Chapitre 32

Le visage de Ryker se métamorphosa. Il devint aussi livide que s'il avait été vidé de son sang et il bondit sur ses pieds comme un diable. Je frémis, surprise par cette attitude si différente de ce à quoi j'étais habituée.

Pour la première fois, il me parut royal, investi d'un pouvoir et d'une volonté. Il était blanc de rage, les pupilles écarquillées de choc mais sa posture, son dos droit, son menton haut criaient qu'il était Prince et qu'il comptait bien agir en tant que tel.

- De quoi parlez-vous ?!

Je me mordis la lèvre, impressionnée malgré moi par son aura écrasante. Même son père ne m'avait jamais impressionnée à ce point. Je ne m'étais pas trompée lorsque j'avais songé que Ryker ferait un bien meilleur roi que son père. Il avait ce qu'il fallait.

- Jon m'a dit qu'il savait où Gallagher a disparu, dis-je prudemment. Il ne m'a pas dit où mais il insinué plusieurs choses et Jedrek a compris qu'il parlait de la Faerie. Il pense que Gallagher est parti ouvrir la Cage de Fer et que ce Sdan est avec lui.

Le regard bleu de Ryker passa entre Jedrek et moi alors qu'il se massait les tempes.

- Vous êtes sûrs de vous ?

- Sûre, je ne sais pas. Toutefois, cela entrerait en corrélation avec ce que m'a dit Jon. Il avait un plan qui, selon lui, dépasserait tout ce que l'on peut imaginer. Qu'il veuille libérer la Faerie ne me semble pas si fou.

- Même si l'on se trompe, ce dont je doute, poursuivit Jedrek, mieux vaut envoyer un groupe en repérage. Je pense que l'attaque durant le bal n'était qu'un leurre pour obtenir les coordonnées de la Cage. S'ils y vont, nous devons intervenir. Tu dois mettre ton père au courant.

- Et comment ? Si je lui dis que Sixtine a parlé avec Jon et a caché cette information plusieurs jours, autant lui passer la corde moi-même !

- Tu n'as pas besoin de lui dire que l'information vient d'elle ! Dis-lui que tu as entendu une conversation au détour d'un couloir ou que quelqu'un est venu te parler de ce qu'il a entendu !

Jedrek s'énervait. Je me levai, me plaçant entre les deux hommes, un pas en retrait.

- Pourquoi lui annoncer de vive voix ? questionnai-je. Il ne nous croira pas. Écrivons simplement un mot l'informant de la menace. Il n'a besoin de rien d'autre.

- Tu penses qu'il va agir sur simple fond de spéculation ?

- S'il est prudent, il te dépêchera sûrement pour aller voir si la menace est sérieuse ou non. C'est mieux que rien, Jedrek ! Je connais Gallagher. Si Jon lui a dit d'aller ouvrir la Cage, il le fera. Et il ne reculera devant rien pour trouver son entrée.

- Ton petit copain ne tiendra pas une journée dans le désert de feu.

- Tu le sous-estimes. J'ai été entraînée avec lui depuis que nous sommes gamins. Il saura survivre dans ce désert. Je ne parie pas sur les chances de Sdan et de ses hommes mais Gallagher saura.

- Mon père n'agira pas à cause d'une lettre, intervint froidement Ryker. Il s'y est toujours refusé. Il lui faut des preuves.

- Et quelles preuves pourrait-on lui apporter ? Nous n'en avons aucune !

Le Capitaine allait s'arracher les cheveux avant que nous ayons décidé de la meilleure façon d'agir. Il se mit à faire les cents pas, tournant en rond comme une bête en cage.

Je tournai mon regard vers Ryker.

- Alors tu dois agir à sa place.

Jedrek se figea brutalement et l'expression abasourdie de Ryker m'auraient fait rire si l'heure n'avait pas été aussi grave. On aurait pu croire que je venais de le gifler.

- Pardon ? couina-t-il, la voix éraillée.

- Tu es le futur Roi du Grand Royaume ! Si ton père ne se bouge pas, fais-le à sa place ! Oh, il sera furieux. Mais lorsqu'il se rendra compte que tu as sauvé le Royaume, je doute que cela importe encore ! Si tu ne fais rien, tu agis comme lui et nous mourons tous. Les Faes vont se venger. Je doute qu'ils aient aimé être mis en cage.

Il se laissa choir dans un fauteuil, le poids du monde semblant soudain tomber sur ses épaules.

- Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Si mon père apprend que j'ai été contre lui...

- Cela montrera qu'il te prête un peu d'attention ! Tu devrais agir. Tu en es capable.

Ses beaux yeux bleus étaient si clairs, si limpides et, surtout, si indécis... Ils semblaient chercher de l'assurance, la promesse que tout irait bien. La confiance dont il avait besoin pour agir.

J'allai m'asseoir à côté de lui. Il fallait que je le pousse à agir. Il devait faire quelque chose. Cela risquait de me demander une patience que je n'avais pas. Son indécision, son hésitation, ses doutes m'énervaient. Il était prince et il avait ce qu'il fallait pour se comporter en roi à la place du Roi. Alors pourquoi choisissait-il ce moment précis pour douter ?

Il secoua la tête, baissant les yeux vers ses genoux. Vers ses mains crispées l'une autour de l'autre.

- Tu peux le faire. J'en suis sûre. Il suffit de donner un ordre dans le dos de ton père. D'ici à ce qu'il l'apprenne, il sera trop tard.

- J'irai, intervint sèchement Jedrek. J'irai avec un ou deux gardes. Si je vois quoi que ce soit, j'en reverrai un pour vous prévenir. Comme cela, pas besoin d'ordre direct. S'il le faut, j'en prendrai la responsabilité.

- Non. C'est à moi d'assumer face à mon père. Tu vas prendre ton messager le plus rapide avec toi et tu vas aller à la Cage. Soyez discrets. Si ça se trouve, ils guettent pour qu'on les y conduisent. Et je vais aller parler à mon père.

Je faillis soupirer de soulagement. Je me retins pour ne pas saper sa motivation. Il suffisait de peu pour que sa décision s'effondre comme un château de cartes.

- Allons-y. Il n'y a pas de temps à perdre.

Ryker se releva et Jedrek et lui sortirent. Je leur emboîtai le pas. Dans le couloir, ils se séparèrent. Jedrek partit en petites foulées vers l'aile ouest du château et Ryker partit vers la Salle du Trône. Je l'accompagnai, peu encline à voir son courage vaciller sur la route. Il semblait déjà bien moins confiant.

- Tu peux le faire, lui répétai-je.

Il tourna vers moi un regard indécis.

- Comment et pourquoi as-tu une telle foi en moi ? Quelle raison as-tu pour me faire ainsi confiance ?

- Tu es différent de ton père. Tu as ce qu'il faut pour devenir un grand roi. Je n'en ai jamais douté.

En fait, c'était un demi-mensonge. Lorsque je l'avais rencontré, il m'avait paru être un prince idiot et peu fait pour régner. J'avais vite compris que ce n'était qu'une façade. Il était bien plus intelligent qu'il ne voulait le laisser croire.

Il se tourna vers moi, presque trop près. Je sentais son parfum riche et épicé. Il ne me touchait pas. Loin de là. Toutefois, il devait être à quelques millimètres de le faire. J'en avais le cœur qui battait à tout rompre.

- Vraiment ? Tu le penses sincèrement ?

Je hochai la tête. Ma voix risquait de me faire défaut. Je ne pouvais pas prendre ce risque. Il ne devait rien savoir de l'émoi qu'il éveillait. Il devait renoncer à ressentir quoi que ce fut pour moi. Le plus vite serait le mieux. Je n'avais plus beaucoup de temps. Il allait falloir que j'agisse dans les heures à venir. Avec le problème que posait Gallagher, je n'avais plus le temps de réfléchir, de chercher.

Il fallait que je tue son père au plus vite. Si jamais la Faerie venait à être libérée, mieux valait que Ryker prenne le pouvoir. Nous aurions une chance de survivre. Cela ne serait pas le cas si Quinten demeurait sur le trône. Les Faes nous tueraient tous.

De plus, si je tuais celui qui les avait enfermés, peut-être que les Faes me laisseraient en vie. Et peut-être accepteraient-ils même d'épargner Ryker.

- J'espère que tu as raison de croire en moi. Je ferai tout ce que je peux pour ne pas te décevoir.

- Tu ne me décevras pas. Je le sais.

- Comment ?

Je forçai un sourire.

- Une femme sait ces choses-là.

Il ébaucha un faible sourire avant pousser la porte. Je me mordis la lèvre en le voyant disparaître derrière le battant. Il était plus que temps que je prépare mon expédition de la nuit. Quelles que soient que Jedrek ramènerait, ce soir, le Roi mourrait. Quoi qu'il m'en coûte.

Il était plus que temps de passer aux choses sérieuses.

Je gagnai le cours de la Princesse avec un quart d'heure de retard. Je la trouvai lovée dans un fauteuil en train de lire tranquillement.

- Veuillez excuser mon retard, Votre Altesse.

- Si vous me dites ce qui vous a retenue, répliqua-t-elle avec un sourire.

Elle posa son livre et me rejoignit à la table de travail.

- Une affaire fort importante dont votre frère discute avec votre père en ce moment-même.

- Qu'est-ce ?

- Il n'est pas judicieux pour moi de vous le dire, Votre Altesse. J'ignore comment votre père va réagir...

- Je suppose que je ne saurai rien donc, autant passer à la leçon ! C'est politique, aujourd'hui ?

- En effet.

- Génial... Je suis courbaturée de notre dernière leçon de combat et le sujet du jour, c'est la politique. J'ai déjà mal à la tête...

Je souris malgré moi. Je n'étais pas plus enthousiaste qu'elle à l'idée de deux heures de politique. Je détestais cette matière plus que les autres. Mais elle en avait besoin. Il fallait qu'elle sache comprendre le fonctionnement d'un royaume au delà du simple « le roi décide ».

Une chose me dérangeait, cependant. Un élément commun à chaque membre de la famille Madsen. Ils étaient toujours plus que ce qu'ils se complaisaient à paraître au premier abord. Ils avaient autant de facettes qu'il y avait de cartes à jouer dans le Royaume.

Je n'aimais pas cela. Surtout en ce qui concernait le Roi. Je ne savais jamais à quoi m'attendre avec lui. Ce n'était pas rassurant. Il pouvait décider de me faire pendre du jour au lendemain et je ne saurais probablement le prévoir.

Et la princesse était pareille. Elle pouvait se comporter comme une enfant et le lendemain, être tout ce qu'il y a de plus adulte et réfléchie. Elle pouvait aller d'un extrême à l'autre, exactement comme sa mère.

Je ne cessais de réfléchir à mon plan de régicide. Toutes les variables avaient été envisagées aussi me sentais-je prête à agir une fois la nuit tombée. Au demeurant, j'avais l'impression que je manquais quelque chose d'essentiel dans mes calculs.

Je m'isolai dans la bibliothèque. Je ne tenais pas à tomber sur Ryker ou Judeen. Plus les heures passaient et plus le retour de Jedrek ou du messager m'angoissait. Si le messager revenait seul, le meurtre du Roi serait plus difficile à cause du branle-bas de combat que cela causerait. Il serait impossible de l'isoler. Même mes diversions ne serviraient à rien.

Il y avait une option que je n'avais pas envisagée et je m'en rendis compte trop tard.

Lorsque la nuit fut tombée, profonde et opaque comme un four, je me changeai, mettant ma combinaison de combat entièrement noire. Je parcours les couloirs, épousant les ombres jetées par les torches. Les gardes ne me remarquèrent pas un seul instant.

J'entrai dans une chambre d'invités déserte. De là, je jetai mon explosif de fortune le plus à gauche que je pus. Il explosa et crépita, attirant l'attention des gardes sur le chemin de patrouille. J'en lançai un second qui résonna un peu plus fort. Puis un troisième. Les gardes coururent dans la direction des explosions.

Sautant sur l'occasion, j'escaladai le mur jusqu'à la fenêtre du troisième étage. Elle était ouverte, le rideau dansant dans l'air nocturne. Je pénétrai dans le silence le plus complet dans la chambre. Lord Gerber ronflait si fort que le plancher qui grinça sous mes pieds près de la porte fut inaudible.

Je tirai mon foulard sur mon visage, me couvrant le nez et la bouche, avant de sortir une petite bourse de ma poche. Je la passai sous la porte et l'enflammai. Elle répandit une fumée épaisse et âcre. Je l'éteignis et la récupérai après avoir entendu les gardes dans le couloir s'effondrer.

Je courus jusqu'à l'aile royale. La fumée continuait de s'échapper de la bourse et les premiers gardes tombèrent comme des mouches. Deux servants sortant de la chambre du Roi rejoignirent le tas de gardes. Je les poussai sur le côté, cachant les corps endormis. Mieux valait éviter de trop attirer l'attention.

Je poussai la porte, entrant dans une chambre vide où brûlaient quelques bougies. Les appartements du Roi étaient immenses. Les murs étaient couverts de riches tentures représentant des scènes de couronnement, de chasse... Les meubles étaient impeccables, d'un bois doré unique. La cape pourpre du Roi gisait sur le dossier d'un fauteuil épais et moelleux. Tout était si net et propre qu'il était évident que les deux hommes venaient de terminer de préparer la pièce pour le Roi.

J'avais assumé qu'à une heure aussi avancée, le Roi serait en train de dormir. Au lieu de quoi, les quartiers étaient vides. Il n'y avait aucun recoin où me dissimuler. L'agencement des meubles était tel qu'il était impossible pour un assassin de se fondre dans le décor qui, déjà, semblait très étrange. Le Roi devait vraiment avoir un problème de paranoïa.

J'avisai le lit. Je soulevai la courtepointe brodée d'or et jugeai l'espace sous le lit. Il avait fait clouer des plancher pour que personne ne puisse se glisser dessous. Il avait tout prévu.

Je passai dans le petit salon. Là aussi un arrangement étrange de meubles de tentures. Toutefois, je vis aussitôt la faille. Une des toiles n'était plus parfaitement tendue et s'accrochait au coin d'un meuble, formant une tâche d'ombre étroite. Je m'y glissai, me collant entre le meuble et la tenture, prête à patienter pour ma proie.

Je n'eus pas longtemps à attendre. La porte claqua sourdement et la voix du Roi résonna.

- Je ne veux plus en entendre parler !

- Tu devrais m'écouter ! répliqua sèchement la Reine.

- J'en ai assez de tes histoires ! J'ai une guerre à gagner, un fils à discipliner et un Royaume à gérer ! Je n'ai pas le temps pour tes élucubrations !

- Alors tu te moques de qui montera sur le trône avec lui ? Tu te moques de l'avenir de ton cher Royaume ?

- Bien sûr que non ! Mais pour l'instant, j'ai plus important à faire que de trouver une reine à Ryker ! Ce n'est pas le problème le plus urgent que j'ai à gérer !

- Si tu le laisses continuer sur ce chemin, il va faire un bâtard à cette peste et il ne se gênera pas pour l'épouser dans notre dos !

- Je trancherai la gorge de cette fille si cela arrive. Maintenant va-t-en !

La porte claqua si fort que le mur dans mon dos vibra. Je déglutis. La Reine était d'une humeur massacrante.

- Pourquoi ai-je convaincu mes parents de me faire épouser cette harpie, Irek ?

- Parce qu'elle était la princesse des Tempêtes, Votre Majesté.

- Ah oui. Et aussi parce que mon père a... insisté...

Le dénommé Irak eut le bon sens de ne rien répondre.

- Pourquoi fait-elle un tel foin de cette relation ? Ryker a plus que l'âge de papillonner et si cette orpheline lui plaît... Je m'en moque. Je peux même comprendre qu'elle le fascine. Elle est assez unique en son genre.

- J'ai entendu parler les gardes. Ils l'ont vue se battre contre le Capitaine de la Garde. Elle lui a donné du fil à retordre.

- Je n'ai jamais vu une femme se battre comme cette gamine. Je n'aimerais pas être du mauvais côté de sa lame. Heureusement, elle semble si attachée à Ryker qu'elle était prête à tuer Jon pour demeurer dans mes bonnes grâces. Les femmes sont si facilement manipulables... Les sentiments sont une faiblesse.

- Ils peuvent être une force, Votre Majesté. Ils peuvent vous pousser à vous dépasser, à endurer mille morts.

Le Roi ne parut pas le percevoir mais le léger trémolo dans la voix d'Irek me fit savoir qu'il savait de quoi il parlait.

- Aimer, chérir quelqu'un, c'est l'une des pires faiblesses qu'un homme peut avoir.

- Vous ne pouvez nier que vous aimez vos enfants, Votre Majesté. Vous êtes le père de ce Royaume. Vous aimez vos sujets.

- Devrais-je ? Devrais-je aimer un peuple qui ne cesse d'envoyer assassin sur assassin pour tenter de me mettre en terre ?

- Dans toute famille, il y a des éléments rebelles. Cela ne devrait pas vous faire haïr toute la famille.

Mes jambes commençaient à s'engourdir. Être ainsi accroupie n'était pas la meilleur position pour attendre que le Roi ait terminé de se préparer pour la nuit.

Le plancher craqua sous les lourds pas d'Irek qui vint éteindre les bougies.

- Le tapissier n'est toujours pas venu, Votre Majesté.

Je me figeai lorsque le valet du Roi me regarda droit dans les yeux. L'éclat de son regard vacilla. J'étais sur le point de jaillir ; il leva la main pour m'en empêcher. Il éteignit la dernière bougie dans la pièce avant de retourner dans la chambre.

- Je vous laisse une bougie allumée, Votre Majesté ?

- Oui. Je sens la menace qui rôde dans les couloirs.

- Bonne nuit, Votre Majesté.

La porte émit le léger clic familier. Je me redressai, me dégourdissant les jambes. Le petit salon était plongé dans une noirceur épaisse et impénétrable. J'aurais pu faire tout ce que je voulais, il ne pouvait pas me voir.

Moi, par contre, je le discernais parfaitement. La bougie posée sur le rebord de la fenêtre à gauche du lit dessinait sa silhouette sous les draps.

Je saisis ma dague, refermant mes doigts autour de la garde avec une délectation malsaine. Le moment que j'avais tant attendu était enfin là. À portée de main. Il n'était pas encore endormi. Il allait tenter de se défendre et c'était ce que j'avais voulu depuis le début. Un combat. Pas l'égorger comme un porc dans ses draps de soie.

- Sors de l'ombre, Sixtine.

Je me figeai. Avais-je rêvé ?

- Je sais que c'est toi. Je pensais que tu tenterais ta chance plus tôt.

Je le vis se redresser dans son lit. Les traits de son visage étaient impossibles à discerner.

J'étais perdue. Je n'avais pas prévu cela. Jamais je n'aurais songé qu'il se douterait de ma présence. Irek m'avait-il vendue, au final ? Avait-il fait un signe quelconque au Roi ?

- Grâce à toi, je sais que je dois me débarrasser d'Irek. Vingt-cinq à mon service et je vais devoir trouver un nouveau valet... C'est très déplaisant.

Je m'approchai, gardant le silence. Ma main tremblait.

- Je pensais que tu avais plus d'honneur que Jon mais je me suis trompé. À moins que tu ne sentes que le temps t'est compté ? Il est vrai que voir ton ami d'enfance te doubler... Ce n'est pas un sentiment agréable, n'est-ce pas ?

Je m'appuyai contre le mur, chancelante. Il jouait avec moi. Il tentait de me déstabiliser pour que je craque et me dévoile. Il ne pouvait en aller autrement.

- Je pense que, à l'heure qu'il est, il a atteint son objectif. Votre pathétique essai, à toi, mon fils et Jedrek, de l'empêcher d'atteindre la Cage est un échec. C'était destiné à être un échec, de toute façon. Vous ne le saviez simplement pas.

Il s'affaissa contre ses oreillers, faisant couiner la tête de lit.

- Jon a toujours cru être le plus malin de nous deux, vois-tu. Il avait toujours ces idées tordues et incompréhensibles. Je savais qu'il voudrait se venger de moi. Quand il est arrivé au château, j'ai compris qu'il préparait quelque chose. Pourquoi serait-il venu voir l'orpheline que je l'ai poussé à adopter ?

Ma bouche s'ouvrit pour lâcher la question qui me brûlait les lèvres. Je parvins à me retenir à la dernière seconde. Tout ce que j'émis, ce fut un souffle.

- Oh, il ne s'est jamais douté que c'était une manigance de ma part. Il s'est dit : oh, une orpheline dans un terrier de renards bleus ! Je vais l'adopter pour en faire une arme et me venger !

Il se mit à rire.

Cet abruti a agi exactement comme je l'avais prévu. Je l'ai laissé faire assassiner Leen Leary. Je voulais voir ce qu'il avait fait de toi. S'il t'avait parlé de ta famille. Je me suis vite rendu compte que non. Ce n'était que meilleur. Je savais que ton ascendance te pousserait à aller vers la Cage. Tout s'est goupillé à la perfection ! Il n'y a qu'une chose que je n'avais pas prévue, je l'avoue.

J'avais la tête qui tournait. Jen'arrivais pas à croire ce qu'il me racontait. C'était impossible.Personne n'avait un esprit assez intelligent et complexe pour pouvoirprévoir l'attitude d'une personne durant des années !

Je n'avais pas prévu que mon fils s'enticherait de toi comme un idiot. Pourtant, c'était facile à deviner. Bref, ça ne change strictement rien à notre affaire. Tu es là où je te voulais et c'est ce qui compte. Approche donc !

Je ne bougeai pas d'un cil. Unchangement s'était opéré. Léger, imperceptible. Pourtant, il yavait quelque chose de différent. Je n'aurais pas su mettre mondoigt dessus.

La porte s'ouvrit à la voléesur Ryker, échevelé et agité.

La Faerie est sortie de la Cage !



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