Chapitre 2 : Les Fils du Ténébreux
Je rêve...
Mes yeux rencontrent immédiatement les siens, bleus comme ceux d'un nouveau né. Ses cheveux bruns sont trempés et en bataille, plus long qu'avant, ses lèvres ouvertes de stupeur. Comme les miennes.
Les mots sortent d'eux-même :
- Nom d'un putain de bordel de cul de mammouth de merde, souffle-je tout à fait normalement.
- Emma ?!?, répète-t-il, sous le choc.
Je ne réponds pas, les yeux plantés sur ce visage que je connais par cœur. Lentement, je me relève avec précaution, ainsi que la personne que je viens d'heurter. Je le dévisage sans savoir comment réagir. Je dois pleurer parce que je viens de le retrouver ? Ou bien le frapper pour qu'il m'explique ce qu'il se passe ? Est-ce une blague ? Je me suis trompée quelque part, c'est ça ?
- Emma, qu'est-ce que tu fais là ?!, me demande-t-il, dévasté.
- Qu'est-ce que moi j'fais là ?, m'étrangle-je.
- Mais d'où tu sors comme ça ? Oh, Em, tu m'as tellement manqué !
Il commence à s'approcher de moi à grands pas, ouvrant ses bras, les yeux luisants et un sourire béat scotché sur la figure. Je n'ai à cet instant qu'une envie : me fondre dans ses bras et me mettre à pleurer comme la petite fille qu'il a connue. Au lieu de quoi je recule de trois pas en plaçant mes mains face à lui, comme pour le repousser.
- Je répondrais à aucunes de tes questions tant que tu m'auras pas dis ce qu'il se passe !
- Mais Emma ! C'est moi ! Tu me reconnais pas ?
- Je sais parfaitement qui tu es, merde ! Tu me prends pour qui ?
- Emma, chuchote-t-il simplement sans que ça paraisse être une réponse à ma question.
Il croise ses mains derrière sa tête et la serre, se mordant les lèvres pour se retenir de pleurer. Il plaque ses paumes sur ses joues en regardant la rue vide autour de nous.
- Merde, j'arrive pas à y croire...
- T'es le fils de Gold !, m'écrie-je, sentant des larmes de rage monter (C'est assez frustrant de chialer lorsqu'on est en colère. Ça retire toute crédibilité.) NE T'APPROCHE PAS DE MOI, CLARK SWAN ! UN PAS DE PLUS, ET J'TE PLANTE !
Il stoppe tout geste. Ses bras retombent le long de son corps, et des larmes commencent à couler le long de ses joues - anecdote : j'ai vécu avec lui depuis que j'ai treize ans, et jamais je ne l'ai vu pleurer. Je vois bien sur ses lèvres qu'il continue à murmurer mon prénom, hébété, incrédule, ahuris par ma présence. Malgré la folie que représente pour nous cet événement, je me rends tout de même compte que c'est la première fois que je le revois depuis mon arrivée à Storybrooke. Depuis mon anniversaire. Depuis le vingt-deux mai dernier. Et nous sommes fin août.
Le visage de marbre, je l'épie de haut en bas, regardant en quoi il a changé. La première chose qui me marque est sa corpulence volatilisée : il a maigri. Son teint est jaunâtre, une fine barbe recouvre le bas de son visage, des poches noires tirent sur ses paupières inférieures mais la même étincelle brille dans son regard. Je ne sais pas si c'est ma fatigue, notre course poursuite, ces retrouvailles ou le simple fait de le revoir qui réveille en moi la petite Emma du bon vieux temps. Mais il n'en est pas moins que je fonds en larmes et me précipite dans ses bras. A cet instant, j'oublie Gold, Damen, Caleb, Regina, Cora, Crochet, les Cullen, mes parents, Neal Laurens et Storybrooke. J'oublie tout ce qui a suivit le soir de mes seize ans : Henry, ma vie de Shérif, l'escapade à Boston avec Damen, mes galères contre le maire, mon combat contre des vampires, mes retrouvailles avec mes parents, mon aventure à Narnia...
Tout ce qui m'importe, là, maintenant, c'est le moment présent. Et le connard que je sers contre moi.
- Clark !, piaille-je pitoyablement, mon nez enfoncé dans sa veste en cuire de Shérif. Clark ! Clark !
- Oh Emma, tu peux pas savoir ce que tu m'as fais subir ! Je savais que t'allais te barrer avec ce gosse, je le savais ! Merde, Emma, merde quoi...
- Tu m'as manqué...
- J'crois que t'aurais du mal à avoir plus souffert que moi. (Il me détache légèrement de lui, le visage transformé en fontaine.) Oh regarde-toi, ma belle, t'es magnifique ! Oh Em, ce que t'as changé ! T'as régimé ou c'est comment ?
- Je me suis hybridée, ouais !, croasse-je, mélange entre le rire et le pleure. Et toi, qu'est-ce que t'es devenu ? On dirait un mort-vivant !
- Je te l'ai dis, ton départ a été... dur. Avant que tu n'arrives, je trouvais ma vie parfaite, mais t'avoir vu grandir et t'épanouir ne serait-ce que trois petites années... ça m'a fait me rendre compte que j'avais besoin de toi pour vivre. Je te considère comme ma sœur et comme ma fille, Em. Jamais je pourrais comprendre ce lien, mais jamais je ne pourrais le rompre, tu m'entends ? Maintenant que je t'ai retrouvé, je te laisserais plus jamais repartir Là-bas. Plus jamais ! Personne n'a le droit de t'emmener loin de moi. T'es ma famille, t'es ma sœur et t'es à moi, Emma Swan.
Les yeux baignés de larmes, je regarde son visage si haut par rapport au mien (je ne lui arrive pas aux épaules) et me remets à pleurer.
+++
- Avant de parler de ce qu'on a fait ces derniers mois, je veux savoir la vérité.
- Demande. Je te dirais tout ce que tu voudras.
J'hoche la tête, un semblant de satisfaction me faisant à moitié sourire. S'il est honnête avec moi, tout ceci se passera peut-être sans casse dans notre relation, bien qu'elle ne sera plus jamais la même.
Depuis nos glorieuses retrouvailles, on a prit du recul sur l'endroit où nous étions (une ruelle vide et détrempée). Il m'a conduit dans un bar et s'est servit un verre de scotch, histoire de faire passer le choc de cette rencontre imprévue, pour lui comme pour moi. Je me tiens assise face à lui sur une table, ma tasse de chocolat chaud à la cannelle face à moi. J'évite de trop le regarder dans les yeux. Clark ne sait pas que je ne suis plus à lui. Je ne pourrais plus jamais m'installer à Boston avec lui. Nos soirées pizzas, nos délires au poste, les fous rires avec nos collègues policiers, mes courses derrière des bandits et mon oreillette bien en place, sa voix résonnant dedans pour me booster et me rassurer lorsque j'avais peur de passer les menottes à un géant de deux mètres aux joues balafrées de cicatrices... J'aime Clark, mais tout ceci n'existera plus.
Il ne sait pas que j'ai retrouvé mes parents. Que je sors avec un mec, et que j'aime ce mec en plus de ça - et qu'il m'a souhaité bon voyage d'une manière assez déconcertante, vu qu'on aurait dit des adieux. Mais pire que tout, il ne sait pas que Gold m'attend.
- Tu savais qui j'étais quand tu m'as rencontrée ?, lui demande-je calmement.
Il prend une petite inspiration. Je risque un œil plus haut que ma tasse pour le regarder : il garde les yeux rivés sur ses mains, elles-même autour de son verre.
- Tu le savais, Clark ?, répète-je.
- Honnêtement... si j'avais su qui tu étais, je t'aurais fuis comme la peste.
Ces paroles ont sur moi l'effet d'une gifle.
Aussi violente que les images qui se bousculent dans ma tête.
Je pense à cette ruelle où, pauvre SDF que j'étais, j'avais volé une brioche au boulanger. Lorsqu'il m'avait choppé, l'homme m'a fouetté les mains à cinq reprises avec la boucle de sa ceinture, devant les passants bostoniens qui faisaient semblant de ne rien voir. Puis je m'étais cachée sous un pont, brûlante de fièvre et grelottante de froid en même temps. C'est là que la brigade de police avait arrêté le boulanger et sa femme. Et c'est là que les bergers-allemands s'étaient précipités sur moi en aboyant, signalant ma présence. Le premier flic à être venu à ma rencontre, c'était le Shérif. C'était Clark.
« Si j'avais su qui tu étais, je t'aurais fuis comme la peste. »
- Pourquoi ?, chuchote-je, ayant peur d'entendre ma voix dérailler si je parlais plus fort.
- A cette époque-là, lorsque je t'avais rencontré, je n'espérais qu'une chose : garder la vie normale que je m'étais reconstruite avec les années. Je voulais échapper une bonne fois à toutes ces conneries insupportables !
- T'es de Là-bas.
Un silence pesant plane au-dessus de nous. Ce doit être à cause de mon ton, à la fois accusateur et affirmatif.
- Oui, répond-il juste, yeux baissés.
- T'as jamais su que moi aussi ?
- Je l'ai deviné lorsque le gamin...
- Henry, rectifie-je.
- ... lorsqu'Henry est arrivé. Tu étais encore au poste, et j'avais pris ma journée. Il était environ dix-huit heure lorsqu'il s'est pointé à la maison. Je ne lui aurais pas ouvert la porte s'il ne t'avait pas réclamé. Il m'a dit : « Je cherche Emma Swan, elle fête ses seize ans aujourd'hui et je dois la ramener à Storybrooke. »
- Quoi ?!, m'écrie-je en levant complètement mon visage vers le sien. Il m'a jamais dit que... tu... qu'il...
Je me tais et le dévisage, hébétée. Mon changement d'humeur doit être visible, car Clark a l'air inquiet. Il fronce les sourcils en tendant le bras vers moi.
- Quoi ? De quoi tu parles ?
- Dix-huit heure ?!, m'étrangle-je,ahuris. Mais je suis arrivée une heure et demi plus tard, ce soir-là ! Ça veut dire que...
- Calme-toi, Emma, chuchote-t-il, paniqué par mon comportement.
- ... vous aviez déjà discuté avant mon arrivée ! Tu savais qu'Henry était au courant pour notre monde et tu l'as laissé m'emmener Là-bas !
- Comment t'as deviné si vite ?!, s'étouffe-t-il, choqué. Et je pensais que c'était mieux comme ça !, se justifie-t-il ensuite (déplorable).
- Tu mens, Clark !, crie-je en bondissant de mon siège, au bord de la crise de nerfs. Quand t'as découvert qui j'étais, tu voulais qu'Henry m'emmène loin de toi !
- Jamais !, s'offusque-t-il, scandalisé par mes propos.
- Tu l'as dis toi-même : « Si t'avais su qui j'étais, tu m'aurais fuis comme la peste ! »
- Non, je... écoute, installe-toi, je vais t'expliquer.
Je m'écrase sur mon siège, bouleversée par ces révélations. Clark essaie de prendre mes mains pour me calmer, mais je les retire de la table et les croise entre mes jambes pour me retenir de tout casser. Il attend quelques secondes, lui-même recouvrant son calme, avant de reprendre :
- En parlant avec lui, j'ai compris qu'il y croyait dur comme fer, et il m'a montré son livre. Once Upon A Time... Impossible de ne pas y croire. Je ne voulais pas te laisser partir, je te le jure. Je t'ai aimé dès l'instant où je t'ai découvert, Emma. Mais en apprenant qui tu étais... que tu étais Elle, la fille assez puissante pour vaincre la Méchante Reine... Quand j'ai su que tu étais la Sauveuse, j'ai pensé à deux personnes seulement. (Il plonge son regard azur dans le mien, quelque peu radoucit.) James et Blanche-Neige.
Il laisse quelques instants passer, le temps pour moi de reprendre mes esprits. Je me mets à respirer avec plus de régularité, et me prépare pour la suite.
- J'étais égoïste, se désole-t-il juste après. Je ne voulais pas te laisser partir avec ce garçon, parce que je savais que tu ne reviendrais jamais. Or, j'avais besoin de toi. J'étais partagé : je ne voulais pas te laisser affronter cette ville toute seule, mais je ne voulais pas retrouver mon monde non plus. Du moins notre monde. Je te l'ai dis, je faisais tout pour tout oublier.
- Parce que tu es le fils de Gold, conclus-je, rhétorique.
Je suis certaine d'avoir tout compris et d'être capable de le pardonner, mais son froncement de sourcils brise mon délire. Je copie son air.
- Mais c'est qui, ce Gold ? T'arrêtes pas de causer de lui !
Ça a toujours été comme ça : il a toujours recadré (ou massacré) n'importe quel garçon posant ses yeux sur moi. Sauf qu'il ne sait pas que Gold n'est pas un garçon, mais un homme. Et pas n'importe lequel...
- Rumpelstiltskin, lâche-je alors.
Il arrête tout mouvement et lève ses yeux bleus vers moi. Clark hausse les sourcils, le regard inquisiteur, une moue narquoise aux lèvres.
- Il est à New York ?, s'étonne-t-il.
- Pour retrouver ses fils. (Mon ton redevient énervé lorsque je reprends la parole.) Maintenant, tu vas me dire si t'es l'un d'eux. Et qui tu es, par la même occasion.
Il secoue la tête en me dévisageant, souriant. Un ricanement lui échappe tandis qu'il regarde les clients autour de nous. Sceptique, je ne cligne pas d'un cil et le dévisage, le regard dur.
- Tu me prends pour un des célèbres fils du Ténébreux, là ?, raille-t-il, amusé.
- Point de vu généalogie, je ne m'y retrouve plus, alors j'vais pas te coller l'étiquette du fils de Gold sur le front. Je veux juste que tu me répondes.
- Eh bien non. (Je fronce les sourcils.) Non, je ne suis pas un de ses fils.
Un soupire m'échappe, à la fois soulagé que Clark n'ait aucun lien de parenté avec Gold, et surtout ne pas être un de ses fils, à la fois dépitée de ne pas avoir réussi à mettre la main sur l'un d'entre eux. Je me tasse mollement au fond de mon siège, boudeuse.
- Mais alors pourquoi son globe nous a indiqué New York ?, ronchonne-je, n'y comprenant plus rien. Pourquoi est-ce que ça n'a pas... tout est incohérent.
- Il est malin...
Je me tais pour l'épier, surprise par sa prise de parole. Il sourit en hochant la tête, l'air à la fois étonné mais impressionné. Il ne me regarde pas.
- Qui ça ?, soupire-je.
- Il m'avait dit que ça marcherait...
- De qui tu parles ?
Il ne répond pas immédiatement, toujours souriant et surpris.
- Hier soir, il m'a lancé un espèce de sort pour fausser l'endroit où ils se trouvaient. (Il me regarde. Je dois avoir l'air perdu car il rectifie.) Avec ce sort, c'est comme si Gold avait un GPS qui ne conduisait qu'à moi alors que ses fils se sont taillés de l'autre côté.
- Quoi ?
- Un de ses gosses m'a lancé un sort qui ferait croire à leur père qu'il est à New York alors que lui et son frère se sont barrés, réexplique-t-il plus clairement.
- Attends, tu veux dire qu'aucun d'entre eux n'est à New York ?
- Non. A l'heure qu'il est, ils doivent être en plein milieu de l'Océan, s'esclaffe-t-il, toujours impressionné.
Je me fige sur mon siège, rabattant mon bras contre moi. Je remarque avec un temps de retard que mon chocolat chaud est renversé sur mes genoux. Le truc bien, quand on est en état de choc, c'est que tout ce qui se passe autour de nous nous ait indifférent. Ainsi, je ne sens pas mes jambes en train de brûler sous ma boisson fétiche (à moi et à Henry).
Bref, on s'égare.
- HEIN ?!, hurle-je (littéralement, ouais !) en bondissant sur mes pieds. Tu déconnes, j'espère ! Tu veux dire que le point rouge... Merde, quoi ! Ils sont ensemble ?
Clark regarde toujours un point sur le dossier du canapé, un sourire scotché sur les lèvres, hochant doucement le menton, impressionné. J'ai envie de le taper.
- Ça m'a fait bizarre de les voir si soudés, m'avoue-t-il, déconcentré et toujours aussi bouleversé. Les jumeaux de Rumplestiltskin se haïssent, tu peux me croire ! Mais là, ils avaient tellement les boules d'être retrouvés par leur père qu'ils se sont enfuit en Europe en deux temps trois mouvements ! (Il rit un peu avant de retrouver sa lucidité. Il pivote alors vers moi.) Oh, et si tu as une âme charitable, tu les laisseras s'enfuir, Em. Personne ne mérite d'être avec cet homme.
- J'ai passé un accord avec lui, et je compte bien le tenir, alors...
- T'as passé un accord avec lui ?, me coupe-t-il ENCORE une fois. Mais c'est le Diable, Emma !
- Non, c'est le Ténébreux ! Nuance ! (Je pose à plats mes paumes sur la table et me penche doucement en avant, les yeux électrifiant.) Maintenant, donne-moi leurs noms.
- Peter et Baelfire, me révèle-t-il automatiquement.
J'hoche la tête en absorbant complètement ces deux noms. Peter et Baelfire. Ce sont des prénoms très vieux, qui se marient à merveille avec ceux de notre monde : Blanche-Neige, Regina, Henry, Cora... J'acquiesce durement.
- OK, Peter et Baelfire. Tu sais où ils sont partis ?
- En Europe.
On avance...
- C'est grand, l'Europe !, m'exclame-je en ouvrant les bras. T'as pas une idée plus précise ?
Clark fronce les sourcils en se mordant l'intérieur de la joue.
- Non, désolé...
- Tu mens.
- C'est pas ça, c'est que... crois-moi, inutile de te casser la tête, Em. Ces gars-là sont des génies. Sauf s'ils le décident, personne ne les retrouvera.
J'arque un sourcil et penche la tête sur la droite. Un sourire emplis de narquoiserie se dessine sur le coin de mes lèvres, et Clark ne bouge pas d'un poil, se contentant de me dévisager. Quelque chose dans mes yeux a certainement du le faire changer d'avis. Moi-même, je sens une petite flamme renaître au fond de moi. Cette petite flamme que seuls les chasseurs savent reconnaître et éprouver. Clark se ravise de lui-même, sans que je ne l'y incite. En me regardant droit dans les yeux, il fait demi-tour sur ses paroles.
- Non, en faite. Tu les retrouveras... Toi, t'es pas personne.
PDV OMNISCIENT
A STORYBROOKE, AU MÊME MOMENT
- Allez, Blanche ! Dépêche-toi !
- Ben oui, oui ! J'arrive !
Blanche-Neige dévale les escaliers de son vaste appartement avant de rejoindre son mari devant la porte d'entrée. Excédé, Charmant patiente, le revolver de sa fille à la ceinture. Il remarque l'attention toute particulière de sa femme pour son arme, et il lève les yeux au ciel.
- Tu sais très bien que c'est provisoire.
- Avoue que ça te plaît, le taquine-t-elle en riant.
- Je préfère mon épée comme tu préfères ton arc. Ce truc est à Emma.
Blanche se fige, une main posée sur son carquois remplis de flèches en bois, l'autre sur son arc souple qu'elle a gardé depuis leur retour de Narnia. L'énonciation du nom de sa fille rend ses jambes fébriles, elle se sent toute bizarre.
Depuis le départ d'Emma, Blanche-Neige enchaîne les cauchemars.
Elle n'a pas peur pour elle. Emma est du genre à se défendre avant même d'être attaquée, et Gold lui porte beaucoup d'affection : il le cache bien, mais Emma lui plaît beaucoup. Pas dans le sens pervers, hein ? Dans le sens où son comportement, sa maturité et sa réflexion sont assez élevé pour une jeune fille de son âge. Dès la rupture de la Malédiction, Blanche-Neige a aimé et admiré sa fille. Mais maintenant qu'elle comprend d'où lui vient cette maturité, cette méfiance... « son mur », comme elle l'avait dit du temps où elle était Elena Blanchard... Maintenant qu'elle sait pourquoi sa fille leur cache son passé, elle n'admire plus du tout son parcours et sa sagesse : au contraire, elle se répugne elle-même en regardant Emma. Lorsque ses yeux se posent sur cette jolie jeune fille, sa fille, celle qu'elle a portée neuf mois et qu'elle a du abandonner trois minutes après l'avoir mise au monde... Lorsque Blanche entend le nom d'Emma, elle ne peut s'empêcher d'imaginer combien de personne elle a rencontré dans sa vie. Combien de mauvaises rencontres elle a pu faire. Qu'est-ce qui s'est passé entre le 22 mai 1998 et le 22 juillet 2014 ? Quelles choses horribles sa fille a-t-elle vécu ? Au point où on en est, peut-être s'est-elle faite plu que simplement torturée (enfin... comme si la torture était une épreuve simple). Qui lui dit qu'elle n'a pas été privée de toit, de nourriture, de sommeil ? Qui lui dit qu'Emma n'a pas été sur une longue période touchée, maltraitée, abandonnée, arnaquée... violée ?
Sentant les larmes monter, elle inspire un grand coup en plaquant sa paume sur ses lèvres, emprise à ces pensées horribles qui bousillent ses nuits en formant d'affreux cauchemars. Charmant comprend et réagit vite en posant ses mains sur les épaules de son épouse. La nuit, il l'entend gémir dans son sommeil.
- Blanche... Tu y penses encore, hein ?
- Je... non.
- Je te connais, mon cœur. Je sais à quoi tu penses comme si j'étais Damen.
Comme d'habitude, James pince imperceptiblement les lèvres en prononçant ce nom. Blanche-Neige le remarque aussitôt.
- Ne me dis pas que tu ne l'apprécies pas...
- Non, mais... J'avais ma fille enroulée dans une couverture dans mes bras, elle venait de naître... et la fois d'après, lorsque je la revois, elle sort avec un gars... Tu le prends bien, toi ?
- Damen la rassure. Il prend soin d'elle. Je pensais qu'après ce qu'on a vu de la vidéo, tu aurais pu comprendre qu'elle a besoin de lui !
Blanche se détache de son mari et se dirige vers la cuisine, où elle se sert un grand verre d'eau. Elle y fait fondre un anti-dépresseur prescrit par Archie. Ce-dernier a reprit ses fonctions de psy comme s'il n'avait jamais été ligoté dans une cale de bateau.
Les bras ballants, Charmant regarde sa femme sans savoir quoi faire.
- Je... Je suis un homme. Je pense comme un homme.
- Tu penses comme un homme depuis que tu es né. Maintenant, essaie de penser comme un père.
Cassante et définitive, elle boit d'une traite son verre d'eau, le pose violemment sur le comptoir de la cuisine, patiente quelques instants, puis éclate en sanglots.
*Éclipse de plusieurs heures de pleures*
Après son orageuse réaction aux cachets d'Archie, Blanche-Neige réussit à se calmer quelque peu. En premier allongée sur son lit, enveloppée des bras de son mari, elle a déprimée pendant une bonne partie de l'après-midi. Elle a ensuite cherché du réconfort en appelant Granny, mais surtout Esmé, la mère de Damen. La jeune femme vampire leur avait rendue une courte visite pour remonter le moral de Blanche. Elle était très persuasive, mais le fait qu'elle ait esquivée toutes les questions concernant Damen rend Elena suspicieuse.
Au bout d'un long moment, c'est-à-dire aux alentours de 16 h 30, Blanche termine son chocolat à la cannelle, tournant la cuillère avec nostalgie. Dès que la chantilly termine de fondre autour des guimauves, elle se rend compte qu'elle ne veut rien manger ni boire. En faite, elle ne veut rien si ce n'est son bébé, bien cachée dans son ventre, à l'abri des gens mauvais et de la menace de Cora...
Cora.
- Cora !, lui répète Charmant en remettant ses chaussures.
- Hein ? Où ?! ELLE EST LA ?!
- Du calme, je te dis juste que les Cullen et les Nains ratissent la ville à sa recherche. Leur filer un coup de mains serait généreux de la part du couple royal, tu ne crois pas ?
- Nan !, bougonne-t-elle, déprimante. Ils ont pas besoin de nous. Trouver une sorcière dans une si petite ville, ça doit pas être... sorcier !
James ignore la remarque sarcastique et ouvre la porte d'entrée. Il arque les sourcils.
- T'as raison, ça doit pas être si compliqué, déclare-t-il simplement. Alors comme ça, vous faites votre retour ?
- Je suis venue acclamée mon innocence : je ne suis pas responsable de la mort du Docteur Hopper.
En entendant cette voix, le sang de Blanche-Neige ne fait qu'un tour.
Elle dépose sa tasse sur un coin de la table de chevet, enfile ses pantoufles et se précipite à la rencontre de Regina, qui ignore jusqu'à maintenant que Archie est en vie.
Qui ignore qu'elle a été piégée par sa propre mère.
Sa mère, qui l'attend patiemment chez elle. Et qui a un plan pour parvenir à ses fins.
PDV EMMA
UNE HEURE PLUS TARD
C'est mieux comme ça... C'est mieux comme ça... C'est mieux comme ça...
Cette phrase, je me la répète inlassablement depuis dix minutes. J'essaie de m'en convaincre, mais c'est difficile. La vie est difficile. Elle est faite de choix, certains irréversibles, d'autres non. Et maintenant, avant d'imposer aux autres de respecter mon choix, je vais essayer d'en faire de même. Plus qu'à me dire que c'est mieux comme ça.
Les gens comprendront. Ils ne m'en voudront pas. De toute façon, personne ne peut m'en vouloir ! J'ai réagis comme n'importe qui. N'importe qui apprenant que la personne avec qui ils ont passé les cinq huitième de leur existence se révèle être un personnage de contes de fée. Enfin... Storybrooke se demandera sûrement pourquoi j'ai dégagé Robin des Bois de ma vie alors que mes parents sont Blanche-Neige et le Prince Charmant. Mais eux, c'est pas pareil. Eux, ils étaient sous l'emprise de la Malédiction. Eux, ils ne se rappelaient même plus de qui ils étaient. Eux, ils m'ont dit toute la vérité dès qu'ils en ont eu l'occasion.
Alors que lui...
Lui, il m'a menti. Lui, il m'a trahi. Et pire que tout, lui, ce Robin des Bois qui se fait appelé Clark Swan à Boston... Lui, il connaît la véritable identité de Peter et Baelfire.
Et il refuse de me la dévoiler !
Il préfère aider les fils du Ténébreux plutôt que moi. Moi ! Emma ! Sa sœur, son cœur, sa famille, sa vie, comme il dit... celle qu'il traite comme sa fille, celle qu'il a toujours aimé, celle à qui il a tout donné, même son nom de famille... Il m'a bien fait comprendre que je n'étais pas prête à tout savoir sur sa vie, sur la vie de Gold, sur la vie de ses fils. Alors il s'est braqué. Et je me suis enfuie.
Mais c'est mieux comme ça.
Dévastée, j'avance d'un pas décidé à travers les rues de New York. En cette terrible après-midi, j'ai retrouvé une de mes premières familles et l'ai renvoyé dans un laps de temps de deux petites heures. Je dois détenir le record mondial. Le diplôme de la plus grosse conne de la planète. Mais si j'ai bien horreur d'une chose, dans la vie, c'est qu'on me prenne en effet pour une conne. Et c'est ce que « Clark » a fait. Grosse erreur.
Haletante, je remercie le ciel de pleuvoir. Des gouttes torrentielles s'abattent sur moi, fouettant mes jambes nues et mon visage avec la violence d'une pluie de grêlons. Au moins, les larmes du ciel cacheront les miennes. Avec un peu de chance, Gold ne se rendra pas compte que je chouine comme un bébé.
Au bout de treize minutes de marche sous la tempête, j'arrive au bout de la rue, face à l'immeuble de Clark. J'ouvre la porte et y entre brusquement, ce qui le fait sursauter. Un instant, je reste muette d'hébétude. Il est resté là, assis bien sagement sur le sol carrelé. Il m'a obéit, et une lueur de soulagement énorme vient faire briller son regard lorsqu'il me reconnaît. Gold bondit de sa place, se tenant sur sa canne de gentleman, et me dévisage d'un air pressant. Je ne saisis pas pourquoi.
- Alors ? Vous l'avez trouvé ?
Un instant, je reste égaré avant de m'en souvenir. Pauvre homme ! J'avais complètement oublié que j'étais censée lui ramener son fils. Ce que je viens de vivre n'est pas du tout ce qu'on avait prévu. Ni lui, ni moi. Je pose mes mains sur mes hanches dégoulinantes de flotte en prenant une grande inspiration.
Et opte pour la meilleure solution.
Je crois....
- Euh... Je regrette, mais... votre fils a prit la fuite.
La petite lueur d'espoir qui s'était mise à briller dans son regard depuis notre départ de Storybrooke s'éteint violemment, presque immédiatement. Ses yeux d'un gris ténu reste accroché aux miens encore quelques instants avant de se baisser, l'air égaré. Il se tient à deux mains sur sa canne, et une bouffée de culpabilité me submerge. J'aurais peut-être du lui dire la vérité : ses garçons sont en mer, peut-être même arrivé au Portugal, à cette heure-ci. Stupide que je suis ! j'ai préféré préserver ce clochard de Clark ! C'est sûr que dès que Gold aurait compris que le voleur de Sherwood a coopéré avec ses fils pour les aider à se casser du pays, il l'aurait allumé. Mais encore une fois, j'ai fais l'égoïste.
Gold se met à massacrer l'interphone avec le plat de la main.
Je sursaute.
- Eh ! Gold ! Mais qu'est-ce que vous faites ?
Je me précipite à côté de lui, les bips étranges émanant du grillage m'ayant rendue soupçonneuse. Il ne frappe pas seulement la machine, mais appuie sur tous les boutons jusqu'à temps que l'un des voisins lui ouvre la grille, ce qui se produit. Aussitôt, il détalle dans les escaliers.
- HEY ! Mais vous êtes dingue ?! Vous faites quoi, bon sang ?!
- Je cherche mon fils !
- Il n'est pas là !
- Mais il habite ici et il va revenir. Alors je vais l'attendre.
Il galope donc sur les marches jusqu'à ce que je ne l'entende plus. Désespérée et impuissante, je le rejoins mollement jusqu'au premier étage. Ce que j'y vois me laisse coïte. Je lui fonce dessus une nouvelle fois.
- Me dites pas que vous allez forcer la serrure !
- Quoi, vous croyez que ça me pose un problème de conscience ?
Il se met donc à rentrer deux petits bouts de métal dans la serrure et les fait tourner entre eux, comme dans les films. Je m'approche encore avant de reconnaître ces bouts de métal : des barrettes. Certainement celles de sa chère Belle qui l'a oublié en franchissant la Ligne Rouge. Ou bien... les miennes. Personnellement, apprendre qu'il me les a volé ne m'étonnerait qu'un peu.
Bref. Mon ennui n'est pas l'endroit où il a déniché ces barrettes, mais comment je peux l'empêcher d'entrer dans cet appartement.
- Si ça se trouve, il reviendra pas !, lui crie-je désespérément.
- Oui, mais comme vous le dites, ceux qui ne veulent pas être retrouvés, c'est votre spécialité, rétorque-t-il, direct. Et moi, je me contenterais de vous aider. On trouvera peut-être des indices sur lui : qui il est, ce qu'il fait dans la vie, à quelle personne il tient... où est son frère...
Une boule se forme en travers de ma gorge. Je déglutis, mais elle reste coincée tant la panique me submerge. S'il découvre qu'aucun de ses fils ne vit ici, je suis cuite.
- Ne faites pas ça, répète-je avec plus de sécheresse. Y a des lois, dans ce pays. Vous pourriez être arrêté !
- Auquel cas il devra témoigner contre moi, ce qui me permettra de le voir.
Il tourne rapidement la tête vers moi. Mes yeux se braquent sur les siens, et je le mitraille du regard. Le goujat ! Il a toujours réponse à tout ! Stupide Ténébreux de merde ! Malheureuse et impuissante une nouvelle fois, je m'écarte avec un air piteux et le laisse terminer de violer la serrure à coups de barrettes noires. La poignée en forme de bouton doré finit par se tourner, et il pénètre dans l'appartement loué de Clark.
- Gold...?, pépie-je discrètement, tel un oisillon prit au piège. Gold...?
« Je crois pas qu'il t'écoute, là. », me renseigne une petite voix intérieure - qui bizarrement me rappelle Henry.
L'appartement est assez étroit en lui-même, à la hauteur des revenus de Clark. Il me fait presque penser à celui qu'on partageait à Boston, bien qu'ils ne soient pas agencés du tout pareil. Un tapis rouge persan prend la poussière dans le salon, seulement composé d'un gros canapé, de quelques placards et d'une porte-fenêtre donnant sur le balcon d'où il a sauté pour me fuir - serait-ce possible que ça s'est passé seulement tout à l'heure ? Aucun mur ni aucune porte ne coupe le salon de la petite cuisine, où Gold se trouve maintenant. Il n'y a quasi rien, ici.
Si on ne sait pas chercher.
Mes yeux se posent d'eux-même sur un petit miroir accroché au mur. J'ai un instinct de recule, choquée par ce que je vois. Mon visage s'est affiné, mes cheveux ont l'air plus longs et le orange de mes yeux crépite. Quand est-ce que je me suis regardée dans une glace pour la dernière fois ? Me sentant idiote, je détourne le regard et tombe nez à nez avec un objet tout à fait inattendu, accroché à la poignée de la fenêtre. Je l'en détache et le dévisage stupidement. Un attrape-rêve.
Il est magnifique, tout fait de plumes de faisant et de perles indiennes. Sa présence ici me déconcerte : c'est celui que j'ai offers à Clark pour son anniversaire l'année dernière. On avait pique-niqué sur la berge du lac Winnipeg, à la frontière canadienne. Si voir cet objet me choque, c'est surtout parce qu'il m'ait familier.
Aucun autre objet de cet appartement n'appartient à Clark.
Donc logiquement, il vit toujours à Boston.
Donc logiquement, il loue cet endroit. Pour lui... ou pour quelqu'un d'autre. Comme un fugueur non-majeur dont l'État américain ignorerait l'existence...
- Vous avez trouvé quelque chose, très chère ?
Je sursaute en relevant la tête Gold me dévisage avec intérêt, les mains posées délicatement au sommet de sa canne, il m'observe simplement. Je secoue la tête.
- Euh, non. Je croyais que c'était un attrape-rêve... Mais c'est rien, c'est ... Oh, c'est un attrape-rêve. Mais c'est rien...
Je déglutis nerveusement en continuant de ratisser de l'œil l'objet.
- Si ce n'est rien, pourquoi vous l'avez encore à la main ?
J'hausse les épaules, fais des allers-retours entre l'attrape-rêve et Monsieur Gold. Son regard est assassin, et je comprends qu'il a comprit. Je m'empresse d'accrocher le gri-gri à sa place en serrant les lèvres.
- Vous, vous me cachez quelque chose, devine-t-il, le ton mauvais.
- Reprenons les recherches.
- Vous avez vu quelque chose, et vous allez me le dire.
J'ai vu quoi ? Ah oui, j'oubliais le coup de l'attrape-rêve dans sa boutique, lorsque j'ai fais appel à la magie volontairement pour la première fois de ma vie. Il est bête, non ? Y a pas de magie, ici !
- Vous vous faites des films, chantonne-je, l'air serein.
- Dites-le moi !, hurle-t-il, furieux.
Je tourne la tête vers lui et hausse les sourcils. Il va croire que je me fou de lui, et je m'en fou ! Il ne m'effraie pas.
- Y a rien, ici, on perd notre temps.
- Vous me prenez pour un idiot, crache-t-il, à la fois plus calme mais plus contrarié. Qu'est-ce que vous me cachez, mais surtout pourquoi ?!
Un instant, j'ai envie de tout lui avouer. Mais l'image de Clark fait irruption dans ma tête, et je me retiens. C'est lui qui m'a sauvé et aimé à l'époque où j'en avais le plus besoin... je ne peux pas le trahir.
- Je ne vous cache absolument rien !, me défends-je avec assurance.
- Est-ce qu'il vous a parlé ?!, crépite-t-il en se mettant à avancer dangereusement vers moi.
- Écoutez...
- Qu'est-ce qu'il vous a dit exactement ?!
- Il ne m'a rien dit !
- Mais vous lui avez bien parlé, hein ?
- ME FAITES PAS DIRE CE QUE J'AI PAS DIS !!!, rugis-je, folle de rage.
- DITES-MOI LA VERITE !
Il pousse violemment une bibliothèque faiblarde, et tous les livres viennent me frapper les jambes. Je saute en arrière, choquée par sa brutalité.
- Vous êtes cinglé !
- DITES-LE MOI, OU JE VOUS Y OBLIGERAIS !
Il devrait se douter qu'on ne peut pas me faire peur ni me parler de cette manière. J'ai connu tellement de coups de ce genre qu'il pourrait bien me battre à mort sur la terrasse, m'éventrer avec sa canne ou répandre ma cervelle dans toute la maison que je ne parlerais pas. Quand bien même j'aurais quelque chose à dire, d'ailleurs.
- Vous avez pas de pouvoirs, ici !, lui crache-je identiquement, désormais aussi furibonde que lui.
- Oh, mais je peux m'en passer ! (Il serre sa canne entre ses mains pour bien me faire comprendre ce qu'il sous-entend. Il s'approche de moi, rouge de fureur.) On a un accord, et PERSONNE ne rompt d'accord passé avec MOI !!!
PDV CLARK
CINQ MINUTES PLUS TÔT
- Elle a tout gober, annonce-je tristement.
Ils ne semblent pas choqués, ni surpris, ni rien de ce genre. Juste vide d'émotions. Comme si tout était normal, alors que rien ne l'est. Assis sur une terrasse entre eux deux, les mains dans les poches, je continue à observer les passants se promener dans les rues de la ville. A ma droite, il termine la tasse de chocolat chaud à la cannelle qu'il s'est commandé. A ma gauche, il fait pareil que moi, se contentant d'observer le monde qui suit son cours, les mains enfoncées dans les poches de sa veste de sport.
- Chocolat à la cannelle, déclare-je en pointant du menton la tasse qu'il vient de reposer. Tous les gens comme toi kiffe ça ou c'est comment ?
- Henry et Emma kiffent ça, répond-il.
Sa voix est dénuée d'émotions. Morte.
- Ouais... A Boston, elle aimait bien aussi, lui dis-je.
- Les vieilles habitudes ont la vie dure, déclare celui à ma gauche.
Un court silence nous enveloppe ensuite tous les trois, et j'en profite pour méditer sur les dernières choses qui me sont tombées dessus. Premièrement, ces deux-là. Je ne m'attendais pas à voir le premier débarquer en plein après-midi, et encore moins le second. Il est là depuis moins de temps. En faite, à peine une journée complète.
Ensuite, je n'avais pas du tout l'intention de retrouver Emma de cette manière.Moi, je croyais que tous les plans que j'avais griffonné pour la sortir de Storybrooke allaient tous s'emboîter, que j'arriverais à la faire évader de cette ville de fou, et tout et tout... OK, elle a retrouvé ses parents. Elle a une nouvelle famille, là-bas. Mais je refuse simplement qu'elle vive loin de moi. Quand je suis avec elle... c'est comme un médicament. Elle est si simple, si vraie dans ce qu'elle pense, qu'elle parvenait à me faire oublier ma vie d'avant. Ma vie de célèbre Robin des Bois, en plein cœur de Sherwood, valsant entre les flèches du Shérif de Nottingham. S'il savait que j'en suis devenu un, Shérif ! Pff ! Quelle histoire !
Grâce à Emma, donc, j'arrivais à me reconstruire une vie normale, sans Royaumes ni Narnia, ni Hunger Games, ni Journée des Challenges, ni Méchante Reine ni Ténébreux. J'ai beaucoup perdu, ainsi : mon frère, ma femme, mon fils... Trois personnes toujours à Narnia. Trois personnes dont Emma ignore l'existence. Elle m'a banne lorsque je lui ai avoué que j'étais le Prince des voleurs. Elle m'aurait tué rien qu'en apprenant que je me suis déjà marié... Alors si je lui disais que j'ai un fils quelque part dans la nature... Je refuse d'y penser plus longtemps.
- Elle te crucifiais sur le clocher de Storybrooke, ou bien elle te guillotinerait et mettrait ta tête en trophée de chasse chez elle, ricane amèrement celui à gauche.
- Merci, c'est très rassurant.
- De quoi vous parlez ?, intervient celui à ma droite.
- De ta mère, rétorque l'autre.
- On a la même.
- Point de vue biologique, oui. Du reste, on a rien en commun.
- J'avoue !
- Eh, les mecs, vous êtes frères, leur rappelle-je.
- J'crois pas, non, ripostent-ils en même temps.
Je sers amèrement les poings, ne me rappelant pas la dernière fois que j'ai vu deux ados aussi désagréables.
- La ferme, merde ! Si je l'ai trahis, c'est pour sauver vos têtes à claques, alors un minimum de respect l'un envers l'autre serait le bienvenu !
- Tranquille, Rob, persifle celui à ma droite.
- Clark, corrige-je.
- Robin te va mieux. C'te nom de merde, n'empêche ! Clark !
Un semblant de rire lui échappe.
- Et c'est le mec nommé Baelfire qui dit ça, ricane l'autre, sournois.
- Respect minimum, cher frère. Rappelle-toi que je suis ton aîné.
- De deux minutes vingt-sept, ouais. Ça fait toute la différence !
A ma gauche, il lève les yeux au ciel. A ma droite, il se met à bouder dans son coin. On observe tous la route et les passants, pensant à la même personne. On reste un long moment silencieux, n'attendant pas le déluge vu qu'il s'abat déjà sur nos baskets. A ma droite, Baelfire commence à se trémousser.
- Tu crois qu'elle est à l'aéroport ?
- Non, crache son petit frère.
- Je t'ai pas causé ! Je parlais à Rob.
- CLARK !, lui crie-je, dépassé par leur mémoire de pigeon.
- Bref, elle en est où, M'sieur l'télépathe ? Parce que j'aimerais savoir quand est-ce que je pourrais rentrer chez moi. Et quand est-ce que tu pourras te casser en Europe. T'as pris ton billet ?
- T'as pas besoin de le savoir.
- Son avion décollera demain, réponds-je à Baelfire à la place de son frère. Et pour revenir à Emma, à mon avis, elle doit être sur la route.Mais elle devait en premier passer chercher votre père.
A ces mots, ils se figent tous les deux sur leurs sièges.
Tout se passe très vite.
Dans un premier temps, leurs yeux d'un noirs d'encre semblable se tournent vers moi comme des fusils, écarquillés comme des soucoupes, choqués comme après avoir vu un fantôme.
Juste après, en à peine une seconde, je comprends le sens de mes paroles. Je me rappelle qu'il y a quinze minutes, on s'est retrouvé comme convenu sous le porche de ce restaurant. Et je leur ai juste expliqué ce que j'ai dis à Emma.
Sans jamais préciser que leur père était aussi à New York.
- Attends, tu veux dire que... IL EST EN VILLE ?!?
Le hurlement de Baelfire fait dresser les poils de mes bras. Son frère bondit de sa chaise, et les deux jumeaux se dévisagent avec une étincelle de panique identique dans le regard. Pour une fois, sans haine ni énervement. Juste une étincelle de crainte. La crainte d'être retrouvés par leur père.
- Il est en ville, mais..., bredouille-je, coupé par mes réflexions.
Une révélation déstabilisante me frappe. Malgré qu'elle soit partie comme une teigne tout à l'heure, furieuse après moi et mes mensonges, Emma m'aime encore un tant soit pas. Et elle essaiera de me sauver la mise. Je pense. A cette heure-ci, soit Rumplestiltskin croit ses deux fils en mer, soit il les croit en pleine fugue dans les rues. Et connaissant Emma, je doute qu'elle m'ait balancée. J'opterais pour la seconde option.
A ma gauche, le jeune garçon se tourne vers son aîné, le regard paniqué.
- Tu crois qu'il oserait...
- Oh que oui !, s'écrie l'autre. Faut qu'on bouge avant qu'il ne lui fasse du mal !
Après qu'il prononce ces paroles, son frère, lui-même et moi nous mettons à courir à toutes allures jusqu'à mon appartement, même si mes pauvres jambes humaines paraissent quelque peu pitoyable par rapport aux leurs. Ensembles, soudés, ils ouvrent à la volée la porte de l'immeuble. La grille qui sépare le hall d'entrée du reste du bâtiment est grande ouverte.
- C'était combien ?!, m'hurlent-ils en se précipitant dans les escaliers.
- Appartement 407, bande de cons ! On y était hier soir !
Sans prêter attention à ce que je dis, ils se pétrifient littéralement sur les marches, incapable de bouger. Lorsque j'arrive à leur hauteur, je comprends pourquoi.
- Qu'est-ce que vous me cachez, mais surtout pourquoi ?
Je ne reconnais pas cette voix. Avant, Rumplestiltskin avait la voix d'un homme ayant avalé de l'hélium, même si ce gaz n'existe pas à Narnia. Cette voix-là n'y ressemble pas du tout. La Malédiction est bien passée par ici.
- Je ne vous cache absolument rien !
Je me pétrifie comme les mecs en la reconnaissant. Je le savais, je le savais, je le savais, je le savais... Merde, merde, merde, MERDE, Emma ! Elle me déteste et me sauve la peau quand même !
- Est-ce qu'il vous a parlé ?!, crépite-t-il aussitôt.
- Écoutez...
- Qu'est-ce qu'il vous a dit exactement ?!
- Il ne m'a rien dit !
Même capacité à mentir...
- Mais vous lui avez bien parlé, hein ?
- ME FAITES PAS DIRE CE QUE J'AI PAS DIS !!!
Même caractère...
- DITES-MOI LA VERITE ! (Des bruits de casse et de bois brisé retentissent.)
- Vous êtes cinglé !
- DITES-LE MOI, OU JE VOUS Y OBLIGERAIS !
Entendre ce charivari produit en nous trois un déclique commun, et nous nous envolons dans les escaliers pour venir en aide à cette fille qu'on aime, chacun d'une manière différente.
- Vous avez pas de pouvoirs, ici !
- Je vais le niquer, fulminent les jumeaux en chœur.
- Oh, mais je peux m'en passer !, reprend l'autre, à l'intérieur de mon appart. On a un accord, et PERSONNE ne rompt d'accord passé avec MOI !!!
Les yeux noircis de haine et de colère, le plus jeune des fils du Ténébreux met un énorme coup de pied dans la poignée de la porte verrouillée, qui s'ouvre automatiquement sur un homme hors de lui, une bibliothèque renversée et une Emma tremblante de rage.
PDV EMMA
Il est carrément face à moi.
Je ne défaillis pas. Avant de connaître Clark et Henry, je lui aurais littéralement bondis dessus, le couvrant de coups à l'instar d'une petite sauvageonne. Mais ce temps-là est révolu. Je me suis calmée, et j'ai surtout mûrie. Rien chez cet homme ne m'effraie, quand bien même il est le Ténébreux. Je ferme durement les poings.
A cet instant, un énorme BOOM explose sur ma droite, et on sursaute en nous tournant vers la porte d'entrée ouverte. Trois hommes se précipitent à l'intérieur en hurlant la même chose :
- ARRÊTE !
L'un d'entre eux se jette sur le côté, m'observant, haletant, terrorisé pour moi. Il fait l'aller-retour entre mon visage hébété et celui de Gold, avant de me plonger dessus. Il m'attrape durement par le bras et me tire sur le côté, loin de Gold et loin des deux nouveaux arrivants. Clark enroule ses bras autour de moi, et je ne me débats pas, trop choquée pour ça.
C'est la présence des deux jeunes hommes face à moi qui me déstabilise. Ils me regardent quelques instants, reprenant leur respiration, me dévisageant pour s'assurer que je n'ai rien. Ils se redressent. Mes jambes sont prêtent à me laisser tomber au sol. Je porte mes deux mains à mes lèvres en ravalant un hoquet d'horreur.
En les reconnaissant.
Gold a l'air aussi choqué de moi.
Désormais certains que je vais toujours bien, ils pivotent en dévisageant l'homme qui était sur le point de me faire je n'ose pas imaginer quoi. Parfaitement de la même taille, les cheveux identiques si ce n'est que ceux-là sont noirs, ceux-là sont blonds, les yeux aussi foncés l'un que l'autre, leur peau lisse soit blanche, soit mâte, les célèbres Peter et Baelfire dont on m'a tant fait l'éloge ne bougent pas d'un poil.
Gold reste bouche bée, comme moi.
Ces deux jumeaux que je croyais en mer. Que je croyais ne pas connaître.
Ces deux jumeaux abandonnés par leur père, d'après les histoires d'Henry.
Eh bien ils sont là. Face à moi. Et je les connais. Et je les aimais.
Et ça ne sera plus jamais pareil.
- C'était nous que tu voulais ?, crache Caleb, furibond.
- Eh bien nous voilà, termine Damen, tremblant de rage.
Non, ça ne pourra plus jamais être comme avant.
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