#Chapitre 36

- Dîtes les gars, se signale Liam d'une petite voix désolée, je veux pas me montrer rabat-joie, mais je vous ferai remarquer qu'il est dix-huit heures passées ; le soleil est déjà bien bas et on doit être au réfectoire dans moins d'une heure...

Comme s'il avait suffi de son intervention pour nous ramener à la réalité, tout le monde prend conscience de l'obscurité qui gagne du terrain sur le jour. Galvanisés par la conversation et le simple plaisir de s'amuser ensemble, nous n'avons guère fait attention à l'heure. Or, nous avons mis près de trois heures pour atteindre cette clairière ; redescendre en moins de quarante-cinq minutes paraît difficilement réalisable... Pourtant, loin d'être pressés, le groupe rassemble tranquillement ses affaires en discutant du meilleur chemin à prendre.

- En coupant droit par les éboulis, calcule Adam, on devrait être au dortoir dans une demi-heure environ.

- Mais dans le noir, proteste Valentin, ça ne va pas être de la tarte.

- On a tous un téléphone, non ? riposte Jaz. Ils font tous lampe de nos jours.

- Puis si on rebrousse chemin par là où on est passé à l'allée, ajoute Leander, on en a pour au moins deux heures si on se dépêche. Autrement dit, on va louper le dîner...

- Ah non ! ça, c'est hors de question ! m'insurgé-je à haute voix.

Surprise que mes pensées aient franchi mes lèvres, je plaque mes mains sur ma bouche, comme pour me retenir d'en dire plus. Oups...

Mes compagnons me fixent de leur regard qui mêle amusement et désespoir. Je devine à l'air espiègle qu'affiche Adam qu'il va encore me sortir une de ses répliques bien sentie, mais Liam lui coupe l'herbe sous le pied :

- T'inquiète Will, personne ne se risquera à te priver de dîner...

- Ouff !

Je lui offre un immense sourire de reconnaissance. Devant mon soulagement évident, Valentin capitule :

- Bon, bah puisque tout le monde semble d'avis à passer par les éboulis, allons-y.

Ainsi, nous nous mettons en marche. Leander, fort de sa connaissance parfaite de l'île, prend la tête du groupe pour nous guider sur le chemin le plus rapide. Nous suivons la piste principale sur quelques mètres avant de bifurquer sur un petit sentier sauvage qui s'enfonce à flanc de montagne. La pente très raide nous oblige à nous mettre à la queue leu leu tandis que les cailloux qui roulent sous nos pieds exige de nous toute notre vigilance. Nous zigzaguons ainsi entre les broussailles drues qui accroche nos vêtements, à la lumière de nos smartphones, avant que la végétation s'amenuise jusqu'à totalement nous dégager le chemin. A nos pieds, une pente entièrement recouverte de pierres de la taille de nos points s'étend à perte de vue. Même la lumière de nos téléphones ne suffit pas à en voir la fin.

Sans se poser davantage de question, Leander attaque le premier sa dégression. A peine a-t-il fait un bon qu'il vacille en battant de bras pour recouvrer son équilibre. Ça promet... Stabilisé, il saute de nouveau en se tenant perpendiculairement à la pente. Ania le suit de près, bien qu'elle opte pour une descente sur les fesses. Sur l'exemple de Leander, Adam adopte la même technique, de même que Jaz qui le talonne à porter de main. Adrian est le suivant, désireux de ne pas s'éloigner de sa moitié. Valentin, Charline, Liam et moi clôturons la marche. Pour éviter les accidents, nous descendons tous les uns à côté des autres afin de ne pas faire dévaler les pierres dans les pieds des camarades.

A mi-chemin, Liam manque de tomber. De justesse, je le rattrape juste avant qu'il ne se précipite contre un arbre. Par chance, je parviens à conserver mon équilibre pour ne pas l'accompagner dans sa chute. En revanche, mon téléphone, lui, ne connaît pas la même fortune ; dans ma précipitation, je l'ai lâché. Impuissante, je le regarde dégringoler jusqu'à ce qu'une pierre interrompe sa course.

- Désolé, s'excuse l'anglais tandis que je fixe le faisceau de ma lampe de téléphone.

Je secoue la tête pour lui faire comprendre que ce n'est rien. Sans attendre, je modifie légèrement ma trajectoire pour aller le récupérer. Je saute à l'aveugle, à la seule lumière de la lune quand Liam oriente son propre smartphone pour m'éclairer.

- Merci de m'avoir rattrapé, déclare-t-il. C'est déjà la deuxième fois que tu m'évites des situations périlleuses, faudrait pas que ça devienne une habitude.

Etonnée par le ton miséreux de sa remarque, je m'arrête. Je plisse les yeux, éblouie par son portable. Il le baisse aussitôt.

- Mais t'inquiète, le rassuré-je avec humour, c'est parce que t'es mon préféré parmi cette bande de tordu. Et tu sais pourquoi ?

Il me fait signe que non.

- Parce que si on remplace ton L par un M, ça fait « Miam ».

Je devine dans la pénombre qu'il secoue la tête de dépit, mais son sourire suffit à me rendre heureuse. D'un geste de la main, je lui demande de m'éclairer de nouveau, ce qu'il s'empresse de faire. Je me penche vers mon téléphone au moment où un cri, suivi d'un gros bruit d'éboulement, me glace le sang. J'ai juste le temps de me retourner que sous mes yeux horrifiés, je vois la main d'Adrian se refermer dans le vide et Jasmine glisser inexorablement vers le bas. Au dernier moment, Adam bondit en avant pour intercepter ma meilleure amie. In extremis, il parvient à saisir son bras.

Mais c'est là que les choses se corsent. Plutôt que de la retenir, Adam perd l'équilibre à son tour. Il tombe avec une violence inouïe. Dans un fracas de pierres qui se heurtent en roulant, ils dégringolent encore et encore. Au bout d'un moment interminable, ils achèvent enfin leur glissade dans un buisson qui amortit un tant soit peu leur chute. Plusieurs grognements de douleur nous indiquent qu'ils sont toujours entiers, mais en sale état.

Il ne m'en faut pas plus pour avaler la distance entre eux et moi à toute vitesse. J'entends derrière moi Liam criait mon nom tandis que Valentin jure entre ses dents.

- Will ! s'emporte-t-il. Va pas te péter une jambe toi aussi ! On a déjà assez de blessés comme ça !

Je lui fais un vague signe de la main, comme pour lui assurer que je sais ce que je fais, mais je ne ralentis pas pour autant. Je cours jusqu'à eux sans me soucier des cailloux qui roulent sous mes chaussures. En dépit de mes pieds qui dérapent, je parviens à conserver mon équilibre. Très vite, Jaz et Adam apparaissent dans le faisceau de ma lampe. Assis sur un tronc renversé, le frère de Logan tient son propre téléphone de façon à éclairer son bras, tandis que ma colocataire, les lèvres pincées de concentration, frotte délicatement ce qui doit être une plaie. S'apercevant de mon arrivée, ils relèvent la tête vers moi.

- Comment vous allez ? leur demandé-je, inquiète.

- Moi ça va, m'apprend Jaz. J'ai quelques écorchures, mais je m'en sors super bien. En revanche, l'épaule d'Adam vire au violet et je doute que ce ne soit qu'un effet de la lumière...

A ces mots, elle appuie un regard insistant à l'intéressé qui lève les yeux au ciel.

- Je t'assure que c'est moins grave qu'il n'y paraît. C'est juste un gros bleu.

- Et il s'est profondément entaillé l'avant-bras, poursuit ma meilleure amie, et fendu la lèvre.

- Gravissime, souffle le blessé.

Il plonge son regard blasé dans le mien, comme pour guetter mon approbation. Mais devant mes sourcils froncés, il abandonne. D'un geste de la tête, Jasmine me demande de lui passer son sac, ce que je m'empresse de faire. Elle en sort une trousse de secours, prépare son matériel et se met à l'œuvre.

- T'es sûre que j'ai besoin de point de suture ? râle Adam. C'est pas un peu exagéré ?

Jaz soupire d'impatience avant de le foudroyer des yeux.

- OK, OK, OK, capitule-t-il finalement.

Satisfaite, Jaz verse le reste de sa bouteille d'eau sur son bras pour en déloger les potentiels résidus. Elle désinfecte ensuite la plaie au moyen d'une compresse imbibé d'alcool. Adam siffle entre ses dents sous la brûlure.

- Désolée, s'excuse-t-elle.

- T'inquiète...

Elle adoucit son geste pour amoindrir la douleur lorsqu'une voix bourrue et énervée nous fait sursauter :

- Ça va ? vous vous amusez bien tous les trois ?

- Adrian ! s'étonne Jaz, la main sur le cœur pour se remettre de sa frayeur.

Il observe d'un œil noir la scène sous ses yeux, Jaz penchée vers Adam, la main sur son bras. Son sourcil se hausse doucement tandis que les muscles de son visage de crispent de rage.

- Je ne te gêne pas Adam, j'espère ? s'emporte-t-il. Il te les faut toutes, petite merde, c'est ça ? O grand héros qui vient au secours de toutes ces dames en détresse ! Et maintenant tu fricotes avec ma copine ? T'es un minable, mec.

Un hoquet de stupeur nous fige tous les trois. Puis Adam secoue la tête, la colère montant à son tour.

- T'aurais peut-être préféré que je laisse ta copine dégringoler sans tenter de la retenir ?

- C'est vrai que ton intervention a été franchement utile !

- Tu veux qu'on parle de la tienne ?

Adrian en reste sans voix l'espace d'un instant, mais cela ne dure guère. Hors de lui, il réduit l'espace entre lui et le français en quelques enjambées seulement, visiblement prêt à en découdre, mais cela ne suffit pas à intimider son adversaire qui soutient son regard sans ciller. Pétrifiée et muette d'incompréhension face au comportement haineux de son copain, Jaz recule d'instinct pour s'éloigner des deux hommes, incapable du moindre geste pour apaiser la situation. Ses yeux brillent de larmes d'impuissance, ses poings se serrent de colère, mais elle n'ose intervenir pour tempérer les deux hommes. Sentant que la situation est sur le point de dégénérer, je tente le tout pour le tout en posant une main réconfortante sur le bras d'Adrian.

- Adam a juste essayé d'éviter une catastrophe et Jaz le soignait, il n'y a pas de quoi en faire tout un plat.

- On t'a rien demandé la traitresse, m'envoie-t-il bouler en me dégageant brutalement d'un mouvement d'épaule.

Face à moi, le frère de Logan fléchit légèrement les jambes, son corps en tension. Il se prépare à frapper, mais je secoue la tête. Il faut absolument calmer le jeu avant qu'on franchisse le point de non-retour. Bien que sceptique, Adam obtempère, toujours aussi immobile, mais prompt à réagir vivement s'il venait à en avoir besoin.

- Adrian, s'il te plaît, calme-toi, essayé-je de nouveau. Votre comportement est complètement futile et ridicule. Tu sais très bien que Jaz ne te trompera pas et qu'Adam n'a jamais tenté de la séduire.

Voyant qu'il ne m'écoute même pas, déterminé à se battre, je lance une dernière provocation désespérée pour le distraire de son objectif.

- Tu fais pitié à jouer les gros bras. Tu crois que Jasmine le vit comment ton petit numéro ?

Il cille. J'ai touché la corde sensible. Malheureusement, je me laisse surprendre par sa rapidité. Je n'ai pas le temps de cligner des yeux que je me retrouve bloquée contre un arbre alors que l'espagnol me retient par le col. Un vif lancement irradie à l'arrière de mon crâne à cause du choc.

- J'vais te dire, le suppo d'Octavius, ton avis j'm'en fou pas mal. Tout ce que tu veux, c'est foutre la merde entre nous tous mais tu n'y arriveras pas, crois-moi. Donc si j'étais toi, je la bouclerais...

Du coin de l'œil, je vois Adam bondir vers nous, mais je suis plus rapide. Loin d'être impressionnée par la tentative d'intimidation du copain de Jaz, je me contente de mettre en application les leçons de M.Hartmann. Je repousse sa tête en arrière d'une pression sur chaque œil pour l'obliger à s'éloigner puis j'enchaîne par un coup de coude. Il me lâche en grognant, mais je devine qu'on est loin d'en avoir fini. Alors qu'il s'approche de nouveau, je poursuis mon mouvement en le frappant au genou avant de l'achever d'un coup de pied dans ses parties. Il se plie en deux en crachant de douleur, mais cela ne suffit pas à l'arrêter. Prêt pour un deuxième round plus féroce encore, il fait un pas dans ma direction. Je bande chacun de mes muscles déjà à vif de mes rudes entraînements, me préparant à recevoir le prochain coup. Mon enchaînement l'a surpris, mais mon adversaire ne se laissera pas avoir une seconde fois. Autrement dit, je suis dans la panade ! Toutefois, je refuse de me défiler. Il y a bien trop longtemps que l'espagnol a besoin qu'on lui tienne tête.

Il s'approche encore. Mais il est intercepté par Adam qui fait barrage, chaque parcelle de son corps exprimant une lourde menace. Pourtant, l'espagnol semble insensible à l'aura dangereuse que dégage le frère de Logan. Il hausse un sourcil revêche, en levant son bras. Avec élan, il s'élance contre Adam qui l'esquive avec une facilité déconcertante avant de frapper à son tour dans les côtes de son agresseur. Celui-ci grogne, mais réplique aussi sec en visant l'épaule violâtre de mon compagnon de voile qui redouble d'agressivité. La danse dangereuse à laquelle s'adonnent les deux jeunes hommes s'intensifie, chacun donnant coup sur coup sans qu'il ne soit jamais possible de déterminer lequel prend le dessus sur l'autre. Devant cet amalgame de poing et de jambes, impossible pour Jaz ou moins d'intervenir sans risquer d'être blessée par mégarde.

De l'autre côté, Jaz secoue la tête, horrifiée. Ses larmes se déversent sur ses joues tandis qu'elle regarde ce spectacle, impuissante.

Priant le ciel pour qu'il m'épargne, je m'interpose dans une tentative désespérée. Au même moment, la voix forte et charismatique de Valentin retentit d'un « stop ! » sans appel. Malheureusement, cela survient trop tard pour qu'Adrian ait le temps d'arrêter son geste ; trente-six chandelles dansent devant mes yeux alors que son poing m'atteint violemment à la tempe. Je m'écroule contre Adam qui me retient de justesse de son bras meurtri. Il m'aide à m'asseoir en grognant pendant que Valentin nous rejoint, visiblement furibond lui aussi.

- Non, mais ça va pas bien dans vos têtes ! Vous m'expliquez ce qu'il vous a pris ? Vous trouvez qu'on avait pas déjà assez de blessés ?

- Où sont les autres ? interroge Adam, toujours penché sur moi pour éviter le regard noir de son meilleur ami.

- Ils ont rejoint la piste principale, nous apprend Valentin en s'adoucissant. Après que Will aie descendu les éboulis de façon inconsciente, Ania est tombée aussi en voulant accompagner Adrian. Leander a donc décidé de prévenir Karen par message tout en prenant le chemin balisé avec Liam et Charline. Adrian était censé vous le dire, nous informer sur la gravité de vos blessures pour qu'on sache s'il fallait chercher de l'aide ou sinon vous accompagner jusqu'en bas. Sauf que j'ai entendu des grognements alors j'ai préféré laisser les autres et venir voir ce qu'il se passait.

Il nous lance un regard noir.

- Et autant vous dire que je ne suis pas déçu.

A l'exception d'Adrian, nous affichons des mines pitoyables face à l'aura dégagée par le candidat aux présidentielles de l'école. Plus aucun bruit ne brise le silence en dehors des respirations sifflantes des deux combattants et des sanglots de Jaz.

- Rentrons, finit-il par déclarer.

Une tension palpable se fait sentir alors que le Président tend la main vers Jaz. Mais celle-ci n'esquisse pas le moindre geste. Alors que son copain s'impatiente, elle secoue piteusement la tête. Surpris, Adrian hausse les sourcils avec une colère bouillonnante. Ma meilleure amie retrouve alors son courage pour lui rétorquer avec froideur :

- Non. Pars devant. Redescends tout seul.

La tête haute, sans appel, elle observe son petit-ami, vert de rage, laisser retomber sa main. Vaincu, il se retourne, ramasse son téléphone et entame sa longue descente jusqu'au dortoir, nous laissant seuls ici tous les quatre. Après son départ, c'est comme si notre groupe reprenait enfin vie.

Après une rapide inspection de ma tête, Adam m'aide à me relever. Prise d'un violent vertige, je retombe aussitôt sur mes fesses.

- Tout va bien Will ? me demande avec douceur Valentin.

- Oui, oui, assuré-je.

Je cligne plusieurs fois des yeux pour chasser mon tournis. Le frère de Logan, qui me tient toujours le bras, m'interroge silencieusement du regard. Je lui fais signe que tout va bien alors il tente une deuxième fois de me remettre sur mes pieds. Un violent mal de crâne m'accueille, une fois debout. Au moment de partir, Jaz demande à vérifier la blessure d'Adam. Toujours ouverte et suintante, elle prépare de nouveau son matériel pour faire les points de sutures mais, les mains tremblantes d'émotion, elle se retrouve dans l'impossibilité de recoudre la plaie. Le français pose la main sur son épaule dans un geste de réconfort :

- Je pense qu'un gros pansement fera l'affaire jusqu'à l'infirmerie, affirme-t-il d'une voix apaisante.

Mon amie acquiesce, remballe ses affaires sans un mot avant d'appliquer une compresse le long de l'entaille et d'enrouler de la bande autour. Ceci fait, nous reprenons notre route. Tout le long du chemin, les garçons font preuve de beaucoup de précaution et de gentillesse pour nous accompagner jusqu'en bas, nous aidant à franchir les passages les plus compliqué.

Enfin arrivée au dortoir, les garçons poursuivent leur chemin jusqu'à l'infirmerie. Valentin a eu beau insisté pour que je les accompagne afin d'examiner ma tête, j'ai refusé, assurant que j'allais bien. Durant la descente, mes vertiges ont cessé d'eux-mêmes et mon mal de crâne s'est peu à peu mué en douleur sourde, semblable à n'importe quelle migraine. Rien qu'un doliprane ne puisse endiguer, en tout cas. Quant à Jaz, en dépit de toutes les tentatives de nos compagnons pour alléger l'atmosphère, elle s'est tenue en retrait, recroquevillée sur elle-même, la tête enfoncée entre ses épaules, pendant toute la descente. Alors, au moment de nous séparer pour chacune entrer dans sa chambre, je lui tends la main avec un sourire bienveillant. Reconnaissante, elle la saisit, la presse délicatement avant de la relâcher et de pénétrer dans sa chambre.

Dans la mienne, un sandwich et une bouteille d'eau ont été déposé sur mon bureau, sans doute à la demande de Karen après que les autres l'ont prévenue de notre retard. Pourtant, je n'y touche guère, le mordillant du bout des dents sans vraiment y toucher. Oui, moi qui avais insisté pour manger ce soir...  

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top