Chapitre Dix-neuf
Quand le sommeil se retire, la lumière m'aveugle. Je prends appui sur mes coudes pour regarder la pièce vide. Morgan est partit. Tout me revient en mémoire comme une claque. Je frôle ma bouche de la pulpe de mon pouce croyant encore sentir un vestige de notre baiser. Je suis toujours perdue. Mais j'ai trouvé quelqu'un pour m'aider à sortir de la confusion. Tout me paraît différent et je suis vidée de toute souffrance à part la plaie à ma jambe. Je ne l'ai pas oubliée mais ne la ressent plus. Elle restera tout de même un souvenir douloureux auquel je ne voudrais plus penser mais qui me hantera toujours.
Je me dresse sur mes jambes. J'arrive à marcher en me soutenant aux meubles. Quand je regarde le bandeau blanc je constate qu'il est immaculé. L'hémorragie a cessée. Une très bonne nouvelle pour commencer la journée. Une fois la toile rouge écartée, je voie une multitude de personne. Quelques uns s'occupent d'enfants qui se courent après et rient. Certains discutent pendant que le reste travaille et s'occupe des différentes corvées de la vie quotidienne. Face à ce tableau si paisible je souris. Le bonheur se ressent dans chaque parole, chaque mouvement. Ils n'avaient pas l'obligation de me laisser ici, ils auraient pu m'abandonner quelques part dans la forêt mais il ne l'ont pas fait. Je les remercie tous intérieurement. Il n'y a plus aucun dégâts de ce que m'a raconté Morgan. M'aurait-il mentit ? Non, je ne crois pas. J'ai dû tout rétablir à un moment donné. Mon idée est confirmée quand des tentes aux toiles rapiécés entrent dans mon chant de vision. Je m'avance à la lumière qui m'agresse. Je ne porte plus ma tenue d'Élémentaire mais une longue chemise blanche m'arrive aux genoux. Je ne fais pas attention au fait que je suis presque nue et me dirige vers la tente blanche.
J'y trouve Hélène, comme je m'y attends, assise derrière un bureau de fortune. Je ne m'étais pas préoccuper de la pièce la dernière fois. Dans un coin on trouve un petit lit aux barreaux en métal, une lampe posée à même le sol sur l'autre côté et il y a le bureau avec des bibliothèques en arrière plan.
Hélène ne paraît pas surprise de ma venue et lève vers moi un regard indifférent. Je ne la reconnais plus. Se faire passer pour morte l'a changée ou à moins que ce soit ces nouvelles responsabilités ? Elle met fin à mes réflexions :
- Que puis-je pour vous ?
- Je suis venue pour m'excuser. J'ai réagi excessivement. Ça ne se reproduira plus.
- Je suis contente de vous l'entendre dire. Vous allez mieux ?
- Oui. Je voudrais savoir si je peux rester au moins pour un jour ou deux ?
- Mais bien sûr ! Pourquoi partirez-vous ?
- Avec ce qui s'est passé j'aurais pu comprendre que...
Je n'ai pas le temps de terminer qu'une voix retentit derrière moi :
- Tu es enfin réveillée ! Quel soulagement !
Kristal se plante devant moi avec un sourire réjoui. Je ne sais pas quoi répondre mais elle s'en désintéresse et continue sur le même ton enjoué :
- Viens ma petite, nous allons te trouver quelques vêtements et te préparer un bon petit-déjeuner !
- Merci mais vous n'êtes pas obligée, réponds-je.
- Si, merci Kristal de vous en occuper, finit Hélène.
- Allez, suis moi ma petite Katelynn.
Je suis surprise que Kristal connaisse mon nom mais passe très vite à autre chose et lui demande :
- Depuis combien de temps suis-je là ?
- Trois jours. Tu as dormis la plupart du temps.
- Je me souviens m'être réveillée, c'était hier ?
- Exactement. Avant que tu me poses la question, il est un peu plus de dix heures du matin. Tu vas t'habiller, manger et après nous irons voir Constance qui n'est autre que notre infirmière. Tu arrives à marcher, me dit-elle en regardant ma jambe.
- Oui, mais c'est encore douloureux.
- Ça va passer. Elle t'a recousue après avoir arrêter l'hémorragie. Tu es encore faible. Tu as perdu beaucoup de sang. Suis-moi.
Nous nous engageons vers une des tentes raccommodées et à ce moment-là toute l'activité extérieur s'arrête. Autour de nous tous les habitants nous dévisagent plus moi que Kristal. Je me sens mal-à-l'aise mais je les comprends. Je suis quand même celle qui a détruit en partie leur camp. Nous continuons notre chemin et ma compagne me rassure qu'au fil du temps ils ne me fixeront plus. J'essaye de la croire mais c'est difficile d'oublier ce genre de choses. Tout le monde a reprit son occupation quand nous rentrons dans la petite tente.
Deux lits jumeaux sont disposés au fond et deux malles attendent à leurs pieds. Une lampe à pétrole diffuse une faible lumière dans un coin. Kristal ouvre celle de droite et en sort un pantalon en flanelle blanc accompagné d'un t-shirt bleu clair et des sous-vêtements assortis. Des espadrilles pendent à une de ses mains quand elle prend la parole :
- Tu vas devoir prendre un bain. Non, ça prendra trop de temps, j'ai une autre idée.
Elle y pioche encore une serviette et referme la malle. Elle me dit de l'attendre un moment puis elle revient avec un morceau de savon jaune. Une fois dehors, elle me conduit derrière les habitations de fortune et prend la direction de la forêt. Je me demande bien où elle m'emmène. Nous marchons quelques minutes et les arbres s'ouvrent sur des bassins d'où émanent des nuages de vapeurs. Je ne savais pas qu'on trouvait des sources chaudes par ici. Elle me laisse en me rappelant le chemin pour rentrer.
Je pose les affaires dans l'herbe douce qui chatouille mes pieds nus. Je me débarrasse de la tunique et fait tomber mes sous-vêtements juste après. Je plonge dans l'eau chaude qui me débarrasse de toutes les tensions. Mes muscles se détendent et je commence à nager en faisant attention à ma blessure dont j'ai laissé le pansement de peur de l'abîmer. Le liquide est une bénédiction pour ma peau malmenée par ces derniers jours. Je me retourne et flotte sur le dos fermant les yeux. C'est si agréable que j'oublie tout pendant quelques minutes. Je me porte jusqu'au bord pour attraper le savon que je frotte frénétiquement sur tout mon corps. J'en utilise tellement qu'il n'en reste qu'un tout petit morceau que je repose sur la rive.
Je nage encore quelques minutes avant de me hisser hors de l'eau pour me frictionner avec la serviette moelleuse. Je passe les vêtements et trouve le pantalon très confortable. Je n'en ai jamais mis. C'est interdit pour une femme de porter ce genre de chose. Ce qui s'en rapprochait le plus était la combinaison de la base.
Je me remémore le chemin mais ce n'est pas difficile de retrouver l'arc-en-ciel de tissu. Je reviens vers la petite tente pour reposer les affaires de toilette. Quand j'entre quelqu'un est déjà là. Je pense à Kristal mais la silhouette est trop grande pour que ce soit elle.
Je m'arrête dès que je la reconnais. Morgan se tourne vers moi et ses yeux s'illuminent à ma vue.
Un silence gêné nous enveloppe et nous parlons en même temps :
- Salut.
Puis nous étouffons un rire et Morgan reprend la parole :
- Tu vas mieux on dirait.
- Oui.
Je ne sais plus comment me comporter avec lui. Ce qui s'est passé la dernière fois à tout changer. Lui n'a pas l'air si déstabilisé que ça et continue :
- Tu as mangé ?
- Non, pas encore et toi ?
Il ne répond pas à ma question au lieu de ça il me demande de le suivre. Nous arrivons devant des tables entourées de bans disposées un peu partout à l'extérieur. Plusieurs personnes y discutent. Il me laisse m'assoir et revient avec des œufs brouillés, de la viande séché, du pain et un verre d'eau. Il prend place à côté de moi. Sa proximité me trouble mais lui ne s'en soucit pas et attend que je mange.
Tout est très bon et j'engloutis tout en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Je finis mon eau avant de me rendre compte que j'avais vraiment une faim de loup. Quand je me tourne vers Morgan, il est amusé :
- Au moins ça ne t'a pas enlevé ton appétit !
Je lui fait une grimace enfantine et nous rions. L'ambiance est détendue et j'ai peur de perdre ce moment d'insouciance comme tout. En me voyant morose, il me soulève le menton pour croiser mon regard.
- Kate, je voudrais que tu sois heureuse pour une fois.
- Moi aussi.
- Alors essaye !
J'esquisse un sourire face à son entrain puis entame :
- À propos d'hier, je...
Il me coupe :
- Je sais. Ce n'était pas le moment. On s'est un peu égaré mais ne pense plus à ça. Regarde (il me montre le camp de la main) on a un toit, à manger, de quoi nous habiller. Alors pourquoi se plaindre ? En plus la tristesse ne te va pas du tout.
Je ne sais pas quoi répondre. Il pense que notre baiser n'était qu'une erreur ? Mon cœur se serre à cette pensée. J'embrasse si mal que ça ? Préférant ne plus y penser, je demande :
- Quand reprenons la route ?
- Pourquoi veux-tu repartir si vite ?
- On a une mission, non ?
- Si, mais on a besoin d'une pause. Restons encore quelques jours après on avisera.
- Oui, tu as sûrement raison.
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