Chapitre 3
Where have you been?
Been searching all along
Came facing twilight on and on
Without a clue
Without a sign
Without grasping yet
The real question to be asked
Where have I been?
Malgré la première impression inoubliable qu'il leur a laissée, Azura ne s'attend pas à voir les élèves de sa classe faire le premier pas vers lui. Les regards curieux qu'on lui lance s'esquivent au moment même où il les remarque. Sans s'intéresser à la question plus que ça, Azura se demande pour qui il passe. Il ne serait pas étonné d'apprendre que la droite mise à Campbell se soit muée en agression au cutter ou pire encore. Autant s'habituer à la solitude.
Il fait craquer les os de sa nuque, une main dans la poche et l'autre serrée contre un plateau repas trop léger à son goût. Assise seule à une table ronde, Morgane semble plongée dans la lecture d'un roman qu'Azura ne connaît pas. Il déglutit. Je peux m'asseoir là ? répète-t-il dans sa tête. J'aurais besoin que tu me prêtes tes notes, juste pour deux ou trois jours. Je te les rends tout de suite.
« Je peux te prêter là ? »
Morgane lève les yeux, mais Azura a déjà tourné les siens vers le mur le plus proche. Il aimerait disparaître.
Elle doit avoir compris quand même, car elle hoche la tête avant de revenir à son bouquin. Azura jette un œil à la couverture et hausse les sourcils. Il s'attendait à un truc du niveau de Harry Potter, pas à un traité de philosophie. Il s'assied à sa gauche en prenant garde à ne pas faire trop de bruit.
« C'est si mauvais que ça ? » lance-t-il en avisant son plateau plein.
Confuse, Morgane le dévisage un instant avant de se rendre compte qu'il ne parle pas de son livre. Elle n'avait plus l'air consciente de se trouver dans un réfectoire.
« Oh, non, c'est ... Tu peux le finir, si tu veux. »
Sa voix est faible, presque effacée, comme celle d'un fantôme. Ses yeux ont la couleur d'un ciel d'été sans en avoir l'éclat. Sous ceux-ci, la fatigue a creusé deux poches. Azura revient sans joie à sa propre ration.
« Je crois que je vais me contenter du mien. »
Du bout de sa fourchette, il teste une purée dure comme la roche. Il n'aurait pas dû importuner cette fille. De toute façon, elle n'écoute rien du tout depuis qu'il est arrivé ; qu'est-ce qui lui fait croire qu'elle a la moindre note à lui prêter ? Il lui pose quand même la question.
« Oh, tu devrais ... tu devrais demander à quelqu'un d'autre, répond-elle simplement. Je serai peut-être plus là très longtemps. »
Il hoche la tête sans insister. Quelqu'un d'autre ne l'aurait pas laissé s'asseoir à sa table.
Il retourne un nugget froid, pensif. Elle ne sera plus là très longtemps ? La façon dont les profs laissent passer son manque d'attention lui en dit déjà plus qu'il n'a besoin de savoir. La pauvre fille doit avoir une bonne excuse. Un décès dans la famille, ou un truc du genre. Ce Frank Merryland faisait peut-être partie de ses proches.
« Hm ? marmonne-t-il tout à coup. Y a un lacet dans mes ... »
Il écarte ses petits pois fluorescents, écœuré, et coince l'intrus entre les dents de sa fourchette. Lorsque celui-ci commence à gigoter, Azura repose lentement son couvert et pousse son plateau jusqu'à l'autre bout de la table.
« C'est pas un lacet. »
Un rire nasal, dénué de toute élégance, s'élève de sa droite. Morgane s'est couvert la bouche pour le retenir, mais sans succès.
« Désolée » souffle-t-elle.
Un sourire, le premier depuis leur rencontre, flotte sur ses lèvres tandis qu'elle dévisage son voisin. Il s'efface quand elle revient à son plateau. Derrière eux, un groupe de filles d'une autre classe leur jettent un regard réprobateur. C'est quoi, leur problème ? On ne peut plus rire d'un ver de terre dans les petits pois ?
« Non mais sérieusement ? siffle l'une d'elle en guettant l'approbation de ses copines. Après ce qui est arrivé, elle ...
– Quoi, y a un problème ? »
Azura n'a pas pu s'en empêcher. La commère se tord le cou pour échapper à son regard meurtrier, l'air déconfit. Elle n'avait pas dû le reconnaître la première fois.
Il revient à Morgane, mais celle-ci a posé les yeux sur un point invisible au-dessus de son livre. Azura ignore ce qui se joue dans la tête de cette fille mais, après plusieurs secondes de silence abattu, elle le referme d'un geste brusque et se lève de sa chaise sans plus de délicatesse. Les pieds grincent fort sur le sol. Une des connasses de derrière grimace de douleur. Les traits plissés de mépris, Morgane s'éloigne de la table sans même jeter un dernier regard à son plateau. Azura tend une main vers elle, mais la jeune fille s'éloigne avant qu'il trouve ses mots. Effaré, il regarde ses épaules voûtées disparaître dans la foule du réfectoire.
Qu'est-ce qu'il a fait, encore ?
Morgane l'ignore pour le reste de la journée. Elle regarde la pluie tomber sans dire un mot, le menton dans la main et l'air encore plus maussade qu'avant. Azura aimerait y faire quelque chose, mais quoi ? Il ne connaît pas cette fille. Et vu comment a tourné leur première conversation, il préfère ne pas en rajouter.
Il descend dans le hall du lycée, les yeux bas. Était-ce vraiment sa faute ? Morgane lui donne plutôt l'impression d'être victime d'un harcèlement insidieux. Elle devrait en parler aux profs. En tout cas, Azura le ferait à sa place. Ou alors il leur casserait la gueule.
Il range ses questions dans un coin de sa tête en apercevant Gaël près de la sortie. Adossé au mur avec une jambe pliée, celui-ci a le regard braqué sur son smartphone. Il met plusieurs secondes à le relever même quand Azura se plante face à lui.
« Il te faudrait une clochette, l'accueille-t-il. T'as presque failli me faire peur.
– Déjà essayé. Ça suit mal avec mes yeux.
– Change de chaussures, alors. Prends celles qui font couic-couic.
– Elles sont chez ma mère. »
Le visage de Gaël se fend d'un sourire.
« Vous les avez gardées ? Sérieusement ?
– Tu sais bien qu'elle garde tout, dit Azura d'un air ennuyé. Elle a encore mes cours de primaire au cas où j'oublierais mes couleurs. Y en a jusqu'au plafond. »
Ils lui rappellent soi-disant l'époque où Azura était moins insupportable. Il préfère garder cette information pour lui.
« Alors, fait Gaël en dépliant un grand parapluie noir, cette deuxième journée à Sunnyside ? Tu survis ?
– Troisième, corrige Azura. Et non. J'ai trouvé un ver de terre dans mes petits pois ce midi.
– Oh, dur. Il paraît qu'un type de ma classe a trouvé une araignée dans sa ratatouille y a pas longtemps. »
Il réfléchit un instant, puis ajoute :
« On peut manger ensemble si tu veux.
– C'est gentil, mais je vois pas en quoi ça change le planning des vers de terre. À moins qu'on t'ait appris une technique ancestrale pour les éviter.
– Je mange pas les trucs de la cafèt.
– Oh ? »
Gaël secoue la tête. Dehors, un groupe d'élèves se bouscule près de la route. Azura reconnaît les cheveux blonds de Morgane quelque part dans la foule.
« J'ai ... j'emmène mes propres trucs. On pourrait les partager de temps en temps.
– C'est une technique ancestrale comme une autre.
– La meilleure. Eh, ça te dirait qu'on ... »
Gaël a haussé d'un ton, comme s'il était sur le point de lui proposer la sortie du siècle, mais se tait en avisant quelque chose de l'autre côté de la route. Azura suit son regard. Une longue voiture noire, brillante, aux vitres teintées et à l'allure presque sinistre, est garée là. Il hausse les sourcils.
« Bordel, j'aimerais être aussi riche.
– C'est ... c'est pour moi. »
Persuadé qu'il plaisante, Azura ricane. Il le regrette aussitôt. Gaël s'est tourné vers lui, le teint plus pâle que d'ordinaire, et a l'air de tout sauf de plaisanter. Bon Dieu, il devrait vraiment la fermer parfois.
« Tu peux garder le parapluie si tu veux, dit Gaël après un silence embarrassé. J'en prendrai un autre. »
Azura hoche la tête sans ouvrir la bouche. Leurs doigts se touchent quand il s'empare du manche. Ça ne doit être que le fruit de son imagination, mais il jurerait que ceux de Gaël s'y attardent plus longtemps que nécessaire.
« Reste là, souffle-t-il en lui tapant l'épaule. C'est pas la peine de m'accompagner. On se revoit vite. »
Leurs mains se séparent. Bien qu'il ne puisse pas s'empêcher d'avancer d'un pas, Azura fait comme il lui est demandé et le regarde partir sous la pluie. Les cheveux caramel se retrouvent trempés aussitôt qu'il traverse la route.
Gaël se laisse tomber sur le siège arrière avec un soupir, l'estomac noué. Il déteste l'odeur de cette voiture - un mélange de neuf, de tabac et de cuir - presque autant qu'il déteste l'odeur de cette ville. En faisant mine de lisser la poche de sa veste, le garçon s'assure de la présence de la petite fleur. Son angoisse diminue un tant soit peu au contact du relief familier.
« Un ami ? » demande l'homme assis à l'autre bout de la banquette.
Les doigts de Gaël s'enfoncent dans celle-ci. Il refuse de regarder son voisin.
« Personne. On parlait des cours.
– Hm. »
L'homme soupire, agacé.
« Tu vas encore foutre de l'eau partout. »
Ouais. Mange ça, connard.
« Désolé. J'ai oublié mon parapluie ce matin. »
Azura n'a pas bougé de sa place quand le véhicule démarre. Il aimerait faire signe à Gaël, mais les vitres teintées l'empêchent de le voir. Il se sentirait plus ridicule qu'autre chose. Et puis ...
Il rougit en repensant à la façon dont il l'a planté. Il n'aurait tout de même pas honte d'être vu avec lui, si ? Pas Gaël ? Peut-être qu'il voulait juste le garder à l'écart de ... Qui l'attendait dans la voiture, de toute façon ?
Azura secoue la tête. Pour l'instant, il parie sur le beau-père chiant pété de thunes. C'est la solution la plus probable.
Il s'apprête à rejoindre l'arrêt de bus, mais change d'avis en avisant Morgane près de la route. La jeune fille regarde les véhicules passer d'un œil vide. Celui qui arrive roule plus vite qu'il le devrait. Elle ne cherche pas à traverser. Elle a plutôt l'air de vouloir ...
« Eh ! »
Azura presse le pas en la voyant se pencher en avant. Bordel de merde, c'est pas une impression. Cette fille va vraiment se jeter sur la route.
Il l'attrape par le poignet et la tire en arrière. La voiture passe derrière eux sans ralentir. Morgane serait morte à cette vitesse.
Elle le contemple, choquée, comme si elle sortait d'une sorte de transe. Ses yeux vont et viennent entre les siens sans savoir sur lequel se poser. Azura ne sait pas quoi dire. Sa main est toujours serrée autour de son poignet. Morgane ne tente rien pour s'en défaire .Autour d'eux, personne ne semble conscient de ce qui vient d'arriver.
Elle fond en larmes, sa main libre posée à plat sur ses yeux comme pour camoufler sa honte. La tension se relâche un peu et, sans qu'ils sachent comment, leurs doigts se retrouvent quasiment mêlés les uns aux autres. Azura ne veut pas les lâcher.
« On devrait aller ailleurs » s'entend-il dire.
Il est le premier surpris de la voir hocher la tête.
Ils s'assoient sous le feuillage clairsemé d'un marronnier situé entre le lycée et un jardin public où s'époumonent des douzaines d'enfants. Morgane ne peut pas aller plus loin. Elle se laisse tomber au pied de l'arbre, les genoux sous le menton, le regard bas. Azura s'installe en tailleur face à elle. Son parapluie est juste assez large pour deux.
Ils gardent les yeux rivés au sol, trop embarrassés pour dire un mot. Morgane s'essuie le nez d'un coup de manche avant de s'emparer d'une feuille morte pour la dépecer. Les cris des enfants paraissent à des années lumières de là. Personne n'a encore remarqué leur présence. Comme devant l'entrée du lycée, ils pourraient tout aussi bien être seuls au monde.
« Tu devrais aller dans une clinique » dit Azura, incapable de supporter le silence plus longtemps.
Morgane secoue la tête suffisamment vite pour qu'il la soupçonne d'y avoir déjà pensé. Elle ne relève pas les yeux.
« Non, souffle-t-elle de sa voix effacée. Je ... je le ferai plus. J'avais pas vraiment envie de le faire de toute façon. Je le regretterais déjà.
– Je crois pas que t'aurais eu l'occasion de regretter. »
Sur la feuille, les doigts de Morgane se figent. Son regard se plante dans le vide un instant. Intérieurement, Azura se maudit.
« Si tu voulais pas le faire, pourquoi tu ... pourquoi tu l'as fait ? » se rattrape-t-il.
À nouveau, Morgane secoue la tête. Ses lèvres s'entrouvrent pour laisser échapper un minuscule soupir. Elle balaie le sol du regard avec l'air de chercher ses mots. Ou peut-être cherche-t-elle simplement la réponse.
« Je pense pas que tu comprendrais, lâche-t-elle enfin. C'est pas contre toi, mais ... »
Azura hausse les épaules.
« Je peux essayer. »
Pour la première fois depuis leur arrivée sous cet arbre, Morgane lève les yeux vers lui. Ceux-ci semblent plus alertes que quelques heures plus tôt, comme si avoir frôlé la mort avait dissipé une partie de son abattement.
« Peut-être que tu pourrais, murmure-t-elle. J'en sais rien. »
Morgane s'entortille une mèche de cheveux autour des doigts, divisée.
« Il se passe ... tellement de choses. C'est bizarre. J'ai envie de tout te dire, mais ... C'est bizarre, répète-t-elle dans un soupir. Tu viens d'arriver en ville mais j'ai l'impression que ... »
Elle s'interrompt. Azura n'est pas sûr de bien suivre.
« Je vivais là avant » dit-il.
Morgane écarquille les yeux.
« Ah bon, vraiment ? Je me souviens pas de toi. T'es parti quand ?
– Il y a quatre ans, plus ou moins. Quand mes parents ont divorcé.
– Quatre ans ... »
Elle scrute la terre mouillée, pensive. Selon Gaël, les morts subites ont commencé à la même période. Azura se demande si la réflexion de Morgane porte là-dessus.
« T'es parti à temps, dit-elle tout à coup. Mais t'aurais jamais dû revenir.
– Je sais. On m'a raconté. »
Ils s'échangent un regard avant de se replonger dans leur méditation respective. Quatre ans ... Est-ce vraiment une coïncidence ? Que quelqu'un d'autre à Sunnyside soit capable des mêmes choses que lui ? Que les meurtres aient commencé peu après son départ ? Azura n'a jamais cru au destin ou à ce genre de conneries, mais ...
« Ton pin's ... »
Il cligne des yeux, surpris. Morgane semble absorbée par le sac messager qui repose entre ses genoux.
« C'est ... »
Azura suit la main qu'elle tend vers lui. Elle s'arrête sur un épingle ronde dont il avait presque oublié l'existence - un pin's de collection ramené par son père à la même occasion que la peluche qui partage ses nuits.
« Gogo et Morgane, dit-elle. J'adore ce dessin animé. »
Elle retire ses doigts. Azura hausse les sourcils.
« Trois Petits Chats ? »
Morgane secoue la tête.
« En France, le titre, c'est Gogo et Morgane. Je le sais parce que ma mère m'a ... »
Elle se pince les lèvres.
« Elle était française, poursuit-elle ensuite. Elle m'a appelée Morgane à cause de ça. Ma sœur, c'est Nana. Je suppose qu'elle aurait appelé la troisième Lola si elle avait eu le temps d'en avoir une autre. »
Azura hoche la tête sans rien dire. Était. Voilà qui explique des choses.
« Pourquoi Gogo et Morgane ? se demande-t-il, conscient que la Morgane en face de lui n'a pas lancé le sujet pour rien. Je sais que c'est la première à obtenir ses pouvoirs, mais c'est un peu dégueulasse pour les autres protagonistes.
– Mais c'est quand même les plus importants du lot. Et puis c'est un peu plus pertinent que Trois Petits Chats, non ? C'est pas vraiment des chats. Les pauvres passent leur temps à le répéter.
– Pourquoi pas Gogo, Morgane, Nana, Lullaby, Lola et Abu dans ce cas ? Lola et Abu sont toujours laissés dans un coin. Tout ça parce qu'ils sont un peu bouffons.
– C'est un peu long à dire, non ? Et puis, c'est quand même le départ de Morgane qui lance toute la suite. Faire semblant de passer du côté obscur pour faire éclater la vérité de l'intérieur, quitte à tromper jusqu'à ses amis et les spectateurs ... C'était tellement cool, soupire-t-elle. J'arrive toujours pas à croire qu'ils aient eu l'audace de faire ça avec la protagoniste. La protagoniste ! Meilleure série du monde.
– Je continue à penser qu'ils auraient juste pu en parler.
– Mais qu'est-ce qui serait arrivé à la saison trois ? Pense à tous ces retournements qu'on aurait ratés ! Tu serais prêt à sacrifier l'épisode de la pyramide juste pour un peu de cohérence ?
– Je préfère celui du vaisseau spatial.
– Oh, bon choix ! J'ai affaire à un connaisseur, on dirait ! »
Azura rougit en réalisant l'enthousiasme avec lequel ils parlent d'un dessin animé pour enfants. La honte l'accable un peu plus quand il se rend compte à quel point Gaël l'incendierait pour ne pas avoir mentionné l'épisode du bateau. Désolé, Gaël.
« Je regarde ... regardais souvent, se reprend-il. Quand j'étais petit. »
Le regard de Morgane se fait perplexe.
« Tu peux avouer que tu regardes encore, tu sais, dit-elle. On est partis pour tout se dire.
– Bon, OK, j'avoue. Je regarde encore. Je dors même avec la peluche.
– Attends, la peluche ? La vraie ? Celle de Gogo ? Du vingtième anniversaire ? »
Il hoche la tête, fier de lui. Ce n'est pas la sienne à proprement parler (la sienne devrait être chez Gaël, enfin, s'il l'a encore, et Azura espère bien qu'il l'a encore), mais il ne se sent pas de raconter les détails. Surtout des détails pareils.
« La vache, fait Morgane, je te hais ! »
Elle bascule en arrière, camouflant son rire du plat de la main. Ses yeux sont plissés de joie.
Ils sourient en silence, savourant le climat plus léger qui plane sur eux.
« Je suis désolée, reprend Morgane au bout d'un moment. Ça doit être bizarre de me voir rire comme ça après ... ce truc que j'ai fait.
– Non, c'est cool. Et puis, je crois que je comprends. C'est comme quand on pleure trop, on parle de n'importe quoi après. J'ai rencontré quelqu'un comme ça.
– Oh ? »
Azura hoche la tête. Lui non plus n'a aucune idée de pourquoi il lui raconte ça.
« Après mon départ, raconte-t-il, je me suis retrouvé dans une classe de troisième où tout le monde se connaissait déjà. La ville était gigantesque, tout était tellement nouveau et ... bizarre, même. Au troisième jour, quelqu'un m'a envoyé un ballon de volley dans le nez. Il me l'a presque cassé. Il est resté avec moi à l'infirmerie et là j'ai ... Je sais pas, soupire-t-il. J'ai craqué. J'ai pleuré pendant dix minutes et il a eu droit à toute l'histoire de ma vie. Après ça on s'est plus quittés. »
Il préfère garder la raison principale de son chagrin (à savoir l'absence de Gaël) pour lui. Ryan, lui, l'a appris en même temps que tout le reste.
« Je vois, murmure Morgane. Moi non plus, je suis pas douée en sport ou en interactions sociales. On devrait pouvoir s'entendre.
– Je sais juste courir un peu. Enfin, pas plus de trois secondes. J'espère que ça entachera pas la relation de confiance qu'on commence à avoir.
– Je crois que je peux laisser passer ça. Merci, ajoute-t-elle après un silence. Pour ... Tu sais. Pour être venu. Tout le monde m'évite depuis quelques mois, alors même si j'avais ... »
Elle baisse les yeux sans continuer. Azura comprend. Il aimerait lui demander pourquoi les autres la fuient mais, si Morgane voulait en parler, il suppose qu'elle le ferait d'elle-même.
« Je crois que je vais vite savoir ce que ça fait d'être évité par tout le monde, dit-il à la place.
– Fais pas attention aux rumeurs. Les gens inventent n'importe quoi pour pimenter un peu leur vie.
– Elles me dérangent pas.
– C'est ce qu'on dit tous. Ton nom, c'est ... Azura, c'est ça ?
– Ouais. Mon père est un peu hippie. »
Morgane émet le même son qu'à la cantine. Une espèce de rire nasal semblable à un râle contenu. Azura a beau y réfléchir, il n'arrive pas à imaginer ce qu'on peut bien raconter à son sujet. Est-ce qu'on se fiche d'elle à cause de son rire ? Lui le trouve drôle. Et communicatif, avec ça.
« Qu'est-ce que tu vas faire, maintenant ? »
Morgane hausse les épaules. Son sourire s'efface peu à peu, mais elle n'a plus l'air aussi abattue qu'avant.
« Je crois que je vais rester chez moi demain. Peut-être un peu plus longtemps. Je peux toujours revenir lundi.
– Et pour le Wendy's ?
– Oh ... grimace Morgane. Je vais devoir les prévenir. »
Elle passe une main dans les cheveux ondulés qui s'échappent de la capuche de son sweat. Le parapluie goutte doucement à leurs pieds. L'averse a fini par se calmer.
« C'est horrible, de travailler là-bas. Grace est tellement ... »
Elle grommelle quelque chose d'inintelligible. Azura a beau ne pas connaître cette Grace, il imagine assez bien ce que Morgane lui reproche.
« Tu peux pas postuler ailleurs ?
– Où ça ? Tout ce que je sais faire, c'est porter des assiettes et servir du café. Si tu connais quelqu'un que ça intéresse ... »
Azura hausse les sourcils. Holly ne doit pas avoir les moyens d'embaucher une serveuse, mais demander ne lui coûtera rien.
« Je vais rentrer, dit Morgane quand le soleil commence à se coucher. Je suis claquée et je dois encore aller chercher ma sœur avant que notre grand-mère s'inquiète.
– On se revoit lundi ? »
Ils se dévisagent un instant. Azura lui demande de lui faire une promesse, et Morgane semble l'avoir compris.
« Ouais. On se revoit lundi. »
Azura doit se faire violence pour laisser Morgane prendre le bus seule. Ils ne se séparent qu'après s'être échangé leur numéro, s'engageant par la même occasion à se contacter en cas de besoin.
En rentrant à la Petite Sirène, le garçon manque de se heurter à l'homme qui en sort. Il recule d'un pas, les épaules instinctivement tendues, et soutient un regard acier semblable à celui de sa tante. Son propriétaire - un quadragénaire au visage mat, anguleux, vêtu d'une chemise sombre et au menton piqueté de poils noirs - arque ses sourcils baissés vers lui. Un manteau de pluie repose sur son épaule droite. De sa main libre, l'homme lisse machinalement la pointe d'une cravate. Intimidé, Azura ne songe même pas à le saluer. Le silence, dont la brièveté échappe totalement au garçon, ne prend fin que lorsqu'une tête brune surgit aux côtés du quadra pour lui adresser un large sourire.
« Salut ! fait une voix efféminée, semblable à celle qu'aurait un adolescent enroué. Tu vis ici ? »
Azura cligne des yeux pour se donner le courage de les détacher de l'homme qui a failli le percuter. Son partenaire, jusque là éclipsé par sa carrure imposante, le contourne pour se planter devant lui et ancrer un regard vert d'eau à celui d'Azura. Malgré ses salutations sympathiques, il ne fait pas l'effort de sortir les mains de ses poches pour lui en tendre une et encore moins celui de se tenir droit. Sur son visage en triangle, les coins soulevés de sa bouche donnent à son sourire une forme de parfait crochet. Ses cheveux en bataille, juste assez longs pour chatouiller le lobe de ses oreilles, ondulent au rythme du vent malgré la capuche jaune qui les couvre encore. Sur le tissu clair de sa chemise froissée repose la même cravate bordeaux que son voisin. Azura ne saurait pas dire s'il s'agit d'un homme ressemblant à une femme ou l'inverse. Dans tous les cas, cette personne ne doit pas être plus âgée que Cherry. Le garçon se détend un peu.
« Euh ... ouais, au grenier, bafouille-t-il. Y a un problème ?
– Hm ? Depuis combien de temps ? »
Azura relève les yeux vers l'homme intimidant (ce qui demeure possible en dépit de la présence de son collègue entre eux). Sa voix colle parfaitement à son physique, mais revêt des intonations presque rassurantes.
« Euh, trois jours. Pourquoi, y a un problème ? répète-t-il.
– Oh, zut, reprend l'autre. Aucune chance que t'aies vu passer Frank Merryland, alors.
– La ferme, Tori. »
Le quadra pousse son partenaire du coude pour l'écarter. Il n'y met presque pas de force, mais celui-ci titube comme s'il venait de se faire percuter par une voiture. De confusion, Azura plisse les yeux. Frank Merryland ? Le gars venu ici avant de claquer ? Et pourquoi le nom de Tori lui dit quelque chose ?
« Je suis le détective Jack Kingsman, s'introduit l'homme baraqué avant qu'Azura le comprenne de lui-même. Et voici mon ... partenaire, lâche-t-il à contrecœur, Tori Fairfield. Si tu viens d'arriver en ville, tu dois encore ignorer ...
– Vous êtes venus interroger ma tante sur les morts subites ? l'interrompt Azura. Qu'est-ce qu'elle vous a dit ? »
Jack écarquille les yeux avant de soupirer. Il passe une main sur ses cheveux poivre et sel sans savoir quoi dire. À côté de lui, Tori cache un sourire dans son poignet.
« Je suppose que les nouvelles vont vite dans une ville comme la nôtre, admet Jack. Mais oui, nous sommes là pour ça. Ta tante a eu un comportement suspect depuis que tu es ici ?
– Pas plus que d'habitude. Pourquoi ?
– Comment ça, pas plus que d'habitude ?
– Ben, euh ... on n'est pas vraiment proches. On parle pas beaucoup, je me souviens à peine de l'avoir rencontrée avant de venir vivre chez elle, du coup même si elle était bizarre je saurais pas vous dire. Mais pourquoi vous me demandez ça ? Vous la soupçonnez ? »
Ayant déjà compris qu'il risquait davantage de cracher le morceau que son partenaire, Azura reporte son regard sur Tori. Celui-ci entrouvre la bouche comme pour répondre à sa question mais, à nouveau, Jack le devance.
« Sois un gentil garçon et laisse-nous faire notre travail, d'accord ? Contente-toi de répondre à nos questions. Tu peux nous dire si quelqu'un est venu parler à ta tante ces derniers jours ? Ou si elle a passé un coup de fil que tu aurais entendu ?
– Pas à ma connaissance ...
– Tu veux dire que personne s'est arrêté ici depuis trois jours ? se moque gentiment Tori. Comment elle fait pour garder le bar à flot ?
– J'en sais rien, moi, rougit Azura. J'ai seulement vu Cherry.
– Oui, ta tante a mentionné sa ... présence répétée sur les lieux, confirme Jack. Bon, s'il arrive quelque chose ou si tu te rappelles de quoi que ce soit, enchaîne-t-il avant qu'Azura puisse le questionner davantage, passe au commissariat. Ils nous appelleront. Sur ce, si tu veux bien nous excuser ...
– On va chercher la demoiselle en question, complète Tori. Enfin, on le ferait si on savait où elle était. Mais on risque de se revoir, de toute façon, puisque ... »
Jack, qui faisait mine d'allumer une cigarette, s'interrompt pour le fusiller du regard. L'autre met un moment à comprendre pourquoi. Il se pince les lèvres et pivote vers Azura pour se rattraper.
« Enfin, qui sait ? Il a raison, sois gentil et te mêle pas de ça. La police s'occupe de tout ! »
Un pan de son manteau se soulève en même temps que sa main dans ce qu'Azura suppose être un signe d'au-revoir. À bout de patience, Jack l'attrape par le bras pour l'entraîner à sa suite. Azura les regarde s'éloigner sans savoir quoi penser de tout ça. Holly les a prévenus ; la police l'a à l'œil depuis le décès de Merryland. S'ils risquent de se revoir, est-ce que ça ne voudrait pas dire qu'ils sont sur une piste sérieuse ?
Il secoue la tête, préférant ne pas trop réfléchir à ce que sa supposition implique. Lorsqu'il gagne enfin l'intérieur de la Petite Sirène, il y trouve Holly seule. Le regard qu'elle lui lance est moins dépité que celui de la veille. Azura a beau chercher, il ne trouve en effet aucune trace de la jeune femme à la mèche écarlate. Même les toilettes sont silencieuses.
« Eh, la salue-t-il, préférant ne pas mentionner les détectives. Cherry est pas là ? »
Holly hausse les sourcils. Son habituelle cigarette éteinte manque de tomber de sa bouche lorsqu'elle prend la parole.
« Tu retiens le prénom d'une inconnue mieux que celui de ta tante ? T'es amoureux ou quoi ?
– Hein ? Non ... »
Azura croise les bras, embarrassé. Il la trouve juste cool.
« Elle cuve, explique Holly. J'aime autant qu'elle le fasse à la maison.
– Elle vit chez toi ?
– Ouais. »
Il attend des détails qui n'arrivent pas. Holly tourne rageusement la page du journal qu'elle tient dans les mains. Le papier manque de s'arracher.
« Conneries » crache-t-elle.
Elle le jette sur le comptoir et soupire. Azura penche la tête pour lire le premier article.
L'association des pêcheurs de Sunnyside en danger ?
L'avenir de l'association des pêcheurs de Sunnyside n'a jamais paru aussi incertain que suite au récent décès de son vice-président et principal porte-parole, M. Frank Merryland. Une bonne nouvelle pour le propriétaire de l'usine de ...
« Tout est une conspiration, avec elle, coupe Holly.
– La Fouine ? »
Elle hoche la tête. Azura revient à l'article pour le survoler des yeux. A priori, la mort de ce Frank Merryland risque d'entraîner une réaction en chaîne. L'association ne tenait debout que grâce à sa présence et à sa fortune et, sans lui, risque de tomber en miettes (une histoire de désaccords internes qu'Azura ne comprend pas tout à fait) et de laisser le directeur d'il ne sait trop quelle usine continuer à détruire l'océan en toute impunité. La Fouine a beau lui avoir laissé une sale impression, elle n'a pas tort de voir une conspiration là-dessous. Même sans savoir ce que sait Azura, le lien est évident. Ce truc ne vise pas n'importe qui.
« Qu'est-ce que t'en penses, toi ? demande-t-il à Holly.
– Moi ? Rien. Je te l'ai déjà dit, on se portera tous mieux si on se mêle pas de ça. La mort a des oreilles.
– Elle doit avoir un visage aussi.
– Et pas un joli. Arrête de remuer tout ça, tu veux ? J'ai pas envie d'être obligée d'annoncer ta disparition à tes parents. »
Azura déglutit. Si même Holly raisonne ainsi, toute la ville doit avoir écarté la thèse d'une maladie. Il espère juste que la police fait aussi bien son travail que le prétendent Tori et Jack.
« Ouais, cède-t-il. Dis, je peux te parler cinq minutes ? »
Holly fronce les sourcils, méfiante.
« Je te donnerai pas d'argent de poche. C'est pas dans le deal.
– C'est pas ça ! C'est pour une amie. Elle ...
– Tu t'es fait une amie ? C'est bien, ça. »
Ses propos ont l'air sincères. Azura ne peut s'empêcher de trouver ça limite bizarre.
« Elle travaille au Wendy's, poursuit-il, sauf que c'est l'enfer là-bas. Elle va pas trop bien, alors ... »
Il s'interrompt, s'attendant à ce que Holly comprenne la suite d'elle-même. Celle-ci se contente de hausser les sourcils pour l'encourager à continuer. Azura aurait préféré ne pas avoir à prononcer ces mots.
« Tu, euh ... bafouille-t-il. T'as jamais pensé à prendre une serveuse ?
– Oh. Non. »
Elle s'empare d'un verre pour le nettoyer comme si la discussion était close. Azura écarquille les yeux.
« Mais t'en as pas marre de passer tout ton temps ici ? tente-t-il. Tu pourrais ... Je sais pas, tu pourrais t'occuper de Cherry pendant que quelqu'un fait tourner le bar. Ou d'autre chose. Avoir une vie, tout ça.
– C'est pas que je veux pas, Azura. J'ai juste pas les moyens. Et Cherry a pas besoin qu'on s'occupe d'elle. Elle a besoin d'une cure.
– Donc elle a besoin qu'on s'occupe d'elle. »
Contrariée, Holly secoue la tête. La situation de Cherry la préoccupe réellement. Azura continue sur sa lancée.
« Peut-être que ce serait plus facile pour elle si elle avait pas besoin de venir ici pour te voir. »
Holly roule son torchon en boule pour le jeter dans l'évier. L'espace d'un instant, Azura redoute d'être allé trop loin.
« Ouais, lâche-t-elle après un silence tendu. Je sais.
– Et ça ramènera peut-être du monde de voir de nouvelles têtes.
– Ah ouais ? Elle est mignonne ?
– Euh ... ouais ... »
Azura rougit. Ce n'est pas ce qu'il entendait par là.
Les poings sur les hanches, Holly soupire. Elle sonde le vide en pesant le pour et le contre.
« Essaye de la ramener ici un de ces jours, décide-t-elle. Je verrai bien si ça colle.
– Sérieux ? Merci !
– Ouais, ouais, bah, me remercie pas trop vite. C'est pas dit qu'elle me convienne. »
Holly balaie l'air d'un geste de la main, l'air contrariée mais aussi un peu gênée. Elle fronce les sourcils en croisant le regard d'Azura.
« Et arrête avec ce sourire de crétin. Tu me fais froid dans le dos. »
Les bras croisés sur son volant, Jack Kingsman contemple le vide avec l'air de vouloir y creuser un trou. La jeune femme mentionnée par la gérante du bar demeure introuvable, mais ce n'est pas ce qui le dérange le plus. Il est presque certain de ne rien en tirer de toute façon. Non, ce qui le ronge, c'est cet instinct primaire qui bouillonne dans son ventre. La sensation de passer à côté de l'essentiel. La sensation que quelque chose, quelque part, se prépare sans qu'il puisse rien faire pour l'en empêcher.
« T'en veux un, boss ? »
Assis sur le siège passager, Tori tend un long biscuit au bout couvert de Nutella dans sa direction. Jack grimace.
« Arrête de manger dans la voiture. Et arrête aussi de m'appeler comme ça, tant que t'y es.
– Quoi, boss ? C'est l'habitude, désolé. Mais tu sais, si tu mangeais plus de chocolat, tu te dériderais peut-être un peu. Je dis ça pour toi ! se défend Tori devant son regard assassin. Tes filles se plaignent toujours que tu passes trop de temps au travail.
– Je sais, Tori. C'est de ma famille que tu parles. »
Le jeune détective tranche son biscuit d'un coup de dents sans relever. Il regarde par la fenêtre, songeur, tandis que Jack pose son front contre ses avant-bras avec un soupir exaspéré. Quatre ans. Quatre putain d'années qu'ils cherchent à comprendre ce qui se passe dans cette foutue ville et pas le moindre début de piste. Comment regarderait-il Natasha et leurs enfants dans les yeux alors qu'il pourrait passer ces précieuses heures à traquer cette saloperie de tueur ?
« Tu te souviens, quand on devait juste jouer les médiateurs dans des disputes de couples ou chercher les caniches des petites vieilles ? médite Tori devant le paysage grisâtre de la ville. Ça me manque.
– Ça nous manque à tous, Tori. »
Sur ces mots, Jack remet la voiture en marche. Il est temps de faire leur rapport. Temps de tracer une nouvelle route qui débouchera sans nul doute sur une impasse.
Il fronce les sourcils. Dans le rétroviseur, les rues désertes du centre-ville s'éloignent doucement.
Azura se laisse tomber sur la banquette, épuisé. De là, il apprécie l'espace propre qui s'étend devant lui. Cette fois, il a terminé. Plus jamais il ne touchera un aspirateur de sa vie.
Il sort son téléphone de sa poche pour parcourir les messages en attente.
De: Morgane
Bien rentrée. Merci encore. Je te remercierai proprement dès que j'irai mieux. Bisous.
À: Morgane
c'est pas la peine
j'ai pas fait ça pour l'argent ou la gloire
De: Morgane
Tout de même. J'insiste.
À: Morgane
seulement si ça te fait plaisir alors
De: Morgane
C'est le cas ;)
Azura a un sourire en coin. Il lui parlera de la Petite Sirène à son retour. Pour l'instant, mieux vaut qu'elle ait l'esprit en paix.
Il passe à la suite.
De: Gaël
pardon pour tout à l'heure
tu veux aller sur le toit du monde demain ?
et la prochaine fois tu me montreras où tu vis \(^-^)/
À: Gaël
le toit du monde est encore up ??
De: Gaël
oui
tu sais bien qu'ils tiennent jamais leurs promesses dans cette ville
À: Gaël
holy cow
De: Gaël
alors ?
À: Gaël
carrément
ce sera romantique
De: Gaël
hahaha
t'enfuis pas cette fois
Azura se mord les lèvres. Repenser au contact de ses doigts sur les siens suffit à l'embraser, alors à ce qui est arrivé la dernière fois qu'ils sont montés là-haut ...
Il se couvre les yeux d'un avant-bras en soupirant. Ça n'aurait jamais dû se passer comme ça. Il aimerait lui tenir la main. L'embrasser encore. Si seulement il n'avait pas été aussi dégonflé.
Non, il ne s'enfuira pas cette fois.
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