27 - Meitanjo se détend
Les vacances sont enfin là. Une pause bien méritée après un trimestre intense, où chaque jour semblait être une bataille, où chaque décision pouvait bouleverser l'équilibre fragile de notre classe. Mais aujourd'hui, il n'est pas question de stratégie, de points, ni de rivalités. Aujourd'hui, on est censés se détendre.
Je dis bien "censés", parce que, contrairement à mes camarades, je n'ai jamais su ce que signifiait vraiment ce mot. Pour moi, le calme n'est qu'une façade, un moment où les autres baissent leur garde... mais pas moi.
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Un groupe disparate
Nous sommes au bord d'une immense piscine, une sorte d'oasis artificielle en plein cœur du complexe hôtelier où nous avons décidé de passer la journée. Le soleil tape fort, l'eau scintille, et tout le monde semble déjà dans l'ambiance des vacances.
Yinghua est la première à se jeter à l'eau, éclaboussant au passage Igor, qui râle tout en ajustant ses lunettes de soleil. Chiaki est allongée sur une chaise longue, feignant de lire un livre tout en jetant des regards discrets à Hirata, toujours impeccablement souriant.
La majorité silencieuse - ce groupe d'élèves qui suit sans faire de vagues - est là aussi, répartie un peu partout autour de la piscine. Ils parlent peu, se contentant d'observer et de suivre l'ambiance générale.
Et puis il y a Hishida. Lui, je l'avais vu venir de loin. Toujours à vouloir s'incruster dans ce genre de moments, comme s'il avait un radar pour détecter les activités où il n'était pas invité. Et, bien sûr, il ne pouvait pas venir seul. Tokito Youka est là aussi, rayonnante, attirant l'attention comme un aimant.
Je voulais les exclure, eux deux. Ça aurait été plus simple, plus calme, sans leurs présences perturbatrices. Mais le charme de Tokito et l'attitude détachée de Hishida ont eu raison de moi. Les votes ont tourné contre moi. Je suis en minorité.
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La scène
- Wilfried, tu ne viens pas te baigner ? demande Hirata, avec son éternel sourire bienveillant.
Je suis debout à l'écart, habillé de la tête aux pieds dans une combinaison waterproof technologique noire. Une pièce unique, sur mesure, dotée de gants et de lunettes tout aussi sophistiqués.
- Je suis bien ici, merci, je réponds, ajustant les gants et vérifiant une dernière fois que chaque élément de la combinaison est en place.
Nager ? Pas question. S'exposer ? Encore moins. Contrairement à eux, je ne suis jamais vraiment en vacances. La détente est un luxe que je ne peux pas me permettre, pas entièrement. Cette combinaison n'est pas qu'un choix vestimentaire : c'est une armure.
Yinghua, toujours dans l'eau, éclate de rire.
- Tu sais, tu ressembles à un agent secret ou à un extraterrestre avec cette tenue !
Je lève un sourcil derrière mes lunettes. Être comparé à un extraterrestre ? Pourquoi pas.
Tokito s'approche, un sourire éclatant sur le visage, et se penche légèrement en avant.
- Pourquoi tant de précautions, Wilfried ? Tu crains qu'on te jette à l'eau ?
Sa voix est douce, presque mélodieuse, mais je sais que derrière ce sourire se cache une volonté de percer mes défenses. Elle adore jouer à ce jeu-là.
- On n'est jamais trop prudent, dis-je, mon ton neutre.
Elle rit doucement.
- Prudent, ou parano ?
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La tentative de détente
La journée avance, et malgré moi, je me retrouve entraîné dans l'atmosphère détendue. Igor et Hishida organisent un petit concours de plongeons, chacun essayant de surpasser l'autre en faisant le plus de figures acrobatiques possibles avant de toucher l'eau.
- Allez, Wilfried, montre-nous ce que tu sais faire ! lance Igor, sortant de l'eau, dégoulinant mais souriant de toutes ses dents.
Je secoue la tête.
- Je passe mon tour.
Chiaki, qui a fini par ranger son livre, s'approche à son tour.
- Tu ne comptes vraiment pas te détendre, hein ?
Je la regarde. Ses yeux sont curieux, peut-être un peu inquiets. Mais elle ne comprend pas. Personne ici ne comprend ce que signifie pour moi de lâcher prise.
Hirata intervient, toujours conciliant :
- C'est comme ça qu'il se détend, Chiaki. En gardant le contrôle. N'est-ce pas, Wilfried ?
Je hoche la tête. Oui, garder le contrôle. C'est ça.
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Un moment de relâchement
Mais même moi, je ne suis pas invincible face à l'ambiance générale. À force d'observer les autres, de les voir rire, courir, jouer, je sens une tension en moi se relâcher, juste un peu.
Tokito s'installe à côté de moi, un verre à la main.
- Tu devrais essayer, juste une fois, dit-elle doucement. Personne ici n'est ton ennemi.
Je tourne la tête vers elle, mes lunettes masquant mon regard.
- Peut-être pas. Mais ce n'est jamais aussi simple.
Elle sourit, mais cette fois, il y a une pointe de sérieux dans ses yeux.
- C'est toi qui compliques les choses. Pas nous.
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Un imprévu
Alors que tout semble se dérouler sans accroc, une voix s'élève. Un élève de la majorité silencieuse glisse et tombe dans l'eau, provoquant un grand éclat de rire.
Mais quelque chose dans la scène m'alerte. Une sensation, une intuition. Un détail que les autres ne remarquent pas.
Je me lève. Tokito me regarde, intriguée.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Rien. Juste... une impression.
Hishida, qui a tout observé depuis le bord de l'eau, s'approche à son tour.
- Toujours en alerte, hein ? Tu devrais te détendre, comme tout le monde.
Je l'ignore. L'impression persiste, mais je choisis de ne rien dire. Pour l'instant.
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La fin de la journée
Le soleil commence à décliner, et peu à peu, le groupe se disperse. Yinghua et Igor continuent leurs plongeons, tandis que Chiaki et Hirata discutent calmement sur les chaises longues.
Tokito reste près de moi, toujours souriante, toujours attentive.
- Alors, Wilfried ? Toujours aussi tendu ?
Je la regarde une dernière fois, et cette fois, je me permets un léger sourire.
- Disons que je me détends... à ma façon.
Elle rit doucement, et pour la première fois, je me surprends à apprécier sa présence. Peut-être que, finalement, même pour moi, la détente est possible. Mais pas comme les autres. Jamais comme les autres.
Une nuit d'eau et de silence
La nuit est tombée depuis plusieurs heures. Le calme règne enfin sur le complexe. Les rires, les éclats de voix, les plongeons incessants... tout cela appartient à la journée écoulée. Maintenant, c'est mon moment.
Je suis seul.
Enfin.
Je me tiens au bord de la piscine, toujours vêtu de ma combinaison waterproof. Ce n'est pas une simple barrière contre l'eau, c'est une seconde peau, une protection contre le monde extérieur. Ici, dans cette eau silencieuse, je peux être moi-même, loin des regards, loin des attentes.
Mon objectif est simple : battre mon propre record de nage. Un exploit personnel, presque insignifiant pour le commun des mortels, mais essentiel pour moi. Ce record, failli devenir un record du monde, reste une barrière que je me suis promis de franchir.
Je respire profondément, ajuste mes lunettes technologiques, et plonge.
L'eau m'enveloppe immédiatement, froide mais apaisante. Ici, sous la surface, tout est différent. Le monde perd son poids, ses complications. Chaque mouvement est calculé, chaque battement de bras et de jambes est précis, méthodique.
Les minutes passent. Je perds la notion du temps, me concentrant uniquement sur ma respiration en apnée, sur le rythme régulier de mon corps. C'est ce que j'aime le plus : rester en apnée. Repousser mes limites. Tester jusqu'où je peux aller.
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Une heure plus tard
Je ressors de l'eau après une heure. Mon souffle est légèrement court, mais mon esprit est en paix. J'ai frôlé le record, encore une fois. Pas encore assez, mais ça viendra.
Je retire mes lunettes, prêt à savourer ce moment de solitude... mais une silhouette attire mon attention.
Okita.
Elle est là, au bord de la piscine. En maillot. Rien d'étonnant pour quelqu'un qui se trouve près d'une piscine, mais... c'est trop exposé.
Un frisson me traverse. Pas de froid, mais de cette sensation étrange que quelque chose ne va pas. Pourquoi est-elle ici ? Pourquoi maintenant ?
Elle ne me regarde pas directement. Elle semble absorbée par ses pensées, ou peut-être fait-elle semblant. Quoi qu'il en soit, sa présence perturbe l'équilibre de ma nuit.
Pourquoi je m'inquiète ? Elle fait ce qu'elle veut, après tout. Ce n'est pas comme si elle était une menace.
Et pourtant, cette pensée ne me rassure pas.
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L'intrusion
Je me tourne pour récupérer ma serviette, prêt à partir. Mais une sensation de malaise persiste. Et c'est là que je les vois.
Hishida.
Tokito.
Et... tout Meitanjo.
Ils sont là, à l'entrée de la piscine. Certains chuchotent, d'autres me fixent avec des expressions variées - curiosité, amusement, surprise.
Mon cœur se serre. Qui m'a dénoncé ?
Je serre les poings. Je suis censé être seul ici. Cet espace, cette nuit, ce moment... c'était le mien.
- Qu'est-ce que vous faites là ? demandé-je d'une voix froide, tranchante.
Hishida sourit, son éternel sourire narquois collé au visage.
- On passait juste par là, Wilfried. Quelle coïncidence, non ?
Je ne réponds pas. Ce n'est pas une coïncidence. Quelqu'un m'a dénoncé.
Tokito s'approche doucement, ses yeux pétillants d'un mélange de malice et de curiosité.
- Je ne savais pas que tu aimais nager la nuit, Wilfried. C'est... fascinant.
Elle joue avec ses mots, comme toujours. Elle sait que je déteste être observé.
Je respire profondément. Garder mon calme. Ne pas montrer que je suis affecté.
- Vous n'avez rien à faire ici.
Hishida hausse les épaules.
- On pourrait dire la même chose de toi.
Je fixe chacun d'eux, un par un. Qui a parlé ? Qui a osé révéler que je venais ici la nuit ?
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L'expulsion
Dans mon esprit, les rouages tournent à toute vitesse. Quelqu'un ici a trahi ma confiance, volontairement ou non. Et je ne peux pas laisser ça passer.
- Qui m'a dénoncé ? demandé-je d'un ton glacial.
Silence. Personne ne répond. Certains baissent les yeux, d'autres échangent des regards furtifs.
- Vous pensez que c'est un jeu ? je poursuis. Je vais découvrir qui est responsable. Et cette personne sera expulsée.
Les murmures cessent. Même Hishida, pourtant si sûr de lui, perd un peu de son sourire.
- Expulsée ? répète-t-il, feignant l'innocence.
- Oui. Mon regard est fixe, impitoyable. Je ne tolère pas la trahison.
Tokito croise les bras, un léger sourire aux lèvres.
- Toujours aussi extrême, Wilfried. Mais... peut-être que cette nuit n'est pas une trahison. Peut-être que c'est juste... un malentendu.
Je la fixe. Son sourire ne faiblit pas. Elle est douée pour jouer à ce jeu, mais moi aussi.
- On verra.
Je me détourne, récupère ma serviette, et me dirige vers la sortie.
Cette nuit, ils ont franchi une limite. Et moi, je n'oublie jamais ceux qui franchissent mes limites.
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