Chapitre Sept {2}

Nous sortons, sur nos gardes. Il n'y a pas un bruit, ce qui m'effraie encore plus. La menace plane à chaque tournant de couloir. Nous avançons prudemment mais sûrement. La sortie est de plus en plus près. Morgan commence à enclencher le mécanisme mais se stoppe. Les sens en alerte. Il me prend le bras et pose sa main sur ma bouche si rapidement que j'en ai des vertiges. Nous nous cachons dans un coin de mur. Des personnes approchent, le cliquetis de leur armes les accompagnent : la Garde. Ils n'ont pas quitté les lieux et font des rondes pour voir l'étendue de leur exploit et tuer les derniers habitants du sous-terrain. J'arrive à les entrevoir : ils sont au nombre de trois et portent leurs vêtements de fonction, des uniformes noirs surmontés d'épaulettes rouges et or, un béret noir repose sur leur tête. Ils en imposent avec l'arsenal d'armes dont ils disposent : couteaux de toutes tailles, deux armes à feu, une à la ceinture et l'autre en bandoulière.

Étrangement, je ne les crains pas. À ce moment là, je me sens plus forte que jamais et sais que je pourrais me défendre que si il y a une plante dans les parages. Or il y en a dans chaque allée. Et Morgan est là. Il est entraîné et a un don hors du commun. Mais je ne peux compter que sur moi, chacun pour sa peau, nous ne faisons pas équipe et n'avons aucune coordination et nous ne faisons pas réellement confiance.

Les soldats disparaissent en tournant à l'angle. Il n'y a que maintenant que je remarque la paume chaude plaquée contre mes lèvres. Elle est même un peu trop chaude, je comprends alors que Morgan disait vrai. Il surchauffe pendant les moments critiques. Il met du temps à me relâcher, plus que nécessaire. Il voulait sans doute attendre pour être sûr qu'ils ne reviendraient pas.

Il me murmure à l'oreille :

- Trouvons une autre sortie, celle là est surveillée.

J'acquiesce et le suis. Il ne m'a pas lâché le bras et m'emporte dans un dédale de couloir. Je m'arrête alors d'essayer de me repérer, perdue au milieu de tout ces changements de directions.

Une petite porte se présente enfin devant nous. Morgan l'ouvre sur un escalier. Nous montons. Je suis fatiguée et mes jambes ne cessent d'en trembler. Un point de côté me blesse quand nous arrivons en haut des marches, qui mènent à un cul de sac. Je commence à perdre patience, on a fait tout ça pour rien ! Morgan se met sur la pointe des pieds et actionne une trappe, au plafond, qui s'abaisse et laisse entrer un rai de lumière, au dessus de nous. J'en saute presque de joie. Une sortie ! Mais comment l'atteindre ? Je lui pose la question et il répond :

- Faites moi la courte échelle, une fois dehors je vous hisse en haut.

- Comment savoir qu'une fois sorti vous ne me laisserez pas ici ?

- Je n'ai aucune preuve à vous fournir.

Contrainte, je met mes mains de sorte à lui faire la courte échelle. Il appuie son pied sur ma paume tout en se maintenant à mon épaule et à la paroi du passage. Il s'élance et je manque de m'écrouler sous son poids. Il n'est pas très lourd pour sa taille, un poids moyen, mais je n'ai pas l'habitude de porter une telle masse. Sa chaussure se détache et je l'entends sauter à terre, en haut. Il me dit :

- Maintenant à vous, vous voyez bien que je tiens parole. Morgan se penche et la moitié de son corps pend dans le vide. J'attrape fortement ses mains et pose mes pieds sur le mur glissant de moisissure. Il me tire et me hisse d'un coup, comme si je ne pensais pas plus lourd qu'une plume. Ses mains se détachent de ma taille, il recule et remarque à la lueur du jour :

- Vous avez raccourci votre robe. Il paraît sceptique.

- C'est de votre faute, je dis franchement.

- Ma faute ?

- Oui, vous l'avez déchirée en fermant la porte dessus.

- Oh.

Il ne s'excuse même pas pour les dégâts et change de sujet :

- Dépêchons nous.

- Nous ne savons même pas où nous sommes...

- Moi, je le sais. Allez, en route.

- On ne peux pas faire une pause?

- Non.

- Mais regardez, le soleil s'est déjà levé depuis une bonne heure ! Nous sommes rester éveillés presque toute la nuit. Dans cet état nous ne serons d'aucune efficacité.

- Vous avez sans doute raison mais trouvons d'abord un endroit sûr.

La trappe menait à un petit bosquet. Elle était masquée par un énorme buisson, que nous contournons. Nous ne marchons qu'un petit quart d'heure avant de déboucher sur un bois parcouru de petites rivières menant à un lac accompagné de roseaux et autres plantes aquatiques.

Je voudrais bien me rafraîchir. L'eau a l'air tellement accueillante.

Je sors ma tenue que j'ai pris le soin de ranger dans mon sac quand on étaient dans la chambre. Je n'ai pas pris de serviettes elle étaient en trop mauvais état.

- Que faites vous ? me demande la voix dure de Morgan.

- Je crois qu'une petite baignade s'impose, pouvez vous tourner le temps que je me lave ?

- J'en suis capable.

Et il m'offre son dos. Morgan a beau être imprévisible et agaçant avec ses réflexions et son intonation froide, il m'écoute quand même.

J'ôte ma robe en lambeaux. Et me glisse dans le liquide. L'eau est à peine froide et me rafraîchit après les séances de stress et de sueur de ses dernières heures. J'applique et frotte le savon contre ma peau. Je m'amuse à faire de la mousse et souffle sur les bulles. Je suis tranquille, ce qui m'arrive de plus en plus souvent. J'aime ça. Mais le poids des événements précédents s'abattent sournoisement mais durement sur moi. Ne voulant pas faire attendre trop longtemps Morgan, je sors du lac et enfile directement ma tenue, faute de serviette. Comme elle règle ma température, je doute de tomber malade. Par contre je ne peux rien contre la lourdeur de mes cheveux remplis d'eau, je m'arrange pour les essorés le plus possible et les tresse le long de mon crâne pour retomber sur ma poitrine.  

Je m'adresse à la silhouette masculine retournée :

- J'ai fini.

Il se tourne, me regarde et suis les gouttes qui tombent de mes cheveux pour atterrir sur le sol.

- Je ne sais pas comment vous faites pour aimer l'eau... Il affiche une grimace.

- Et moi je ne pas pourquoi vous ne l'appréciez pas.

- J'ai failli me noyer enfant... Et avec la venue de mes pouvoirs, j'ai toujours penser que l'eau me blesserait.

- Vous en avez peur ?

Il a baissé les yeux, honteux.

- C'est compréhensible, enfin je veux dire... qu'approcher la mort de si près, laisse des séquelles même si vous pouvez toujours vaincre vos démons.

- Peut-être.

- Je me demande comment vous faites pour vous laver ? (Question idiote...) L'eau doit vous blesser, non ?

- Pas du tout, l'eau ne me fait rien... C'est juste un justificatif pour éviter le plus de contacts avec. Et naturellement, je me douche comme vous...

- Comment faites vous, alors, si en avez tellement peur ?

- Si peu d'eau ne peut pas me tuer...

- Alors pourquoi ne pas penser de cette façon tout le temps ?

- Je ne sais pas. Pouvons nous changer de sujet ?

Je ne veux pas, mais m'y abaisse :

- Qu'allons nous faire, maintenant ?

- Rejoindre l'autre base, elle doit être à deux jours d'ici. En prenant la direction du nord.

Je me réjouis de sa présence, bien utile...

- Quand partons nous ?

- Pas avant demain, à l'aube. Comme vous l'avez dit, nous en sommes incapables, pour le moment. Faisons l'inventaire de nos fournitures récupérées pour l'instant.

Nous nous y attelons et je remarque que nous avons tout pour survivre : vivres, couvertures et médicaments...

À l'approche de midi, nous mangeons de la viande séchée et des fruits tout aussi secs, ce qui calme mon estomac.

J'ai rangé ma robe déchirée dans mon sac et envisage de la jeter en arrivant à l'autre camp. En me voyant Morgan me demande :

- Avez vous passer un bon anniversaire malgré ce qui s'est passé ?

Son soudain intérêt pour moi, me trouble mais je réponds :

- Oui, c'était très différent de chez moi, toute cette attention était très touchante.

- Comment c'est chez vous ?

- Assez modestement. Il n'y a rien de particulier, c'est une journée ordinaire à part des "joyeux anniversaire", rien ne change.

- Vraiment ?

- Oui, nous ne sommes pas très riches et ma mère travaillait très dur pour nous garder au chaud.

- Je n'ai jamais connu cela.

- Qu'avez vous connu, alors?

- Le Sous-Noyau.

- Comment?

- Je suis orphelin et ils m'ont recueillit plus tôt que prévu.

- Je suis désolée pour vos parents.

- Ne le soyez pas, je ne les ai pas connu et ce sont eux qui m'ont abandonnés.

- Mais vous avez bien vécu, toujours le ventre plein en vous couchant.

- C'est sûr.

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