. Le regard confus d'Azura passe de l'un à l'autre.
« Vous vous connaissez ?
- Je dois pouvoir mettre un nom sur tous les flics de la ville, explique Morgane. Mais Tori ... bah, disons que c'est un cas à part. Maman se plaignait souvent de lui, alors quand j'ai fini par le rencontrer c'est comme si je le connaissais déjà. Tu savais qu'il était arrivé avec une heure de retard pour son premier jour ?
- Quelle introduction, se lamente le concerné. C'est comme ça que tu me présentes à tes amis ?
- J'ai que deux amis et apparemment t'en as déjà rencontré la moitié, rétorque Morgane avec un clin d'œil. C'est pas la mort. Oh, et en parlant de mort, il a aussi vomi sur le bitume la première fois qu'il a vu un cadavre. »
D'embarras, Tori se masse le front. Comme invoqué par la conversation, Gaël pointe sa mine curieuse aux côtés de la jeune fille. Il fait glisser le panier qu'il porte au bras jusque dans ses mains et se cache à moitié derrière son amie, intimidé.
« Oh, c'est ... toi ? réagit Tori après un court instant de silence. Vous vous connaissez tous ? Sunnyside est encore plus petite que je le pensais. »
Gaël hoche la tête avant qu'Azura comprenne de quoi parle le détective. Ray faisait partie de la police, lui aussi ; qu'ils se soient déjà croisés ou même adressé la parole n'a rien d'étonnant.
« Manquerait plus que je sois amené à vous interroger un jour, poursuit Tori avec un demi-sourire. La boucle serait bouclée.
- Qui sait, enchaîne Morgane. Faudrait déjà que tu travailles pour ça. J'y pense, on te dérange pas trop ?
- Je suis venu avec mon frère, en fait. Je suis pas en service. »
Tori se retourne un instant vers le rayon des fromages, cherchant des yeux le concerné. N'y tenant plus, Azura pose la question qui le démange depuis le début de leur conversation.
« Vous soupçonnez encore ma tante ? La nouvelle victime a rien à voir avec elle.
- Wow, fait Tori en reportant son regard écarquillé sur lui, tu perds pas de temps, dis donc. Je suis pas censé répondre à ça, tu sais ?
- Mais tu vas le faire quand même, dit Morgane. Allez ? Pour moi ? »
La jeune fille bat des cils avec insistance. Embarrassé, Tori se passe une main sur la nuque. Il jette un œil aux alentours - l'heure du midi commençant tout juste à passer, seule une poignée de retraités se traînent dans les rayonnages - et murmure :
« On peut pas exclure la possibilité qu'elle ait joué un rôle, vous comprenez ? Même si c'était à son insu. Enfin, perso, je me passerais bien d'aller la revoir ... J'espère au moins qu'on n'aura plus à interroger la nana qui zone avec.
- Cherry ?
- Ouais, c'est ça, Cherry. Elle est flippante, non ? J'ai cru qu'elle allait nous arracher la tête rien que quand Jack l'a accostée. Elle doit avoir un problème avec la police.
- Elle est sympa quand on la connaît, proteste Azura. Elle doit juste pas apprécier qu'on la mêle à une affaire de meurtres en série.
- Si tu le dis. »
Tori baille à s'en décrocher la mâchoire. La situation était déjà évidente vu leur présence à la Petite Sirène mais, puisqu'il ne nie pas la thèse d'un tueur en série, la voilà confirmée. La police sait parfaitement qu'il ne s'agit pas d'une maladie.
« Ah, ouais, en parlant de Jack, lui en veut pas pour l'autre fois, reprend Tori. On n'a pas l'habitude de gérer autre chose que les petits délits et les animaux disparus depuis que le gang de Myers s'est démantelé. Je veux dire, la dernière fois qu'on a allumé les sirènes c'est parce que le marchand de donuts près de la plage allait fermer, alors forcément toute cette histoire de tueur en série ça l'obsède un peu, surtout qu'on n'avance pas beaucoup. Mais il est pas méchant. Juste stressé.
- Parce que tu l'es pas, peut-être ? le taquine Morgane.
- Il faut bien quelqu'un pour garder la tête froide. Et puis, Jack va faire une crise cardiaque avant ses cinquante ans s'il continue comme ça. J'ai pas trop envie de finir comme lui. »
Azura fronce les sourcils. La mention de Myers lui comprime l'estomac, mais autre chose dans ses propos l'intrigue.
« Y en a encore beaucoup, d'animaux disparus ? s'enquiert-il.
- C'est sur ça que tu te focalises ? s'étonne Tori. T'es bizarre. Mais ouais, y en a encore plus qu'avant. C'est comme s'ils fuyaient la ville.
- On peut pas vraiment leur en vouloir, marmonne Gaël.
- On est bien d'accord. »
Le détective adresse un sourire en coin à son ami. De son côté, Azura scrute le sol pour finir sa pensée. Des animaux fuyant les lieux ...
« C'est comme s'ils sentaient une catastrophe arriver, songe-t-il.
- T'es un peu dark, non ? ricane Tori. Sérieux, on croirait entendre Jack. C'est juste des cabots qui se font la malle de chez leurs vieux. Moi aussi, je ... »
Il s'interrompt en sentant une présence arriver près de lui. Un adolescent d'allure timide, au crâne presque rasé, se tient en retrait derrière le détective. Azura le dévisage avec curiosité. Une cicatrice blanche, longue de trois centimètres, traverse son arcade sourcilière. Intimidé par son regard insistant, le garçon baisse les yeux. Son visage a la même forme que celui de Tori.
« Ken, te voilà ! fait celui-ci. T'as tout ce qui te faut ? C'est mon frère, Ken, ajoute-t-il tandis que l'adolescent hoche la tête sans la relever. Il devrait être une classe en-dessous de la vôtre. Soyez gentils avec lui si vous le croisez, d'accord ? »
Il pose une main emplie de fierté sur la tête du garçon, qui rougit de honte et se tord quasiment le cou pour y échapper.
« On peut y aller ? » demande-t-il.
Intrigué, Azura cligne des yeux. Sa voix est discrète, presque effacée, comme l'était celle de Morgane lors de leur première rencontre. Son cœur se pince à ce souvenir. Il espère que Ken ne remue pas le même genre de pensées.
« Ouais, ouais. T'es pressé, dis donc. »
Tori laisse tomber son concombre dans le sac plastique de son frère et se retourne une dernière fois vers le trio. De l'index et du majeur, il leur adresse un signe d'au-revoir.
« À bientôt, les jeunes.
- Te surmène pas trop, lance Morgane.
- Faites attention à vous, murmure Azura.
- Quoi, on s'inquiète pour moi ? Trop mignon. »
Tori leur adresse un clin d'œil avant de s'engager à la suite de son frère. Azura regarde les pans jaunes de son manteau s'éloigner sans reprendre la parole. Des animaux disparus ... Est-ce vraiment aussi inquiétant qu'il l'imagine ? Ce genre de chose arrive tous les jours.
Il secoue la tête avant de retourner aux étalages de légumes. De part et d'autre de lui, ses amis l'imitent sans avoir l'air plus émus que ça par les propos du détective. Même Gaël n'a accordé à Myers qu'un battement de cils. En contemplant le profil du garçon, qui sonde un carton de tomates comme s'il s'agissait d'une formule mathématique, Azura sent un sourire lui étirer le coin de la bouche. À eux trois, ils s'empareront de la vérité même si la police la laisse filer entre leurs mains. Mais, pour le moment, il a toujours besoin d'un fenouil.
Les trois adolescents profitent d'un ciel relativement dégagé pour partager leur repas sur la plage. Rien d'étonnant à ce que celle-ci soit déserte ; le vent glacial et l'étoffe blanche que les rayons du soleil peinent à percer rendent l'endroit carrément inhospitalier et, à distance régulière sur le sable, des pancartes frappées de têtes de morts interdisent toute baignade même surveillée. Les responsables sanitaires doivent ne vouloir prendre aucun risque. Enfin, au moins, l'averse a fini par s'interrompre.
Assis sur une serviette, Azura s'étire. Sa bouche ouverte laisse échapper un bâillement sonore que son voisin ne tarde pas à lui rendre. Les pancakes de Holly pèsent encore sur leur estomac. Les sandwichs achetés à April's ont beau avoir l'air délicieux, Azura n'est pas sûr d'en venir à bout.
« J'ai l'impression de pas avoir vu le soleil depuis des années, soupire Gaël, les yeux clos, le visage levé au ciel.
- C'est un bon présage. »
Azura penche la tête en arrière pour en profiter, convaincu par ses propres mots. La présence de Gaël le pare d'une sensation d'invincibilité. Si seulement il pouvait toujours ouvrir les yeux sur lui, au réveil, les choses lui paraîtraient si faciles ...
« On devrait réfléchir à ce qu'on va faire après avoir fouillé les archives, dit Morgane en traçant des lignes sur le sable. Histoire de pas perdre de temps.
- Poser des questions aux proches des victimes ? propose Azura. Peut-être qu'en mettant leurs témoignages en commun, on trouvera ... quelque chose.
- La police a déjà dû passer par là, non ? fait Gaël. Vous croyez qu'on peut faire un meilleur travail qu'eux ?
- Je suis prête à essayer.
- Ouais. Moi aussi. »
Gaël se frotte le menton, pensif. L'affaire ne le touche pas autant que les deux autres, mais Azura comprend pourquoi. Il n'a aucune raison personnelle de s'en mêler. Ray n'est pas mort de crise cardiaque ; Gaël ne pleure pas de matière visqueuse en souhaitant la mort des gens. À vrai dire, tout ça le terrifie. Pourtant, il est là, en train de réfléchir avec eux au meilleur moyen de découvrir la vérité. Le regard d'Azura sur son ami se teinte d'adoration.
« Les tueurs en série s'intéressent souvent à l'enquête, poursuit-il, alors le coupable a peut-être été en contact avec eux ? La police, je veux dire. Ou les journalistes ? J'ai vu ça dans une série.
- C'en est peut-être un, suppose Morgane. De flic ou de journaliste.
- Mais pourquoi un flic ou un journaliste ferait ça ? »
Morgane hausse les épaules.
« J'en sais rien, mais ça expliquerait le meurtre de ma mère et la disparition de ses dossiers. Ses collègues devaient savoir qu'elle était sur la bonne piste. »
Elle plisse les yeux, repensant sans doute à leur rencontre avec Tori. Azura fait de même. Le coupable se cacherait parmi les agents de police ? Y a-t-il une chance qu'il s'agisse de Gina, Lauren, Tori ou son partenaire dont il a encore une fois oublié le prénom ? Non, impossible. L'enquête est leur responsabilité ; qu'ils aient commis ces crimes n'aurait aucun sens. Quoique ... Ce serait la couverture idéale, non ? Cacher les preuves, enterrer la vérité et ainsi détourner l'attention ...
Azura secoue la tête pour en chasser cette pensée. Il ne va pas se mettre à soupçonner tout le monde avant même d'avoir commencé à entrevoir un début de piste.
« Dis, Tori était en équipe avec ta mère avant ? s'enquiert-il tout de même. Tu disais qu'elle se plaignait souvent de lui.
- Non, répond Morgane. Il a toujours été avec Jack. C'est juste qu'ils sont pas nombreux et qu'il s'est jamais passé grand chose avant les morts subites, alors tout le monde travaille un peu ensemble. La partenaire de maman ... Elle a disparu. Elle a dû faire ses valises et quitter la ville à la seconde où elle a appris son accident. »
La jeune fille interrompt ses tracés, songeuse.
« Interroger leurs proches ... » marmonne-t-elle en tournant la tête vers le port.
Les deux garçons suivent son regard, mais c'est autre chose qui attire celui d'Azura. Il écarquille les yeux.
« Gaël, tu saignes. »
Surpris, l'intéressé se touche l'arrière du crâne. Le sang colore de noir ses cheveux caramel.
« Ça va ? s'inquiète Morgane. Qu'est-ce que tu t'es fait ?
- Oh, j'ai ... je suis tombé ce week-end. À cause de mon tournis. »
Il s'essuie la main et se frotte le bout du nez. Azura fronce les sourcils.
« Vraiment ?
- Oui, vraiment. Je me suis senti mal dans les escaliers et ... je suis parti en arrière. Ça a dû se rouvrir cette nuit. Désolé si j'ai taché l'oreiller.
- Mais c'est horrible ! Tu prends des médicaments, au moins ? insiste Morgane.
- C'est juste ma tension qui est trop basse. Elle finira par remonter. »
Gaël arbore un sourire détaché, mais son regard fuyant n'échappe pas à Azura. Il serre les dents. Sa sensation d'invincibilité n'aura pas duré longtemps.
« Dites, les garçons, reprend Morgane lorsqu'il devient clair que Gaël préfère laisser tomber le sujet. Je viens de penser à quelque chose. »
Elle se rapproche d'eux comme pour leur confier un secret, entraînant sa serviette dans le mouvement.
« On parlait d'interroger leurs proches, murmure-t-elle. L'avant-dernière victime, c'était bien le vice-président de l'association des pêcheurs de Sunnyside ? J'en connais un, de pêcheur. Enfin, connaître est un grand mot, mais il m'aime bien. Il devrait accepter de nous parler si c'est moi qui pose les questions.
- C'est qui ?
- Johnny. Johnny Gunn. Un habitué du Wendy's.
- Le type à la casquette ? »
De justesse, Azura se retient de mentionner ses cheveux gras. La jeune fille hoche frénétiquement la tête.
« Il devrait être là cet après-midi. Vous en dites quoi ?
- Ça me va, dit Gaël.
- Moi aussi. Faudra bien commencer quelque part, de toute façon. Mais ça te dérange pas de retourner là-bas ?
- Oh, non. Je leur dois rien. Et si Grace a un problème ... »
Elle lisse la pointe de ses couettes, trop polie pour aller au bout de sa pensée.
« Coucou, Johnny ! »
Avec un entrain forcé, Morgane secoue la main devant l'homme aux cheveux gras. Celui-ci lève les yeux de ses haricots avant de les écarquiller de surprise.
« Morgane, fait sa voix de fumeur. Je croyais que t'avais fini par quitter la ville. Et ... »
La jeune fille s'assied en face de lui tandis qu'il dévisage ses deux amis. Mal à l'aise, ceux-ci préfèrent rester debout.
« C'est qui, eux ? s'enquiert Johnny d'un air méprisant.
- Des copains. Ils m'ont aidée à trouver un nouveau travail.
- Ah ouais ? Où ça ?
- À la Petite Sirène. Tu devrais passer un de ces jours. »
L'homme les scrute sans plus de sympathie qu'avant. Sans le vouloir, Azura plisse le nez. Ce type empeste le tabac. Le bar se passerait volontiers de sa présence.
« Mouais, peut-être. Qu'est-ce que vous me voulez ?
- Je me demandais comment allait l'association depuis la mort de Frank, attaque Morgane. C'est tellement horrible ... Tu crois que vous allez vous en remettre ? »
Johnny mâche ses haricots en silence, le regard assombri par sa casquette. Il l'apprécie, c'est ça ? Azura préfère ne pas imaginer comment il se comporterait dans le cas inverse.
« Qu'est-ce qu'ils en ont à faire, eux ? Leurs parents sont pêcheurs ?
- Je t'ai dit, c'est des copains. On traîne ensemble, c'est tout.
- Mouais ... »
Il abandonne ses haricots pour boire une gorgée de bière en canette. Le liquide tourne longtemps dans sa bouche avant d'être avalé.
« T'as jamais demandé de nouvelles de l'assoc' avant aujourd'hui, dit-il enfin. Qu'est-ce que vous me voulez ? Crachez le morceau avant que je m'énerve. »
Pris au dépourvu, les trois adolescents se redressent d'un seul geste. Azura décroise les bras. Sur la banquette, Morgane prend un instant pour se recomposer.
« Bon, comme tu veux, fait-elle, moins souriante. On cherche qui est à l'origine des morts subites. Je me disais que tu pourrais peut-être nous aider. T'as une idée de qui a pu lui faire ça ?
- À Frank ? Bah, c'est le directeur de l'usine. Tout le monde le dit.
- Mais ça colle pas forcément avec les faits, insiste Morgane. Pourquoi il aurait tué tous les autres ?
- Qu'est-ce que j'en sais, moi ? Il s'est peut-être fait la main. Ou alors il voulait brouiller les pistes, tu sais, comme dans je sais plus quel épisode de je sais plus quelle série de la semaine passée. Ça lui a mal réussi.
- Tu crois qu'il aurait fait tout ça juste pour tuer deux personnes ?
- Pas juste pour tuer deux personnes, corrige Johnny. Pour continuer à traiter ses ouvriers comme des larbins. Pour continuer à s'enrichir pendant que l'océan avale toute sa merde et que notre poisson meurt ! Et ...
- Le poisson meurt ? »
Le regard sombre tombe sur Azura. Celui-ci déglutit. Il n'avait pas l'intention de lui couper la parole, mais ses propos l'inquiètent. Des animaux disparus, et d'autres morts ? Le rêve de Morgane ne commençait-il pas ainsi ?
« Ouais, génie, le poisson meurt. C'est ce qui arrive quand on laisse des gens comme Burk se prendre pour les maîtres du monde. Ils se foutent des conséquences, tant que ça leur rapporte assez de blé.
- Mais, euh ... comment il meurt ? »
Johnny fronce les sourcils.
« En avalant les déchets de l'usine, je suppose. On en trouve des kilos remplis de ce truc noir dégueulasse depuis quelques temps. Tous morts. Ça leur a même fait exploser les yeux. »
Morgane et les garçons s'échangent un regard de détresse. Ça a déjà commencé. Et s'ils ne font rien ...
Le fil des pensées d'Azura se rompt lorsque celui-ci sent son téléphone vibrer. Il bafouille une excuse en le sortant de sa poche. Ryan.
« Tu peux prendre l'appel, dit Morgane avant qu'il décide quoi faire. Ça ira.
- Et emmène le gamin de la décharge avec toi, ajoute Johnny. J'aime pas comment il me regarde. »
Il n'a pas le temps de donner un sens à ses propos que Gaël l'entraîne déjà dehors. Pris au dépourvu par le comportement de ses amis et la sonnerie insistante, Azura se laisse emmener. Il se tient sur le trottoir de façon à pouvoir surveiller Johnny par la vitre et, encouragé par un mouvement du menton de Gaël, finit par prendre l'appel de Ryan.
« Azu ! l'accueille celui-ci. J'ai cru que tu décrocherais jamais ! Je tombe mal ? C'est ton enquête, c'est ça ? Qu'est-ce que ça donne ? T'as des pistes ? Des suspects potentiels ?
- Euh ... »
Dépassé par toutes ces questions, Azura s'ébouriffe les cheveux. Ryan n'a aucune idée de ce qui se joue ici. Il ne peut pas lui reprocher de mal tomber.
« Pas vraiment ... pas encore, fait-il. Pourquoi tu m'appelles ?
- Pour l'anniv de Fatima ! T'avais pas oublié, quand même ? La pauvre, ça lui briserait le cœur. Peut-être même qu'elle en mourrait. »
Azura rougit. Il avait complètement oublié.
« Bien sûr que j'ai pas oublié. Je pensais juste que tu m'appellerais plus tard.
- Ouais, non. Bon, alors, accroche-toi, parce que j'ai deux ou trois trucs à t'annoncer. Tu sais que ma demi veut aller en école de photo plus tard ? Du coup, poursuit-il avant qu'Azura puisse répondre par la négative, elle a intégré un club qui fait des réunions près de chez nous. Pour sortir et voir des gens, qu'elle dit, mais on sait tous qu'elle veut juste les humilier et être meilleure qu'eux. Bref, vu que c'est un club de bourges, mes parents vont lui offrir un trépied et un nouvel appareil pour qu'elle reste au niveau. Mais moi je suis pauvre, du coup ... Ben, y a cette meuf qui va être exposée pas loin de là où t'es en ce moment. Alga Panzani ou je sais plus quoi. J'ai demandé à mes parents si c'était une bonne idée de lui offrir le train et un ticket, ils ont dit oui, carrément, elle va être folle de joie, à condition que j'aille avec elle, du coup j'irai avec elle. Sauf que mon plan à la base, c'était de lui offrir deux places pour qu'elle y aille avec la personne de son choix. Mes parents ont dit oui, génial, j'ai qu'à faire ça et ils m'offriront la place supplémentaire pour qu'elle y aille quand même pas toute seule. Du coup voilà, ma demi va certainement t'inviter à voir des trucs dans des tableaux dans pas longtemps. Tu te sens prêt ?
- Euh, quoi ? Panzani ? »
Azura cligne des yeux pour revenir à lui. La moitié de la tirade de Ryan lui est passée au-dessus de la tête. Il scrute Johnny à travers la vitre et, malgré toute l'affection qu'il porte à son ami, son attention est plus accaparée par ce dernier que par lui. Et l'homme est bien plus bavard qu'une minute plus tôt. Ses lèvres remuent sans arrêt depuis leur départ. Face à lui, Morgane hoche la tête de temps à autre. Elle semble l'écouter avec application.
« Me force pas à tout répéter, sérieux ! fait Ryan, désespéré. Je suis déjà à court de salive !
- Désolé. Tu peux me faire un résumé ?
- Bon. Est-ce que ça te branche de zoner dans une galerie d'art avec ma demi et moi ? On pense faire ça le 22 décembre. Et t'as pas vraiment le choix, en fait.
- Une galerie ... »
Azura réfléchit, les yeux vagabondant sur les traits interrogateurs de Gaël. Il préfère ne pas se faire d'illusions sur leur avancée ; le coupable n'aura pas miraculeusement rejoint le bon côté des barreaux d'ici le 22 décembre. Se changer les idées de temps à autre leur ferait du bien, à Morgane comme à eux. Azura ignore ce qu'il en est de la jeune fille, mais Gaël n'a jamais quitté Sunnyside. L'emmener dans cette galerie ferait un joli cadeau de Noël (même s'il devra en trouver un vrai, bientôt).
« C'est où, exactement ? demande-t-il à Ryan.
- Dans un patelin qui s'appelle Devil's Rock, à deux heures de Sunnyside. Tu pourras prendre le train ?
- Pas sûr. Y aurait de la place pour quelques personnes de plus ?
- Euh, ça dépend. Je sais pas combien de personnes Fatima pourra supporter. Pourquoi ?
- J'ai des amis ici qui seraient heureux de venir, dit-il, ignorant la confusion dans le regard de Gaël. Tu crois que je peux les inviter ?
- Y a des filles dans le tas ?
- Aucune qui serait intéressée.
- T'es nul ! Vous seriez combien, au total ?
- Entre un et ... six, décide-t-il. Faut que je palpe le terrain.
- Alors palpe ! Mais pas trop longtemps quand même.
- Je te tiens au courant.
- Encore heureux que tu me tiennes au courant, c'est moi qui ai eu l'idée ! »
Il raccroche. Adossé les bras croisés à la façade du restaurant, Gaël abandonne sa contemplation du trottoir pour relever les yeux vers lui.
« C'était Ryan, répond Azura avant qu'il pose la question. Tu sais, le blond sur mes photos.
- Vous parliez de quoi ?
- De l'anniversaire de sa demi-sœur. La brune sur les photos. »
Gaël cille sans comprendre. Après un dernier regard vers Johnny, Azura se rapproche de son ami pour lui résumer la situation.
« Et je me disais que ça vous ferait peut-être plaisir, conclut-il. À toi, Morgane ... peut-être sa sœur, et aussi à Holly et Cherry. T'en penses quoi ?
- Tu veux dire ... à l'extérieur de la ville ? »
Azura hoche la tête. Il voit bien, au regard de Gaël, qu'il meurt d'envie d'accepter sa proposition, mais quelque chose le retient.
« Je dois ... je dois voir si j'ai le droit. Il me faut une autorisation pour sortir de Sunnyside.
- Hein ? De qui ? De Joy ?
- Des gens qui s'occupent de moi, marmonne-t-il, tête basse.
- Des médecins ? »
Gaël hausse les épaules. La gorge d'Azura s'assèche tout à coup. Qu'est-ce qu'il ne lui dit pas ? Ses tournis, cette voiture, ces médecins qu'il mentionne parfois ...
« Gaël ... »
Il s'avance d'un pas, mais la porte du restaurant s'ouvre à ce moment précis. Morgane descend les deux marches en s'enroulant une écharpe autour du cou, pressée de les rejoindre.
« Alors ? fait Gaël comme pour détourner l'attention de ses propres problèmes. T'as appris quelque chose ? »
Morgane secoue la tête, dépitée.
« Il fait que se plaindre depuis que vous êtes partis, c'est atroce. Pour lui, c'est le directeur de l'usine de teinture qui est responsable de tout - même de la faim dans le monde. Frank avait pas d'autre ennemi, apparemment.
- Hm ... »
Comme sur la plage, Gaël se touche le menton pour réfléchir. Azura finit par détacher les yeux de son ami. Ils reprendront leur conversation plus tard.
« Vous pensez qu'il a raison ? Qu'il y a une chance pour que ce Burk soit derrière tout ça ?
- J'y crois pas trop, répond Morgane. Ce serait trop évident. Presque grotesque. Et Azura disait qu'il détestait ce prof quand il l'a ... Enfin, tu vois. Y a peut-être quelque chose de plus personnel là-dessous. »
Azura les écoute sans intervenir. Morgane a raison. Tout dans les deux dernières victimes semble accuser Burk, à un tel point que leur mort ressemble à un coup monté. Quant à son mépris pour eux, il devait être purement professionnel. Rien de comparable à ce qu'il ressentait pour Campbell.
« Et les poissons ... » frissonne la jeune fille.
Ils baissent les yeux sans rien dire - sans qu'il y ait quoi que ce soit à dire. Plus Azura repense à la mort de Campbell et moins il comprend. Comment quelqu'un peut abriter assez de haine, de rage pour affecter la nature ainsi ? C'est comme si ses émotions le dépassaient. Comme si ... comme si à force de tuer, il avait fini par souhaiter la disparition de la ville toute entière.
Azura déglutit, ressentant, pour la première fois, un élan d'empathie envers cette personne qu'ils recherchent. Quelle vie peut-elle mener pour haïr Sunnyside à ce point ?
« C'était bizarre, dit-il avant que ses pensées s'aventurent sur des terrains trop étranges. Il t'aime bien, c'est ça ? J'ose pas imaginer les trucs qu'il nous aurait sortis s'il t'aimait pas.
- Il est pas méchant, soupire Morgane, juste un peu parano. Il pense que tout le monde se fout toujours de sa gueule à cause de son statut. Mais ouais, c'était bizarre. C'était quoi, cette histoire de décharge ?
- J'en sais rien, fait Gaël en haussant les épaules. Il a dû me confondre avec quelqu'un d'autre. Ça arrive. »
Azura dévisage son ami sans en croire un mot. Celui-ci lève la main vers son visage comme pour s'essuyer le nez, mais s'immobilise à temps. Bon. Encore un mystère à ajouter à sa liste concernant Gaël.
« J'ai un truc un peu plus mignon à t'annoncer, dit-il à Morgane avant que ça lui sorte de la tête. T'aimes bien les galeries d'art ?
- J'y connais rien en art. Mais ouais, je suppose que j'aimerais bien. Pourquoi ? »
Le visage de la jeune fille s'éclaire tandis qu'il lui explique la situation. De joie, elle tape dans ses mains. Ses gros gants se percutent avec un bruit mat.
« Ce serait trop cool ! Mais t'es sûr qu'on peut venir ? Je voudrais pas m'imposer à tes amis.
- Ils devraient vous tolérer. Et tu fais partie du package, maintenant ! C'est nous trois ou rien. Et puis, on a encore jamais rencontré ta sœur. Il faut remédier à ce drame au plus vite.
- Honnêtement, vous ratez pas grand chose. Gaël vient aussi, j'espère ? »
Ce dernier rosit, gêné que la jeune fille ait décidé de reporter son attention sur lui. Il se gratte la joue, le regard fuyant.
« Je me débrouillerai. Ils peuvent pas m'empêcher de sortir, de toute façon.
- Ce serait pas pareil sans toi. Et puis, Azura a dit nous trois ou rien. »
Il rougit carrément. Malgré leur sujet de conversation précédent, Azura ne peut pas empêcher sa réaction de l'amuser. Gaël n'a jamais été doué pour recevoir ce genre de flatterie.
« C'est presque décidé, alors, dit-il. Mais je vais avoir besoin de vous pour la dernière étape. »
Ses amis tournent vers lui deux mines curieuses.
« Holly ! salue Azura en faisant traîner la dernière syllabe. Coucou ! »
Surprise, la concernée lève les yeux de son journal. Ses traits s'adoucissent en avisant Morgane et Gaël. Avachie sur le comptoir comme à son habitude, Cherry relève difficilement la tête pour la tourner vers eux.
« Vous avez avalé une licorne ? grogne-t-elle.
- Ils ont quelque chose à me demander, comprend Holly en fermant le journal. Je suis toute ouïe. »
Flanqué de ses deux amis, Azura s'accoude au comptoir. Il ne comptait pas tourner autour du pot. Pas avec elle.
« Je t'ai déjà parlé de Ryan ?
- Non, dit Holly. Jamais.
- Ah, euh, ben, c'est un ami de là d'où je viens. Il nous a invités à voir une expo avec lui le 22 décembre à Devil's Rock. Tu connais ?
- Une expo de quoi ?
- De, euh ... photos, je suppose. Avec Alga Panzani ? Je suis pas sûr que le nom soit correct.
- Alma Zanielli, peut-être ? propose Cherry. Elle est peintre et photographe à la fois, comme son père. Oh, vous avez de la chance ...
- Je hais les artistes, crache Holly. Pourquoi tu me parles de ça ?
- Parce que ... c'est à deux heures d'ici en voiture. »
La femme lève les yeux au ciel. C'est mal parti. Qu'est-ce qu'elle a contre les artistes, au juste ?
« Et tu crois que j'ai rien de mieux à faire ? J'ai un bar à gérer, au cas où ça se verrait pas. »
Azura embrasse les lieux du regard, peu convaincu. Ils sont seuls.
« Tu pourrais peut-être fermer juste une journée ? propose-t-il. Les gens seront pas déçus si tu les préviens en avance.
- Et il paraît que Devil's Rock a des supers décos de Noël, ajoute Morgane. Ils ont un marché, y a même une grande roue ... Oh, et Cherry est invitée aussi ! »
La jeune femme écarquille des yeux embués.
« Moi ? Sérieux ?
- J'ai dit qu'on serait six au maximum, fait Azura en se tournant vers elle. Donc ouais, si tu veux, tu peux venir.
- Cool. Sympa. Merci, Akuma.
- C'est toujours Azura. Mais de rien.
- Eh, une seconde ! intervient Holly. Vous parlez comme si c'était déjà décidé, mais j'ai jamais dit que j'étais d'accord !
- Ce serait mieux si on était tous ensemble, dit Gaël, tout sourire, en ramenant une mèche de cheveux derrière son oreille. On pourrait y aller en bus et en train, mais qui sait pour combien de temps on en aurait ... On devrait certainement passer une nuit là-bas ... tous seuls ... Et puis ça me ferait plaisir que vous soyez là, madame. »
Azura se mord les joues pour ne pas rire. Encore un peu et il verrait presque les paillettes flotter autour du visage de son ami. De l'autre côté du comptoir, Holly a cessé de respirer. Elle déglutit, le regard braqué sur Gaël, l'air prête à vomir un cœur.
« Je ... suppose que je pourrais, lâche-t-elle, vaincue. C'est où et quand, t'as dit ?
- Le 22 décembre à Devil's Rock ! crie presque Azura. Merci, Holly !
- Ouais, ouais ... »
Elle se détourne d'eux, embarrassée. Azura revient à ses amis, le visage fendu d'un sourire, les pouces levés en signe de victoire. Morgane lui rend le geste tandis que Gaël le balaie de la main. Malgré son allure détachée, il sourit lui aussi. Pourvu que rien ne contrecarre leurs plans.
À: Ryan
palpation accomplie
on sera 6, on viendra en voiture
y aura moi + gaël + morgane (une fille de ma classe qui serait pas intéressée) + sa sœur (elle a 8 ans) + ma tante + cherry (je sais pas trop qui c'est en fait mais elle est cool et elle serait pas intéressée non plus)
De: Ryan
GAËL ??????????
cette histoire de palpation s'éclaire (͡° ͜ʖ ͡°)
À: Ryan
t'es con
prends nos places on te remboursera
De: Ryan
TU VEUX ME RUINER ????? 😢 😢 😢
À: Ryan
c'est combien ??
De: Ryan
7 dollars la place
À: Ryan
tu devrais vivre
et tu me dois toujours une pizza
deux maintenant que j'ai aussi sauvé la vie de fatima en acceptant sa future invitation
De: Ryan
MAIS
Azura ricane seul devant son écran. Il devra s'assurer que Ryan ne fasse aucune mention de palpation devant Gaël quand ils se rencontreront. Ce serait embarrassant.
Son amusement s'efface lorsqu'il ouvre les mémos de son téléphone. Il a décidé, plus tôt en journée, d'en créer un juste pour mettre un peu d'ordre dans les questions qui lui trottent dans la tête.
Mystères de Sunnyside
les morts subites (who knows)
le gamin de la décharge (selon johnny gunn)
stef (interroger cherry ?? holly me tuerait)
Il soupire en relisant la deuxième entrée, refusant de la remplacer par le prénom de Gaël. Gaël n'est pas un mystère. Il est juste ... souffrant. Et cette simple pensée le fait souffrir lui aussi. À quel point doit-on être malade pour avoir besoin d'une autorisation juste pour quitter la ville ? Ou peut-être ... peut-être qu'il ne parlait pas des médecins. Peut-être que ce beau-père chiant pété de thunes est encore plus chiant que l'imaginait Azura. Merde, il devrait au moins s'assurer de son existence avant d'envisager le pire.
« Gaël ... »
Il serre Gogo dans ses bras, tentant inconsciemment de reproduire la chaleur des mains de Gaël sur les siennes. Le pire n'est jamais bien loin, à Sunnyside.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top