Chapitre 9

Pour être sûr de ne pas louper Zara, le lendemain matin, j'ai dormi dans le canapé. Comme ça, je l'entendrais se lever. J'étais tellement pressé que je ne dormis que quatre heures cette nuit là. Zoé sortit au beau milieu de la nuit. A en juger par son attitude et son parfum qui sentait à cent mètre à la ronde, elle devait aller en boite de nuit. Elle ne revint que vers six heures du matin et elle semblait légèrement alcoolisée. Ensuite, ce fut Efia qui a sept heures du matin se leva et m'annonça qu'elle allait faire les courses puis à son cours de yoga. Zélie fila comme une voleuse dans les alentours de sept heures trente. Et enfin, Zara se réveilla à neuf heures. Kris la suivit  et sonna une demie après. Au même moment, je fis semblant de d'émerger  à mon tour. J'eus le droit à un check de Kris et à un grognement de Zara. Ce qui ne l'empêcha pas de me préparer des tartines au beurre et un bol de céréales.

Je la remerciai, remuant mollement mes céréales. Kris prit son petit déjeuner en même temps moi tandis que Zara fourra dans son sac un paquet de gâteaux. Je la sentais s'activer un peu partout dans l'appartement. Vu comment Kris rigolait, elle avait l'air en retard. Plusieurs fois, elle s'énerva contre son réveil qui n'avait pas sonné à l'heure et contre Wisa qui tournait autour d'elle. Zara impétueuse ? Mais pas du tout ! Finalement, une petite demie plus tard. Elle s'installa à côté de Kris et moi, qui n'avions toujours pas finit de manger ayant commencé une conversation sur Megan Rapionoe. Surpris, je stoppai ma tartine entre l'assiette et ma bouche.

- Je suis en distanciel. A cause de la fièvre grise la fac nous fait faire certains cours à distance, m'expliqua-t-elle agacée.

J'hochai la tête, et immédiatement, je me demandai si Mia elle aussi faisait ses cours via un ordi. La réponse était certainement oui. Même si, je ne croyais pas que ça est une quelconque utilité. La mère de Sophia écrivait que ne c'était pas une maladie contagieuse. C'était certainement pour bien se faire voir, montrer que les universités prenaient la fièvre au sérieux. Elle nous demanda ne pas faire trop de bruit durant deux petites heures. Enfaite, elle ne nous demanda pas, elle nous ordonna. J'avais trop peur de finir découpé en rondelle ou de finir une balle entre les deux yeux, alors je me tus. Je finis rapidement mon petit déjeuner puis je m'éclipsai dans la chambre, pour ne rien faire. Ne voyant plus rien, j'aurais cru que Zara parlait dans le vide. N'empêche, elle allait vraiment à la fac.

Mais, je me suis rapidement rendu compte qu'elle n'était pas en cours. Elle rigolait trop souvent, parlait vulgairement. Zara s'amusait trop pour être en cours. Mais je fis aucun commentaire. A la place, je formai une sorte de plan dans ma tête. Et si elle m'emmenai à une de ses répétions ? Je pourrai, non seulement, l'entendre chanter mais peut être aussi prendre des photos. J'avais mon téléphone depuis trois ans, je connaissais les touches par cœur, je saurai donc aller sur l'appareil photo et prendre une photo ou une vidéo. Mais pour ça, fallait il encore que Zara accepte de m'emmener avec elle. Les deux heures passèrent lentement, très lentement. Avec Kris, on s'enferma dans la chambre où j'avais dormis il y a deux jours. On discuta un peu de tout et de rien. Nous fîmes un peu plus connaissance. Je lui expliquai comment j'avais connu Mia au collège, comment j'avais perdu mon père ainsi qu'une bonne dizaine d'anecdotes. Lui, il me raconta comment ses parents avaient divorcés, qu'il avait été vivre chez sa mère avec sa sœur à Munich. Il maitrisait donc l'Allemand. Et, il était revenu en France il y a quatre pour poursuivre des études en marketing. Un bel avenir tout tracé. C'était le gars typique. Dans dix ans, il aurait un bon taff, une femme et un enfant. Sa vie était prévue. Mais Zara était arrivée. Il me raconta également comment il l'avait rencontré. La rencontre la moins poétique du monde, mais surement la plus originale. Dans un commissariat. Zara y avait été convoqué après avoir été accusé d'agression avec arme blanche contre un garçon plus âgé. Kris, lui, était venu voir sa mère qui travaillait là-bas. Zara avait été libéré quelques heures plus tard, ayant un alibi en béton. C'est ainsi que les deux êtres les plus incroyables du monde c'était rencontré. On a beaucoup rit. Et enfin, vingt minutes avant la fin du " cours " de Zara, Efia appela Kris pour lui dire qu'elle allait mangé avec une amie. En conclusion : Zara, Kris et Moi allions déjeuné ensembles. 

Je découvris l'absence de talent culinaire de Zara. Son poulet était sec et trop salé, quand à ses pâtes, elles, elles n'étaient pas salées. Heureusement que Kris savait cuisiné, sinon on serait mort de peur. Au final, on mangea un gratin dauphinois. Nous rigolâmes énormément durant le repas. Kris tenta d'expliquer comment utiliser un fou à Zara, tandis qu'elle lui rabâchait qu'elle savait cuisiné mais que le matériel de l'appartement était trop ancien. Moi, j'assistai à leur scène de ménage. Ils me faisaient rire. Je me demandai ce qui les retenait, pour qu'ils se mettent en couple. Quand Zara refusa d'admettre, pour la quinzième fois, qu'elle ne savait pas cuisiner, je me lançai et demandai :

-   Euh...Zara, tu fais quoi cette après-midi ? Il y eut un silence gênant. Puis, ce fut Kris qui me répondit :

- Hum...cette aprem... t'as pas répèt avec les Phoenix ? Zara a confirmé. Et, évidement, je demandai qui était les " Phoenix "

- C'est mon groupe de musique. On est six. Ensemble, on créé des chansons et on fait des petits concerts. Tu peux venir si tu veux, me répondit Zara.

J'étais heureux, car je n'avais pas eut besoin de demander. Peut être que finalement, on allait bien s'entendre. Mais bon, je ne faisais pas d'idées. Zara était Zara. Et même si je ne la connaissais que depuis deux jours, je savais très bien son fort caractère et son habitude qui consistait à s'emporter dès que quelque chose ne lui plaisait pas. On prit rapidement le dessert, de simples yaourts, puis, Kris nous a fait monter dans sa voiture. J'étais accompagnée de ma fidèle Wisa. Le trajet dura dix minutes. Je sentais Kris s'engager dans une sorte de petite ruelle. A l'arrière, Zara commençait à s'impatienter. Enfin, Kris se gara je ne sais où. Il me guida jusqu'à l'intérieur. Je dû négocier avec Zara pour pouvoir emmener Wisa.

Les locaux des Phoenix sentaient l'urine et les poubelles. Même si je ne voyais pas, je pouvais deviner les tags un peu partout sur les murs et des mégots gisant sur le sol. C'était les locaux clichés. Kris et Zara m'emmenèrent jusque dans une sorte d'amphithéâtre. Là, je sentis qu'il y avait plusieurs personnes. Ce sont elles qui sont venues vers nous.

- Hey, Zara ! Pour une fois t'es à l'heure ! ricana une voix de femme. Elle salua également Kris, et enfin, remarqua ma présence.

- C'est Romain, il vit avec nous maintenant. Il vient vous écouter, lui dit Kris. Je l'entendis ajouter plus bas que j'étais aveugle. La femme se présenta : elle s'appelait Valérie, surnommée Val. Val était la guitariste du groupe. Après elle, je rencontrai un jeune homme de dix-sept ans, nommé Ilyan, chanteur et batteur. Kris m'informa qu'il manquait deux garçons et une femme. Il m'emmena m'installer sur des sièges, que je devinais devant la scène. Les Phoenix commencèrent à jouer, tout en rigolant. C'est à ce moment-là que je me rendis compte que je n'étais pas à ma place. J'étais un inconnu, qu'ils avaient accepté d'accueillir le temps d'une répète, mais ça s'arrêtait là. Le seul ami que je m'étais fait depuis le début de la Fièvre Grise, était Kris. Et lui-même, n'avait pas l'air à sa place. Il y avait comme une sorte d'aura jalouse qui se formait autour de lui quand Zara approchait quelqu'un d'autre. Jalousie ou possession ? Je n'en avais pas la moindre idée. Dix minutes passèrent. Et de nouveau, des personnes entrèrent. Je ne savais pas quelle taille avait la salle mais je crois qu'ils sont entrés derrière nous. Ils étaient au nombre de trois. Kris me les a présentés rapidement. Les deux garçons étaient des frères, Sohan et Issa, avec Zara, c'est eux qui écrivaient les chansons et qui les interprétaient. Et la fille, elle s'appelait Isabella, elle maitrisait toutes sortes d'instruments, mais sa spécialité c'était la guitare électrique. Quand les Phoenix furent au complet, ils commencèrent leur répétition. Je ne connaissais pas la plupart des chansons qu'ils reprenaient. A vrai dire, ma culture musicale se limitait aux chanteurs et aux groupes connus ainsi qu'aux musiques de films. J'appris vite à mes dépends, qu'applaudir ou féliciter n'était pas une bonne idée, et revenait à se foutre la honte. Ils ont eu le temps de chanteur cinq chansons, et de revoir la composition d'une autre.

Mais, il y a eu un autre groupe : Les Trois Mousquetaires. Leur présence ne me mettait pas en confiance. Les portes ont claqué, quand ils sont entrés. Ils étaient neuf, de mémoire. Kris m'a expliqué que les locaux n'appartenaient pas qu'au Phoenix, que d'autres groupes venaient répéter ici. Je sentais qu'il allait y avoir un conflit. Je commençai à regretter d'être venue ici. Kris m'a dit de rester calme et de ne pas bouger, que Zara et sa bande allait régler le problème. Mais, je sentais que ça allait dégénérer. Des rires, du côté des Trois Mousquetaires, ont commencé à retentir. Je pouvais sentir la tension dans l'air.

- On s'était mis d'accord, aujourd'hui c'est à nous. Qu'est-ce que vous voulez, encore ? demanda Zara. On sentait l'agacement dans sa voix. Le gars en face d'elle a ricané, à ce moment précis, j'étais sûr que ça allait déraper.

- Tu t'es mise d'accord avec toi-même ! Moi j'suis pas ok, maintenant, dégagez.

- Sinon ? a menacé Val en ricanant, elle aussi.

- Sinon, je te laisse imaginer, a répondu le gars. Les Phoenix ont commencé à rigoler à leur tour. Ils étaient moins nombreux, pourtant, je savais qu'il ne fallait pas les chercher. Je ne connaissais pas les Trois Mousquetaires, mais pour moi, ils n'auraient pas dû chercher Zara. Wisa s'est mise à remuer à mes pieds. Elle, aussi, sentait la tension. Kris s'est crispé, à côté de moi.

- Je te le répète une dernière fois : toi et tes oiseaux vous bougez. Sa menace eut comme seul effet de faire marrer les Phoenix. Un coup partit. Je n'étais pas prêt. J'ai senti le poing de Zara claquer contre la figure du type. Ce fut le coup d'envoi. Les coups volèrent, les insultes fusèrent. En quelques secondes, la scène s'était transformé en un impitoyable champ de bataille. Kris s'est immédiatement levé, il a pris la laisse de Wisa et m'a agrippé le bras pour me lever de force. J'ai compris qu'il voulait que je dégage, avant de me prendre un coup. Mais, avant que Kris ait le temps de me faire sortir, j'ai pu entendre une phrase qui m'a marqué :

- Bah alors, t'aime pas qu'on parle de papa, hein ? Je savais que c'était adressé à Zara. Kris m'a amené dehors, et je l'ai entendu appeler la police. Alors, ils étaient si provocateurs et rancuniers que ça pouvait à ce point devenir violent ? La police mit une dizaine de minutes à arriver et ils séparèrent les deux groupes. Un des flics ramena Zara à la voiture.

- Bon, j'aurai besoin que vous me dites ce qui s'est passé, a dit le policier. Impossible que Zara parle, elle a trop de fierté, trop d'honneur, et un égo à redorer. Et moi, qu'est-ce que je pouvais bien dire ? Je n'avais rien vu. Quant à Kris, il prendrait le partit des Phoenix. A mon grand étonnement, c'est Zara qui a parlé en premier. Elle a tout assumé.

- Ils venaient parler, je me suis énervée. Les policiers confirmèrent cette maigre version auprès des autres membres et s'en allèrent après une demie heure passé à recueillir des informations et à sermonner les chanteurs. Quand la police donna l'accord à Zara de partir, elle nous annonça qu'elle allait rentrer à pied, et passer devant la boulangerie. Avec Kris, on montait dans la voiture pour retourner au petit appart d'Efia et ses filles. La phrase du type des Trois Mousquetaires me revenait sans cesse en tête. Au final, j'ai fini par poser la question :

- Dis, Kris, Efia est veuve ou divorcée ? C'était bizarre de demander ça. Ça me regardait en aucun cas mais j'étais trop curieux, et je n'ai pas pu m'empêcher de poser cette question. Kris est resté sans voix pendant une petite minute. Je me demandais s'il allait me répondre. Il a hésité. Je le sentais, c'était une évidence. La voiture a également ralenti. Il a dégluti, avant de me répondre :

- C'est compliqué, et c'est une longue histoire... De toute évidence, il ne voulait pas me répondre, ou m'en parler. Soit parce qu'il n'en avait pas envie, ou parce que Zara lui avait fait jurer d'en parler à personne. Pourtant, il a fini par continuer et me raconter brièvement l'histoire de Zara et de ses sœurs.

- Efia vient d'Afrique du Sud, elle a rencontré son mari dans un projet qui visait à aider les immigrés. Il venait de Corée du Sud. Ils devaient tous les deux avoir la vingtaine. Ils ont Zara, puis Zélie, et trois mois après la naissance de Zoé, leur père est retourné en Corée. Zara avait six ans, elle voulait partir avec lui. Mais il l'a laissé. Efia s'est retrouvée seule avec trois filles et elle ne travaillait pas.

Il m'avait dit ça d'une voix faible, triste. Comme si c'était un secret d'état. Mais j'ai compris. Et j'ai également compris pourquoi Zara n'en parlait pas, pourquoi elle voulait paraitre si forte. Je n'ai pas répondu. De toute façon, qu'est-ce que je pouvais répondre à ça ? Ça aurait été Zara, j'aurais pu lui répondre que j'étais désolé et que je la comprenais, ayant moi aussi perdu mon père, mais c'était Kris qui m'avait raconté son histoire. Et au fond, j'avais un peu honte de moi, honte de ne pas avoir eu le courage de lui demander à elle. La pluie s'est mise à tomber, et on est rapidement rentré. Efia et Zoé étaient de retour. Je ne les regardai plus comme avant. Enfin, je ne les voyais plus comme avant. Elles paraissaient différentes.

- Je commençais à m'inquiéter ! nous dit Efia quand nous rentrâmes. Mais elle se rendit vite compte de l'absence de sa fille aînée. Kris tenta la rassurer en lui disant qu'elle passait à la boulangerie, et en omettant la bagarre. Cette fameuse bagarre m'en avait dit long sur les Phoenix. Ils étaient impulsifs, et Zara était leur leadeur.

Zara ne rentra qu'une demie heure plus tard avec une baguette à la main. Elle sentait le tabac. Efia a dû le remarquer mais elle n'a rien dit. La fin de journée fut silencieuse, et le silence pesant. Je trainai dans l'appartement, Kris est repartit et Zara s'est enfermé dans sa chambre. Dans les alentours de dix huit heures trente, Efia me demanda d'aller chercher une veste pour elle dans la chambre de Zara.

- Qu'est ce que tu veux  ?

- Une veste, pour ta mère. Zara m'en a jeté une dans les bras. La tension dans l'air était palpable, j'ai déglutit avant de la remercier. Puis, je suis retourné dans la pièce principale pour donner la veste à Efia. La matriarche me proposa de l'aider à préparer le repas, chose que je ne pus refuser. On cuisina des lasagnes au saumon.

- Au fait, Zélie amène le Docteur Meyer pour le dîner.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top