7 - Réunion pour la survie
Le 18 avril, tout se met en place. J’ai passé les dernières semaines à observer, à écouter et à comprendre les dynamiques de la classe. Aujourd’hui, c’est l’heure de récolter les fruits de ces efforts.
Dans une salle vide de l’école, j’ai réuni la moitié de la classe D, ces élèves indécis qui n’ont encore pris parti ni pour Kushida ni pour Akagami. Ce sont ceux qui se tiennent à l’écart des groupes et des luttes d’influence, la majorité silencieuse.
À mes côtés, Chiaki, Igor, et Yinghua me soutiennent. Hirata est là aussi, mais uniquement en tant que témoin officiel. Sa présence donne une certaine légitimité à cette réunion. Pourtant, je sais qu’il est ici pour une autre raison : il me fait confiance.
Hirata est un homme compliqué. Selon mon intuition, il a perdu quelqu’un d’important, un ami, peut-être plus, et cette perte semble guider chacune de ses actions. Il est obsédé par l’harmonie de la classe et serait prêt à tout pour la préserver, y compris à utiliser la violence si nécessaire.
C’est pour ça que je me suis rapproché de lui. Pas par manipulation, mais parce que je sais qu’il est essentiel à la survie de cette classe. Il a l’influence et le charisme, mais il manque de pragmatisme. Et moi, je peux fournir ça.
Je me tiens devant eux, les bras croisés, évaluant les visages devant moi. Certains sont anxieux, d’autres curieux, mais tous sont prêts à écouter.
— Merci d’être venus, dis-je pour commencer.
Un murmure traverse l’assemblée. Je ne perds pas de temps et plonge directement dans le vif du sujet.
— Vous êtes ici parce que vous ne voulez pas vous faire embarquer dans les jeux de pouvoir de Kushida ou d’Akagami. Vous voulez une alternative, une façon de survivre sans vous faire écraser.
Je marque une pause, laissant mes mots s’imprégner.
— Notre classe a commencé avec 100 000 points. Aujourd’hui, regardez autour de vous. Certains dépensent sans réfléchir, d’autres cherchent à manipuler ou à dominer. Pendant ce temps, nous perdons des points chaque semaine. Si on continue comme ça, à la fin du mois, on sera à zéro. Et vous savez ce que ça signifie.
Je capte leur attention.
— Mais il y a une solution.
Je commence à donner des exemples concrets, utilisant les informations que j’ai récupérées auprès des harceleurs dont je me suis débarrassé.
— Pourquoi pensez-vous que ce système S est là ? Ce n’est pas juste une question de mérites ou de notes. C’est un jeu de survie, un test pour voir qui est capable de s’adapter.
Je continue, les poussant à se poser les bonnes questions sur les événements récents :
— Pourquoi les enseignants ne nous aident-ils pas ? Pourquoi la classe D existe-t-elle si ce n’est pas juste une question de compétences académiques ou sportives ?
Les murmures s’intensifient. Certains commencent à hocher la tête.
— L’objectif n’est pas de devenir la classe A, pas tout de suite. Ce serait idiot de viser si haut alors qu’on ne sait même pas marcher correctement. Non, notre objectif, c’est de survivre. Et pour ça, on doit commencer par éviter de perdre nos points.
Je croise les bras, les regardant un par un.
— À partir de maintenant, vous êtes la voix de la majorité silencieuse. Vous êtes ceux qui vont influencer la classe de l’intérieur. Pas en prenant des décisions brutales ou en vous opposant frontalement à Kushida ou Akagami, mais en restant unis, en défendant nos points, en évitant les comportements stupides.
Je termine sur une note claire et déterminée :
— Si certains veulent jouer les brebis galeuses, laissez-les faire. Ils tomberont d’eux-mêmes. Nous, on doit se concentrer sur l’essentiel : ne pas finir à zéro.
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À la fin de mon discours, je vois les expressions changer. Il y a moins de doute et plus de résolution. La graine est plantée.
Hirata se lève et s’adresse au groupe :
— Wilfried a raison. Ce système est fait pour nous diviser. Mais si on reste unis, on peut surmonter ça.
Je note son utilisation du "on". Il se positionne avec nous, même si officiellement, il reste neutre.
Quand la réunion se termine, je sens que les choses sont en marche. Ces élèves, la moitié de la classe D, sont maintenant engagés, même s’ils ne le réalisent pas encore pleinement.
En sortant, Chiaki me glisse à l’oreille :
— Bien joué, Wilfried.
Je lui réponds avec un sourire en coin :
— Ce n’est que le début. Maintenant, on va voir si on peut survivre à ce mois.
Le 19 avril, notre groupe Meifuka est enfin au complet. Chiaki a accepté de nous rejoindre, après de nombreuses discussions et un travail de persuasion discret. Elle reste réservée, préférant cacher ses véritables capacités, mais c’est son choix, et je le respecte. L’essentiel, c’est qu’elle soit là.
Le groupe Meifuka est désormais composé de Chiaki, Igor, Yinghua, Hirata – bien qu’il soit un membre à part, un témoin de nos actions plutôt qu’un acteur direct – et moi-même. Notre objectif n’est pas de briller ni d’écraser les autres, mais de bâtir une stratégie durable pour que la classe D ne sombre pas.
Nous avons choisi une salle peu fréquentée pour cette réunion, loin des oreilles indiscrètes. Hirata est là, non pas pour nous surveiller, mais pour garantir que tout reste dans le cadre des règles. Je préfère que ce soit lui qui observe ce que nous faisons, plutôt qu’Horikita. Elle aurait tout simplement rejeté notre approche, préférant imposer ses propres idées.
Je commence la réunion en dressant un bilan rapide de la situation.
— Maintenant que Chiaki nous a rejoints, on est un groupe solide. Je ne vais pas vous mentir : ce qu’on fait ici, ce n’est pas pour atteindre la classe A tout de suite. C’est pour survivre.
Je marque une pause, observant les réactions. Chiaki est assise calmement, Igor croise les bras avec un air concentré, et Yinghua acquiesce doucement. Hirata, comme à son habitude, reste silencieux, son visage neutre mais attentif.
— Vous avez tous remarqué que notre classe est divisée. Kushida et Akagami s’affrontent pour le contrôle, mais ce n’est qu’un jeu de pouvoir. Pendant qu’ils se battent, les points de la classe continuent de diminuer. Si on ne fait rien, on sera à zéro avant la fin du mois.
Je prends une inspiration et continue, d’une voix posée mais ferme :
— Ce que je vous propose, ce n’est pas de choisir un camp. C’est de devenir une force d’influence, un groupe qui travaille dans l’ombre pour protéger nos intérêts.
Le rôle de chacun
Je commence à attribuer des rôles, en tenant compte des talents et des préférences de chacun.
— Igor, tu es notre rempart. Tu restes vigilant, surtout contre ceux qui cherchent à semer la pagaille.
Il hoche la tête, l’air sérieux.
— Yinghua, tu as un sens aigu de l’observation. Utilise-le pour surveiller les comportements de la classe et repérer les problèmes avant qu’ils ne deviennent ingérables.
Elle sourit légèrement, mais ses yeux montrent qu’elle a compris.
— Chiaki, ton talent est évident, même si tu veux le cacher. Personne ne te forcera à te dévoiler ici. Mais sache que tu peux toujours contribuer en analysant les situations avec ton calme et ta discrétion.
Elle incline légèrement la tête, acceptant mon point de vue sans un mot.
Enfin, je me tourne vers Hirata.
— Hirata, je sais que tu es ici pour t’assurer que tout reste en ordre. Et je veux que ça continue. On a besoin de toi pour garantir que ce qu’on fait n’attire pas l’attention de la direction.
Il sourit doucement et répond :
— Je suis là pour vous soutenir tant que ça reste bénéfique pour la classe.
Une fois les rôles définis, je présente le plan.
— Nous devons éviter que les points de la classe tombent à zéro. Pour cela, nous allons :
1. Identifier les élèves qui causent le plus de problèmes et essayer de limiter leurs dégâts.
2. Repérer les opportunités pour gagner des points supplémentaires, que ce soit en participant aux évaluations ou en profitant des failles du système.
3. Influencer les indécis pour qu’ils évitent les comportements nuisibles.
Je fais une pause pour évaluer leurs réactions.
— L’objectif, c’est de survivre. Si on reste soudés et qu’on joue intelligemment, on peut non seulement garder nos points, mais aussi poser les bases pour monter plus tard.
La conclusion
À la fin de la réunion, Hirata se lève et prend la parole.
— Ce que Wilfried propose est intelligent. Ce n’est peut-être pas la solution pour atteindre la classe A tout de suite, mais c’est un bon départ pour que la classe D reste compétitive.
C’est tout ce que j’espérais entendre de lui. Hirata est le leader officiel, et son approbation donne du poids à nos actions.
Quand tout le monde se lève pour partir, Chiaki s’attarde un peu. Elle me regarde avec une curiosité discrète avant de dire :
— Tu joues bien tes cartes.
Je lui réponds avec un sourire en coin :
— On n’a pas le choix si on veut survivre.
Elle acquiesce avant de s’éloigner. Alors que je regarde les autres partir, je sens une certaine satisfaction. Le groupe Meifuka est prêt. Maintenant, il est temps de passer à l’action.
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