Chapitre 42 : Mi ange-mi démon
Le silence est palpable et je me surprend à trembler comme une feuille. Les hostilités sont lancées, mais je ne suis concentré que sur mon arme qui pèse bien plus lourd que ce que je pensais. En tournant la tête vers mon adversaire, je remarque très vite qu'il est déjà en train de courir vers moi, armé de son épée qui pointe vers le ciel.
Je suis terrorisé et la peur m'empêche de faire le moindre mouvement. Cette effrayante émotion me paralyse et le chef m'intimide encore plus en me regardant attentivement. Que suis-je censé faire ? Moi qui n'ai jamais combattu et encore moins avec une arme, bien qu'elle soit factice : Que pourrais – je faire de plus actuellement ?
Soudain, l'épéiste adverse arrête sa course et laisse tomber son épée par terre en souriant niaisement. Désarmé mais apparemment confiant, il marche maintenant fièrement vers moi en me disant que je ne ferais pas long feu et rétorque ensuite qu'il va falloir que je me prépare à manger le sol.
A vrai dire, le fait qu'il lâche son épée m'arrange bien et me permet de me débarrasser également de ma hache qui pèse bien trop lourd. Je me sens déjà plus léger, et légèrement plus confiant. Mais, ses provocations me touchent et mon angoisse ne veut pas faire ses valises.
Les blessures du harcèlement que j'ai subi pendant des années et que j'ai depuis enfoui au plus profond de moi remonte d'un coup et me submerge, alors que mon adversaire continue de me provoquer verbalement de plus belle.
Mon angoisse passe soudain une nouvelle étape qui m'empêche maintenant de me ventiler correctement. Je respire frénétiquement et ma mâchoire se contracte, tout en étant troublé par un souvenir que je confonds maintenant avec la réalité.
Je me retrouve étrangement transporté à la fac, à l'intérieur d'un cercle formé par une multitude d'autres élèves à l'extérieur de l'établissement. Je ne distingue plus le souvenir du réel, et mon angoisse se transforme en colère noire quand je réalise que Jacob se tient devant moi, en train de tournoyer son bras fort de haut en bas.
Je suis comme un loup affamé, prêt à bondir sur sa proie à tout moment. De la bave coule et mes yeux deviennent aussi blancs qu'une colombe. Mes mains tremblent et mes jambes trépignent d'impatience, comme un taureau voyant du rouge devant lui.
Je veux que Jacob souffre dans d'atroces souffrances. Je veux le tuer de mes mains afin de l'emmener aux côtés du diable en personne afin qu'il paye pour l'humiliation qu'il m'a affligé toutes ces années. Ce dernier recule et le sourire niais qu'il avait à enfin disparu de son visage. J'avance vers lui en criant qu'il était l'heure pour lui de mourir afin de rejoindre les enfers, la ou est sa place. Les larmes coulent le long de son visage et mon sourire ne cesse de grandir en constatant ceci. La peur émane de lui et celui-ci tente même de me fuir. Mais, ma vitesse, ainsi que ma force ayant décuplée, je bondis du sol afin de me retrouver pile devant lui. Il ne m'échappera pas, pas cette fois-ci. Tant que le sang ne change pas la couleur de ses vêtements, je ne le lâcherais pas. Je lui serre fortement la gorge et le soulève d'une seule main, pour ensuite le plaquer très violemment sur le sol. J'entends ses os craquer et se casser, et m'installe ensuite sur son ventre dans l'espoir de lui infliger une multitude de coups de poing au visage. Jacob me supplie de le laisser partir et de stopper ma furie, mais rien n'y fait. Je n'ai qu'un seul objectif et je n'arrêterais pas aussi près du but.
Mais, sur le point de commettre l'irréparable, quelqu'un m'arrête et stoppe mon élan. Nos regards croisent le fer et je vois dans les yeux de cette personne qu'elle est prête à tout afin de m'arrêter.
Je me lève et laisse donc Jacob agonisant sur le sol, et fait face à son acolyte. Mais, quelque chose cloche. Ma vision devient trouble et mon rythme cardiaque est tel qu'il m'essouffle instantanément. Cela m'oblige à poser un genou à terre et j'aperçois en levant la tête du chef de Dryade qui me fait face. La réalité revient au galop et petit à petit, et je reprends mes esprits.
Encore essoufflé, je prends conscience que Jacob était en réalité le soldat contre qui je devait me battre en duel et, la culpabilité me ronge instantanément en le voyant agoniser, sa tenue rouge sang sur le sol.
Les larmes montent et coulent autant que les chutes du niagara. Je suis rempli de colère envers moi-même en me posant une question qui revient sans cesse dans ma tête depuis tout à l'heure : Qu'ai-je fait ? Est-ce vraiment moi qui suis coupable d'une scène aussi atroce et effrayante que celle-là ? C'est impossible, je ne veux pas y croire.
C'est terrible ce que j'ai fait, je ne me le pardonnerais jamais. Bordel, mais, que s'est-il passé pour que moi, un simplet qui ne ferait pas de mal à une mouche puisse être à l'origine de ça ?! Est-ce encore cette force dont Charlie m'a tant parlé depuis le début de notre voyage? Non, ça ne peut pas être ça. C'est bien différent, plus fort et plus profond. La rage qui m'anime est encore bien présente et augmente même encore plus, malgré la culpabilité. Des petits démons m'accablent de leurs idées les plus sombres et l'irrésistible envie de vouloir faire du mal se propage encore et encore. Cela m'effraie plus que tout, car, c'est la première fois qu'une telle chose m'arrive.
Quand je regarde autour de moi, la totalité des personnes qui nous entourent encore n'osent plus croiser leurs regards au mien. Ils ont l'air terrorisé, comme s'ils avaient un monstre en face d'eux. Moi qui suis d'habitude un garçon gentil et pacifique, je suis maintenant à leur yeux qu'une bête féroce qu'il faut mettre en cage. J'espère que tout cela n'est qu'un cauchemar et que le réveil ne tardera plus, car la colère qui m'anime en ce moment même est bien trop pesante et me hante frénétiquement.
Soudain, mes forces m'abandonnent et je perds tout équilibre. Je tombe par terre et tout est flou. Mes yeux se ferment sans que je le décide. Je n'ai même plus assez d'énergie pour bouger le petit doigt, je suis simplement immobile. Je ne comprends pas vraiment ce qu'il se passe mais, je n'y prête pas plus attention que cela. Je me sens léger et prêt à dormir un long moment. Le cauchemar est enfin terminé, je vais bientôt me réveiller de tout cela et tenter de tout oublier aux côtés de Thalia et Charlie.
PDV du chef de Dryade, Oxylus :
Après avoir lancé les hostilités du duel, j'en attend beaucoup du petit Noah. Mais, l'inquiétude me pèse quand je constate que celui-ci peine à simplement porter sa hache. Il a l'air angoissé et déstabilisé par la situation, l'exact opposé du favori de la bande, son adversaire Moros.
Ce dernier est né pour le combat. Son talent d'archer ainsi que son don au maniement à l'épée en fait un soldat de choix. Mais, il est encore bien trop arrogant et impulsif. Tout lui réussit, mais sa confiance en lui le perdra.
Moros avance vers Noah tout sourire, mais je ne comprends pas pourquoi le petit étranger ne bouge pas d'un poil. Je peux même remarquer les tremblements au niveau des mains. L'angoisse du duel le paralyserait-il ? Quoi qu'il en soit, l'épéiste va bientôt sonner la fin du combat. Je suis vraiment déçu, je pensais qu'il valait mieux que cela.
Quand soudain, Moros lâche son épée et provoque son adversaire verbalement. Est-il inconscient, ou est-ce une stratégie ? Si c'en est une, soit son arrogance lui fait encore défaut, soit il est inconscient. Le petit Noah en fait de même avec sa hache et, j'ai bien l'impression qu'il parait plus à l'aise sans. Ceci relancerait-il l'issue du combat ?
Malheureusement, comme à son habitude, Moros cherche à savoir si l'étranger à la tête sur les épaules en continuant à le provoquer. Il continue encore et encore, jusqu'à ce que Noah baisse la tête vers le sol. Je sens tout à coup une aura très maléfique émaner du duel. J'ai très rarement ressenti ce genre d'atmosphère écrasante et malfaisante. Serait-ce le petit qui provoque ceci ? Ou, est-ce mon imagination ?
Les secondes passent, et tout le monde retient son souffle, moi compris. Mon instinct m'alerte et me dit d'intervenir très vite, mais je préfère attendre encore un peu. J'ai besoin de patienter afin que le temps me donne la réponse à ma question. Et hélas, mes doutes se confirment en voyant Noah bondir de plusieurs mètres sur Moros, terrorisé par la furie dévastatrice de son adversaire. Je dois impérativement intervenir.
Ma vitesse ne suffit pas à sauver les os de Moros qui se cassent, un par un. Sa tenue de soldat autrefois verte et blanche est maintenant ornée de sang. Mais, j'arrive à temps afin de limiter les dégâts en stoppant l'élan de Noah, qui s'apprête à lui infliger un coup de poing dévastateur au visage. Sa force est telle que je peine moi-même à l'arrêter.
Mais, ce qu'il se passe ensuite est très étrange. Il tombe sur le sol et même ses yeux se ferment, comme s'il s'endormait paisiblement, comme s'il ne s'était jamais rien passé. Rassuré, je m'avance vers lui en pensant que tout danger était écarté.
En me rapprochant, un mauvais pressentiment m'habite subitement. Ses vêtements déchirés et son chignon laissant tomber plusieurs mèches en bataille le long de son visage, le petit se lève brusquement et ses pupilles disparaissent complètement, ce qui me donne l'impression d'avoir affaire au démon Gorgone en personne. Ses yeux sont une fois de plus aussi blancs que pégase mais sont regard est aussi froid et sans pitié qu'Hadès, dieu des enfers.
Maintenant transformé en une bête féroce et affamée, Noah me fait face. Ce petit m'impressionne, je l'admet. Mais, quoi qu'il en soit, que Noah soit intimidant ou non, de par mon expérience, j'ai appris à garder le contrôle de mes émotions. Et, en tant que chef, il est impensable pour moi d'être dépossédé de mes moyens. Je dois agir, quoi qu'il en coûte.
Je me rappelle encore de cet homme capable d'une telle chose. Cette personne à, a lui seul, failli détruire l'ensemble du village. Il était capable de pulvériser un groupe de plusieurs soldats en infligeant un simple coup de pied dans le vent, provoquant une onde de choc d'une violence inouïe. Je me souviendrais toute ma vie de ses yeux blancs veinés de rouge et ses traits tirés, qui trahissaient une rage à peine contenue.
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