Le Commencement
« Marre de me faire prendre pour une conne ! » se dit Laura, après avoir vérifié son téléphone pour la dixième fois de la journée, journée qui était loin d'avoir fini malheureusement pour elle. Encore un qui ne donne plus signe de vie après qu'elle ait refusé de l'embrasser au premier rendez-vous.
Laura écume les sites de rencontre pas pour le plaisir mais dans le but d'écrire un article pour un célèbre magazine féminin. C'était l'idée de sa boss, Angelina, une grande blonde aux jambes élancées, qui voulait attirer de nouvelles lectrices, plus actuelles, en clair, plus jeune, plus tendance. Quand Angelina lui avait donné le nouveau thème de son article, Laura avait directement refusé, il était hors de question pour cette jeune trentenaire de faire le tour des sites de rencontre. Elle trouvait cela vide sens et sans intérêt. Laura avait une conception de la rencontre amoureuse assez traditionnelle de par les nombreuses romances qu'elle avait lu et vu. Angelina le savait, c'est pour cela qu'elle avait prévu un argument de choque : Une double page dans le magazine avec en prime son article en titre principal en couverture, elle qui n'avait droit qu'à un encart de vingt ligne environ en dernière page de magazine. C'était l'opportunité rêvée de prouver ce dont elle était capable. Pour avoir plus de choix sur les sujets de ses prochains articles et pourquoi pas par la suite avoir une page entière rien que pour elle. C'est pour cela qu'elle avait accepté ce challenge.
Mais elle se retrouvait maintenant prise à son propre jeu. Elle commençait doucement à apprécier ses échanges incognito sur internet et espérait secrètement trouver enfin chaussure à son pied, même si elle se refusait à l'admettre. Car côté sentimental, on ne peut pas dire que Laura avait une vie trépidante. Elle était célibataire depuis bientôt quatre longues années, sa dernière relation lui avait laissée de grave séquelle à son égo et surtout à son petit cœur d'artichaut. Se retrouver seule devant le maire avec la famille et la belle-famille en arrière-plan n'est pas des plus agréable. D'autant plus que les seuls absents sont sa meilleure amie et son futur époux qui soit dit en passant s'envoyés en l'air dans la voiture qui devait les conduire vers la lune de miel.
Laura regarda encore une fois son téléphone dans l'espoir de voir apparaître un signe de vie de son prétendant de la veille, en vain. Dépitée, elle jette son téléphone sur le canapé et reprend son ordi pour écrire les premières lignes de ce foutu article qui lui rappelle indirectement sa solitude. Elle est vite interrompue par Milki, son chat, qui en a décidé autrement. Posé sur la table basse devant elle, il fixe Laura avec intensité et émet un faible miaulement indiquant qu'il est dix-neuf heure soit l'heure d'approvisionner sa gamelle. Laura lève les yeux en l'air d'exaspération mais se résigne à se lever une nouvelle fois pour satisfaire Monsieur Milki, seul mâle qui partage sa vie à l'heure actuel.
« Je vais finir comme Mme Cochard du 3ème, seule avec Milki 4ème du nom sur mes genoux devant Question pour un champion. Quelle triste vie... ». Une fois avoir rempli la gamelle de monsieur, elle retourne une nouvelle fois devant son ordinateur, à la recherche de l'inspiration pour écrire un article pertinent tout en étant décalé. Cependant, elle est de nouveau dérangée, pas par Milki cette fois-ci, qui mange goulument sa ration journalière mais par son téléphone qui sonne. Elle se met à le chercher désespérément dans le canapé rempli de coussins, magazines et notes. Bien entendu, elle ne le retrouve qu'une fois qu'elle a raté l'appel. Elle est espère secrètement que c'est Juan Carlos qui la recontacte suite à l'agréable soirée qu'ils ont passé ensemble hier, même si elle a refusé de l'embrasser. Mais la déception fait de nouveau son apparition, ce n'est pas Juan Carlos mais Mona, une bonne amie qui est dans sa vie depuis bientôt trois ans. Mona est comment dire, une artiste bohème, un tourbillon de vie, son maître mot « Fais ce que tu veux quand tu veux et où tu veux, on a qu'une vie » de ce fait, elle évite toutes contraintes. La notion de travail pour gagner sa vie lui est étrangère, en même temps lorsque que l'on est à la tête d'une fortune estimée à 15 milliards d'euros c'est plus facile d'éviter les contraintes comme calculer un budget pour les charges. A côté de cela, c'est une personne très simple qui n'attache aucune importance au niveau social de son entourage, contrairement à ses parents qui sont de purs aristocrates et qui ne côtoient que les personnes avec un pédigrée selon elle.
Mona et Laura se sont rencontrées dans le cadre du magazine, Angelina avait demandé à Laura de la suivre pour l'interview de Mona. Laura, bonne patte, l'avait suivi sans trop d'enthousiasme, rencontrer une gosse de riche ne l'enchanté pas trop. Elle n'était pas issue de ce monde-là, ses parents sont de petits commerçants qui ont sué sang et eau pour lui payer une partie de son école de journalisme. A côté, elle avait enchaîné des petits boulots d'étudiants pour subvenir à ses besoins, car une chambre de bonne avec WC sur le palier à Paris coûte horriblement cher.
La rencontre entre Mona et Laura fut un coup de foudre amical. Laura fut scotchée par sa spontanéité, son humour et son franc parlé. Elle qui était tout l'inverse, timide, maladroite avec un humour particulier pour ne pas dire bizarre. Mona l'avait salué comme si elles se connaissaient depuis des années et leur amitié commença.
Laura décide donc de rappeler Mona pour savoir ce qu'elle veut, à tous les coups c'est pour lui proposer de l'accompagner à l'exposition de son ami américain sur les quais de seine et en même temps essayer de la jeter dans les bras d'une énième connaissance, car Mona adore les histoires d'amours que l'on trouve dans les téléfilms de M6 l'après-midi. Laura adore aussi ses films mais elle a conscience que ce n'est que de la fiction, malheureusement dans la vraie vie les choses ne sont pas si simple, les gens ne te courent pas après pour te dire qu'il t'aime, que tu es la femme de leur vie et qu'ils veulent des enfants, un chien et une maison avec un jardin. Les gens séduisent, prennent un verre et ne donnent plus signe de vie.
- Allo ? Mona ?
- Laura ! Enfin tu te décides de me rappeler ! Depuis hier soir j'essaie de te joindre. Qu'est-ce que tu foutais ? Tu as enfin dépoussiéré ta caverne ?
- Non ! Je t'ai dit d'arrêter avec ces expressions ! Hier je ne t'ai pas répondu car j'étais en rendez-vous avec J-C.
- Alors ?! C'était comment ? Pourquoi tu ne m'as pas appelé pour me raconter les détails ? Ou carrément me demander de passer pour tu puisses me dire s'il en a une grosse ? S'il t'a fait crier de plaisir !
- Non mais t'es pas bien meuf ! T'es sérieuse ?! Je te rappelle que ces dates organisés sont pour l'article que j'écris ce n'est pas pour le plaisir ! Pas de personnelle dans le cadre professionnel.
- Ça va, détends toi ! Je rigole, enfin bref... Avoue quand même que tu peux joindre l'utile à l'agréable. Et puis tout le monde utilise les sites de rencontre maintenant pour trouver l'amour comme pour un coup d'un soir. Donc comment ça s'est passé avec Jésus Christ ?
- C'est Juan Carlos et non Jésus Christ ! Bien jusqu'à qu'il tente de m'embrasser.
- J'imagine que tu l'as repoussé, hein ?
- Ben oui ! J'allais pas l'embrasser le premier soir quand même !
- Le premier soir ? Je croyais que « Pas de personnelle dans le cadre professionnel » Et comment ça le premier soir ? Tu comptes le revoir ?
- Bennn, je comptais au début mais silence radio depuis qu'il m'a raccompagné jusqu'au taxi.
- Alors laisse tomber, tu trouveras mieux comme mon copain Anton, tu sais l'américain qui expose ce soir sur les quais de seine ! Tu t'en rappelles je t'en ai parlé la dernière fois ?
- Oui ! j'imagine qu'il faut que je t'accompagne ce soir ? J'ai rien à me mettre pour ce genre d'évènement Mona.
- Genre ça me pose un problème ? J'ai déjà tout prévue une petite robe rouge Givenchy avec des bottines noires avec des reflets émeraude de Louboutin et un perfecto que j'ai trouvé chez Dior la semaine dernière. J'arrive chez toi dans 10 min, je suis en chemin.
- Je t'ai dit que je n'aime pas que tu me prêtes tes fringues ! J'ai mes propres fringues je te signale. Je suis pas ta pote pour que tu me prêtes tes fringues de grandes maisons de couture.
- Ça va, ça me fait plaisir ! j'adore j'ai l'impression de retomber en enfance, tu es un peu ma poupée que j'adore habiller. Tout te va ! j'en profite ! En plus, les bottines sont trop petites pour moi, je fais du 40 et c'est du 37 comme toi, avec ma grosse poitrine la robe me rend vulgaire tandis que toi tu seras sophistiquée dedans. Et enfin le perfecto c'est juste pour parfaire la tenue. Et puis je sais que tu n'es pas une personne vénale, tu ne me demandes jamais rien. Je dois me battre à chaque fois pour que tu acceptes que je t'offre quelque chose.
- Tu veux m'offrir des choses démesurées, une maison, une nouvelle voiture ! Ce n'est pas des cadeaux lambda !
- C'est vrai, tu marques un point ! Mais là pour une robe, des bottines et un perfecto ça va, tu ne vas pas me refuser ce plaisir quand même ?
- Non pour cette fois ça va ! Bon je te laisse arriver, je file à la douche alors ! Tu fais comme chez toi, tu rentres et tu prends tes aises !
- Oui comme d'habitude, t'inquiète j'ai ma clé, aller cours à la douche car on n'est pas en avance, l'expo a commencé depuis une heure déjà !
- Quoi ?! Je file à la douche maintenant, bisous à tout de suite.
- A toute de suite, bisou Lau.
Une fois le téléphone éteint, Laura file à la douche comme prévue. Sous la douche, elle entend la porte d'entrée s'ouvrir et se claquer comme le fait souvent Mona. Une fois la douche finie, elle la rejoint dans le salon emmitouflé dans son peignoir rouge, un vestige de son ancienne vie. Mona la regarde attendrit et lui tend les vêtements, bien entendu, elle a pris le soin de choisir déjà les sous-vêtements assortis dans les affaires de Laura.
Une fois habillée, elle file à la salle de bain pour essayer de dompter sa chevelure rebelle. Laura souffle devant son miroir, elle aimerait tellement avoir la chevelure flamboyante de Mona qui porte les anglaises très bien. Elle doit se contenter de ses cheveux bruns ni bouclés ni raide, un mélange d'ondulation désordonné. Laura appel au secours Mona pour trouver une coiffure correcte pour la soirée. Cette dernière arrive avec épingles, élastiques et boucle le tout en cinq minutes chrono. Laura se retrouve alors avec une tresse qui donne un effet « coiffé décoiffé » avec un coté sophistiqué. Mona fait des merveilles avec ses cheveux. Laura passe maintenant au maquillage, ce n'est pas qu'elle n'aime pas le maquillage, c'est juste qu'elle ne sait pas l'appliquer, au grand damne de Mona qui connait la fonction de chaque pinceau et instruments de make-up. De ce fait, Laura reste assez basique, un peu de rouge à lèvre carmin, un trait d'eyeliner sur le dessus de la paupière, une BB crème et un peu de mascara. Un peu de parfum pour parfaire le tout et c'est parti.
Entre temps Mona a commandé un Uber pour pouvoir profiter de la soirée, le temps de descendre les quatre étages, la voiture est déjà là. C'est parti pour une exposition sur les quais de Seine et rencontrer ce fameux Anton.
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