- C'est fini, annonça respectueusement une voix. Tout est opérationnel.

Aêr hocha la tête, et le scientifique qui se tenait derrière elle laissa tomber les courroies qui maintenaient ses nouvelles ailes pendant l'opération. La jeune cheffe les déploya doucement, découvrant leurs reflets irisés, afin de tester les mécanismes. Elle sembla satisfaite et le scientifique sortit sans demander son reste, laissant Aêr seule avec le Chef, qui avait observé l'opération en silence.

- Il te faut autre chose ? Demanda le Chef de sa voix grave.

- Une nouvelle monture. Répondit Aêr d'une voix égale. Et l'assurance que personne n'approchera d'elle, ni de mon matériel.

- Entendu.

*****

Aêr observait la gigantesque bête d'ébène qui se débattait devant elle avec fureur, tenant à distance les agents terrifiés qui étaient missionnés de la tenir. Son long cou fin se tordait dans tous les sens pour échapper aux cordes, et des griffes acérées ornaient la pointe de ses gigantesques ailes. D'épaisses écailles protégeaient son corps en une armure solide, et ses dents étaient comparables à de larges épées courbes. Elle était bipède, et possédait une queue préhensile assez épaisse. En apparence, la bête ne semblait menaçante que par sa taille, mais elle était en réalité capable d'accomplir des ravages.

- C'est la monture de mon dernier remplaçant ? Questionna la guerrière.

- Non, ladite monture est en reconditionnement. Expliqua calmement le Chef qui observait lui aussi le monstre. Celle-ci n'a jamais été montée. Elle n'était pas censée naître et nous n'avions pas la place de la garder ici, donc elle a été placée dans un enclos à part, et n'a jamais été manipulée. Je l'ai faite revenir depuis Dresde pour toi.

- C'est une femelle ? Observa Aêr.

Le Chef acquiesça, et surprenant le regard brillant de son alliée, il fit signe aux agents de lâcher la bête. Celle-ci envoya valser cordes et courroies, et après avoir chasser les hommes qui avaient tenté de la contenir, elle se tourna vers Aêr, qui l'observait calmement.

Puis cette dernière se mit en mouvement. Brusquement, elle se retrouva au pied de la créature qui hurla de rage et de surprise. Aêr bondit sur l'une de ses pattes et, rapidement, s'aidant quand il le fallait de sa dague, elle se hissa au niveau du flan de la bête, qui s'agita de plus belle. La créature étendit ses larges ailes et prit son envol, tentant de désarçonner Aêr. Mais la guerrière avait de l'expérience, et elle ne se laissa pas avoir. Elle s'agrippa fermement et tient bon.

La bête se mit à tournoyer telle une torpille dans les airs, tandis qu'Aêr remontait le long de son dos. Quand elle fut à niveau, elle appuya sa lame dans un creux près du crâne de la créature, et la força à plonger tête la première vers le sol. La bête secoua sa tête dans tous les sens, et Aêr lâcha prise un instant, ce qui permit au monstre de se retourner. La créature se rattrapa au dernier moment et vola au raz du sol un instant. Aêr cria une instruction à l'un des agents, qui ne tarda pas à lui lancer une épaisse corde, coupée en son milieu par une chaîne hérissée de picots métalliques. La jeune fille l'attrapa, et d'un geste habile, parvient à la placer sous la gorge de la créature. Puis Aêr saisit sa dague, et la planta violemment dans la nuque de la bête, qui ouvrit sa gueule en grand pour hurler. Sa tortionnaire en profita pour lui passer l'étrange corde entre les mâchoire de la bête, s'aidant du manche de sa dague pour ne pas tomber. Les picots métalliques saignèrent la langue de la créature qui réagit directement. Elle rua dans les airs, et tenta dans un dernier recours de faire tomber Aêr, mais ne réussit qu'à renforcer l'action de la chaine dans sa gueule.

Finalement, la créature céda. Elle se redressa, et obéit à sa nouvelle propriétaire, qui lui ordonnait de se poser. Ceci fait, Aêr retira sa dague de la nuque de la bête, et attachant un anneau les deux extrémités de la corde pour qu'elle ne s'enlève pas, elle glissa au sol, ses cheveux en bataille, et souffla un instant pour laisser le temps à son rythme cardiaque de ralentir.

Puis elle s'approcha du Chef, qui avait contemplé la scène d'un œil satisfait, en tenant sa monture par les rênes qu'elle lui avait passé de force.

- Cette monture me convient. Annonça Aêr à son allié. Tu pourras faire apporter le matériel dans mon ancienne résidence, je serai prête à reprendre mon poste dans deux jours.

L'homme, toujours masqué, acquiesça. Et tandis qu'Aêr quittait les lieux, sa monture derrière elle, le Chef esquissa un rictus. "Une chose de faîte" pensait-il alors.