#Chapitre 38

Droite face au miroir, je me reconnais à peine. C'est la première fois que je revêts l'uniforme d'Eos. Composé d'un pantalon ultra moulant mais très souple, d'un débardeur et d'un simple gilet à capuche, le tout exclusivement dans des teintes de gris sombre et de noir, j'ai davantage l'air d'une racaille sur le point de commettre un cambriolage que d'une élève inscrite dans un cursus élitiste. Des cernes de plus en plus marqués creusent mes joues, résultat d'un manque de sommeil chronique, et j'ai l'air encore plus pâle qu'avant, ce qui me paraissait difficilement réalisable. Seuls mes cheveux cuivrés, relevés dans une queue de cheval serrée, semblent toujours aussi flamboyants. Toutefois, mon visage ainsi dégagé laisse apercevoir l'hématome qui s'est formé au-dessus de mon œil gauche, histoire de bien parfaire mon allure de petite délinquante. Seul mon stress évident, triturant mes mains de nervosité, casse un peu cette image déplorable que me revoie la glace.

Enervée par mon reflet, j'essuie mes paumes moites sur mon pantalon tout en décrochant mon regard du miroir. De l'autre côté de ma chambre, avec un sourire compréhensif, se tient Jasmine, elle aussi vêtue du même uniforme à ceci près que le sien semble plus lâche et comporte une longue blouse gris clair. Devant ma fébrilité, elle se dégage du mur pour se planter droit devant moi.

- Arrête d'angoisser, tente-t-elle de me rassurer. Tout se passera bien, personne ne va te manger. Et Adam et M.Hartmann garderont un œil sur toi, tu verras.

- Je sais, je sais, soufflé-je. Mais si je ne suis pas à la hauteur ? Travailler seule avec Hartmann, c'est une chose, mais avec tous les autres, c'est sûr que je vais être nulle...

- Will, tu as un an de retard sur les autres. On se doute bien que dans un premier temps tu vas être à la ramasse. Tout le monde le sait et tout le monde va en tenir compte. A toi de redoubler d'effort pour les rattraper et les dépasser.

Une part de moi ne peut s'empêcher de douter, mais l'heure n'est pas à l'apitoiement. Alors je fais taire mes hésitation, force un sourire à l'adresse de ma meilleure amie avant d'attraper mon manteau, prête à partir. L'air aussi bravache que possible, je quitte ma chambre, dévale l'escalier deux à deux avant de débouler dans le hall du dortoir où m'attend Adam. Alors qu'il m'aperçoit enfin, ses lèvres se plissent légèrement en un rictus moqueur qu'il tente de contenir. Une fois face à lui, je lève les yeux au ciel :

- C'est bon vas-y, fais-toi plaisir, soufflé-je, blasée. Je ne voudrais pas frustrer mon si estimé partenaire...

- On dirait que tu t'apprêtes à cacher un cadavre, se lâche-t-il enfin.

- Tu t'es vu ? répliqué-je en riant.

Car, de fait, Adam n'a guère l'air plus fréquentable que moi actuellement puisque lui aussi est tout de noir vêtu et que les traces de sa bagarre avec Adrian, sans parler de sa chute, sont tout à fait visible en dépit de l'obscurité sauf qu'elles sont encore plus marquées que les miennes. Bref, on est bien assorti...

Sans se départir de son franc sourire, Adam m'entraine vers notre entrée réservée. Jaz s'abstient de tout commentaire, connaissant parfaitement ma claustrophobie tandis que nous nous séparons sur le chemin qui mène au bâtiment scolaire. Le frère de Logan semble parfaitement savoir s'orienter alors je le suis sans me poser de question, incapable de resituer où se trouve la porte qu'il m'avait montré une semaine plus tôt. Bientôt, il bifurque sur la droite puis apparaît devant nous la fameuse entrée qu'il s'empresse d'ouvrir.

- Prête ? s'assure-t-il en me tendant sa main.

J'inspire un grand coup avant de hocher la tête. Il m'encourage d'un clin d'œil avant de plonger dans l'étroit boyau qui serpente sous l'île. Luttant contre un élan de panique, je resserre mes doigts autour des siens, concentrée sur ce seul contact dans une vaine tentative d'oublier le reste. Comme à chaque fois, Adam parle sur tout le trajet, pour m'occuper l'esprit, mais ma nervosité mêlée à ma claustrophobie montante, cela n'a guère d'effet. J'ai beau savoir qu'il nous faut seulement une minute et vingt-six secondes pour atteindre la grande salle, le chemin me paraît interminable.

Après une éternité, nous déboulons enfin dans la gigantesque pièce d'entraînement. Pourtant, loin de chasser ma panique grandissante comme la dernière fois que j'y suis descendue, mon angoisse redouble. Je suis assaillie par l'odeur de transpiration et de chaleur écrasante qui emplit déjà le lieu. Un vacarme indescriptible y résonne. Mes pensées m'échappent totalement pour ne laisser place qu'à une immense panique. Un voile de sueur s'écoule sur mon front brûlant, mes yeux se brouillent, mes mains se mettent à trembler. J'étouffe.

Dans un état second, j'entends à peine mon partenaire jurer avant de m'éloigner de cette cacophonie. J'ai tout juste conscience qu'il m'emmène dans une pièce voisine quand je sursaute violemment au claquement d'une porte. Par réflexe, je me recroqueville dans un coin, la tête entre les bras. Mon cœur bat à tout rompre et mon poumon brûle douloureusement, asphyxié. Désespérée, je tente par tous les moyens de visualiser une partition, mais les notes s'enfuient dès que je les approche.

- Oh, oh, oh, me parvient vaguement la voix chaude d'Adam où perce une légère pointe d'inquiétude. Will, écoute-moi. Il faut que tu inspires... puis que tu expires... inspire... expire...

J'essaie, mais je n'y arrive pas. L'air refuse de pénétrer mes poumons. Je secoue la tête, au bord de l'évanouissement. Je le sens s'accroupir près de moi. Il m'appelle, il tente de m'apaiser, mais ses mots se perdent, mon crâne devient comme du coton.

La porte s'ouvre de nouveau. Adam ordonne avec empressement qu'on aille chercher Hartmann et Jaz.

- Bougez-vous, merde ! s'énerve-t-il.

La porte se referme.

Il s'assoit à côté de moi en prenant de nouveau ma main. Je le sens se radoucir, conscient que sa tension amplifierait ma peur.

- Eh, Will, commence-t-il doucement. Tu vois le bouquet de fleurs sur la table ? Décris-le-moi.

A travers la brume de mon esprit, je réussis difficilement à lever les yeux vers le vase qu'il m'indique. Il n'a rien de bien extraordinaire et les fleurs sont presque toutes fanées et flétries. Malgré tout, je lutte pour répondre à son exercice. Ma voix enraillée me paraît comme à des kilomètres de là, mais me concentrer sur cette description éloigne quelque peu ma panique. A peine. Mes tremblements ne diminuent qu'à cause de l'épuisement et je continue de serrer de toutes mes forces les doigts de mon compagnon.

Mais alors que les battements de mon cœur commençaient à ralentir, Hartmann déboule brusquement dans la pièce, suivi de Jaz. Je sursaute de nouveau tandis que je sens mon angoisse revenir aussitôt. Le visage serein d'Adam m'apparaît alors.

- Eh, du calme Will. Tout va bien. Continue de me parler de ces fleurs. Il y en a combien d'après toi ?

J'essaie de les compter ; une... deux... trois... quatre... mais la présence envahissante de mon entraîneur et le regard inquiet de Jaz m'écrasent. Les chiffres s'envolent alors que ma respiration se fait de nouveau plus courte.

- Elle n'a pas un médicament, normalement ? interroge la voix bourrue de mon coach.

Je vois Adam secouer la tête sans me lâcher de son regard confiant.

- Et comment elle fait pour se calmer d'habitude ? demande encore le professeur.

Le frère de Logan hausse les épaules d'ignorance. Il continue de me parler calmement, patiemment, mais il commence à stresser lui aussi même s'il fait son possible pour le masquer. Il a épuisé toutes ses cartes et ma crise empire de nouveau. La tête lourde, je me sens au bord du précipice, prête à sombrer...

- La musique ! réalise soudain la voix fluette de ma meilleure amie. Will m'a dit un jour que quand elle était petite, son père sifflotait une musique de sa mère. Chante, Adam !

- C'est génial Jaz, souffle l'intéressé, mais je les connais pas, moi, les morceaux de sa mère !

- Et bah chante n'importe quoi ! du moment qu'elle connaît le morceau, ça devrait marcher...

Adam inspire un coup avant de se mettre à fredonner. La mélodie m'est lointaine, méconnaissable dans un premier temps, mais elle suffit à mobiliser toute ma concentration. Malgré la brume qui occupe mon crâne, je décompose la mélodie mentalement, son par son, note par note jusqu'à visualiser la partition. Puis le morceau m'apparaît en entier, souvenir fugace d'une période où je passais des heures devant la série. Je me focalise encore davantage sur la musique jusqu'à la jouer dans le vide de ma main libre.

Constatant son effet, mon partenaire poursuit inlassablement sa chanson tandis que je l'accompagne silencieusement de mon violon imaginaire. Sans m'en apercevoir, mon souffle retrouve peu à peu un rythme normal, de même que mon cœur s'apaise et que les brumes de mon esprit s'évaporent définitivement.

- Au temps pour moi, s'étonne ma meilleure amie avec humour, Games Of Thrones a fonctionné... J'aurais pas cru pourtant...

Réalisant enfin pleinement où je suis et dans quel état, je m'empresse d'essuyer mes joues baignées de larmes et de me relever. Seulement un tournis m'arrête aussi sec.

- Eh, vas-y doucement, me conseille Adam en me soutenant.

- Désolée... m'excusé-je piteusement.

Avec plus de brusquerie que je ne l'aurais voulu, je libère mon bras d'un coup sec de l'emprise d'Adam, surpris par la brutalité de mon geste. Rouge de honte, je n'ose même pas les regarder en face. Je dois avoir l'air tellement cruche à paniquer pour rien ! Et tellement faible. Je leur fais sûrement pitié même s'ils ont la politesse de ne pas m'observer avec condescendance ! Enervée par ma propre fragilité, j'efface toute trace de ma crise sur mon visage et remets correctement mon uniforme sans aucune douceur avant de me positionner devant la porte.

- Tu es sûre que ça va, Will ? s'inquiète Adam, ce qui démultiplie encore ma colère.

Oui, je sais, j'ai l'air pathétique ! Pas besoin de me le rappeler.

J'inspire pour refouler la réplique cinglante que je m'apprêtais à lui sortir. A la place, je me contente d'un banal « oui, oui, tout va bien, c'est passé ».

- Allons-y, conclus-je.

Surpris par mon attitude soudain glaciale, ils ne font toutefois aucune remarque sur mon étrange comportement. Sans un mot, nous retournons dans la grande salle qui, par chance, s'est largement vidée, chaque cours ayant déjà commencé. Ma meilleure amie s'excuse brièvement avant de rejoindre sa section. Devant nous, seuls restent les militaires, l'espace nous étant réservé car nous avons besoin de plus d'espace que les autres cours, m'apprend Adam en chuchotant. Les élèves s'amassent tous devant un prof au costume trois pièces impeccable en train de donner les instructions.

Le plus discrètement possible, le frère de Logan et moi tentons de rejoindre les rangs sans nous faire remarquer, hélas notre petit manège n'échappe pas au professeur Schuman qui nous accueille d'un violent sarcasme :

- Ainsi vous déniez vous joindre à nous Mlle.Santiago, c'est une chance que vous nous faîtes. Et M.Lombardo vous suit, super ! J'espère seulement que vous ne gâcherez pas son potentiel.

Je serre les poings pour me maîtriser. Ce n'est pas franchement le moment le plus judicieux pour jouer avec mes nerfs ! Par chance, je parviens à retenir ma riposte insolente pour lui offrir un hypocrite sourire désolé.

- Pardon pour notre retard, m'excusé-je poliment en dépit de mon humeur massacrante. C'est entièrement ma faute.

- Je n'en doute pas, rétorque le professeur avant de revenir au sujet principal : Vous savez jouer à Risk, Mlle.Santiago ?

Je secoue la tête.

- Ça m'aurait étonné... concède-t-il avec dédain. M.Lombardo se fera donc un plaisir de vous apprendre les règles du jeu. Allez, tout le monde au travail, vous savez comment ça fonctionne ! En piste.

Le troupeau d'élèves se dispersent pour récupérer les boîtes de jeu dans une armoire avant d'installer des tables un peu partout dans la salle. Jamais je n'aurais pensé que nos entraînements consisteraient à disputer des parties de jeu de société...

Sur l'exemple des autres, Adam me tend une boîte de jeu avec inscrit en gros dessus « Risk » et un planisphère représenté juste en dessous pendant qu'il tire une table et deux chaises. Sans plus de cérémonie, il s'installe en m'invitant à faire de même. Dubitative, j'obtempère quand même.

- Sérieusement, on va jouer, là ? ne puis-je m'empêcher de vérifier. A un jeu de société ?

- C'est pas tout à fait un jeu qui a pour but de passer du bon temps, m'explique Adam avec patience. Il s'agit d'un célèbre jeu de tactique et de stratégie guerrière. Le but, c'est de conquérir le plus de terres possibles, sans pour autant oublier de s'occuper de son territoire en cultivant les ressources, etc...

Un jeu à l'image de l'Ecole, quoi...

Mon partenaire met en place le plateau avant de distribuer les ressources dont chacun dispose en m'expliquant l'équivalent de chaque pion. Il distribue ensuite quatorze cartes territoires à chacun avant de me tendre ma carte d'objectif que je dois garder secrète. « Vous devez conquérir en totalité l'Amérique du Nord et l'Océanie ». Rien que ça...

- Tu dois avoir au moins une armée sur chacun des territoires que tu as reçu, m'apprend-il. Pour le reste, tu les disposes comme tu veux.

Alors qu'il égrène les consignes, M.Hartmann s'invite à notre table pour observer la partie. Il se munie de mes cartes afin de « m'aider de temps en temps » tout en jouant les arbitres, un cahier et un stylo sous la main pour consigner chacun de nos faits et gestes. Puis la guerre de territoire commence.

Bah laissez-moi vous dire que je suis un chef de guerre lamentable et que ce n'est pas demain la veille que je vais devenir l'impératrice de l'Amérique du Nord ou même de l'Océanie... Si au début, j'étais relativement confiante après avoir conquis trois territoires d'Amérique en plus des deux dont je disposais dès le départ, j'ai vite déchanté. Sans que je comprenne vraiment comment, Adam a peu à peu éliminé mes armées, récupéré mes terres jusqu'à enfin retourner sa carte objectif une fois que celui-ci fut rempli. Bref, je me suis fait laminée.

Devant ma moue pincée, mon partenaire éclate de rire.

- Mauvaise perdante, va, se moque-t-il de moi.

- Que nenni, ce n'est que partie remise. Je l'aurai, l'Océanie, je l'aurai !

- Will, je jouais déjà à ce jeu avec Logan quand j'avais dix ans... Tu crois vraiment pouvoir me battre ?

- Bah... hésité-je, peut-être pas ce soir... mais un jour, oui !

Amusé par mon obstination, il secoue la tête en continuant de battre les cartes pour la deuxième partie.

- Et les autres, ils jouent tous au même jeu ? demandé-je, curieuse.

Autour de nous, chaque élève semble plongé en intense réflexion, de deux à six joueurs par endroit. J'ai bien remarqué les œillades curieuses qu'ils me lancent de temps à autres depuis le début du cours – si on peut appeler ça un cours... Si ma présence semble essentiellement susciter de l'intérêt et quelques bavardages dont le contenu m'échappe, pour d'autres, leur mine renfrognée et la tension dans le corps de certains quand je croise leur regard m'indiquent clairement que la situation ne plaît pas à tout le monde. Le frère de Logan a bien tenté de me rassurer en m'expliquant qu'il ne s'agit que de jalousie, les élèves ayant droit d'intégrer Eos en cours d'année étant très rares, cela ne m'empêche pas de penser que la raison de leur animosité est bien plus profonde que ça.

- Non, me répond l'entraîneur. Certains sont occupés avec des jeux de déduction, d'autres de logique, certains comme toi de stratégie et d'autres encore disputent des parties où le but est de tricher sans que les autres s'en aperçoivent...

- Vous leur apprenez à tricher ? m'étonné-je.

- Que crois-tu ? réplique-t-il avec un sérieux déplaisant. Que les grands du monde ont obtenu la place qu'ils occupent sans avoir biaisé les règles ?

Je ne trouve à redire.

Nous recommençons une partie, où cette fois M.Hartmann m'aiguille véritablement, me prodiguant conseils, mobilisant mon attention sur des points que j'aurais sauté dans la stratégie d'Adam... le tout sans jamais explicitement me dire quoi faire. Cela ne change pas l'issue finale, une défaite cuisante, mais au moins, je commence à mieux cerner les rouages du jeu.

A la fin des deux heures, à jouer encore et encore au même jeu, je suis au bord de l'overdose. Après une énième défaite, bien que ma résistance s'améliore – on se rassure comme on peut, OK ? – M.Hartmann nous fait enfin signe de tout ranger. Soulagée, je m'empresse de tout remettre dans le carton qui retourne sur l'étagère. N'ayant pas transpiré, Adam et moi décidons de sauter l'étape de la douche et ainsi éviter le troupeau d'élèves qui ne tardera plus à envahir la grande salle.

Comme à l'allée, le frère de Logan me tend sa main, mais je rechigne à la prendre, au souvenir du pitoyable spectacle que je lui ai offert tout à l'heure. Ma colère contre moi-même a beau s'être quelque peu envolée, ma honte intersidérale ne faiblit pas, elle. Pourtant, la lumière clignotante de l'étroit boyau me rappelle obstinément que sans lui, je serais incapable de remonter à la surface. Fichue claustrophobie débile ! Résignée, j'entremêle mes doigts aux siens.

Malheureusement, nous n'avons pas le temps de faire trois pas qu'une armoire à glace nous barre la route. D'au moins deux mètres de haut et plus d'un demi-mètre de large, il me cache presque totalement la fin de l'horrible couloir. Ecrasée par sa stature et terrassée par ma peur, je me cache malgré moi derrière mon partenaire. Si mes pensées conservaient un tant soit peu de leur cohérence, je me maudirais jusqu'à la fin de mes jours d'ainsi me réfugier dans le dos d'Adam.

- Alors c'était donc vrai ? s'emporte le garçon imposant. La poissonnière a même son accès privé ?

Sa voix grave et dur emplit tout le couloir, c'est presque si les murs n'en trembleraient pas. Je me crispe inconsciemment, tout en luttant contre la panique qui me guette. Mon compagnon se rend compte de l'urgence de retrouver l'air libre tandis que ma respiration s'accélère.

- Excuse-moi Ambre, déclare-t-il calmement au jeune homme, mais il faut vraiment qu'on file.

Il tente de forcer le passage, mais ledit Ambre se décale d'un pas pour nous en empêcher. Dans la brume qui envahit mes pensées, je note tout de même les cheveux légèrement roux de celui qui nous fait face, ses yeux marron qui nous étudient tour à tour, un regard franchement dédaigneux à mon encontre. Ses traits me rappellent vaguement quelqu'un, mais je suis incapable de retrouver qui.

- Ambre, s'il te plaît, insiste Adam, laisse-nous passer.

- J'aimerais juste comprendre comment ça se fait que la poissonnière ait réussi à intégrer Eos, poursuit la brute sans se dégager. De ce que je sais, ses résultats sont médiocres, elle a beaucoup trop de retard sur nous et surtout, j'ai entendu dire qu'elle avait maintes fois manqué au règlement, et voilà qu'on la récompense ? Si c'est pas du favoritisme ça, je me demande bien ce que c'est.

- Rien qui te concerne alors pousse-toi.

Sa patience à bout, le frère de Logan feinte à droite avant de se faufiler rapidement vers la gauche. Entraînée par son élan, je le suis maladroitement. Je retiens mon souffle en attendant que l'armoire à glace m'attrape à son tour par le bras, mais il n'en fait rien. A la place, tandis que nous continuons notre chemin, il me lance avec colère :

- Tu n'y arriveras pas la poissonnière ! crie-t-il. Et c'est pas parce que tu es pistonnée que cela va changer quelque chose ! Tu vas échouer, inexorablement...  

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