Chapitre Vingts

Morgan m'a quitté quelques minutes plus tard pour aller je ne sais où. Je n'ai pas trop compris mais apparemment il participe activement aux tâches quotidiennes du camp et je ferai bientôt pareil. J'ai vraiment hâte de bouger. On m'a demandé de rester dans la tente rapiécée, qui est maintenant celle que j'occupe avec Morgan, pour me reposer. Étendue sur le lit de droite, je repense à tout se qui s'est passé depuis le mois d'août. J'ai eu mon premier rendez-vous, je me suis fait enlever par le Sous-Noyau et après j'ai découvert mes pouvoirs. J'ai décidé d'abandonner ma famille alors que j'avais le choix de rester. "Pas vraiment, mais c'est toi qui le dit." La petite voix m'a manqué malgré ses agaçantes réflexions, c'est la seule à me comprendre vraiment. Elle fait partie de moi. Reprenons le décompte des catastrophes...

Plusieurs bases ont été détruites par la Garde, Juliette est morte. Une boule se forme à chaque fois que je pense à elle. Pourquoi voulait-elle mourir ? Ce dernier mot est âpre et amer sur ma langue. Peut-être attendait-elle ça pour mettre fin aux choses qu'elle a subit et qu'elle allait subir ? Je trouve qu'avoir peur de vivre dans notre monde est tout à fait compréhensible mais il ne faut pas baisser les bras sinon nous les faisons gagner, eux, ceux qui contrôlent tout, tout notre avenir. Un sentiment de haine pur a grandit en moi depuis un mois. Je ne l'ai pas vu arriver, il s'est immiscé dans mon esprit par mégarde. Je ne l'ai jamais souhaité et ne veux pas que ce soit ça qui décide de mes actions. La vengeance ne me conduira nulle part même si elle brûle en moi comme un feu incandescent. Je veux que la société change pour le bonheur que cela apportera à tous et non pour servir de revanche à ce qu'ils ont fait. Non ! Je ne veux pas de ça ! La guerre doit finir, le monde doit sortir de ce coma dans lequel il est tombé. Il est temps de se réveiller !

Pour ça, il faut que je me détache de tout. Le Sous-Noyau n'est pas ce qu'il me faut. Je dois me faire mes propres alliés, faire mes propres choix. Morgan est celui qui m'aidera et les filles aussi, si j'arrive un jour à les revoir. Tom pourrait en faire partie. Ma mère serait d'accord avec moi, Jules aussi. Il faut que je les revoie ! Oui, il faut que je fasse ça ! Je sais enfin quoi faire !

Je me lève précipitamment ce qui m'arrache un cri de douleur. Saleté de jambe ! Je cours jusqu'à la tente d'Hélène, malgré les protestations de mon membre, personne. Je regarde autour de moi pour la repérer ou alors quelqu'un d'autre. Je distingue une silhouette que je connais bien et vais la rejoindre.

- Morgan ! crié-je.

Il est surpris de me voir mais je n'ai pas le temps pour ça.

- Viens, il faut qu'on parle !

Je l'entraine en dehors du camp vers les sources chaudes. Je m'arrête, essoufflée comparé à Morgan qui ne sue même pas. Il s'impatiente :

- Tu m'expliques ce que tu as, ou quoi ?

- Il faut partir.

- Quoi ?! panique-t-il.

- Ne t'inquiète pas, il n'y a rien de grave mais il faut qu'on retourne chez moi.

- Je ne te suis pas, là, dit-il dubitatif.

Je commence à lui expliquer que retourner à la base n'est pas prudent avec la Garde dans les parages et qu'il faut que j'aille voir ma mère. Mais je ne dis rien de plus. Il n'a pas besoin d'en savoir plus pour le moment. Je ne sais même pas où tout cela va nous mener, lui en dire d'avantage ne me fera qu'en douter un peu plus. Je sais qu'il ne sera pas d'accord.

- J'ai vraiment envie de revoir ma mère, je dois lui parler de quelque chose d'important.

- D'accord, mais on peut rester encore un peu le temps que tu ailles mieux.

- Je n'ai pas envie de m'éterniser. Tu sais bien qu'ils ne veulent pas de nous, enfin de moi mais c'est du pareil au même.

- Ne dis pas ça !

- Arrête de te voiler la face !

Je n'ai pas envie de lui parler comme ça. Mais je veux partir tout de suite. Le temps nous manque, on mettra déjà plusieurs jours à arriver au Noyau alors si la Garde arrive à nous retrouver parce qu'on n'est rester trop longtemps... Je ne pourrais jamais me pardonner d'avoir laisser ce petit camp se faire exploser. Jamais. J'abats ma dernière carte et insiste encore.

Il hoche la tête pour me montrer qu'il a comprit.

- Il faut qu'on s'en aille le plus tôt possible.

- Dis-moi vraiment ce qui se passe, Kate.

Ses yeux verts me sondent. Je suis mise à nu. Je ne veux pas lui dire que je pense faire la révolution à moi toute seule. Ce qui à l'air totalement ridicule mais je m'en fiche. Je n'arrive pas me détacher de son regard. Je n'arrive pas à lui mentir alors je déballe tout. C'est plus fort que moi. Pendant mon récit, il ne cille pas et m'écoute avec attention.

- Je sais que tu vas me dire que c'est idiot mais je sais que je dois le faire, finis-je.

- Je suis de ton avis.

Je suis sidérée par sa réponse. Je n'aurais jamais penser qu'il dirait ça. Il rit en voyant mon expression et ajoute :

- Bien avant que tu me dises ça, j'y pensais, et encore maintenant, mais je n'ai pas ta détermination. Kate, je te suivrai, quoi qu'il arrive.

C'est tellement inédit. Nous nous sommes beaucoup rapprocher mais je n'en savais pas encore l'étendue et maintenant quand je le vois, je sais qu'il ne bluffe pas. Nous sommes comme liés par le même désir, la même idée.

Je le prends dans mes bras. Je suis si heureuse qu'il m'ait compris. Il répond à mon étreinte et nous restons ainsi pendant quelques minutes. Je sens les pulsations de son cœur à travers le tissu. Elles accompagnent les miennes comme un écho familier. Dans ses bras, je me sens bien et en sécurité. Je crois qu'il est la seule chose qui ne m'est pas inconnue à ce stade. Je respire son odeur, un mélange de terre, de forêt et de vent frais. À travers lui je sens toute la nature, tout ce que je suis et ce que je voudrai être. Le doux chatouillis à mon poignet recommence et je me laisse porter par ce moment. Je ne perds pas le contrôle, je me maîtrise. Je sens toute les plantes autour de moi comme si nous étions connectées. J'inspire avec elles. Je vis à leur rythme. Je me détache de Morgan et ferme les yeux. C'est de cette façon que je vois mieux le paysage qui m'entoure. Dans ma tête. Je fais fleurir les jonquilles enfoncés dans le sol, je ravive l'éclat presque rouille des feuilles d'automne et rafraîchit l'herbe jaunit par le soleil. Si je pouvais choisir de vivre ainsi je le ferais. Je suis tellement en accord avec ce qui m'entoure. J'ai l'impression de me fondre dans le sol meuble sous mes pieds, de traverser chacune des veinures des arbres, d'être leur écorce forte qui les protège. Quelque chose de chaud me frôle la joue ce qui me ramène au présent. Mes yeux retrouvent les siens. Il sourit, le plus beau que je ne lui ai jamais vu.

- Je savais que tu pouvais faire bien plus, Katelynn.

Mon nom dans sa bouche est soyeux comme sa voix. Je préfère quand il m'appelle Kate alors qu'au début je détestais ça. C'est fou comme tout peut basculer en si peu de temps. Sa main revient sur ma joue et j'y cale ma tête. Je voudrais gravé ce moment au plus profond de mon esprit. Je n'ai envie que de ça pour le moment, du réconfort.

Quand sa paume se retire c'est pour se glisser dans mes cheveux encore un peu humide de ma baignade. Je lui prends le poignet pour qu'il ne l'enlève pas cette fois. Mon regard se pose sur ses lèvres pleines qui sont là comme pour m'inviter à m'approcher. Ce que je fais. C'est comme si un feu d'artifice éclatait dans mon ventre quand nos lèvres rentrent en contact. Elles se connaissent déjà et commencent leur bal appuyé. Ce n'est plus du désespoir ni de la tristesse. C'est tout autre chose cette fois c'est d'une tendresse infinie. Morgan essaye de me raisonner :

- On ne devrait pas...

Mais je ne le laisse pas terminer. Je l'embrasse encore. J'ai vraiment envie qu'il ressente le même besoin. Ses mains glissent sur mon cou et il nous séparent violemment.

- Kate, il ne faut pas. Tu le sais bien. Ce n'est pas ce que tu veux. Tu crois te sentir mieux en faisant ça. Je sais que tu as du chagrin alors ne me prends pas comme un moyen de consolation. C'est horrible de se sentir utiliser de cette façon.

- Ce n'est pas ça du tout, Morgan. Je ne suis plus triste, j'ai dépassé ça. Je ne t'utilise pas. Je t'embrasse parce que j'en ai envie et je sais que toi aussi.

- Tu en es sûre ? Je ne veux pas que tu me dises ça pour me rassurer.

- Je sais. La première fois j'étais désespérée mais pas maintenant. J'aime quand tu es là. Ça a toujours peut-être été comme ça ? Je ne sais pas. Mais aujourd'hui ce qui importe c'est que j'ai compris.

- Compris quoi ?

- Que je t'aime.

Il reste bouche bée face à ma révélation. Je ne m'étais pas non plus préparé à dire ça. C'est sortit tout seul. Est-ce vrai ? Au fond, je ne sais pas. Je ne reconnais pas la Katelynn qui a dit ça. Tout est brouillon dans ma tête. J'ai envie de revenir en arrière pour l'empêcher de dire une telle énormité ! " Tu l'as dit l'ami ! " J'ai envie d'étrangler cette voix qui a tout à fait raison. Ce que je m'en veux de ressentir comme une pointe de bonheur. Il ne faut pas. Je ne veux pas de ça. C'est faux. Je ne l'aime pas et pourtant j'ai dit le contraire. Je revisionne toutes ces fois où l'on s'est disputé pour m'en convaincre. Mais je n'arrive pas à l'une des conclusions que je m'étais fixé : ce n'est pas que je l'aime ou pas c'est que nous sommes pareil en fait. Similaires. Je suis tellement prise par mon débat intérieur que je suis surprise en entendant Morgan :

- Tu ne sais pas ce que tu dis !

Je suis tout à fait d'accord avec lui mais n'ose pas le prononcer.

Il s'éloigne et ajoute encore plus froidement :

- On part demain à l'aube, soit prête.

Je ne bouge pas d'un pouce. Le regardant partir avec une expression indéchiffrable. J'ai tout gâcher. Il avait réussit à s'ouvrir et je viens de le refermer. Juste à cause de ces quelques mots. Je ne sais même pas quelle partie de mon cerveau s'est risqué à faire ça ! J'ai vraiment envie de me donner des coups. "Oui moi aussi je penserai ça à ta place." J'ai envie d'écraser cette minable voix contre un mur !!!

Je suis tellement inconsciente et ignorante. Je ne sais même pas ce qu'est l'amour. Je l'ai confondue avec le peu d'affection que m'a procuré Morgan. Cette affection que ma mère ne m'a jamais offert, que personne ne m'a donné. Je suis une enfant perdue. Je l'ai toujours été et rien n'a changé. Je ne connais toujours rien à la vie mais je veux apprendre.

Demain, il faudra que je commence à réunir le plus de monde pour entreprendre de sauver notre monde. Le changement s'enclenche et il ne serra pas de tout repos. L'aventure sera difficile mais je veux réussir. Les épreuves seront rudes, tous seront épuisés. Mais à la fin tout sera mieux.

Tout paraîtra meilleur.

Fin de la première partie

Alors vos ressentis sur cette première partie ? Une fin de chapitre un peu mouvementée, n'est ce pas ?
J'attends vos avis et commentaires avec impatience sur ses vingts premiers chapitres ou alors sur ce dernier ci !
PtitZozio

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